Résultat du test :
Auteur : Anonymous
Date : 26 avr.05, 22:17
Message : quelle est la preuve que les arabes descendent d'ismael?
Love dit que c'est dans la Bible, mais après il dit que non. En effet, j'ai pas trouvé dans la Bible qu'ismael est ancêtre des arabes.
Love dit que c'est prouvé par les historiens. Mais il ne donne pas de preuve non plus.
Je demande alors qu'on me prouve que c'est vrai. Le dictionnaire ne constitue pas une preuve.
Auteur : Anonymous
Date : 27 avr.05, 04:21
Message : alors, personne qui sait répondre?
Auteur : Falenn
Date : 27 avr.05, 05:57
Message : Tu aurais du mettre ce topic dans le menu "Islam".

Auteur : Nickie
Date : 27 avr.05, 07:27
Message : 
Salut le COOL, ONKEP!!
Je déménage ton poste vers le forum approprié qui est celui du forum Débat. En espérant qu'avec ton haut niveau d'intillgence supérieure à la moyenne que tu sauras à l'avenir où aller poster tes propres postes, et ce de façon convenable, et ce selon les normes établis par ce forum.
Car à l'avenir je vais les déménagé sans un tracé de sujet et sans avis.
Espérant le tout à ta convenance intellectuelle, je demeure...
Auteur : black.muslim
Date : 27 avr.05, 10:34
Message : ONKEP a écrit :quelle est la preuve que les arabes descendent d'ismael?
Love dit que c'est dans la Bible, mais après il dit que non. En effet, j'ai pas trouvé dans la Bible qu'ismael est ancêtre des arabes.
Love dit que c'est prouvé par les historiens. Mais il ne donne pas de preuve non plus.
Je demande alors qu'on me prouve que c'est vrai. Le dictionnaire ne constitue pas une preuve.
tu veux extrait sortit de registre d'etat civil ou koi ? mais donnez moi 1 seule pruve qsue vous etes légitimes
La bible réclame que Sarah (la mère d'Isaac) était la soeur biologique d'Abraham :
genése20/12 De plus, il est
vrai qu'elle est ma soeur, fille de mon père;
seulement, elle n'est pas fille de ma mère; et elle est devenue ma femme quelle honte il a violé sa soeur de son pére
deutéro
27/22
Maudit soit celui qui couche avec sa soeur, fille de son père ou
fille de sa mère! -Et tout le peuple dira: Amen!
la question choquante est ces les fils de juda sont légitimes ??
ET est ce abraham du bible est maudit selon la loi ??
Auteur : Nova
Date : 27 avr.05, 18:51
Message : Onkep, pourquoi parlerait-on des arabes en particulier dans la Bible ? A l'époque, tout au plus étaient-ils une communauté païenne parmi tant d'autres. La Bible évoque les païens en général mais je ne pense pas qu'elle fasse dans la distinction.
Black.muslim, tu évites la question
Auteur : TeNChiNhaN
Date : 27 avr.05, 21:03
Message : ONKEP je connais pas la réponse, mais c'est quoi le but ?
Auteur : quintessence
Date : 27 avr.05, 23:21
Message : ONKEP a écrit :quelle est la preuve que les arabes descendent d'ismael?
Love dit que c'est dans la Bible, mais après il dit que non. En effet, j'ai pas trouvé dans la Bible qu'ismael est ancêtre des arabes.
Love dit que c'est prouvé par les historiens. Mais il ne donne pas de preuve non plus.
Je demande alors qu'on me prouve que c'est vrai. Le dictionnaire ne constitue pas une preuve.
arabe ou pas arabe? ce n'est pas une question de race car allah ne va pas privélégier les arabes pour leur race.
Auteur : MOHAMED
Date : 27 avr.05, 23:31
Message : ONKEP a écrit :quelle est la preuve que les arabes descendent d'ismael?
Love dit que c'est dans la Bible, mais après il dit que non. En effet, j'ai pas trouvé dans la Bible qu'ismael est ancêtre des arabes.
Love dit que c'est prouvé par les historiens. Mais il ne donne pas de preuve non plus.
Je demande alors qu'on me prouve que c'est vrai. Le dictionnaire ne constitue pas une preuve.
ismael était arabe par sa mére hagar
Auteur : manuelo77
Date : 28 avr.05, 03:11
Message : oui ismael et arabe moitie juif
Auteur : MOHAMED
Date : 28 avr.05, 07:06
Message : le therme juif existe depuis l' an 600 , ismael était hébreux par abraham et arabe par hagar
dans l' islam l' ethnie n' a aucune importance , seul compte la piété , la foi , et les bonnes actions
Auteur : marseillais
Date : 28 avr.05, 07:24
Message : Bien dis Mohamed!!!! Là vérité fais mal.
Auteur : elwahrani
Date : 28 avr.05, 07:25
Message : MOHAMED a écrit :le therme juif existe depuis l' an 600 , ismael était hébreux par abraham et arabe par hagar
dans l' islam l' ethnie n' a aucune importance , seul compte la piété , la foi , et les bonnes actions
Hagar était égyptienne, pas arabe.

Auteur : marseillais
Date : 28 avr.05, 07:30
Message : Les juifs et les arabes sont frére.
Car à ce que je sache y a pas de religion qui s'appelent ARABE
Auteur : elwahrani
Date : 28 avr.05, 07:34
Message : marseillais a écrit :Les juifs et les arabes sont frére.
Car à ce que je sache y a pas de religion qui s'appelent ARABE
Ben faudrait aller expliquer ça aux colons israeliens.

Auteur : marseillais
Date : 28 avr.05, 07:45
Message : Oui mais nous on est pas raciste.A eux de faire un effort et pas ce prendre pour les rois du monde en ayant une terre minable.
Auteur : manuelo77
Date : 28 avr.05, 19:12
Message : désole mais les hébreux on habité avant vous en israel alors c'est leur et du. meme les romains etai la avant vous EN ISRAEL
A OUI genre vous etes pas raciste et ben en dirai pas avec tou se que lon enten
Auteur : Anonymous
Date : 28 avr.05, 23:44
Message : MOHAMED a écrit :le therme juif existe depuis l' an 600 , ismael était hébreux par abraham et arabe par hagar
dans l' islam l' ethnie n' a aucune importance , seul compte la piété , la foi , et les bonnes actions
sur la croix de Jesus, les romains avaient écrit - Jesus le Nazaréeen ,
roi des Juifs c'était en l'an 33 de notre ère donc tu as 567 ans de retard :P
Auteur : manuelo77
Date : 29 avr.05, 00:00
Message : et oui
Auteur : clando
Date : 01 juin24, 12:54
Message : ONKEP a écrit : 26 avr.05, 22:17
quelle est la preuve que les arabes descendent d'ismael?
Love dit que c'est dans la Bible, mais après il dit que non. En effet, j'ai pas trouvé dans la Bible qu'ismael est ancêtre des arabes.
Love dit que c'est prouvé par les historiens. Mais il ne donne pas de preuve non plus.
Je demande alors qu'on me prouve que c'est vrai. Le dictionnaire ne constitue pas une preuve.
Si un des plus spécialistes du monde chrétien de l'ancien-testament le confirme appuyer par une partie des israelites ce ne st pas vous qui allez dire le contraire
https://michaellanglois.fr/questions/le ... s-dismael/
Ajouté 11 minutes 26 secondes après :
Re:
Invité a écrit : 28 avr.05, 23:44
sur la croix de Jesus, les romains avaient écrit - Jesus le Nazaréeen ,
roi des Juifs c'était en l'an 33 de notre ère donc tu as 567 ans de retard :P
Comme le christianisme 400 ans après Malachie, en plus tu as raison le roi des juifs pas des occidentaux, je ne suis venu que pour les brebis perdus de la maison d'israel, a t-il menti? Michée idem, Ezeckiel idem, Jeremie idem, l'ange idem, Matthieu idem, Jésus idem, Pierre idem, Étienne idem, Jacques idem, 1 Jean idem
Auteur : Stop !
Date : 01 juin24, 20:43
Message : manuelo77 a écrit : 28 avr.05, 19:12
désole mais les hébreux on habité avant vous en israel alors c'est leur et du. meme les romains etai la avant vous EN ISRAEL
Ils habitaient tous ensemble la même région, il y avait les Édomites, les Moabites, les Ammonites, les Philistins, les habitants de Juda et d'Israël,
et plein d'autres. Bien sûr, un territoire nommé Israël existait déjà mais s'ils ne s'étaient pas créé des dieux pour aller ensuite les mettre en concurrence
comme des cons, ils seraient aujourd'hui un seul peuple intelligent. Au lieu d'être un tas d'idiots.
Auteur : omar13
Date : 02 juin24, 01:59
Message : La preuve concernant cette question se trouve aussi dans la bible, malgré touchée par des mains mensongères:
"Agar donna un fils à Abram (devenu Abraham sur ordre de Dieu). Genèse 17:5);
et Abram appela Ismaël le fils que Agar lui avait donné." (Genèse 16:15)
2. "Abraham prit son Fils Ismaël... (Genèse 17:23)
3. "Son Fils Ismaël était âgé de treize ans, lorsqu'il fut circoncis: (Genèse 17:25)
4. "Ce jour-même, Abraham fut circoncis, ainsi que son Fils Ismaël. (Genèse 17:26)
5. "Isaac et Ismaël, ses Fils, l'ensevelirent dans la grotte de Makpéla, dans le champ d'Ephrôn... (Genèse 25:9)
6. "Voici la postérité d'Ismaël, Fils d'Abraham, que l'égyptienne Agar, servante de Sara, avait enfanté à Abraham. Genèse (25:12)
Deutéronome 21
15 Si un homme, qui a deux femmes, aime l'une et n'aime pas l'autre, et s'il en a des fils dont le premier-né soit de la femme qu'il n'aime pas,
16 il ne pourra point, quand il partagera son bien entre ses fils, reconnaître comme premier-né le fils de celle qu'il aime, à la place du fils de celle qu'il n'aime pas, et qui est le premier-né.
17 Mais il reconnaîtra pour premier-né le fils de celle qu'il n'aime pas, et lui donnera sur son bien une portion double ; car ce fils est les prémices de sa vigueur, le droit d'aînesse lui appartient.
CQFD.
Auteur : Stop !
Date : 02 juin24, 06:26
Message : Recopier une fable tirée d'un vieux grimoire ne peut en aucun cas servir de CQFD.
Auteur : omar13
Date : 02 juin24, 07:53
Message : Stop ! a écrit : 02 juin24, 06:26
Recopier une fable tirée d'un vieux grimoire ne peut en aucun cas servir de CQFD.
les prophéties et les versets divins , n'ont pas changés depuis les temps d'Adam, il y'a 5.000 ans avant JC;
il suffit de les connaitre et les comprendre pour répondre à l'ignorance des soit disant connaisseurs de la région???? ça fait parti d'une recherche personnelle et non pas de simple copie collé.
La preuve concernant cette question se trouve aussi dans la bible, malgré touchée par des mains mensongères:
"Agar donna un fils à Abram (devenu Abraham sur ordre de Dieu). Genèse 17:5);
et Abram appela Ismaël le fils que Agar lui avait donné." (Genèse 16:15)
2. "Abraham prit son Fils Ismaël... (Genèse 17:23)
3. "Son Fils Ismaël était âgé de treize ans, lorsqu'il fut circoncis: (Genèse 17:25)
4. "Ce jour-même, Abraham fut circoncis, ainsi que son Fils Ismaël. (Genèse 17:26)
5. "Isaac et Ismaël, ses Fils, l'ensevelirent dans la grotte de Makpéla, dans le champ d'Ephrôn... (Genèse 25:9)
6. "Voici la postérité d'Ismaël, Fils d'Abraham, que l'égyptienne Agar, servante de Sara, avait enfanté à Abraham. Genèse (25:12)
Deutéronome 21
15 Si un homme, qui a deux femmes, aime l'une et n'aime pas l'autre, et s'il en a des fils dont le premier-né soit de la femme qu'il n'aime pas,
16 il ne pourra point, quand il partagera son bien entre ses fils, reconnaître comme premier-né le fils de celle qu'il aime, à la place du fils de celle qu'il n'aime pas, et qui est le premier-né.
17 Mais il reconnaîtra pour premier-né le fils de celle qu'il n'aime pas, et lui donnera sur son bien une portion double ; car ce fils est les prémices de sa vigueur, le droit d'aînesse lui appartient.
CQFD.
viewtopic.php?t=5159 Auteur : Pollux
Date : 02 juin24, 08:30
Message : omar13 a écrit : 02 juin24, 07:53
les prophéties et les versets divins , n'ont pas changés depuis les temps d'Adam, il y'a 5.000 ans avant JC;
C'est 4000 av. J.C. et non pas 5000, sauf si tu te réfères au Talmud de Babylone qui donne 5650 av. J.C.
- 4026 av. J.-C. (chronologie biblique littérale)
- 5650 av. J.-C. (Talmud de Babylone)
- 4004 av. J.-C. (Talmud de Jérusalem)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Adam Auteur : omar13
Date : 02 juin24, 08:45
Message : Pollux a écrit : 02 juin24, 08:30
C'est 4000 av. J.C. et non pas 5000, sauf si tu te réfères au Talmud de Babylone qui donne 5650 av. J.C.
tu as raison, Adam avait vécu 4000 avant JC.
Auteur : Stop !
Date : 02 juin24, 19:57
Message : En effet, et on se demande bien pourquoi Dieu n'a pensé à créer les hommes
qu'environ 15000 ans après que ceux-ci aient peint la grotte de Lascaux.
Mais les voies de Dieu sont impénétrables.
Auteur : Seleucide
Date : 04 juin24, 19:22
Message : Il n'y a aucune preuve que Muhammad descende d'Ismaël. Les "Arabes", c'est plus compliqué encore, parce que même selon le paradigme islamique, tous les Arabes ne descendent pas d'Ismaël. Sur le plan historique, on dispose d'éléments objectifs qui tendent à nous faire croire que les Arabes du Hijâz n'avaient aucune idée de leur ascendance ismaélite jusqu'à ce que le Coran le leur apprenne. Donc, au final, tout repose sur le Coran, comme d'habitude.
Auteur : Yacine
Date : 04 juin24, 20:21
Message : Ils honoraient pas la Kaaba pour rien, et la Kaaba n'est pas née de rien..
Auteur : spin
Date : 05 juin24, 06:12
Message : Yacine a écrit : 04 juin24, 20:21
Ils honoraient pas la Kaaba pour rien, et la Kaaba n'est pas née de rien...
Elle a pu naitre de beaucoup de choses.
Par rapport à la question du fil, il faudrait déjà prouver qu'Abraham et Ismaël ont existé. On n'a que la Bible, falsifiée selon le Coran.
Auteur : Anoushirvan
Date : 05 juin24, 07:10
Message : Quelques éléments factuels :
1. Ismaël n'est pas un nom arabe, c'est un nom juif à la base. Des Grands-Prêtres juifs au 1er siècle de notre ère se sont appelés Ismaël (ou plutôt Ishmael en hébreu) : Ishmael ben Phabi I et II,
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ishmael_ben_Phabi
Les Juifs auraient certainement continuer à utiliser le nom Ishmaël s'il n'avait été préempté par l'Islam.
2. A aucun moment, le Coran ne parle des "fils d'Ismaël", l'expression n'y existe nulle part, alors que l'expression "fils d'Israël" y est omniprésente.
Par conséquent, ni la communauté primitive qui s'est construite autour de la prédication coranique, ni ses adversaires ne se voyaient comme les "fils d'Ismaël", sinon on aurait certainement trouvé cette expression dans le Coran.
En fait, ce sont les chroniqueurs chrétiens (syriaques ou byzantins) qui à l'origine désignaient les Arabes comme les "Ishmaelites" ou les "fils d'Ismaël".
Il n'y a aucune preuve que les Arabes avant les conquêtes du 7e siècle se désignaient eux-mêmes comme "fils d'Ismaël".
Pour quelles raisons les Arabes après les conquêtes, au 8e siècle, ont commencé à reprendre à leur compte l'expression "fils d'Ismaël", et à construire une filiation d'Ismaël vers le Prophète, ce n'est pas entièrement clair.
Il y avait vraisemblablement une visée eschatologique (liée à la perception de la fin des temps) derrière ce choix, c'est-à-dire signifier à ceux qui se réclamaient de la descendance d'Isaac et de Jacob (qui est surnommé Israël dans la Torah), à savoir les Juifs et les chrétiens, que leur époque était révolue et que le flambeau prophétique était désormais passé à l'Islam.
Auteur : spin
Date : 05 juin24, 07:51
Message : Par ailleurs, la Genèse fait voyager Abraham et sa famille de la Mésopotamie (Ur) à l'Egypte, puis de l'Egypte à Hébron. Il est vrai qu'elle le fait voyager à dos de chameau alors que les chameaux n'étaient pas encore domestiqués à son époque supposée.
Un passage par La Mecque suppose un détour de 2000 kilomètres aller-retour, en plein désert.
Auteur : Yacine
Date : 05 juin24, 08:42
Message : Anoushirvan a écrit : 05 juin24, 07:10
Il n'y a aucune preuve que les Arabes avant les conquêtes du 7e siècle se désignaient eux-mêmes comme "fils d'Ismaël".
Les historiens musulman tout comme la Tradition (à moins que je me trompe) stipule que les Arabes existaient bien avant Ismaël, et Ismaël lui même était un "arabisant" (Musta'arib - مستعرب). Par contre le Prophète tout comme le clan des
Quraïshides descendent des
Adnanites sont des enfants d'Ismaël.
Auteur : Seleucide
Date : 05 juin24, 20:39
Message : Yacine a écrit : 04 juin24, 20:21
Ils honoraient pas la Kaaba pour rien, et la Kaaba n'est pas née de rien..
Il n'y a pas assez de documentation pour faire l'histoire de la Ka'ba. La tradition islamique rapporte la concernant, ou bien des légendes qui n'ont aucune historicité, ou bien des informations relatives à son histoire récente précédant de peu les débuts de l'islam. Les origines de cet édifice sont condamnées à rester obscures. Mais ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas émettre des hypothèses et c'est ici que l'anthropologie doit pouvoir prendre le relai de l'histoire.
Ajouté 2 minutes 40 secondes après :
Yacine a écrit : 05 juin24, 08:42
Les historiens musulman tout comme la Tradition (à moins que je me trompe) stipule que les Arabes existaient bien avant Ismaël, et Ismaël lui même était un "arabisant" (Musta'arib - مستعرب). Par contre le Prophète tout comme le clan des
Quraïshides descendent des
Adnanites sont des enfants d'Ismaël.
Oui, tu as raison, il y a les Arabes authentiques العرب العاربة et les Arabes "arabisés", ou "assimilés" pourrait-on dire العرب المستعربة.
Par contre, je ne pense pas que tu puisses prouver que 'Adnan descende d'Ismaël.
Auteur : Yacine
Date : 05 juin24, 23:03
Message : Seleucide a écrit : 05 juin24, 20:39
Par contre, je ne pense pas que tu puisses prouver que 'Adnan descende d'Ismaël.
Il y a rien à prouver c'est de tradition, maintenant reste à savoir est ce tradition seulement islamique mais aussi pré-islamique. Il faut aussi signaler que les Arabes pré et post islamiques s’intéressaient fortement à la généalogie.
Auteur : Seleucide
Date : 06 juin24, 08:12
Message : Yacine a écrit : 05 juin24, 23:03
Il y a rien à prouver c'est de tradition, maintenant reste à savoir est ce tradition seulement islamique mais aussi pré-islamique. Il faut aussi signaler que les Arabes pré et post islamiques s’intéressaient fortement à la généalogie.
S'il n'y a aucune preuve (ou disons aucune présomption) que 'Adnan descende d'Ismaël, pourquoi devrais-je le croire ?
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 06 juin24, 08:24
Message : Pour Flavius Josèphe, dans ses Antiquités judaïques, les fils d'Ismaël occupèrent les régions entre l'Euphrate et la Mer rouge (le Hedjaz en ferait donc partie).
Il ne fait sans doute que rapporter une lecture de la Bible:
"Sara, au début, chérissait cet Ismaël, né de sa servante Agar, avec toute la tendresse qu’elle eût témoignée à son propre fils; on l’élevait, en effet, pour succéder au commandement; mais quand elle eut mis au monde Isaac, elle ne crut pas devoir élever avec lui Ismaël, qui était l’aîné et pouvait lui nuire après que leur père serait mort. Elle persuada donc à Abraham de l’envoyer s’établir ailleurs avec sa mère. Mais lui, au début, ne donnait pas son adhésion aux projets de Sara; il estimait qu’il n’y avait rien de si inhumain que de congédier un enfant en bas âge et une femme dénuée de toutes ressources. Mais plus tard –aussi bien Dieu approuvait-il les desseins de Sara–, il céda, remit Ismaël à sa mère, car il ne pouvait encore cheminer tout seul, et la congédia, avec une outre pleine d’eau et un morceau de pain; la nécessité lui servirait de guide. Elle partit et, quand le nécessaire vint à manquer, elle se trouva dans une situation cruelle; comme l’eau s’épuisait, elle posa son enfant mourant sous un pin et, pour n’être pas là quand il rendrait l’âme, elle alla un peu plus loin. Un ange de Dieu la rencontra, lui indiqua une source dans le voisinage et lui recommanda de veiller à la nourriture de son enfant; car le salut d’Ismaël serait pour elle la source de grands biens. Elle reprit courage à ces promesses, et rencontra des bergers, dont la sollicitude la tira de peine.
Quand son enfant eut atteint l’âge d’homme, elle lui fit prendre une femme de cette race égyptienne dont elle était elle-même issue. Ismaël eut de cette femme en tout douze fils: Nebayot, Qedar, Adbéel, Mibsam, Mishma, Duma, Massa, Hadad, Tema, Yetur, Naphish et Qedma. Ceux-ci occupent tout le pays qui s’étend depuis l’Euphrate jusqu’à la mer Rouge et qu’ils appelèrent Nabatène. Ce sont eux dont les tribus de la nation arabe ont reçu les noms en raison de leur bravoure et en considération d’Abraham."
Dans le Saint Coran, ce sont Abraham et Ismaël, paix sur eux, qui ont élevé les assises de la Kaaba, avant de demander à Dieu de faire que leur descendance soit soumise à Lui.
À cet égard, Abraham est désigné par "votre père" dans sourate Al-Hajj (Pèlerinage), en s'adressant aux musulmans.
Quant à Ismaël (mentionné 12 fois dans le Coran), après s'être établi à cet endroit (la vallée sans agriculture), il exhortait les siens à faire la salât (prière rituelle) et à se purifier. Il est appelé prophète, mais aussi "messager" dans le Coran (il avait donc un message à transmettre), là où Isaac est seulement prophète. Quelques références:
14:37: "Ô notre Seigneur, j'ai établi une partie de ma descendance dans une vallée sans agriculture, près de Ta Maison sacrée [la Kaaba], - Ô notre Seigneur - afin qu'ils accomplissent la Salat. Fais donc que se penchent vers eux les cœurs d'une partie des gens. Et nourris-les de fruits. Peut-être seront-ils reconnaissants?"
2:126-128: "Et quand Abraham et Ismaël élevaient les assises de la Maison: "Ô notre Seigneur, accepte ceci de notre part! Car c'est Toi l'Audient, l'Omniscient.
Notre Seigneur! Fais de nous Tes Soumis, et de notre descendance une communauté soumise à Toi. Et montre nous nos rites et accepte de nous le repentir. Car c'est Toi certes l'Accueillant au repentir, le Miséricordieux."
22:78: "C'est Lui qui vous a élus; et Il ne vous a imposé aucune gêne dans la religion, celle de votre père Abraham, lequel vous a déjà nommés "Musulmans" avant et dans ce (Livre)"
19:54: "Et mentionne Ismaël, dans le Livre. Il était fidèle à ses promesses; et c'était un Messager et un prophète. Et il commandait à sa famille la prière et la Zakat; et il était agréé auprès de son Seigneur."
Auteur : Yacine
Date : 06 juin24, 22:17
Message : Seleucide a écrit : 06 juin24, 08:12
S'il n'y a aucune preuve (ou disons aucune présomption) que 'Adnan descende d'Ismaël, pourquoi devrais-je le croire ?
Si on peut certains démarches d’investigation historique, on peut même être ramené à douter de l'existence d'Ismaël même comme a dis Spin.. Tout comme la différenciation entres les Arabes عاربة et les Arabes مستعربة.. Il y a rien de "concret" qui nous parle de l'origine exacte des Arabes et de la langue arabe, et on sait même pas qui est réellement la première des langues sémitiques à ma connaissance..
Auteur : Anoushirvan
Date : 07 juin24, 07:13
Message : Yacine a écrit : 05 juin24, 08:42
Les historiens musulman tout comme la Tradition (à moins que je me trompe) stipule que les Arabes existaient bien avant Ismaël, et Ismaël lui même était un "arabisant" (Musta'arib - مستعرب). Par contre le Prophète tout comme le clan des
Quraïshides descendent des
Adnanites sont des enfants d'Ismaël.
En fait, dans ce genre de discussions, ici comme ailleurs, on confond allègrement deux aspects ou deux revendications :
1. Se revendiquer fils d'Ismaël en tant que figure biblique et prophétique de la famille d'Abraham
2. Se revendiquer fils d'Ismaël en tant qu'ancêtre éponyme d'un certain nombre de tribus arabes.
Sur ce deuxième point, on a retrouvé des inscriptions assyriennes, datant de huit siècles avant notre ère, ainsi que des inscriptions en nord-arabique ancien, qui mentionnent les "ishmaelites" comme confédération tribale (cf. en anglais :
https://en.wikipedia.org/wiki/Ishmaelites).
Et dixit la page Wikipedia que je viens de citer, on a même des inscriptions qui mentionnent des noms de tribus qu'on retrouve dans la Bible comme étant des noms des enfants d'Ismaël.
La Bible n'a donc pas sorti ces noms des enfants d'Ismaël de nulle part, il y a bien une réalité historique derrière.
Ce qui n'est pas clair au sujet des "Ishmaelites" est leur rapport à l'arabité : les historiens musulmans n'avaient sans doute pas tort en parlant d'eux comme étant "arabisés", mais d'un autre côté, les noms de tribus ishmaelites n'ont pas subsisté comme noms de tribus arabes.
Quelle part de souvenir des "Ishmaelites" s'est colportée à travers les générations, ce serait à éclaircir.
Mais le premier point, se revendiquer fils d'Ismaël en tant que figure biblique et prophétique de la famille d'Abraham, c'est tout autre chose.
Ca demande de bien comprendre la Bible et le sens profond du passage biblique sur Ismaël, ainsi que de bien mesurer la portée symbolique qui se rattache à cette revendication.
Ca ne peut pas être une revendication portée par une tradition tribale colportée de génération en génération, même si elle a pu s'appuyer dessus.
On est en présence d'une construction théologique bien élaborée de la part de théologiens de l'Islam primitif qui maîtrisaient les Écritures, y compris bibliques, et le sens de cette construction s'est nettement perdue avec le temps, en témoigne la difficulté qu'ont les musulmans à la justifier face aux Juifs et aux chrétiens.
Auteur : Yacine
Date : 07 juin24, 07:50
Message : Depuis quand les musulmans ont a se justifier face à la Bible ?
"O fils d'Ismaël, pratiquez l'archerie, car votre père était un archer"
https://sunnah.com/bukhari:3373 Auteur : Anoushirvan
Date : 07 juin24, 07:56
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 07:50
Depuis quand les musulmans ont a se justifier face à la Bible ?
Parce que ça n'a aucun sens de se réclamer d'Ismaël (la figure prophétique) sans la Bible.
Auteur : Seleucide
Date : 07 juin24, 09:07
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 06 juin24, 08:24Pour Flavius Josèphe, dans ses Antiquités judaïques, les fils d'Ismaël occupèrent les régions entre l'Euphrate et la Mer rouge (le Hedjaz en ferait donc partie).
Dans le passage cité, il est question de la Nabatène, pas du Hijâz. Par ailleurs, les rabbins disent que les Romains descendent d'Esaü, faut-il aussi les croire ? Non, c'est juste du midrash. Rien de tout cela n'a une valeur historique.
Yacine a écrit : 06 juin24, 22:17
Si on peut certains démarches d’investigation historique, on peut même être ramené à douter de l'existence d'Ismaël même comme a dis Spin.. Tout comme la différenciation entres les Arabes عاربة et les Arabes مستعربة.. Il y a rien de "concret" qui nous parle de l'origine exacte des Arabes et de la langue arabe, et on sait même pas qui est réellement la première des langues sémitiques à ma connaissance..
Ce qui est concret, c'est l'absence des noms Isma'il et Ibrahim dans les tribus préislamiques du Hijâz.
Le contraste est saisissant quand on compare avec l'onomastique post islamique.
Auteur : Yacine
Date : 07 juin24, 11:15
Message : Anoushirvan a écrit : 07 juin24, 07:56
Parce que ça n'a aucun sens de se réclamer d'Ismaël (la figure prophétique) sans la Bible.
L'Islam se base sur une toute nouvelle révélation
D'ailleurs tous les Prophètes/personnages bibliques qui figurent dans le Coran ne ressemblent pas à la manière avec laquelle ils sont présentés dans la Bible
Auteur : spin
Date : 07 juin24, 15:58
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 11:15
D'ailleurs tous les Prophètes/personnages bibliques qui figurent dans le Coran ne ressemblent pas à la manière avec laquelle ils sont présentés dans la Bible
C'est le moins qu'on puisse dire ! Le Noé de la Bible ne demande nulle part à Dieu d'"exterminer les infidèles" comme celui du Coran (71:26). Mais c'est difficile d'y voir une meilleure connaissance de cette histoire, puisqu'on sait par ailleurs qu'elle vient d'un mythe polythéiste.
Et si c'est à prendre comme un symbole, un enseignement, une parabole, je ne vois pas bien de quoi.
Auteur : Yacine
Date : 07 juin24, 18:32
Message : spin a écrit : 07 juin24, 15:58
Le Noé de la Bible ne demande nulle part à Dieu d'"exterminer les infidèles" comme celui du Coran (71:26).
Tu vas répéter cette phrase pour combien de fois encore ?
a écrit :Et si c'est à prendre comme un symbole, un enseignement, une parabole, je ne vois pas bien de quoi.
Si tu ne sais à quoi elle renvoie c'est qu'elle n'en est pas une.. Le récit du Coran ne fait mention nul part que ça été un déluge global contrairement à la Bible. Et si les anciens cultures l'ont mentionné, c'est sûrement parce qu'il s'agit d'un résidu de mémoire de quelque chose qui s'est bien déroulé, et non car le Bible et le Coran ont copié sur.
Auteur : Anoushirvan
Date : 07 juin24, 19:23
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 11:15
L'Islam se base sur une toute nouvelle révélation
D'ailleurs tous les Prophètes/personnages bibliques qui figurent dans le Coran ne ressemblent pas à la manière avec laquelle ils sont présentés dans la Bible
Non, ça c'est une perception contemporaine de l'Islam par les musulmans, qui résulte des violents chocs géopolitiques subis par le monde musulman depuis le 19e siècle, notamment :
* colonisation chrétienne des terres musulmanes
* création par les Juifs de l’État d'Israël
Perception favorisée par la sclérose intellectuelle qui frappait le monde musulman depuis la fin du califat de Bagdad au Moyen-Âge et qu'avaient bien diagnostiqué des intellectuels musulmans à la fin du 19e siècle.
Cela a créé une forme d'amnésie collective chez les musulmans modernes à l'égard des Écritures antérieures pour bien signifier que l'Islam ne leur était redevable en rien.
Les anciens musulmans étaient nettement plus nuancés dans leur appréciation et savaient que la nouvelle religion devait en partie sa légitimité à certaines interprétations et enseignements tirés des Écritures précédentes.
Mais voilà, cet islam "canal historique" devait mettre en place un monde nouveau dans lequel il ne pouvait y avoir de retour à l'ancien monde, dominé par les juifs ou les chrétiens.
A cet égard, la colonisation chrétienne du monde musulman puis la création de l’État d'Israël y sont des événements impensables, ça ne pouvait aller selon le plan divin.
Recourir à l'amnésie collective a alors permis d'intégrer ces chocs géopolitiques en faisant de l'Islam une religion et une civilisation apparue quasi ex-nihilo, en tout cas sans racine biblique forte, soumise aux aléas du monde comme les autres.
Donc, comme je disais, en Islam contemporain, Ismaël devient essentiellement un chef tribal, ancêtre de quelques tribus arabes, dont le privilège est d'avoir le Prophète dans sa descendance, et dont l'insigne honneur est d'être brièvement évoqué dans le Coran.
Du point de vue historique, c'est très contestable.
Et religieusement, ça n'a pratiquement pas d'importance.
D'où les malentendus et quiproquos, comme ici, lorsque les musulmans discutent d'Ismaël avec les juifs et les chrétiens parce que pour ces derniers, Ismaël reste d'abord une figure biblique avec une fonction assez précise.
Auteur : spin
Date : 07 juin24, 19:33
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 18:32
Tu vas répéter cette phrase pour combien de fois encore ?
A chaque fois qu'elle correspondra au sujet du moment.
Yacine a écrit : 07 juin24, 18:32Si tu ne sais à quoi elle renvoie c'est qu'elle n'en est pas une.. Le récit du Coran ne fait mention nul part que ça été un déluge global contrairement à la Bible. Et si les anciens cultures l'ont mentionné, c'est sûrement parce qu'il s'agit d'un résidu de mémoire de quelque chose qui s'est bien déroulé, et non car le Bible et le Coran ont copié sur.
Ce "
sûrement" ne repose sur rien. Il me semble plus vraisemblable que Muhammad s'est identifié à Noé et lui a prêté ses propres désirs.
Auteur : Yacine
Date : 07 juin24, 22:22
Message : Anoushirvan a écrit : 07 juin24, 19:23
Non, ça c'est une perception contemporaine de l'Islam par les musulmans, qui résulte des violents chocs géopolitiques subis par le monde musulman depuis le 19e siècle, notamment :
Le Coran c'est le 7e siècle, à moins que tu penses qu'il a été changé entre temps. L'Islam du tout début c'est comme l'Islam du 19e, 20e et 21e siècle.. même choses avec les exégèses coraniques, et quelques petites différences prés des nouveaux
Du point de vu biblique même, Ismaël a été promis qu'il sera une grande et bénite nation, grande comme quoi, je sais pas moi.. la Oumma ?
Ajouté 20 minutes 43 secondes après :
spin a écrit : 07 juin24, 19:33
ses propres désirs.
Tes désirs plutôt.. Lui il a réussi son coup, avec la plus grande religion de la planète qui chante encore ses louanges
Auteur : Anoushirvan
Date : 07 juin24, 23:04
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 22:22
Le Coran c'est le 7e siècle, à moins que tu penses qu'il a été changé entre temps. L'Islam du tout début c'est comme l'Islam du 19e, 20e et 21e siècle.. même choses avec les exégèses coraniques, et quelques petites différences prés des nouveaux
L'Islam n'est pas défini par le Coran tout seul, sinon ce serait du coranisme.
Ni même par des textes, en fait.
Ce qui définit l'Islam :
1. En premier lieu, un modèle mental construit collectivement par les musulmans de ce que doit être l'Islam, et qui évolue au fil du temps
2. Des traditions transmises oralement par les familles et les sociétés
3. Des traditions juridiques qui varient selon les pays.
4. Et enfin un corpus de textes, comprenant le Coran plus des hadiths, la Sira, les tafsirs, etc. dont la compréhension varie en fonction du modèle mental de l'époque et de la société.
L'immense majorité des musulmans dans le monde musulman n'a probablement jamais lu un seul des textes du corpus islamique, à commencer par n'avoir jamais lu le Coran. Pourtant, ça ne va pas les empêcher de se sentir "musulman" et d'avoir une idée de ce que ça signifie.
Et si on leur demande ce que ça veut dire "être musulman", ils ne vont certainement pas répondre un truc du style "croire au Coran".
Du point de vu biblique même, Ismaël a été promis qu'il sera une grande et bénite nation, grande comme quoi, je sais pas moi.. la Oumma ?
Ben, ce n'est pas la signification de l'histoire d'Ismaël dans la Bible, et c'est pourquoi le fait que l'Islam primitif au 8e siècle ait construit une revendication religieuse sur la figure biblique d'Ismaël n'est pas trivial.
Auteur : Yacine
Date : 07 juin24, 23:25
Message : Anoushirvan a écrit : 07 juin24, 23:04
Ce qui définit l'Islam :
1. En premier lieu, un modèle mental construit collectivement par les musulmans de ce que doit être l'Islam, et qui évolue au fil du temps
Tu peux nous donner un exemple de phénomène ?
a écrit :2. Des traditions transmises oralement par les familles et les sociétés
La Tradition a commencé à être écrite et compilée aussitôt, et les ouvrages majeurs utilisé à nos jours comme Al-Boukhari date de juste un siècle après la révélation, vers 870.
a écrit :3. Des traditions juridiques qui varient selon les pays.
Les écoles de jurisprudence, aussi élaborées très tôt : Malik né en 711, Abu Hanifa en 699, Ibn Hanbal en 780 et Chaféi en 767.
a écrit :4. Et enfin un corpus de textes, comprenant le Coran plus des hadiths, la Sira, les tafsirs, etc. dont la compréhension varie en fonction du modèle mental de l'époque et de la société.
Le Hadith comme je t'ai dis plus haut; la Sira en gros se base sur le Hadith, les Tafsirs sont eux qui ne cessent d’être élaboré, mais comme j'ai dis ça ne change pas grande choses si ce n'est d'avoir des perceptions nouvelles à la lumières des évènements nouveaux. Mais ça ne pèse pas autant que les Hadiths, car ça se résume à des opinions personnelles des érudits qui les écrivent.
a écrit :L'immense majorité des musulmans dans le monde musulman n'a probablement jamais lu un seul des textes du corpus islamique, à commencer par n'avoir jamais lu le Coran.
Tu plaisantes je supposes, ou tu essaies de projeter la réalité chrétienne et juive sur les musulmans. Tu sais peut être pas, mais il y a bon pourcentage de musulmans qui apprennent tout le Coran par cœur, une bonne part d'eux dès le jeune age. Pour ce qui est du commun des musulmans, la plupart, ont au moins lis le Coran en entier pendant un seul Ramadan.
a écrit :Ben, ce n'est pas la signification de l'histoire d'Ismaël dans la Bible,
C'est quoi la réelle signification alors ?
Auteur : spin
Date : 07 juin24, 23:31
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 23:25
Tu plaisantes je supposes, ou tu essaies de projeter la réalité chrétienne et juive sur les musulmans. Tu sais peut être pas, mais il y a bon pourcentage de musulmans qui apprennent tout le Coran par cœur, une bonne part d'eux dès le jeune age.
De fait, beaucoup le connaissent par coeur, de Al Fatiha à An Nas, mais sans en comprendre un seul mot ou presque au-delà de "bismillah...".
Pour le coup je cite Ali Sina : "
Shakila est une dame que j’ai aidée à quitter l’Islam. Elle m’a parlé de sa grand-mère pakistanaise qui se lamentait de ce que, alors qu’elle avait lu le Coran toute sa vie, elle n’avait jamais lu sa traduction. Et à présent, à 82 ans, ses yeux ne le lui permettaient plus. Espérant des ajr (récompenses), sa belle-fille se proposa pour le lui lire. Quand cette vieille dame comprit ce que dit le Coran, elle fut submergée par la peur. Elle se souvenait des prières qu’elle avait manquées, du jeûne qu’elle avait négligé, et même qu’elle avait pu désobéir à son mari. Elle se convainquit qu’elle allait devoir passer du temps en enfer avant de gagner le paradis. Elle vécut les quatre dernières années de sa vie dans la terreur de ce qui l’attendait, croyait-elle. Bien que grabataire elle ne manqua plus une prière, qu’elle accomplissait avec difficulté".
Auteur : Yacine
Date : 08 juin24, 00:09
Message : Si on croit Shakila, qui est rapporté par Ibn Sina, cette pauvre mamy non-arabophone n'a juste pas eux celui qui lui explique réellement le sens du texte.
2.185 Allah veut pour vous la facilité, Il ne veut pas la difficulté pour vous,
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 08 juin24, 00:21
Message : Seleucide a écrit : 07 juin24, 09:07
Dans le passage cité, il est question de la Nabatène, pas du Hijâz. Par ailleurs, les rabbins disent que les Romains descendent d'Esaü, faut-il aussi les croire ? Non, c'est juste du midrash. Rien de tout cela n'a une valeur historique.
Tout dépend des limites géographiques que vous mettez au Royaume Nabatéen. On sait par exemple que la cité de Hégra (Al-Hijr dans le Coran) ou Madâin Sâlih, sise dans le Hedjaz, fut construite par les Nabatéens et une capitale importante.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Mad%C3%A2in_S%C3%A2lih
Quant au midrash, il reprend surtout Genèse 25:18: "
Ses fils habitèrent depuis Havila jusqu'à Schur, qui est en face de l'Égypte, en allant vers l'Assyrie. Il s'établit en présence de tous ses frères."
Le terme
nabatéen et une partie de cette population nabatéenne ont, selon toute vraisemblance, une origine arabe. D’après Marie-Jeanne Roche, historienne spécialiste de la civilisation nabatéenne:
"L’opinion qui prévaut est celle de l’origine arabe des Nabatéens; on la déduit des patronymes trouvés dans les inscriptions, mais la péninsule Arabique est vaste et les chercheurs ne s’entendent pas sur la région d’origine."
Anoushirvan a écrit :Donc, comme je disais, en Islam contemporain, Ismaël devient essentiellement un chef tribal, ancêtre de quelques tribus arabes, dont le privilège est d'avoir le Prophète dans sa descendance, et dont l'insigne honneur est d'être brièvement évoqué dans le Coran.
L’islam se veut la religion de tous les prophètes, juifs et non-juifs, celle d'Abraham notamment, dont il rappelle le message, pas celle d’une race en particulier. Ce qui lui donne sa véracité, aux termes même du Coran, ce n’est pas la généalogie ou l’origine (moult versets remettent en question le fait de suivre aveuglément ses ancêtres), mais le contenu du message (qu'il invite à méditer). En l'occurrence, l'unicité divine, la soumission au Dieu unique qui a fait toute chose, auquel rien n’est semblable, la méditation des signes qu'il a répandus dans la création et les bonnes œuvres. Prouver donc que les Arabes ne descendraient pas d'Ismaël c'est ne pas prouver grand-chose au final.
Les Arabes préislamiques étaient surtout préoccupés par leurs affaires mondaines et leur commerce, d’où leur refus d'embrasser cette religion, laquelle remettait en question leurs croyances et leur modèle social. C'est l'élan sincère d'un seul homme, qui a dû prêcher et lutter au vu et au su de tout le monde, pour faire prévaloir sa vérité et amener ses contemporains à abandonner le polythéisme, qui a diffusé cette religion initialement.
Pour les juifs, c'est probablement l'alliance avec le divin et le don de la prophétie qui les amena à maintenir une généalogie et à sauvegarder une partie des enseignements de leurs vertueux prédécesseurs, lesquels ils se rappellent en portant et transmettant leur nom. Les Arabes faisaient ceci dans une moindre mesure, car polythéistes pour la majorité. Le travail de revisite du passé n'a commencé qu'avec ce Rappel (un des noms du Coran), à partir du 7e siècle. Les théories complotistes pour changer l'histoire des hommes, ça ne tient sur rien, surtout lorsqu'on sait l'essor formidable qu'a connu l'islam et continue à avoir.
Auteur : spin
Date : 08 juin24, 01:07
Message : Yacine a écrit : 08 juin24, 00:09
Si on croit Shakila, qui est rapporté par Ibn Sina, cette pauvre mamy non-arabophone n'a juste pas eux celui qui lui explique réellement le sens du texte.
Ali Sina (il ne précise pas si cette belle-fille attentionnée est aussi la mère de Shakila). Après, ça peut aussi montrer que les traductions en urdu ne sont pas adoucies comme celles en français.
Et même pour les arabophones le sens du Coran n'est pas forcément clair.
Auteur : Yacine
Date : 08 juin24, 02:34
Message : Ça dépend du niveau linguistique et théologique
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 08 juin24, 05:23
Message : spin a écrit : 07 juin24, 15:58
Le Noé de la Bible ne demande nulle part à Dieu d'"exterminer les infidèles" comme celui du Coran (71:26). Mais c'est difficile d'y voir une meilleure connaissance de cette histoire, puisqu'on sait par ailleurs qu'elle vient d'un mythe polythéiste.
Noé dans la Bible n'est même pas un prophète ou messager envoyé par Dieu.
En tout cas, il n'est pas désigné par ces termes et n'a averti personne!
Il a été sauvé parce qu'il était juste et les autres —l'humanité entière— détruits à l'improviste (la Bible ne dit pas qu'ils ont été prévenus).
Celui du Coran, par contre, a passé toute sa vie (des centaines d'années) à essayer de ramener son peuple idolâtre à la raison.
Allah béni soit-Il, étant juste, ne voulait pas faire périr ces gens sans leur faire connaitre leurs tors et leur donner l'occasion de se repentir.
26:209: "Et Nous ne faisons pas périr de cité avant qu'elle n'ait eu des avertisseurs à titre de rappel, et Nous ne sommes pas injuste."
71:1: "En vérité, Nous avons envoyé Noé à son peuple : «Avertis ton peuple, lui avons-Nous dit, avant qu’un châtiment implacable ne s’abatte sur lui.»
Il [leur] dit : "Ô mon peuple, je suis vraiment pour vous, un avertisseur clair, Adorez Allah, craignez-Le et obéissez-moi, pour qu'Il vous pardonne vos péchés et qu'Il vous donne un délai jusqu'à un terme fixé."
Son peuple est souvent mis en parallèle avec d'autres peuples rebelles: Âd, Thamûd, les Égyptiens sous Pharaon, etc. Ce qui me porte à croire qu'on n'a pas affaire à un déluge planétaire, mais à une catastrophe localisée. Peut-être une calamité qui s'est abattue sur un endroit où une grande partie de la population terrestre était concentrée alors? Allah seul sait! En tout cas, il se peut que la région touchée soit très riche en eau souterraine (d'où "
nous fîmes jaillir la terre en sources"), car ce fléau n'a pas consisté qu'en une pluie abondante. En outre, le terme utilisé (tufân) renvoie à une
inondation, mais grandiose (le même terme est utilisé pour désigner le premier fléau qui a frappé sur l'Egypte dans l'histoire de Moise: l'inondation du Nil). Il y a aussi le terme
qawmi (= mon peuple), qui renvoie à chaque fois dans le texte coranique à une population en particulier, pas à tous les habitants de la terre.
Auteur : Anoushirvan
Date : 09 juin24, 03:12
Message : Yacine a écrit : 07 juin24, 23:25
Tu peux nous donner un exemple de phénomène ?
Un modèle mental, c'est une représentation de la réalité fondée sur des hypothèses et des croyances (pas nécessairement religieuses d'ailleurs).
J'emprunte ce concept à un bouquin : Stratégie Modèle Mental, de Philippe Silberzahn et Béatrice Rousset, qui est orienté organisation des entreprises et management.
L'expression n'est ni positive ni négative, nous fonctionnons tous avec des modèles mentaux tant au niveau individuel qu'au niveau collectif.
Les modèles mentaux sont nécessaires, ils ne sont pas intrinsèquement un problème, sauf quand qu'ils empêchent d'avancer et de faire face aux nouvelles réalités.
Les modèles mentaux collectifs sont ce qui font la capacité de l'être humain à s'organiser sur des activités complexes à large échelle :
* les abeilles ou les fourmis sont capables de s'organiser à large échelle mais sur des tâches routinières inchangées depuis des millénaires
* les singes ou les lions ont la capacité de s'organiser sur des tâches sophistiquées, avec de la coordination, mais seulement au sein d'un petit groupe où ils se connaissent.
L'être humain en revanche peut s'organiser sur des tâches sophistiquées et à large échelle avec des gens inconnus (comme dans une entreprise).
Et la possibilité de créer des organisations complexes et de convaincre des inconnus de coopérer entre eux repose sur une capacité apparemment unique à l'être humain, à savoir créer des mythes et des fictions collectives.
Ces mythes partagés et fictions collectives, c'est ce qui donne une façon de voir le monde, un modèle de la réalité que nous construisons pour pouvoir donner un sens à ce que nous voyons et ce que nous faisons, et à travers duquel nous y donnons ou pas de la valeur.
Pour donner des exemples plus spécifiques à l'Islam :
* le modèle mental du salafisme est que pour bien suivre l'Islam voulu par Allah, il faut suivre rigoureusement l'exemple des "salafs", c'est-à-dire des compagnons du Prophètes, tel qu'il est décrit dans les hadiths, même si parfois ces hadiths sont "faibles"
* le modèle mentale de l'Islam des Frères Musulmans est que suite à la disparition du califat, il faut que les institutions politiques des pays musulmans deviennent compatibles avec le Coran et la Sunna
* le modèle mentale du soufisme, tendance Hallaj, Attar, Rumi est que Allah a créé le monde afin de se connaître Lui-même et que toute activité dans le monde, musulmane ou non-musulmane, participe à cette recherche.
* le modèle mental du djihadisme est que l'Islam ne peut survivre voire être dominant qu'en étant en permanence dans le djihad guerrier
* le modèle mental du coranisme est que l'on doit suivre le Coran seul exclusivement, sans les hadiths.
* etc., il y a pleins d'autres exemples possibles
* Tous ces modèles mentaux que je viens de citer, à l'exception du coranisme, reposent sur exactement le même corpus de textes de bases (Coran, hadiths, Sira, ...), et parfois la même compréhension, et pourtant ça donne des attitudes très différentes les unes des autres au final.
On peut ajouter également le modèle mental relatif à la place et au rôle de la femme en Islam.
Parfois les modèles mentaux peuvent être cachés, masqués, ou implicites.
Par exemple, un modèle mental qui semble traverser tout le monde musulman et qui est certainement la source des autres, notamment ceux que je viens de citer, c'est celui que j'appelle le mythe de "Médine, la cité idéale".
C'est la croyance implicite que la vie à Médine sous le Prophète représentait l'idéal de vivre en Islam et doit servir de point de repère.
Tous les modèles mentaux que j'ai cités, y compris une grande partie du coranisme, ont pour objectif ultime de recréer l'atmosphère et l'esprit de Médine.
Personne ne va dire explicitement, un peu sur le mode du Coran, "à la génération de Muhammad ce qu'elle a fait, à la nôtre ce que nous faisons".
La Tradition a commencé à être écrite et compilée aussitôt, et les ouvrages majeurs utilisé à nos jours comme Al-Boukhari date de juste un siècle après la révélation, vers 870.
Les écoles de jurisprudence, aussi élaborées très tôt : Malik né en 711, Abu Hanifa en 699, Ibn Hanbal en 780 et Chaféi en 767.
Le Hadith comme je t'ai dis plus haut; la Sira en gros se base sur le Hadith, les Tafsirs sont eux qui ne cessent d’être élaboré, mais comme j'ai dis ça ne change pas grande choses si ce n'est d'avoir des perceptions nouvelles à la lumières des évènements nouveaux. Mais ça ne pèse pas autant que les Hadiths, car ça se résume à des opinions personnelles des érudits qui les écrivent.
Tu plaisantes je supposes, ou tu essaies de projeter la réalité chrétienne et juive sur les musulmans. Tu sais peut être pas, mais il y a bon pourcentage de musulmans qui apprennent tout le Coran par cœur, une bonne part d'eux dès le jeune age. Pour ce qui est du commun des musulmans, la plupart, ont au moins lis le Coran en entier pendant un seul Ramadan.
Désolé, je suis obligé de zapper ces objections sinon on va trop dériver du sujet sur Ismaël.
C'est quoi la réelle signification alors ?
Je pourrais répondre par une pirouette comme l'auteur du Coran au verset 3.7 que c'est un passage "mutashabih" et que qui peut connaître la vraie signification à part Dieu.
Mais je vais tenter d'apporter une réponse.
Les anciens savants Juifs avaient en tête une préoccupation majeure : s'assurer de la perpétuation du peuple d'Israël et que l'épisode de l'Exil babylonien où Israël a failli disparaître ne se reproduirait pas.
C'est ça le fil rouge de l'écriture de la Torah.
Toutes les péricopes, les unes après les autres, de la Genèse au Deutéronome mettent en scène cette préoccupation majeure.
Cependant il y avait des controverses entre eux sur la manière d'adresser cette préoccupation, et ces divergences sont reflétées spécialement dans l'histoire d'Ismaël et d'Isaac.
Il y avait une partie d'entre eux qui pensait que pour assurer la perpétuation du peuple d'Israël, il fallait faire du prosélytisme envers les païens (les non-Juifs) et les faire dans l'Alliance avec Dieu, pour être plus nombreux.
Et il y avait une autre partie qui pensait qu'il fallait que la solution demeurasse interne à Israël, car en faisant venir les païens dans l'Alliance, le risque était que les païens convertis dominent les Juifs d'origine et que ces derniers disparaissent.
L'histoire d'Ismaël et d'Isaac, c'est l'histoire sous forme symbolique de cette dissension.
Ismaël représente l'option du salut d'Israël qui passe par l'extension de l'Alliance aux païens : sa mère, Hagar, est une païenne d'origine, qui, parce qu'elle est entrée dans la maison d'Abraham, fait désormais partie de l'Alliance.
Il y a d'ailleurs un jeu de mots en hébreu sur Hagar / ger, ger qui signifie "converti".
Isaac représente l'option du salut d'Israël qui repose sur la foi qu'il y aura un miracle de dernière minute qui sauvera Israël s'il est amené à disparaître, et qui préservera l'identité propre d'Israël :
* il est de né de Sarah alors qu'elle était âgée et stérile (c'est-à-dire qu'il n'y avait plus d'espoir)
* il est sauvé au dernier moment par Dieu du sacrifice (dans la Torah, c'est Isaac qui est sacrifié).
Le fait qu'Ismaël ait été chassé de la maison d'Abraham signifie que ce sont les savants partisans de l'option du salut miraculeux d'Israël (représenté par Isaac) qui ont fini par avoir gain de cause dans la rédaction finale de ce passage, toutefois l'option du salut par l'extension de l'Alliance aux païens n'a pas été totalement écartée, elle est gardée en réserve "au cas où", et de mémoire, ce n'est pas le seul cas où la Torah garde en réserve la possibilité que le salut d'Israël passe par les païens convertis.
Seulement, il y a un deuxième effet qui va nous amener à l'Islam : ces dissensions au sein du judaïsme interne étaient tellement fortes qu'elles ont éclaté en sectes qui se sont affrontées. On en a des témoignages un peu partout : dans les évangiles, chez Flavius Josèphe, dans les manuscrits de Qumran, etc.
Ces affrontements ont donné lieu à la problématique suivante : laquelle de ces sectes était à même de représenter le "Vrai Israël" ?
Avec la naissance du christianisme, ça a donné lieu à la théologie de la substitution : les Juifs n'étaient plus légitimes à être les gardiens de l'Alliance, l'Alliance est passée du judaïsme au christianisme.
Le principe a été généralisé dans le Coran : chaque oumma de chaque prophète finit un jour par se corrompre et perdre l'Alliance avec Allah qui lui garantissait sa sécurité, et il est lui substitué une nouvelle oumma avec un nouveau prophète.
Ainsi de Noé à Hud, puis Salih, Moïse, Jésus, et donc implicitement au messager du Coran.
Mais le Coran ne dit pas qu'il y a une oumma d'Ismaël qui va remplacer la oumma de Jacob (Jacob c'est Israël).
C'est un concept arrivé plus tard en Islam dans les controverses entre l'Islam du début et les chrétiens.
Certains des premiers "musulmans" connaissaient certainement la Torah, par exemple on a des témoignages de chrétiens que j'interprète dans ce sens au sujet de 'Amr ibn al-As.
C'est plutôt les évangiles qu'ils semblaient mal connaître.
En tout cas, ils ont apparemment saisi l'occasion que les chrétiens les appelaient (souvent par mépris) "fils d'Ismaël" et que eux se dénommaient "muhajjirun" à cette époque plutôt "muslimun", et qui est apparenté à Hagar, pour bien signifier aux chrétiens, qui eux se réclamaient de la descendance d'Isaac, que l'Alliance, en accomplissement de la Torah (reconnue par les chrétiens), était désormais passée de la descendance d'Isaac à la descendance d'Ismaël, et qu'on était entré dans une nouvelle ère.
Auteur : Yacine
Date : 09 juin24, 19:46
Message : Anoushirvan a écrit : 09 juin24, 03:12
En tout cas, ils ont apparemment saisi l'occasion que les chrétiens les appelaient (souvent par mépris) "fils d'Ismaël" et que eux se dénommaient "muhajjirun" à cette époque plutôt "muslimun", et qui est apparenté à Hagar, pour bien signifier aux chrétiens, qui eux se réclamaient de la descendance d'Isaac, que l'Alliance, en accomplissement de la Torah (reconnue par les chrétiens), était désormais passée de la descendance d'Isaac à la descendance d'Ismaël, et qu'on était entré dans une nouvelle ère.
Il est jamais rapporté dans la tradition que les premiers musulmans s’appelaient "muhajiroun" qui veut dire "émigrants, exilés, réfugiés" (Wikipédia), c'est à dire ceux qui ont émigré de la persécution mecquoise à Yathrib, devenue Médine, au lieu de musulmans, ils étaient les deux à la fois. Et il n'a jamais été, à ma connaissance, rapporté que les premiers musulmans étaient traités par fils d'Ismaël par les chrétiens, eux d'ailleurs qui ne se considèrent vraiment fils d'Isaac.
L'alliance qui passe de Isaac à Ismaël c'est un argument très récent utilisé par les musulmans dans leur débat avec les chrétiens comme tu as bien noté. Sinon le concept de l'alliance en soi est absent en Islam. Même lorsque le Coran évoque l'alliance juive avec Dieu il parle de l'"engagement".
En somme, ce je peux comprendre de ton intervention, dans laquelle tu n'as pas voulu aller direct pour dire que l'Islam n'est autre qu'une autre tentative de reforme juive qui a foiré comme le christianisme.
Auteur : Anoushirvan
Date : 11 juin24, 09:09
Message : Yacine a écrit : 09 juin24, 19:46
Il est jamais rapporté dans la tradition que les premiers musulmans s’appelaient "muhajiroun" qui veut dire "émigrants, exilés, réfugiés" (Wikipédia), c'est à dire ceux qui ont émigré de la persécution mecquoise à Yathrib, devenue Médine, au lieu de musulmans, ils étaient les deux à la fois. Et il n'a jamais été, à ma connaissance, rapporté que les premiers musulmans étaient traités par fils d'Ismaël par les chrétiens, eux d'ailleurs qui ne se considèrent vraiment fils d'Isaac.
En effet, la tradition musulmane ne rapporte pas ce genre de chose.
Mais il faut se rappeler du concept de modèle mental, cette tradition a été élaborée dans le cadre d'un certain modèle mental.
Il a d'ailleurs existé une autre tradition arabe concurrente au 8e siècle, qui a disparu face à la première, et qui racontait tout autre chose, notamment une alliance militaire entre fils d'Isaac et fils d'Ismaël pour la conquête de Jérusalem dirigée par Omar.
Les Arabes au 7e siècle pendant les conquêtes se dénommaient d'abord les "mumin".
Par exemple dans des documents administratifs, on peut lire des choses comme "Abdallah Muawiya Amir al-Muminin" : le serviteur de Dieu, Muawiya, commandeur des croyants.
Les chrétiens syriaques dans les différents textes du 7e siècle qui nous sont parvenus dénommaient les Arabes sous différents vocables : Tayyi (du nom d'une tribu arabe), fils d'Ismaël / ishmaélites, ou encore Mhaggraye.
Le syriaque mhaggraye est apparenté à l'arabe muhajjir.
La singularité de mhaggraye / muhajjir par rapport aux autres dénominations, c'est que le Coran témoigne, point de vue interne aux Arabes, qu'un groupe se dénommait vraiment de cette façon.
Donc on peut en déduire que si les chrétiens appelaient les Arabes Mhaggraye, c'est que ces derniers se présentaient aussi comme "muhajjirun".
Et aussi que ça ne voulait initialement pas dire exilé ou émigré parce que ça n'a aucun sens dans ce contexte.
D'ailleurs le syriaque a gardé le verbe hgr pour dire : convertir à l'Islam.
L'alliance qui passe de Isaac à Ismaël c'est un argument très récent utilisé par les musulmans dans leur débat avec les chrétiens comme tu as bien noté. Sinon le concept de l'alliance en soi est absent en Islam. Même lorsque le Coran évoque l'alliance juive avec Dieu il parle de l'"engagement".
Le Coran parle bien de l'Alliance au sens judaïque à de nombreuses occasions en utilisant le mot "mithaq".
Le problème est qu'on est en train de jongler avec le concept entre plusieurs langues : l'hébreu, l'arabe coranique, l'arabe classique, le français.
Le concept passe de l'hébreu à l'arabe coranique, ensuite il y a l'arabe classique qui est encore une évolution par rapport à l'arabe coranique même si elle est mineure, puis on traduit en français le terme coranique en utilisant l'arabe classique lui-même influencé par la tradition musulmane qui elle-même ne comprend pas ce qu'est l'Alliance dans le judaïsme.
Donc oui, on peut s'y perdre.
D'autre part, il y a, c'est vrai, une différence de perception entre l'Alliance dans le judaïsme et le christianisme et le mot "mithaq" dans le Coran.
Cela tient à l'argumentaire spécial du Coran.
Pour les Juifs ou les chrétiens, l'Alliance entre Dieu et le peuple d'Israël est irrévocable (sous réserve de savoir qui est le "Vrai Israël", le sujet de dissensions).
D'ailleurs elle est comparée à un mariage, dont le divorce pour passer à un autre peuple serait de l'adultère.
Mais le Coran rejette le caractère irrévocable de l'Alliance et la conditionne à un respect des engagements en terme de bons comportements, sinon elle passe à d'autres.
Voilà pourquoi on parle plutôt d'"engagement" et pas d'"alliance" à propos de ce que dit le Coran, mais il faut comprendre que le Coran vise bien l'Alliance au sens judaïque.
En somme, ce je peux comprendre de ton intervention, dans laquelle tu n'as pas voulu aller direct pour dire que l'Islam n'est autre qu'une autre tentative de reforme juive qui a foiré comme le christianisme.
Non, ce n'est pas ma compréhension des choses.
Auteur : Yacine
Date : 11 juin24, 10:41
Message : Anoushirvan a écrit : 11 juin24, 09:09
Et aussi que ça ne voulait initialement pas dire exilé ou émigré parce que ça n'a aucun sens dans ce contexte.
D'ailleurs le syriaque a gardé le verbe hgr pour dire : convertir à l'Islam.
Muhajirun (مهاجرون) qui est le pluriel de
Muhajir (مهاجر) veut littéralement dire en arabe émigré(s)
At-toyour al-muhajira (الطيور المهاجرة) : les oiseaux migrateurs
Al-hijra (الهجرة) : migration, d'où le calendrier islamique dit de la Hégire qui date à partir de l'année de la migration vers la Médine
Al-Hajr (الهجر) : lorsque l'homme ne partage plus la couche avec son épouse
Les musulmans ont été appelés ainsi depuis le début dans le Coran. La différence entre être musulman et croyant, la première c'est lorsque quelqu'un se décide être musulman, et on devient croyant lorsque Dieu met la foi dans le cœur du musulman :
Coran 49.14 Les Bédouins ont dit: «Nous avons la foi». Dis: «Vous n'avez pas encore la foi. Dites plutôt: Nous nous sommes simplement soumis (musulmans), car la foi n'a pas encore pénétré dans vos cœurs.
a écrit :D'ailleurs elle est comparée à un mariage, dont le divorce pour passer à un autre peuple serait de l'adultère.
C'est un peu exactement ça, car le mot
Mithaq (ميثاق) désigne dans un verset l'acte du mariage (Coran 4.21). Aussi le
Mithaq a été conclu avec les enfants d'Israël de même qu'avec les autres Prophètes qui ont précédé, Noé et Abraham (Coran 33.7).
Auteur : Anoushirvan
Date : 15 juin24, 02:54
Message : Yacine a écrit : 11 juin24, 10:41
Muhajirun (مهاجرون) qui est le pluriel de
Muhajir (مهاجر) veut littéralement dire en arabe émigré(s)
Oui en arabe classique.
Mais en arabe coranique, ce n'est pas aussi simple.
Des fois, ça veut dire plausiblement émigrer, et des fois ça n'a pas ce sens là.
Contre-exemples :
Sourate 29, verset 26 :
فَآمَنَ لَهُ لُوطٌ وَقَالَ إِنِّي مُهَاجِرٌ إِلَى رَبِّي إِنَّهُ هُوَ الْعَزِيزُ الْحَكِيمُ
Fa'āmana Lahu Lūţun Wa Qāla 'Innī
Muhājirun 'Ilá Rabbī 'Innahu Huwa Al-`Azīzu Al-Ĥakīmu
On voit souvent la traduction :
Lot crut en lui. Il dit: "Moi, j'
émigre vers mon Seigneur, car c'est Lui le Tout Puissant, le Sage".
Mais ça ne veut rien dire "j'émigre vers mon Seigneur".
Une autre traduction qu'on voit : Lot crut en lui et dit : "Moi, je me
réfugie auprès de mon Seigneur, car c'est Lui le Tout Puissant, le Sage".
Ca veut certes dire quelque chose, mais le contexte du passage est très clair que le Coran veut faire dire à Lot que ce dernier a été convaincu par le prêche d'Abraham au verset précédent :
29.25 Et [Abraham] dit: "En effet, c'est pour cimenter des liens entre vous-même dans la vie présente, que vous avez adopté des idoles, en dehors d'Allah. Ensuite, le Jour de la Résurrection, les uns rejetteront les autres, et les uns maudiront les autres, tandis que vous aurez le Feu pour refuge, et vous n'aurez pas de protecteurs."
Donc le sens correct de "muhajirun" au verset 29.26, c'est
29.26 Lot crut en lui et dit : "Moi, je me
convertis à mon Seigneur, car c'est Lui le Tout Puissant, le Sage".
ou bien,
29.26 Lot crut en lui et dit : "Moi, je me
rallie à mon Seigneur, car c'est Lui le Tout Puissant, le Sage".
Autre contre-exemple :
Verset 4.89 :
(...) وَدُّواْ لَوْ تَكْفُرُونَ كَمَا كَفَرُواْ فَتَكُونُونَ سَوَاء فَلاَ تَتَّخِذُواْ مِنْهُمْ أَوْلِيَاء حَتَّىَ يُهَاجِرُواْ فِي سَبِيلِ اللّهِ
Wa Ddū Law Takfurūna Kamā Kafarū Fatakūnūna Sawā'an Falā Tattakhidhū Minhum 'Awliyā'a Ĥattá
Yuhājirū Fī Sabīli Allāhi (...)
Ils aimeraient vous voir mécréants, comme ils ont mécru: alors vous seriez tous égaux! Ne prenez donc pas d'alliés parmi eux, jusqu'à ce qu'ils émigrent dans le sentier d'Allah (...)
Ca ne veut rien dire ici "qu'ils émigrent", même dans le sentier d'Allah.
Le sens est clairement ici : "jusqu'à ce qu'ils se rallient dans la voie d'Allah" ou "jusqu'à ce qu'ils se convertissent à la voie d'Allah".
Auteur : Yacine
Date : 15 juin24, 07:39
Message : Si tu continues à chercher dans les allégories au lieu du sens premier propre, bien sûr tu peux trouver tout ce que tu veux et bien au delà...
Ici tu peux plonger dans une myriade de sens
https://www.almaany.com/ar/dict/ar-ar/% ... %AC%D8%B1/ Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 28 juin24, 23:50
Message : Anoushirvan a écrit : 15 juin24, 02:54
Mais ça ne veut rien dire "j'émigre vers mon Seigneur".
Un peu plus de contexte pour que vous y voyiez un peu plus clair.
Dans les passages qui rapportent l'histoire d'Abraham, paix sur lui, il est question de disputes avec les gens de son peuple ainsi qu'avec son père.
Ce dernier demande à Abraham —qui honnissait leurs divinités— de partir loin, pour longtemps, s'il ne veut être lapidé.
C'est justement le verbe '
hajara' (forme courte; quitter, s'éloigner) qui est employé par ce paternel, pour lui demander de partir: وَٱهۡجُرۡنِی مَلِیࣰّا (éloigne-toi de moi pour bien longtemps).
C'est ce qu'a fait Abraham, notamment lorsqu'on a essayé de le brûler: il a quitté son peuple, pour s'éloigner de leur idolâtrie. Sourate 19:
"Je me sépare de vous, ainsi que de ce que vous invoquez, en dehors d'Allah, et j'invoquerai mon Seigneur. J'espère ne pas être malheureux dans mon appel à mon Seigneur". Puis, lorsqu'il se fut séparé d'eux et de ce qu'ils adoraient en dehors d'Allah, Nous lui fîmes don d'Isaac et de Jacob; et de chacun Nous fîmes un prophète."
Après qu'on a attenté à sa vie, le Coran nous indique que Dieu l'a sauvé et l'a mené vers la Terre sainte. C'est justement à ce moment qu'Abraham dit "
j'immigre vers Mon Seigneur", les passages se recoupent donc! Sourate 21:
"Ils voulaient ruser contre lui, mais Nous en fîmes les plus grands perdants.
Nous le sauvâmes, ainsi que Lot, vers la terre que Nous avons bénie pour les mondes."
Ainsi, le mot
muhajir , même si vous ne voulez le prendre qu'au sens figuré, le sens propre est clairement présent. Abraham a bel et bien immigré loin de son peuple et de leur idolâtrie, pour se consacrer au monothéisme/à Dieu, dans un autre endroit: la Terre sainte.
a écrit :Ca ne veut rien dire ici "qu'ils émigrent", même dans le sentier d'Allah.
Pour Al-Qurtubi, il y a plusieurs sortes de hijra: rejoindre Médine pour soutenir le prophète pssl et les croyants (d'où
al-muhajirun), partir avec lui lorsqu'il s'agit de combattre les païens qui venaient à leur rencontre (ce que les hypocrites refusaient de faire, trouvant toutes sortes d'excuses pour rester loin, se refugiant à Médine ou ailleurs), quitter l'idolâtrie/la mécréance et les mauvaises actions. Le passage que vous citez parle des hypocrites.
Auteur : Stop !
Date : 29 juin24, 02:30
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 28 juin24, 23:50
Dans les passages qui rapportent l'histoire d'Abraham, paix sur lui,...
Je suis toujours étonné de voir formuler des souhaits de paix envers des personnages installés
depuis si longtemps dans le Paradis d'Allah (voire du Grand Manitou). C'est pas encore gagné ?
Auteur : Anoushirvan
Date : 29 juin24, 03:21
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 28 juin24, 23:50
Après qu'on a attenté à sa vie, le Coran nous indique que Dieu l'a sauvé et l'a mené vers la Terre sainte. C'est justement à ce moment qu'Abraham dit "
j'immigre vers Mon Seigneur", les passages se recoupent donc! Sourate 21:
Il ne s'agit pas d'Abraham dans ce verset, mais de Lot : c'est Lot à qui le Coran fait dire "ini muhajirun li rabi".
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 29 juin24, 03:36
Message : Anoushirvan a écrit : 29 juin24, 03:21
Il ne s'agit pas d'Abraham dans ce verset, mais de Lot : c'est Lot à qui le Coran fait dire "ini muhajirun li rabi".
Non, il s'agit d'Abraham.
D'ailleurs, dans la sourate 37 (As-safat), où il est question de lui, les mêmes termes sont repris, mais avec une différence: ذاهب (je vais vers, je part vers) est utilisé à la place de مهاجر (j'immigre vers):
"Ils voulurent lui jouer un mauvais tour; mais ce sont eux que Nous mîmes à bas.
Et il dit : "Moi, je pars vers mon Seigneur et Il me guidera."
La preuve qu'il s'agit d'Abraham -et non de Lot- dans la sourate 29 est le passage qui vient après, lequel indique:
"Nous lui donnâmes Isaac et Jacob, et plaçâmes dans sa descendance la prophétie et le Livre." Auteur : Anoushirvan
Date : 29 juin24, 04:01
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 29 juin24, 03:36
Non, il s'agit d'Abraham.
D'ailleurs, dans la sourate 37 (As-safat), où il est question de lui, les mêmes termes sont repris, mais avec une différence: ذاهب (je vais vers, je part vers) est utilisé à la place de مهاجر (j'immigre vers):
"Ils voulurent lui jouer un mauvais tour; mais ce sont eux que Nous mîmes à bas.
Et il dit : "Moi, je pars vers mon Seigneur et Il me guidera."
La preuve qu'il s'agit d'Abraham -et non de Lot- dans la sourate 29 est le passage qui vient après, lequel indique:
"Nous lui donnâmes Isaac et Jacob, et plaçâmes dans sa descendance la prophétie et le Livre."
Il s'agit de Lot :
.فَآمَنَ لَهُ
لُوطٌ وَقَالَ إِنِّي مُهَاجِرٌ إِلَى رَبِّي إِنَّهُ هُوَ الْعَزِيزُ الْحَكِيمُ
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 29 juin24, 04:07
Message : Anoushirvan a écrit : 29 juin24, 04:01
Il s'agit de Lot :
.فَآمَنَ لَهُ
لُوطٌ وَقَالَ إِنِّي مُهَاجِرٌ إِلَى رَبِّي إِنَّهُ هُوَ الْعَزِيزُ الْحَكِيمُ
ET donc c'est à Lot que Dieu a donné Isaac, puis un petit-fils, Jacob, paix sur eux?
C'est à Lot et sa descendance que Dieu a accordé la prophétie?
Votre lecture contredit le Coran...
Auteur : Anoushirvan
Date : 29 juin24, 05:27
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 29 juin24, 04:07
ET donc c'est à Lot que Dieu a donné Isaac, puis un petit-fils, Jacob, paix sur eux?
C'est à Lot et sa descendance que Dieu a accordé la prophétie?
Votre lecture contredit le Coran...
Les histoires d'Abraham et de Lot s'entremêlent l'une l'autre dans ces versets de la sourate 29, disons 29.25 jusqu'à 29.35.
29.25 --> Abraham
29.26 --> Lot
29.27 --> Abraham
29.28 à 29.30 --> Lot
29.31 à 29.32 --> Abraham (certes, au sujet de Lot)
29.33 à 29.35 --> Lot
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 30 juin24, 04:00
Message : Anoushirvan a écrit : 29 juin24, 05:27
Les histoires d'Abraham et de Lot s'entremêlent l'une l'autre dans ces versets de la sourate 29, disons 29.25 jusqu'à 29.35.
La proposition "
Lot crut en lui" est incidente/incise en la circonstance (جملة اعتراضية).
Il n'est question que d'Abraham dans le contexte immédiat, avant et après.
Tous les exégètes, des linguistes pour certaines, disent que c'est d'Abraham qu'il s'agit, même lorsqu'ils évoquent la possibilité d'être comprise autrement.
Cela importe peu toutefois, puisque le texte indique que Lot a immigré également avec Abraham vers la Terre sainte.
Vous ne pouvez pas balayer ceci d'un revers de main, juste parce que ça ne convient pas à votre lecture.
Sourate 21: "Nous le sauvâmes, ainsi que Lot, vers la terre que Nous avons bénie pour les mondes." Auteur : Anoushirvan
Date : 30 juin24, 08:18
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 30 juin24, 04:00
La proposition "
Lot crut en lui" est incidente/incise en la circonstance (جملة اعتراضية).
Le Coran foisonne de ce genre d'énoncés.
Il n'est question que d'Abraham dans le contexte immédiat, avant et après.
Tous les exégètes, des linguistes pour certaines, disent que c'est d'Abraham qu'il s'agit, même lorsqu'ils évoquent la possibilité d'être comprise autrement.
Il y a différentes traductions, s'appuyant soit sur des exégèses, soit sur la compréhension personnelle du traducteur.
Pour certaines (la plupart en fait), c'est Lot qui dit "ini muhajirun ila rabii", pour d'autres c'est Abraham.
Par exemple, pour celle-ci
http://islammedia.free.fr/Pages/coran/c ... .php?id=29
c'est Lot (enfin, c'est comme ça qu'on comprend dans la traduction française, même si ce n'est pas explicité).
Pour celle-là
https://www.yabiladi.com/coran/sourate/ ... /surano:29
pour la version française, c'est Abraham, et pour la version anglaise, c'est Lot.
D'autres traductions en anglais :
https://corpus.quran.com/translation.js ... 9&verse=26
tantôt c'est Lot, tantôt c'est Abraham.
Mais en effet, ce n'est pas mon point de savoir si c'est Lot ou Abraham qui a dit ça.
Serviteur d'Allah a écrit : 28 juin24, 23:50
Ainsi, le mot
muhajir , même si vous ne voulez le prendre qu'au sens figuré, le sens propre est clairement présent. Abraham a bel et bien immigré loin de son peuple et de leur idolâtrie, pour se consacrer au monothéisme/à Dieu, dans un autre endroit: la Terre sainte.
C'est une bonne remarque.
Pour qu'il y ait un sens figuré (ou plusieurs), il faut qu'il y ait un sens propre au départ, en général concret, et une analogie ou une comparaison imagée qui permette de projeter le sens propre vers l'analogie.
Le sens figuré de converti dans le Coran et en arabe du 7e siècle a été probablement influencé par le judaïsme parce qu'en hébreu, on a le mot "ger" qui signifie étranger immigrant (en Terre Sainte), mais les gerim, ce sont les convertis au judaïsme.
Donc, ce n'est pas qu'intrinsèquement le mot muhajir signifierait converti. C'est plutôt que dans la pensée religieuse de cette époque, émigrer et convertir, ce sont des mouvements analogues.
Ben d'ailleurs, même les exégètes sont forcés de l'admettre :
Pour Al-Qurtubi, il y a plusieurs sortes de hijra: rejoindre Médine pour soutenir le prophète pssl et les croyants (d'où al-muhajirun), partir avec lui lorsqu'il s'agit de combattre les païens qui venaient à leur rencontre (ce que les hypocrites refusaient de faire, trouvant toutes sortes d'excuses pour rester loin, se refugiant à Médine ou ailleurs), quitter l'idolâtrie/la mécréance et les mauvaises actions. Le passage que vous citez parle des hypocrites.
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 30 juin24, 08:59
Message : Anoushirvan a écrit : 30 juin24, 08:18Pour certaines (la plupart en fait), c'est Lot qui dit "ini muhajirun ila rabii"
Les traductions ne disent pas cela, c'est vous qui le dites.
Elles se contentent de reprendre littéralement le texte original ici.
Or, la langue arabe ne fonctionne pas de la même façon que la langue française: là où dans la première il apparait qu'il s'agit d'Abraham, dans la deuxième ce n'est pas le cas. D'où le fait qu'un point est souvent placé à cet endroit dans la traduction, pour séparer les deux idées, alors que dans le texte coranique cette ponctuation n'existe pas.
Un cas similaire se présente juste avant, où il est clair qu'il s'agit d'Abraham:
Son peuple ne fît d´autre réponse que: "tuez-le ou brûlez-le". Mais Allah le sauva du feu. C´est bien là des signes pour des gens qui croient.
Et il dit: "En effet, c'est pour cimenter des liens entre vous- même dans la vie présente, que vous avez adopté des idoles, en dehors d'Allah. Ensuite, le Jour de la Résurrection, les uns rejetteront les autres, et les uns maudiront les autres, tandis que vous aurez le Feu pour refuge, et vous n´aurez pas de protecteurs.
a écrit :Le sens figuré de converti dans le Coran et en arabe du 7e siècle a été probablement influencé par le judaïsme parce qu'en hébreu, on a le mot "ger" qui signifie étranger immigrant (en Terre Sainte), mais les gerim, ce sont les convertis au judaïsme.
Le terme arabe est à rendre en français par un participe présent, car l'aspect qu'il évoque n'est pas accompli, contrairement au terme hébreu.
Il convient pour désigner un homme qui achemine vers autre endroit (la Terre sainte), mais clairement pas pour une personne convertie, laquelle est désignée dans le Coran par le verbe "âmana" et le nom "mu'min" (d'où d'ailleurs
Lot crut (âmana) en lui) ou "ihatada" ou "muhatadi", jamais par "hâjara" ou "muhâjir" (émigrer).
Paix

Auteur : Stop !
Date : 30 juin24, 21:20
Message : Quand Dieu a foutu le bordel dans les langues parce qu'il avait peur que les hommes ne montent jusqu'à lui,
il n'a pas pensé une seconde que tout ce qu'il dirait par la suite pourrait se comprendre n'importe comment.
Manque de clairvoyance.
Auteur : Anoushirvan
Date : 01 juil.24, 07:08
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 30 juin24, 08:59
Les traductions ne disent pas cela, c'est vous qui le dites.
Elles se contentent de reprendre littéralement le texte original ici.
Or, la langue arabe ne fonctionne pas de la même façon que la langue française: là où dans la première il apparait qu'il s'agit d'Abraham, dans la deuxième ce n'est pas le cas. D'où le fait qu'un point est souvent placé à cet endroit dans la traduction, pour séparer les deux idées, alors que dans le texte coranique cette ponctuation n'existe pas.
Ouais enfin, la langue arabe a bon dos, alors que la réalité, c'est que le texte coranique, en tout cas dans certaines sourates, est tout simplement foncièrement mal écrit :
* soit que le gars l'a écrit à l'arrache quelques minutes avant son speech
* soit qu'il avait du mal à structurer ses idées
* soit qu'une autre idée lui venait subitement pendant qu'il en exposait déjà une
* soit que le scribe qui notait ses paroles n'ait pas fait trop attention
En tout cas, on sent que ça a été écrit dans l'urgence pour parer à une situation présente, et non pas pour passer à la postérité, sinon on aurait prêté attention à éviter les ambiguïtés et à mieux expliciter le contexte.
Concernant les traductions, avec les liens que j'ai donnés :
Ici :
http://islammedia.free.fr/Pages/coran/c ... .php?id=29
Lot crut en lui.
Il dit: "Moi, j'émigre vers mon Seigneur, car c'est Lui le Tout Puissant, le Sage" ==> en français, le pronom "Il" renvoie obligatoirement à Lot dans ce contexte, même si ce n'était pas l'intention du texte en arabe.
Ici :
https://www.yabiladi.com/coran/sourate/ ... /surano:29
En français : Loth crut en lui et Abraham dit : «Je me réfugie auprès de mon Seigneur, car c'est Lui le Tout-Puissant, le Sage !» ==> au moins c'est clair, le traducteur a mis "Abraham" comme locuteur, alors que le nom n'apparaît pas dans le verset en arabe
En anglais : And Lot believed him , and said : Lo! I am a fugitive unto my Lord . Lo! He , only He , is the Mighty , the Wise . ==> aucune contestation possible, le locuteur c'est Lot dans cette traduction
Ici :
https://corpus.quran.com/translation.js ... 9&verse=26
Toutes sont des traductions anglaises, mais elles traduisent des compréhensions différentes.
Sahih International: And Lot believed him. [Abraham] said, "Indeed, I will emigrate to [the service of] my Lord. Indeed, He is the Exalted in Might, the Wise." ==> le traducteur pense que le locuteur est Abraham, mais il met le nom entre crochet pour indiquer que c'est un ajout de sa part. On remarque aussi son malaise au sujet de la phrase en arabe "ini muhajirun ila rabii", puisqu'il rajoute des termes qui ne sont pas dans le texte d'origine.
Pickthall: And Lot believed him, and said: Lo! I am a fugitive unto my Lord. Lo! He, only He, is the Mighty, the Wise. ==> même traduction que chez yabiladi au-dessus (qui a sans doute dû reprendre la traduction de Pickthall), le locuteur c'est Lot.
Yusuf Ali: But Lut had faith in Him: He said: "I will leave home for the sake of my Lord: for He is Exalted in Might, and Wise." ==> le locuteur c'est Lot sans contestation possible dans cette traduction
Shakir: And Lut believed in Him, and he said: I am fleeing to my Lord, surely He is the Mighty, the Wise. ==> le locuteur c'est Lot sans contestation possible dans cette traduction
Muhammad Sarwar: Only Lot believed in (Abraham) and said, "I seek refuge in my Lord, for He is Majestic and All-wise". ==> le locuteur c'est Lot sans contestation possible dans cette traduction
Mohsin Khan: So Lout (Lot) believed in him [Ibrahim's (Abraham) Message of Islamic Monotheism]. He [Ibrahim (Abraham)] said: "I will emigrate for the sake of my Lord. Verily, He is the All-Mighty, the All-Wise." ==> le traducteur pense que le locuteur est Abraham, mais il met le nom entre crochet pour indiquer que c'est un ajout de sa part. On remarque aussi les nombreux ajouts de termes dans sa traduction par rapport au texte d'origine.
Arberry: But Lot believed him; and he said, 'I will flee to my Lord; He is the All-mighty, the All-wise.' ==> le locuteur c'est Lot sans contestation possible dans cette traduction
Donc ce n'est pas moi qui dit que les traductions hésitent entre Lot et Abraham, il suffit de lire le florilège que je viens de montrer pour s'en rendre compte. Elles ne reprennent pas le texte littéralement.
Le terme arabe est à rendre en français par un participe présent, car l'aspect qu'il évoque n'est pas accompli, contrairement au terme hébreu.
Il convient pour désigner un homme qui achemine vers autre endroit (la Terre sainte), mais clairement pas pour une personne convertie, laquelle est désignée dans le Coran par le verbe "âmana" et le nom "mu'min" (d'où d'ailleurs Lot crut (âmana) en lui) ou "ihatada" ou "muhatadi", jamais par "hâjara" ou "muhâjir" (émigrer).
Je ne vois aucune raison pour qu'un terme, disons à l'accompli, dans une langue (comme par exemple "converti", participe passé en français) soit forcément rendu aussi à l'accompli dans une autre langue et vice-versa.
Ceci parce que les modèles mentaux des locuteurs diffèrent d'une langue à l'autre.
Quant à l'hébreu biblique, apparemment, conjuguer un verbe au présent (inaccompli) était considérer comme un blasphème, donc il préfère employer l'accompli (
https://fr.wikipedia.org/wiki/Morpholog ... %C3%A9breu).
Ensuite le mot mu'min ne veut pas dire "converti", il veut dire simplement "croyant".
Amir al-mu'minin n'est pas le Commandeur des Convertis, mais le Commandeur des Croyants.
Auteur : Serviteur d'Allah
Date : 20 juil.24, 05:59
Message : Anoushirvan a écrit : 01 juil.24, 07:08
Ouais enfin, la langue arabe a bon dos, alors que la réalité, c'est que le texte coranique, en tout cas dans certaines sourates, est tout simplement foncièrement mal écrit :
* soit que le gars l'a écrit à l'arrache quelques minutes avant son speech
* soit qu'il avait du mal à structurer ses idées
* soit qu'une autre idée lui venait subitement pendant qu'il en exposait déjà une
* soit que le scribe qui notait ses paroles n'ait pas fait trop attention
Le sens du terme n'a jamais fait l'objet de controverse chez les musulmans, pour la simple raison que les intéressés, Abraham et Noé, ont tous les deux émigré dans la Révélation et la Tradition. Inutile donc d'incriminer le texte, parce que ça ne confirme pas vos extrapolations.
Il est question ici du sens de
muhâjir, pas de la personne désignée par ce vocable.
Maints passages explicitent le sens initial: partir, s'exiler, s'agissant d'une personne
déjà croyante, pour s'établir ailleurs.
Quelques exemples qui illustrent ce sens:
3:195: "Ainsi, ceux qui ont émigré [muhâdjiûn], qui ont été expulsés de leurs demeures, qui ont été persécutés dans Mon chemin, qui ont combattu et qui ont été tués, J'effacerai leurs mauvaises actions..."
60:10: "Ô vous qui avez cru, quand les croyantes viennent à vous en émigrées[muhâdjrât], testez-les; et Dieu connaît mieux leur foi. Si vous reconnaissez qu'elles sont croyantes, ne les renvoyez pas aux dénégateurs."
59:8-9: "Ainsi que pour les émigrés [muhâdjiûn] pauvres, ceux qui ont été expulsés de leurs demeures et de leurs biens, tandis qu'ils recherchaient une grâce et un agrément de Dieu, et qu'ils secouraient Dieu et Son messager. Voilà les véridiques."
4: 100: "Quiconque sort de sa maison, émigrant vers Dieu et son messager, puis que la mort atteint, sa récompense incombe à Dieu."
Les personnes dont il est question dans ces passages et d'autres ont, pour un grande partie, embrassé la foi depuis longtemps, avant de décider d'émigrer vers Médine, pour servir leur Seigneur (d'où "émigrer vers Dieu" en parlant d'Abraham) ou assister les autres croyants.
C'est le cas pour le prophète: il a prêché l'islam une douzaine d'années à la Mecque avant de s'exiler vers Médine.
De là le calendrier hégirien, qui rappelle l'émigration (Hijra) du Prophète pssl, après avoir été chassé par les Mecquois.
"Et que de cités, bien plus fortes que ta cité qui t'a fait sortir, avons-Nous fait périr..." (Sourate Mohammed)
Pour conclure, votre démarche me parait incertaine, pour plusieurs raisons.
Vous vous fondez sur la ressemblance de formes pour conclure que la teneur est forcément la même.
Vous passez outre le processus de l'emprunt du terme -étapes du passage d'une langue à une autre- pour spéculer sur les raisons de l'emploi de celui-ci.
Autrement dit, vous mettez la charrue avant les bœufs.
Une démarche correcte nuance les choses et étudie exhaustivement les différents sens du mot, sans exclure aucun, à commencer par le sens original en langue arabe.
Elle chercherait dans les parlers arabes, la poésie préislamique et les textes des premiers temps de l'islam (où ce terme est utilisé)...
Et ne rejetterait pas en bloc l'avis contraire, parce que celui de croyants.
Auteur : Anoushirvan
Date : 20 juil.24, 09:14
Message : Serviteur d'Allah a écrit : 20 juil.24, 05:59
Le sens du terme n'a jamais fait l'objet de controverse chez les musulmans, pour la simple raison que les intéressés, Abraham et Noé, ont tous les deux émigré dans la Révélation et la Tradition.
Que le sens du terme (muhajir) n'ait jamais fait l'objet de controverse chez les musulmans et dans la Tradition, vous n'en savez rien.
Ce que vous appelez "Tradition" n'est que l'illustration du biais du survivant : il a existé au tout début d'autres traditions islamiques totalement différentes qui ont disparu de la mémoire islamique.
Celle-ci l'a emportée sur celles-là.
Il est question ici du sens de muhâjir, pas de la personne désignée par ce vocable.
Maints passages explicitent le sens initial: partir, s'exiler, s'agissant d'une personne déjà croyante, pour s'établir ailleurs.
Ca ne vous est jamais venu à l'idée que le mot "mumin" ("croyant") pouvait très bien avoir été revendiqué par des parties opposées l'une à l'autre ?
Est-ce que vous croyez que les adversaires du prophète se seraient appelés eux-mêmes "kafirs" comme dans le Coran ?
Non, évidemment !
Vous me direz peut-être : si c'était le cas, pourquoi la Tradition ne le rapporte pas (que les "kafirs" se disaient "mumin") ?
Il y a une réponse possible (qui n'est pourtant pas celle que je privilégie) : le biais du survivant : les adversaires du prophète n'ont laissé aucune trace écrite de leurs divergences, laissant le champ libre à la Tradition islamique.
Et puis même sans parler des adversaires directs du prophète à ce moment-là, juifs et chrétiens se revendiquent "croyants" aussi.
Le Coran expose dans ses milliers de pages quelles doivent être les qualités et comportements des gens qui se prétendent "mumin", mais ça ne veut pas dire que ceux qui se désignaient à ce moment-là comme "mumin" appartenaient tous au camp du prophète.
Même le mot "muhajir" peut être revendiqué par un camp ou par l'autre.
Il y a donc un sens à ce qu'il y ait un processus de conversion même quand on se dit "mumin".
Quelques exemples qui illustrent ce sens:
3:195: "Ainsi, ceux qui ont émigré [muhâdjiûn], qui ont été expulsés de leurs demeures, qui ont été persécutés dans Mon chemin, qui ont combattu et qui ont été tués, J'effacerai leurs mauvaises actions..."
60:10: "Ô vous qui avez cru, quand les croyantes viennent à vous en émigrées[muhâdjrât], testez-les; et Dieu connaît mieux leur foi. Si vous reconnaissez qu'elles sont croyantes, ne les renvoyez pas aux dénégateurs."
59:8-9: "Ainsi que pour les émigrés [muhâdjiûn] pauvres, ceux qui ont été expulsés de leurs demeures et de leurs biens, tandis qu'ils recherchaient une grâce et un agrément de Dieu, et qu'ils secouraient Dieu et Son messager. Voilà les véridiques."
4: 100: "Quiconque sort de sa maison, émigrant vers Dieu et son messager, puis que la mort atteint, sa récompense incombe à Dieu."
Typiquement sur ces versets que vous citez, je n'en ai pas du tout la même compréhension et la même lecture.
D'abord, une "maison" (dar ou bayt), que ce soit dans le Coran ou même en arabe en général, ce peut être une demeure pour vivre, mais c'est aussi un lieu d'enseignement, par exemple Bayt al-Hikma à Bagdad autrefois.
Ou même la Maison d'Abraham dans le Coran : c'est un lieu pour une retraite, par exemple, pas une demeure pour habiter.
Et précisément dans ces versets, les "maisons" ne sont pas des lieux d'habitation pour vivre, comme on rentre chez soi après le boulot, même si ce n'est pas exclu, mais d'abord des madrassas (ce mot est sûrement anachronique dans le contexte historique, mais il exprime l'idée).
Les "muhajiruns" en question se font expulser de leurs "madrassas", et donc de leur communauté, en raison de leurs divergences avec les autres liées au fait que eux ont accepté la prédication coranique. Ou bien ils la quittent d'eux-mêmes en raison de ces mêmes divergences et cherchent aller ailleurs.
Pour conclure, votre démarche me parait incertaine, pour plusieurs raisons.
Vous vous fondez sur la ressemblance de formes pour conclure que la teneur est forcément la même.
Vous passez outre le processus de l'emprunt du terme -étapes du passage d'une langue à une autre- pour spéculer sur les raisons de l'emploi de celui-ci.
Autrement dit, vous mettez la charrue avant les bœufs.
Une démarche correcte nuance les choses et étudie exhaustivement les différents sens du mot, sans exclure aucun, à commencer par le sens original en langue arabe.
Elle chercherait dans les parlers arabes, la poésie préislamique et les textes des premiers temps de l'islam (où ce terme est utilisé)...
Et ne rejetterait pas en bloc l'avis contraire, parce que celui de musulmans.
Si je devais écrire une thèse universitaire sur le sujet, je ferais ça en effet.
Mais ce n'est pas mon objectif ici.
Après, si quelqu'un veut reprendre mes idées pour en faire une thèse universitaire, let's go !
Auteur : Seleucide
Date : 23 juil.24, 10:46
Message : Anoushirvan a écrit : 20 juil.24, 09:14
Si je devais écrire une thèse universitaire sur le sujet, je ferais ça en effet.
Mais ce n'est pas mon objectif ici.
Après, si quelqu'un veut reprendre mes idées pour en faire une thèse universitaire, let's go !
Malheureusement, il manque encore à ce jour d'un dictionnaire critique et historique de la langue arabe.
Auteur : Yacine
Date : 24 juil.24, 00:07
Message : Seleucide a écrit : 23 juil.24, 10:46
d'un dictionnaire critique
C'est à dire ?
Ajouté 12 heures 58 minutes 45 secondes après :
Anoushirvan a écrit : 20 juil.24, 09:14
Que le sens du terme (muhajir) n'ait jamais fait l'objet de controverse chez les musulmans et dans la Tradition, vous n'en savez rien.
Moi j'arrive toujours pas à comprendre pourquoi tu te forces à faire un tas autour du mot "muhajir". Ce mot littéralement veut dire immigré émigré voyageur. Dans le contexte de la Tradition avec un grand M, ce sont les Muhajirouns, le premiers Compagnons qui ont migré/fuit la Mecque vers Yathrib/La Medine, de ce fait marque l'année et le début du calendrier de la Hijra, la Hégire. Autrement il y a rien. Si tu retires le contexte de la tradition il te reste plus que la signification littérale directe du mot.
Et si tu veux creuser un peu plus profond, sans même revenir aux anciens dictionnaires élaborés par les musulmans qui sont stupides et pas assez critiques pour Seleucide, tu n'as qu'a revenir à la racine H-J-R هجر et tous les mots qui en découlent en examinant leurs contextes d'utilisation.. comme c'est par ailleurs la démarche à suivre avec toutes les langues sémitiques.
Auteur : Anoushirvan
Date : 24 juil.24, 07:55
Message : Yacine a écrit : 24 juil.24, 00:07
Moi j'arrive toujours pas à comprendre pourquoi tu te forces à faire un tas autour du mot "muhajir". Ce mot littéralement veut dire immigré émigré voyageur. Dans le contexte de la Tradition avec un grand M, ce sont les Muhajirouns, le premiers Compagnons qui ont migré/fuit la Mecque vers Yathrib/La Medine, de ce fait marque l'année et le début du calendrier de la Hijra, la Hégire.
Je crois qu'on se situe ici précisément au cœur du problème posé par ces fameux "Muhajiruns".
En voulant comprendre la genèse du calendrier "hégirien" au 7e siècle et jusqu'au début du 8e siècle, j'ai eu l'occasion d'étudier les différents documents et papyrus arabes de cette époque.
A un moment, ils étaient consultables gratuitement ici
https://www.apd.gwi.uni-muenchen.de/apd/project.jsp mais je crois que ce n'est plus le cas malheureusement (à vérifier).
Mais on peut en trouver certains d'entre eux ailleurs sur d'autres sites web.
On parle bien ici de documents et papyrus, essentiellement administratifs d'ailleurs, écrits par les Arabes au 7e siècle, après la conquête arabe, et non pas de tradition rapportée par écrit plusieurs siècles après.
Un grand nombre sont datés, soit de l'année en cours, voire du mois et de l'année, dans le calendrier des Arabes du 7e siècle.
Certains d'entre eux sont même en deux langues, le grec ou le copte, et avec une date en arabe dans le calendrier arabe, et une date en grec ou en copte dans le calendrier grec ou copte.
Le gros intérêt de la double datation avec un autre calendrier est de vérifier si le calendrier arabe de cette époque est bien le calendrier hégirien.
Le point essentiel pour la discussion présente est que de tous les documents qui courent de 640 J.C. à 720 J.C.,
aucun d'entre eux ne mentionne l'Hégire.
Soit l'année est écrite toute seule (par exemple 22), le cas le plus fréquent.
Soit, et c'est extrêmement intéressant, elle est écrite avec la mention XXX "sanat qaḍāʾ al-muʾminīn" ou des variantes, année XXX de la juridiction des Croyants.
Le papyrus le plus important à cette égard est dénommé P. Louvre Inv. J. David-Weill 20 :
https://www.islamic-awareness.org/histo ... ri/plouvre
(certains historiens ne sont pas d'accord avec la lecture "année XXX de la juridiction des Croyants" et en proposent une autre mais je pense qu'ils ont tort).
Il rapporte l'expression ithnain wa arba3in sanat qada al-muminin à trois reprises.
Un autre cas est donné par l'inscription en grec faite au nom de Mu'awiya des thermes de Hammat Gader :
https://picryl.com/media/greek-muawiya- ... -ad-465698
Elle mentionne en grec l'année 42 des Arabes.
Donc, pour résumer, aucun document arabe daté du 7e siècle et du début du 8e siècle ne fait la moindre mention de l'ère de l'Hégire. Pour les Arabes de cette époque, on est soit en langue arabe dans l'ère de la "juridiction des Croyants", soit en grec, dans l'ère des Arabes.
Ce n'est pas du tout un "petit détail" que l'Hégire ne soit jamais mentionnée dans les dates. Et ce alors même que quand on compte l'année mentionnée, ça colle, peut-être à un an près, avec un calendrier qui aurait commencé à l'année de l'Hégire, du moins entre 620 et 622.
Il s'est bien passé quelque chose de crucial chez les Arabes vers 620/622, qui a justifié la création d'une nouvelle ère et d'un nouveau calendrier, mais ce n'est pas l'Hégire.
C'est un événement que la Tradition islamique a occulté beaucoup plus tard en inventant l'Hégire.
Autrement il y a rien. Si tu retires le contexte de la tradition il te reste plus que la signification littérale directe du mot.
S'il n'y a plus d'Hégire, que s'est-il passé vers 620/622 d'aussi important qui a justifié la création d'une nouvelle ère et d'un nouveau calendrier ?
Quelle est la relation de cet événement hypothétique inconnu avec le Coran ?
Que sont ces "muhajirun" dans le Coran ?
Que ce sont les Mhaggraye rapportés par les écrits syriaques ou grecs du 7e siècle ? Ont-ils un lien avec les "muhajirun" du Coran ?
Les "mumin" dont il est question dans ces papyrus du 7e siècle étaient-ils des adeptes de la prédication coranique ? Quel rapport avaient-ils au Coran, s'ils avaient éventuellement un lien avec ?
Et si tu veux creuser un peu plus profond, sans même revenir aux anciens dictionnaires élaborés par les musulmans qui sont stupides et pas assez critiques pour Seleucide, tu n'as qu'a revenir à la racine H-J-R هجر et tous les mots qui en découlent en examinant leurs contextes d'utilisation.. comme c'est par ailleurs la démarche à suivre avec toutes les langues sémitiques.
Ce n'est pas aussi simple. Tout d'abord, la notion de racine, dans n'importe quelle langue, est un concept de grammairien pour modéliser la langue.
Ce n'est pas quelque chose qui existe quand on parle.
Par exemple, les mots français ont aussi une racine. Mais quand on écrit ou qu'on parle en français, on ne pense pas à chaque instant aux racines. C'est pareil en arabe, en hébreu, etc.
D'autre part, la notion de racine spécifiquement dans la langue arabe a été introduite par les grammairiens arabes (souvent d'origine perse d'ailleurs) au 8e siècle, et plutôt vers la deuxième moitié du 8e siècle.
Ce qui veut dire que cette notion de racine n'existait pas chez les locuteurs arabes à l'époque de l'écriture du Coran.
Les racines en arabe restent un outil intéressant, je ne le nie pas, mais il est à manier avec beaucoup de prudence si on veut l'appliquer à l'étude du Coran.
Auteur : Yacine
Date : 24 juil.24, 19:20
Message : En ce qui concerne la racine en arabe je pense que tu fais erreur ; les grands grammairiens étaient perses certes mais cela ne veux dire aucunement que ce sont eux qui ont introduit cette nation, et si oui la racine serait plutôt découverte qu'inventé. Après les premiers dictionnaires arabes élaborés comme Lissan Al-Arab faisaient classer les chapitres par racine. D'ailleurs même dans les dictionnaires modernes pour cherche quelque chose il faut avoir l'intuition d'extraire la racine; Si par exemple tu cherches la signification du mot "استخرج" tu va pas chercher sur le "ا" (aliph) mais dans le "خ" (kha'a) pour l'entrée "خرج" sinon t'auras rien. Ca n'a vraiment rien à voir avec le français et les langues latines. Et le concept de la racine arabe est utilisé aussi, je sonstate sur Wikipedia, pour l’hébreu. La racine toujours donne la couleur basé généralement sur 3 lettres, rarement 4, mais aussi le sens de base.
Pour revenir à l'Hégire, l'Islam depuis le début a (re)instauré un calendrier strictement lunaire et a abrogé celui luni-solaire adopté par les Arabes, car on avait besoin suivre les éventements religieux, le Ramadan, les Aïds, l'Achoura et le Hajj, tout comme les mots sacrés, c'était donc primordial de se repérer dans le temps sur la seule année. Or pour ce qui est de se repérer dans tout le temps, à ma connaissance les Arabes se repéraient aux événements majeurs, comme l'
Année de l'Eléphant, après selon que la Tradition rapporte c'est Omar qui a désigné l'année de la Hijra comme l'an 0 d'un calendrier musulman, et cela a sûrement été déployé bien plus tard, plus spécialement avec les Omeyyades qui étaient les premiers à frapper les pièces de monnaies et instaurer une administration.
Auteur : Anoushirvan
Date : 03 août24, 06:12
Message : Yacine a écrit : 24 juil.24, 19:20
En ce qui concerne la racine en arabe je pense que tu fais erreur ; les grands grammairiens étaient perses certes mais cela ne veux dire aucunement que ce sont eux qui ont introduit cette nation, et si oui la racine serait plutôt découverte qu'inventé. Après les premiers dictionnaires arabes élaborés comme Lissan Al-Arab faisaient classer les chapitres par racine. D'ailleurs même dans les dictionnaires modernes pour cherche quelque chose il faut avoir l'intuition d'extraire la racine; Si par exemple tu cherches la signification du mot "استخرج" tu va pas chercher sur le "ا" (aliph) mais dans le "خ" (kha'a) pour l'entrée "خرج" sinon t'auras rien. Ca n'a vraiment rien à voir avec le français et les langues latines. Et le concept de la racine arabe est utilisé aussi, je sonstate sur Wikipedia, pour l’hébreu. La racine toujours donne la couleur basé généralement sur 3 lettres, rarement 4, mais aussi le sens de base.
Le consensus des spécialistes de la langue arabe est que c'est bien Sibawayh, grammairien d'origine perse de la fin du 8e siècle, qui a introduit la morphologie en arabe, c'est-à-dire l'étude de la construction des mots à partir des racines.
La notion de racine trilitère en arabe te paraît évidente parce que tu l'as sûrement apprise très jeune à l'école.
Mais, d'une part, les notions de grammaires qu'on t'apprend à l'école servent d'abord à bien s'exprimer, et d'autre part, elles sont basées sur les travaux antérieurs de grammairiens.
Il se trouve qu'un certain nombre de travaux actuels sur la morphologie en arabe pointent vers une morphologie fondée plutôt sur des racines bilitères auxquelles on adjoindrait une troisième consonne, éventuellement en altérant aussi une des consonnes de la racine bilitère (par exemple g -> k et g -> j)
Ces travaux sont fondés sur des comparaisons au sein du groupe des langues chamito-sémitiques englobant les langues sémitiques, dont la langue arabe fait partie.
Donc c'est un choix grammatical théorique que d'affirmer et d'enseigner que l'arabe ou l'hébreu sont des langues basées sur des racines trilitères, ce n'est une caractéristique innée de la langue.
Ensuite, le Lisaan al-arab est un dictionnaire arabe relativement tardif (12e siècle à peu près).
Le plus ancien dictionnaire arabe est le Kitab al-Ayn d'Al-Farahidi, datant du 8e siècle. Al-Farahidi fut d'ailleurs le maître de Sibawayh.
Le Kitab al-Ayn a ceci de particulier qu'il n'est pas classé par racine dans l'ordre lexicographique, mais par un système plus complexe sur base phonétique (en gros à partir du son qui est le plus profond dans la bouche vers celui qui est produit le plus près de la bouche).
Concernant l'hébreu (et ça vaut aussi pour le syriaque), il faut faire attention : les plus anciens traités de grammaire en hébreu (et en syriaque) sont bien postérieurs aux plus anciens traités grammaticaux arabes, et qui plus est, écrits par des savants juifs vivant dans le monde arabe, autrement dit, totalement influencés par celui-ci.
La notion même de "langues sémitiques" a été inventée par des historiens allemands à la fin du 18e siècle.
Ceci étant, je répète, je n'ai pas dit que l'utilisation des racines était à proscrire pour comprendre le Coran, j'ai dit que les racines étaient à utiliser avec prudence, c'est-à-dire que j'ai remarqué que c'est assez souvent dans les contextes les plus compliqués qu'elles s'avèrent les moins utiles et les plus trompeuses.
Pour revenir à l'Hégire, l'Islam depuis le début a (re)instauré un calendrier strictement lunaire et a abrogé celui luni-solaire adopté par les Arabes, car on avait besoin suivre les éventements religieux, le Ramadan, les Aïds, l'Achoura et le Hajj, tout comme les mots sacrés, c'était donc primordial de se repérer dans le temps sur la seule année. Or pour ce qui est de se repérer dans tout le temps, à ma connaissance les Arabes se repéraient aux événements majeurs, comme l'
Année de l'Eléphant, après selon que la Tradition rapporte c'est Omar qui a désigné l'année de la Hijra comme l'an 0 d'un calendrier musulman, et cela a sûrement été déployé bien plus tard, plus spécialement avec les Omeyyades qui étaient les premiers à frapper les pièces de monnaies et instaurer une administration.
Ce qui est certain, ce qu'à partir du moment où les Arabes ont conquis des territoires peuplés en dehors du monde arabe, et qu'ils ont dû les administrer, il n'était plus envisageable de dater des actes administratifs en prenant comme référence un événement qui s'est passé aussi cette année-là, du genre "X doit cent dinars à Y. Fait l'année où Omar est allé au Yémen...".
D'autre part, le calendrier arabe tout au long du 7e siècle et début du 8e siècle n'était pas lunaire, il était luni-solaire.
L'analyse du papyrus P. Louvre Inv. J. David-Weill 20 que j'ai cité plus haut le montre (voir
https://www.ifao.egnet.net/anisl/41/10 même si l'auteur est gêné aux entournures par cette hypothèse).
Auteur : Yacine
Date : 03 août24, 07:49
Message : Anoushirvan a écrit : 03 août24, 06:12
D'autre part, le calendrier arabe tout au long du 7e siècle et début du 8e siècle n'était pas lunaire, il était luni-solaire.
Je ne peux qu’être en total désaccord avec ça, si l’Hégire aurait pris du temps pour se déployer, le calcul strictement lunaire a été adopté au tout début, et cela en raison des éventements religieux qui ne peuvent en aucun cas être accordé avec un calendrier luni-solaire que le Coran condamne vivement dans le verset 9.37
Pour ce qui est de la racine trilitère, le fait qu'elle a été évoqué par Sibawayh n’enlève rien au fait qu'elle est intrinsèque pas à la grammaire seulement mais à la langue en soi. D’ailleurs la grammaire arabe elle même n'est venue que bien plus tard afin de dresser les lois linguistiques qui étaient déjà présentes chez les Arabes, pas théoriquement mais "par soucis esthétique" ; on se met d'accord sur telle ou telle loi linguistique car c'est plus agréable à l’ouïe.
La racine trilitère c'est elle qui a aidé à établir le mot ou le verbe calibre (وزن) فعل à partir du quel on reconnaît la nature d'un mot en arabe ou dans quelle catégorie sémantique le placer. Par exemple si le mot est de Wazn مِفْعَل on connaît généralement qu'il s'agit un outil. On va même établir le groupe des "lettres de l'ajout" (حروف الزيادة) qui peuvent être englobé par un astuce mnémotechnique dans سألتمونيها. C'est à dire en combinant le Wazn فعل avec une ou plusieurs lettre qu'on trouve dans سألتمونيها on peut constituer tous Wazn possible, de la même manière si on prend une racine trilitère, on peut en extraire tous les mots arabiquement corrects qu'ils soient dans le dictionnaire ou pas encore.
Auteur : Anoushirvan
Date : 03 août24, 08:51
Message : Yacine a écrit : 03 août24, 07:49
Je ne peux qu’être en total désaccord avec ça, si l’Hégire aurait pris du temps pour se déployer, le calcul strictement lunaire a été adopté au tout début, et cela en raison des éventements religieux qui ne peuvent en aucun cas être accordé avec un calendrier luni-solaire que le Coran condamne vivement dans le verset 9.37
Ben justement le fait que le calendrier ait été luni-solaire pendant le 7e et le début du 8e siècle va dans le sens d'autres constations faites par ailleurs, à savoir que les dirigeants arabes de cette période n'avaient pas l'air d'avoir jamais entendu parler du Coran, et que les juristes du 8e siècle aient ressenti à son égard une profonde perplexité à le mettre en accord avec les sunnas.
Cependant, le verset 9.37 est également mal compris par la Tradition musulmane.
D'abord, ce verset fait écho aux versets 9.2 et 9.5 plus haut, lesquels impliquent qu'il y devait y avoir une sorte de consensus pré-établi entre les différents protagonistes.
Selon ce consensus, il devait y avoir quatre mois
consécutifs sacrés, dont les deux mois du Hajj.
Durant ces quatre mois, bien sûr, il était interdit de faire la guerre.
Pour une raison X ou Y, le pouvoir, parce que seul le pouvoir politique peut décider de modifier un calendrier, a décidé de bouger un ou deux mois sacrés ailleurs dans l'année, mais pas ceux du Hajj, réduisant drastiquement la durée de la période de non-belligérance.
L'auteur de la prédication de la sourate 9 est donc furieux, il a l'impression de se faire rouler dans la farine, alors que, surtout, lui et ses partisans ont peut-être baissé la garde. Mais il ne peut pas faire grand-chose.
Or j'ai étudié les différents textes bilingues arabe-grec avec double datation du 7e et 8e siècles, et il y en a en effet où le mois de Rajab (un des mois sacrés donc) a été déplacé d'une année à l'autre.
Cependant, si ma mémoire est bonne, il s'agit de textes datant du début du 8e siècle.
Pour moi c'est trop tardif par rapport au Coran (pour moi le Coran appartient au début de la première moitié du 7e siècle).
Donc ça veut dire que la coutume de déplacer des mois sacrés était courante et a perduré très longtemps.
L'autre chose importante, c'est que dans le calendrier hégirien actuel, les quatre mois sacrés ne sont pas consécutifs, alors que dans la sourate 9, le Coran voudrait qu'ils le soient.
Donc quand le calendrier hégirien a été mis en place, on avait déjà perdu de vue la relation entre les versets 9.2, 9.5 et 9.37 (on ne comprenait déjà plus très bien le Coran), et les mois sacrés n'étaient déjà plus consécutifs. Le calendrier hégirien s'est donc mis en place assez tard dans l'histoire et en figeant l'ordonnancement des mois dans l'état où il était.
Auteur : Yacine
Date : 03 août24, 18:48
Message : On imagine tout simplement pas un Ramadan luni-solaire, surtout que le Hadith a bien établi la règle simple, que celui qui voit le croissant lunaire qu'il le jeune, pourvu qu'il soit seul échoué sur une île déserte.. C'est une des raisons qui fait du calendrier strictement lunaire fiable en toute circonstance.
Les musulmans ont par ailleurs daté beaucoup de leur éventement suivant leur calendrier, par exemple la bataille de Badr est connue pour être déroulé le jour du 17 Ramadan, deuxième année de l'Hégire.
Auteur : Seleucide
Date : 04 août24, 09:09
Message : Yacine a écrit : 24 juil.24, 00:07
C'est à dire ?
Un dictionnaire notant pour chaque mot ses différents sens, et pour chaque sens, son attestation la plus ancienne, ce qui permettrait de faire l'histoire de la sémantique de chaque mot. Mais comme pour la période la plus ancienne, on se base sur une tradition orale d'authenticité incertaine, la chose est difficile.
Auteur : Yacine
Date : 04 août24, 09:51
Message : Seleucide a écrit : 04 août24, 09:09
Un dictionnaire notant pour chaque mot ses différents sens, et pour chaque sens, son attestation la plus ancienne, ce qui permettrait de faire l'histoire de la sémantique de chaque mot.
Et c'est quoi le dictionnaire français existant qui remplit ces critères ?
Auteur : Anoushirvan
Date : 05 août24, 01:27
Message : Yacine a écrit : 03 août24, 18:48
On imagine tout simplement pas un Ramadan luni-solaire, surtout que le Hadith a bien établi la règle simple, que celui qui voit le
croissant lunaire qu'il le jeune, pourvu qu'il soit seul échoué sur une île déserte.. C'est une des raisons qui fait du calendrier strictement lunaire fiable en toute circonstance.
Je ne connais pas ce hadith mais tel que tu le rapportes, c'est un faux évident, même si la Tradition le déclare authentique, faux c'est-à-dire qu'il ne vient pas du prédicateur du Coran, mais de quelqu'un qui a fait passer son commentaire personnel pour une parole prophétique.
Tout d'abord, on a ce verset :
2.185 Mois de Ramadan (Shahru Ramadhana) au cours duquel le Coran a été descendu comme guide pour les gens, et preuves claires de la bonne direction et du discernement. Donc quiconque d'entre vous "témoigne" de ce mois, qu'il jeûne!
Ton hadith est tiré de ce verset.
C'est marqué
shahr, et non pas
hilal.
Le mot shahr veut dire mois, certes, mais surtout les anciens dicos d'arabe témoigne qu'il avait le sens d'origine de manifestation de la pleine lune.
Hilal, c'est le croissant de lune, et plus spécialement le tout premier croissant après la nouvelle lune.
Ce verset demande de voir le "shahr" de Ramadhan, bien visible, pour faire pénitence / jeûne, et non pas le hilal de Ramadhan, qui se fond dans l'obscurité, et que personne en général n'arrive à voir, sauf des yeux de faucon.
C'est d'ailleurs parfaitement cohérent avec la thématique générale du Coran, qui oppose la lumière aux ténèbres, et ne va donc pas demander de suivre une pratique qui revient manifestement à se tourner vers l'obscurité.
Exit donc la "nuit du doute", qui n'est d'ailleurs pas mentionnée dans le Coran, et qui est complètement en décalage avec lui.
Un tout petit peu plus loin, on a ce verset :
2.189 Ils t'interrogent sur les nouvelles lunes (Al-'Ahillati, pluriel de hilal) - Dis: "Elles servent aux gens pour compter le temps (mawaqit), et aussi pour le Hajj. Et ce n´est pas un acte de bienfaisance que de rentrer chez vous par l'arrière des maisons. Mais la bonté pieuse consiste à craindre Allah. Entrer donc dans les maisons par leurs portes. Et craignez Allah afin que vous réussissiez!".
Ici on a deux choses importantes :
Premièrement, d'après le Coran, les nouvelles lunes ne servent qu'à rythmer le temps (mawaqit), et pour déterminer le moment du Hajj.
Il n'y a aucune mention du Ramadan ici. C'est parfaitement cohérent avec le verset 2.185 plus haut.
Deuxièmement, le prédicateur du Coran avait clairement à l'esprit de remplacer la détermination d'un mois selon la nouvelle lune par la détermination selon la pleine lune : ça ne se fait pas rentrer dans une maison par l'arrière, qui n'est pas éclairé, il faut rentrer par la porte, qui est éclairée.
C'est-à-dire, il ne faut pas déterminer un mois par l'arrière non éclairé (la nouvelle lune), mais par la porte éclairée (la pleine lune).
On peut aussi remarquer que si le prédicateur du Coran était en mesure de proposer un remaniement aussi radical du calendrier, c'est que la question de créer un nouveau calendrier se posait déjà en son temps, et qu'il y avait des débats à ce sujet, chose sur laquelle la Tradition fait plutôt l'impasse.
Après, on a aussi ces deux versets :
10.5 C'est Lui qui a fait du soleil une clarté et de la lune une lumière, et Il en a déterminé les phases afin que vous sachiez le nombre des années et le calcul du temps ( Wa Lita`lamū `Adada As-Sinīna Wa Al-Ĥisāba). (...)
17.12 Nous avons fait de la nuit et du jour deux signes, et Nous avons effacé le signe de la nuit, tandis que Nous avons rendu visible le signe du jour, pour que vous recherchiez des grâces de votre Seigneur, et que vous sachiez le nombre des années et le calcul du temps (Wa Lita`lamū `Adada As-Sinīna Wa Al-Ĥisāba). Et Nous avons expliqué toute chose d´une manière détaillée.
La nuit et le jour viennent du soleil et non pas de la lune, donc de base avec le verset 17.12, le soleil est utilisé pour compter les années et calculer les dates.
Cependant, avec le verset 10.5, c'est une combinaison soleil-lune qui doit être utilisée.
Donc on est bien dans le Coran sur le principe d'un calendrier luni-solaire, qui utilise la lune et le soleil, et non pas d'un calendrier lunaire, dans lequel le soleil ne joue aucun rôle.
Quant aux verset 9.36 et 9.37, la Tradition islamique les comprend de travers. A aucun moment ils ne disent qu'il faut instaurer une année lunaire.
Auteur : Yacine
Date : 05 août24, 02:23
Message : Viens jeter un coup d’œil ici >>
https://sunnah.com/search?q=%D8%B5%D9%8 ... 8%AA%D9%87
Il est notoirement, c'est à dire pas à travers un seul hadith authentique mais plusieurs, de jeûner à sa vu (croissant) et de fêter à sa vue (croissant), et si le ciel était nuageux alors on finit les 30 jours. Car les jour du moins lunaire sont soit 29 ou 30.
Et ça na nul besoin d'un oeil de faucon comme tu dis. Dans plusieurs pays, même avec les nouveaux instruments on continue à se fier à l'oeil nue.
Un calendrier strictement lunaire est le plus pratique de tout, et qui a donné ses preuves. A la porté de tout le monde et pas seulement à quelques astronomes avertis, et jamais de problème de décalage. On peut très bien avec un simple calcul établir une correspondance entre une date grégorienne et une date hégirienne quelque soit l’éloignement dans la passé ou même le future (mieux que des dates grégoriennes entre elles si on sait que celle ci on subit de multiples changements). Avec le luni-solaire juif par exemple, je pense pas que ça peut être le cas, car ça prend en considération la synchronisation globale avec l'année solaire seulement, mais pas pour chaque année juive en soi; on accumule du retard puis on se rattrape par la suite avec l'ajour d'un 13eme mois.
Auteur : Seleucide
Date : 05 août24, 09:35
Message : Yacine a écrit : 04 août24, 09:51
Et c'est quoi le dictionnaire français existant qui remplit ces critères ?
Je ne suis pas un spécialiste de lexicographie française, mais personnellement, j'utilise beaucoup le CNRTL, par exemple ici :
https://www.cnrtl.fr/definition/toilette
Il y a en bas toute une partie étymologie, histoire.
Auteur : Yacine
Date : 05 août24, 11:33
Message : Seleucide a écrit : 05 août24, 09:35
Je ne suis pas un spécialiste de lexicographie française, mais personnellement, j'utilise beaucoup le CNRTL, par exemple ici :
https://www.cnrtl.fr/definition/toilette
Il y a en bas toute une partie étymologie, histoire.
Lui même qui fait référence aux anciens dictionnaires, qui se référent sur l'oral de l'époque, n'est ce pas ? N'est ce pas ce qui se passe avec toutes les langues et tous leurs dictionnaires ainsi que leur évolution ?
Moi je vais te proposer un jeu nouveau, c'est de lier l’étymologie d'un mot français à la racine trilitère d'un mot arabe. Car ça fait du temps que je tombe sur des mots qui existe en français et en arabe et qui ont l'air très semblable en lettres et en sens, voire même avec un sens exact :
1. Histoire, son équivalent en arabe
ostoura (أسطورة) évoqué dans le Coran surtout en pluriel أساطير, qui veut dire légende ou fable. Les dictionnaires français parle d'une origine latine :
historia, en arabe ça vient de la racine trilitère س ط ر qui va nous donner سطر c'est à dire la ligne sur laquelle on écrit un texte, ou le verbe سَطَرَ qui veut dire tout bonnement écrire : ن والقلم وما يسطرون comme dans le Coran (68.1). Là il semble que l'arabe nous aide à creuser plus loin dans l'étymologie du mot histoire qu'on connaissait pas avant, sans dire que le mot est d'origine arabe.. Je pense plutôt qu'ils ont une origine commune, du phénicien peut être.
Aussi 2. Chemise : dans l'arabe ça existe en
qamis قميص là aussi mentionné dans le Coran (12.18) et provient d'une racine trilitère ق م ص qu'on peut lui trouver toute l'étendu ici
https://www.almaany.com/ar/dict/ar-ar/% ... %85%D8%B5/
L'étymologie des dictionnaires nous dire ça vient du latin
camisia c'est tout..
3. Puis un mot
Kafir, il semble avec la même racine que le mot couvrir. Car si on revient à la définition du mot
Kafir en soi dans la théologie on trouve que le
kafir est celui qui a couvert sa foi (الكافر هو الذي غطى إيمانه). Mieux encore, kafir veut dire aussi cultivateur ou paysan comme on trouve dans le Coran même dans le verset 57.20 (أعجب الكفار نباته) car il couvre la terre, plus encore un village en arabe est aussi appelé
Kafr, c'est le mot le plus utilisé chez les égyptiens pour designer un village.
L'étymologie des dictionnaires français dit que ça provient du latin
cooperire qui serait composé de
co et
operire, ce qui semble pas tout a fait correct.
Voilà quelques petits exemples dans la puissance de la racine sémitique trilitère qui vous semble un peu archaïques alors qu'elle ne l'est pas. Il faut aussi se pencher vers une nouvelle discipline de l’étude des mots qui sont à la fois sémitiques et indo-européens, car les mots d'origine arabe en français on les connait, or là c'est tout autre chose.
Auteur : Anoushirvan
Date : 06 août24, 02:13
Message : Il y a certainement beaucoup de langues où les mots peuvent avoir trois consonnes, ça ne veut pas nécessairement dire qu'ils viennent de l'arabe.
Avant de voir une éventuelle influence de l'arabe sur l'indo-européen (qui reste une langue hypothétique, rappelons-le), il y a d'autres hypothèses à regarder.
En particulier, on oublie souvent que le monde arabe de l'antiquité, Liban, Palestine, Syrie, Jordanie, peut-être une partie de l'Irak, la côte ouest de l'Arabie jusqu'au Yémen (de mémoire, à vérifier) a été colonisé par les Romains, puis sous contrôle des Byzantins du 1er siècle au 7eme siècle.
C'est beaucoup plus que la durée de la colonisation française de l'Algérie, par exemple.
Les mots arabes qui ressemblent à des mots français (hors emprunt du français à l'arabe) viennent certainement des Romains.
Par exemple, dinar vient d'un mot latin (on le trouve dans d'autres langues que l'arabe d'ailleurs).
Idem dirham vient du grec.
D'ailleurs, avant les Romains, les Grecs d'Alexandre le Grand avaient conquis le Liban, la Syrie, la Judée, Gaza, et ont certainement eux aussi laissé leur empreinte.
En fait, si on veut savoir si un mot arabe ne vient pas du latin ou du grec, le plus fiable est de regarder du côté de l'akkadien ou de l'ougarit s'il n'y a pas un mot apparenté.
Car ces deux langues avaient déjà disparu avant que le grec ou le latin apparaissent dans l'histoire.
Auteur : Yacine
Date : 06 août24, 03:35
Message : Anoushirvan a écrit : 06 août24, 02:13
Par exemple, dinar vient d'un mot latin (on le trouve dans d'autres langues que l'arabe d'ailleurs).
Idem dirham vient du grec.
Le dinar et le dirham sont grecs, oui ça je le savais. En français d’ailleurs ça donne le denier. Ils n'ont pas de racine ni de mots dérivés en arabe comme bon nombre de mots perses arabisés. Ce n'est pas le cas des exemple que j'ai donné.
Moi je ne disais pas que les exemples cité sont à l'origine arabes, car si on remonte à l'origine de l'arabe et du latin ils sont nés un peu dans la même période. Je dis juste qu'ils ont sûrement un ancêtre commun, comme le phénicien, car c'est lui à l’origine de l'alphabet latin et arabe, qui conserve d’ailleurs le même ordre jusqu’à maintenant. Et transmission de l’alphabet ne peut vraisemblablement pas passer sans transmission d'un lot de mots.
Auteur : Soultan
Date : 07 août24, 03:29
Message : Aucune preuve n'existe pour la simple raison que les arabes existent avant Ismael
Ce dernier est de père Irakien et de mère Egyptienne et il a vecu à coté de Petra
Auteur : Seleucide
Date : 07 août24, 09:01
Message : Yacine a écrit : 05 août24, 11:33Lui même qui fait référence aux anciens dictionnaires, qui se référent sur l'oral de l'époque, n'est ce pas ? N'est ce pas ce qui se passe avec toutes les langues et tous leurs dictionnaires ainsi que leur évolution ?
Non, justement, il s'appuie sur des oeuvres datées, et pas sur une tradition orale d'authenticité incertaine. Le français est une langue plus récente que l'arabe. Quoi qu'il en soit, l'objet de mon intervention était d'appeler à la prudence dans la sémantique arabe, surtout lorsqu'une occurrence est liée d'une manière ou d'une autre au Coran. J'ai moi-même constaté que la tradition islamique a pu créer, ou plus exactement inventer des significations tout à fait arbitraires à des mots qui apparaissent dans le Coran.
Yacine a écrit : 05 août24, 11:33Moi je vais te proposer un jeu nouveau, c'est de lier l’étymologie d'un mot français à la racine trilitère d'un mot arabe. Car ça fait du temps que je tombe sur des mots qui existe en français et en arabe et qui ont l'air très semblable en lettres et en sens, voire même avec un sens exact
Tout ça est passionnant, mais complexe, et je n'ai malheureusement assez de connaissance pour faire ce travail d'étymologie.
Auteur : Yacine
Date : 07 août24, 20:40
Message : Seleucide a écrit : 07 août24, 09:01
J'ai moi-même constaté que la tradition islamique a pu créer, ou plus exactement inventer des significations tout à fait arbitraires à des mots qui apparaissent dans le Coran.
Des exemples ?
Auteur : Seleucide
Date : 08 août24, 00:16
Message : Yacine a écrit : 07 août24, 20:40
Des exemples ?
Oui, je vais en donner un que j'ai beaucoup étudié, تنور qui apparaît à deux reprises dans le Coran. Dans la mesure où il est cité avec une formule étrange, et dans la mesure où cette formule apparaît dans un contexte obscur, on ne sait pas très bien ce qu'elle signifie, et parce qu'on l'ignore, des significations au mot تنور ont tout simplement été inventées. On les retrouve dans presque toutes les exégèses, notamment celle de Tabarî, mais aussi dans certains dictionnaires arabes, notamment la compilation d'Ibn Manzûr. Pourtant, تنور qui n'est originellement pas un mot arabe, a toujours signifié four, cela et rien d'autre.
Auteur : Yacine
Date : 08 août24, 01:16
Message : Seleucide a écrit : 08 août24, 00:16
Oui, je vais en donner un que j'ai beaucoup étudié, تنور qui apparaît à deux reprises dans le Coran. Dans la mesure où il est cité avec une formule étrange, et dans la mesure où cette formule apparaît dans un contexte obscur, on ne sait pas très bien ce qu'elle signifie, et parce qu'on l'ignore, des significations au mot تنور ont tout simplement été inventées. On les retrouve dans presque toutes les exégèses, notamment celle de Tabarî, mais aussi dans certains dictionnaires arabes, notamment la compilation d'Ibn Manzûr. Pourtant, تنور qui n'est originellement pas un mot arabe, a toujours signifié four, cela et rien d'autre.
Pourquoi تنور pas arabe alors qu'il porte en lui نار (feu) et نور (lumière) et qui signifie four ?
Le Coran parle avec le jargon des Arabes de l'époque en utilisant des termes et des locutions qu'ils connaissent déjà, cela ne peut pas être autrement
Pour essayer une explication il faut se pencher sur le verbe فار qui peut mener à four mais aussi aux sources d'eau, ou les deux à la fois comme les geysers volcaniques qui n’entaient pas méconnus des arabes car ils existaient tout près en Ethiopie
Le verbe فار veut dire ébullition, d'un liquide comme l'eau, comme l’éruption (d'un volcan), tout comme la manifestation d'une colère (فورة غضب), ou l'eau qui jaillit d'une source
Bassam Jarrar propose que ça soit littéralement l'éruption d'un volcan comme signe du début du déluge
Auteur : Seleucide
Date : 08 août24, 02:20
Message : Yacine a écrit : 08 août24, 01:16Pourquoi تنور pas arabe alors qu'il porte en lui نار (feu) et نور (lumière) et qui signifie four ?
تنور n'est pas de l'arabe authentique. C'est un mot que tous les grammairiens et lexicographes arabes, sauf un, jugent être d'origine étrangère. Ce n'est probablement pas non plus un mot sémitique, mais ce n'est pas la question de l'origine ici qui importe, c'est celle du sens. Et il est clair que sur le terrain du sens, les exégètes musulmans ont raconté tout et n'importe quoi sur le sujet, précisément pour rendre compte d'un texte qu'ils ne comprenaient pas.
Yacine a écrit : 08 août24, 01:16Pour essayer une explication il faut se pencher sur le verbe فار qui peut mener à four mais aussi aux sources d'eau, ou les deux à la fois comme les geysers volcaniques qui n’entaient pas méconnus des arabes car ils existaient tout près en Ethiopie. Le verbe فار veut dire ébullition, d'un liquide comme l'eau, comme l’éruption (d'un volcan), tout comme la manifestation d'une colère (فورة غضب), ou l'eau qui jaillit d'une source.
فار peut signifier bouillonner, s’emporter, s’agiter, jaillir ou déborder. Dans la mesure où le contexte n'est d'aucune aide pour déterminer le sens de ce verbe, on ne peut partir de ce dernier pour déterminer le sens de تنور. Donc, on est coincés : comment comprendre l'expression فار التنور ? A partir du Coran seul, sans avoir accès à son sous-texte, c'est strictement impossible. Cela explique la diversité exégétique quant à l'interprétation de cette expression : faut-il prendre la chose au sens propre ? Si oui, cela semble incongru, il faut donc pouvoir expliquer ce sens propre, sinon, il faut trouver un sens figuré, et c'est ici que la tradition islamique a été très imaginative.
Yacine a écrit : 08 août24, 01:16Bassam Jarrar propose que ça soit littéralement l'éruption d'un volcan comme signe du début du déluge
Cette interprétation est clairement inspirée de celle de Qatâda sur le sujet.
Auteur : Yacine
Date : 09 août24, 19:32
Message : Seleucide a écrit : 08 août24, 02:20
تنور n'est pas de l'arabe authentique.
Il est de racine arabe mais sa structure, son وزن ne correspond a aucun qui soit arabe, il peut entrer dans la catégorie des الكلمات الملحونة comme les mots de la
Darija inspirés de l'arabe mais faites de façon
Darija. La
Darija ancienne les Arabes appelaient
Laḥn اللحن le mal-parler
Auteur : Anoushirvan
Date : 10 août24, 03:58
Message : A mon avis, le mot tanor en arabe et dans le Coran ne présente pas en lui-même des difficultés.
C'est un emprunt au perse tanûr, voire à l'ancien perse, qu'on retrouve dans plein de pays du Moyen-Orient, d'Asie, du Caucase.
Il désigne une sorte de four en argile.
En Inde, il a donné le mot tandoor (pensez au poulet tandoori).
En Afghanistan aussi, on dit tandûr, ou aussi tanûr.
De manière intéressante, le Wikipedia anglais (
https://en.wikipedia.org/wiki/Tandoor#Etymology) indique que le mot perse tanûr vient de l'akkadien tinuru, qui associe tin, l'argile, et nuru, le feu.
C'est en raison de l'origine akkadienne, qui est passé au perse, puis de nouveau à l'arabe et aux autres langues, dont l'hébreu, l'araméen, l'arménien, qu'on peut avoir l'impression que le mot arabe tanor est d'origine arabe, mais d'une manière "bizarre".
Encore plus intéressant, le Wikipedia anglais indique qu'une occurrence du mot akkadien tinuru se trouve dans l'épopée de Gilgamesh.
Malheureusement, je n'ai trouvé trace d'aucune confirmation de cette assertion, et le Wikipedia ne cite pas sa source.
Or, un des épisodes de l'épopée de Gilgamesh concerne sa rencontre avec le sage Utnapistin, qui le survivant du Déluge, grâce à un bateau, et à qui les dieux ont octroyé l'immortalité.
Le Noé de la Bible et du Coran vient de l'histoire d'Utnapishtin, qui doit certainement appartenir sous diverses formes au fond sémitique ancien et qui a traversé les âges.
Malheureusement encore, je n'ai pas pu savoir si le mot akkadien tinuru appartenait à l'épisode d'Utnapishtin dans l'épopée de Gilgamesh.
Car la difficulté en fait est là : pourquoi le Coran convoque cette image d'un four rugissant (ou bouillonnant) comme signal de départ du Déluge dans l'histoire de Noé, alors que cette image est absente de la Bible ?
Et vraisemblablement ce n'est pas le Coran qui a inventé cette image, elle devait faire partie de l'imaginaire des gens qui vivaient dans la société du prédicateur du Coran.
Dans la Bible, le mot tanor est utilisé dans la Genèse au verset 15.17 au sujet d'Abram (avant qu'il prît le nom d'Abraham).
Auteur : Seleucide
Date : 10 août24, 06:29
Message : Yacine a écrit : 09 août24, 19:32
Il est de racine arabe mais sa structure, son وزن ne correspond a aucun qui soit arabe, il peut entrer dans la catégorie des الكلمات الملحونة comme les mots de la
Darija inspirés de l'arabe mais faites de façon
Darija. La
Darija ancienne les Arabes appelaient
Laḥn اللحن le mal-parler
C'est là où tu fais erreur : tu considères que la racine de ce mot est نور, ce qui à ma connaissance, a été l'avis d'un et d'un seul grammairien de Kufa, Tha'lab. Mais cela a été critiqué par tous les autres grammairiens et lexicographes, tels Abû Hâtim al-Sijistânî, Ibn Durayd, al-Azharî, Ibn Sîdah, al-Jawâlîqî, al-Suyûtî, al-Qurtûbî, etc. Tous s'accordent sur ceci : la racine de ce ce mot est تنر et elle n'est pas plus arabe que son wazn, comme tu l'as justement noté. Mais encore une fois, la question de l'origine est secondaire : ce qui compte, c'est la sémantique.
Anoushirvan a écrit : 10 août24, 03:58C'est un emprunt au perse tanûr, voire à l'ancien perse, qu'on retrouve dans plein de pays du Moyen-Orient, d'Asie, du Caucase. De manière intéressante, le Wikipedia anglais (
https://en.wikipedia.org/wiki/Tandoor#Etymology) indique que le mot perse tanûr vient de l'akkadien tinuru, qui associe tin, l'argile, et nuru, le feu.
Cela m'a tout l'air d'être une étymologie fantaisiste. En akkadien, argile est diversement rendue par tid(d)um/tit(t)um, ce qui de prime abord rend l'assimilation incongrue. Par ailleurs, tid(d)um/tit(t)um s'écrit avec un t emphatique, comme en arabe pour tîn, ce qui n'est pas le cas avec tinûru, tannûr. Je pense, comme Jeffery, que si l'akkadien est l'attestation la plus ancienne, cela ne donne pas pour autant à ce mot une origine sémitique.
https://en.wiktionary.org/wiki/Reconstr ... AD%C4%ABn-
https://en.wiktionary.org/wiki/%D8%AA%D ... tymology_3
https://archive.org/details/foreignvoca ... 9/mode/1up
Anoushirvan a écrit : 10 août24, 03:58Encore plus intéressant, le Wikipedia anglais indique qu'une occurrence du mot akkadien tinuru se trouve dans l'épopée de Gilgamesh. Malheureusement, je n'ai trouvé trace d'aucune confirmation de cette assertion, et le Wikipedia ne cite pas sa source. Or, un des épisodes de l'épopée de Gilgamesh concerne sa rencontre avec le sage Utnapistin, qui le survivant du Déluge, grâce à un bateau, et à qui les dieux ont octroyé l'immortalité. Le Noé de la Bible et du Coran vient de l'histoire d'Utnapishtin, qui doit certainement appartenir sous diverses formes au fond sémitique ancien et qui a traversé les âges.
Gilgamesh, c'est deux millénaires avant le Coran, et pour le récit de Noé, il est impensable qu'une influence ait pu avoir lieu sans l'intermédiaire biblique. Or, nous ne trouvons rien dans le patrimoine rabbinique ou chrétien à propos d'un four dans l'histoire du déluge.
Anoushirvan a écrit : 10 août24, 03:58Car la difficulté en fait est là : pourquoi le Coran convoque cette image d'un four rugissant (ou bouillonnant) comme signal de départ du Déluge dans l'histoire de Noé, alors que cette image est absente de la Bible ?
Oui, c'est tout le problème. Il se trouve que j'ai écrit il y a quelques années un mémoire de recherche sur le sujet, et je crois avoir découvert le fin mot de l'histoire dans un midrash qui a longtemps échappé à l'attention des chercheurs. Si tu veux bien te donner la peine d'attendre quelques mois, un article très détaillé sera bientôt publié sur le sujet.
Anoushirvan a écrit : 10 août24, 03:58Et vraisemblablement ce n'est pas le Coran qui a inventé cette image, elle devait faire partie de l'imaginaire des gens qui vivaient dans la société du prédicateur du Coran.
Oui, c'est vrai. Mais il y a eu une rupture entre ceux qui produisirent le Coran et ceux qui eurent la charge de l'interpréter, d'où les exégèses farfelues et contradictoires relatives à ce verset.
Auteur : Anoushirvan
Date : 13 août24, 03:57
Message : Seleucide a écrit : 10 août24, 06:29
Cela m'a tout l'air d'être une étymologie fantaisiste. En akkadien, argile est diversement rendue par tid(d)um/tit(t)um, ce qui de prime abord rend l'assimilation incongrue. Par ailleurs, tid(d)um/tit(t)um s'écrit avec un t emphatique, comme en arabe pour tîn, ce qui n'est pas le cas avec tinûru, tannûr. Je pense, comme Jeffery, que si l'akkadien est l'attestation la plus ancienne, cela ne donne pas pour autant à ce mot une origine sémitique.
Peut-être, je ne sais pas, je ne connais pas l'akkadien, hormis ce qui est accessible au profane.
Gilgamesh, c'est deux millénaires avant le Coran, et pour le récit de Noé, il est impensable qu'une influence ait pu avoir lieu sans l'intermédiaire biblique. Or, nous ne trouvons rien dans le patrimoine rabbinique ou chrétien à propos d'un four dans l'histoire du déluge.
Je n'ai pas suggéré que l'histoire de Noé dans le Coran venait de celle d'Utnapishtim dans l'épopée de Gilgamesh.
D'ailleurs, il y a une différence majeure : la femme d'Utnapishtim est aussi vertueuse que lui, alors que dans le Coran, la femme de Noé fait partie des gens du Feu au même titre que la femme de Lot (verset 66.10).
Et la Genèse ne fait jouer aucun rôle particulier à la femme de Noé.
Les trois histoires ne sont donc pas identiques, mais il y a une trame commune entre elle.
C'est cette trame qui persiste à travers les âges, alors que les histoires qui sont construites sur cette trame peuvent avoir des variations entre elles.
D'ailleurs, il existe des variantes de cette histoire de déluge et de héros sauvé par un bateau avec des animaux en dehors de la zone sémitique du Proche- et Moyen-Orient, comme par exemple l'histoire de Noj chez le peuple Sagaï de l'Altaï (cf. Uno Holmberg, Finno-Ugric Mythology), sans qu'on sache très bien si l'histoire de Noj a pu être inspirée par celle de Noé dans la Bible (d'ailleurs, elle ressemble plus à celle du Coran qu'à celle de la Bible, et pourtant les Sagaï ont été christianisés).
Mon interrogation porte sur la possibilité qu'il y ait eu une narration sur cette trame, comportant un four, et qui a fini par être condensée dans le Coran avec l'histoire de Noé biblique.
Oui, c'est tout le problème. Il se trouve que j'ai écrit il y a quelques années un mémoire de recherche sur le sujet, et je crois avoir découvert le fin mot de l'histoire dans un midrash qui a longtemps échappé à l'attention des chercheurs. Si tu veux bien te donner la peine d'attendre quelques mois, un article très détaillé sera bientôt publié sur le sujet.
Ca, ça m'intéresse énormément. Je n'ai rien trouvé au sujet d'un four dans le Midrash Rabbah sur la Genèse et Noé.
Je veux bien que tu me tiennes au courant quand l'article sortira.
Oui, c'est vrai. Mais il y a eu une rupture entre ceux qui produisirent le Coran et ceux qui eurent la charge de l'interpréter, d'où les exégèses farfelues et contradictoires relatives à ce verset.
C'est exactement ce que j'essaie d'expliquer depuis le début de cette discussion.
Sauf que pareille rupture n'est pas bien compatible avec le narratif de la Tradition islamique, car le Coran y est réputé "muttawatir" / notoire, comme quelques hadiths, c'est-à-dire tellement connu qu'il ne peut pas y avoir eu rupture de transmission.
A quel moment dans l'histoire de l'islam racontée par la Tradition aurait-il pu y avoir une rupture telle qu'on n'ait plus su expliquer correctement le Coran après ?
Auteur : Seleucide
Date : 15 août24, 20:27
Message : Anoushirvan a écrit : 13 août24, 03:57Ca, ça m'intéresse énormément. Je n'ai rien trouvé au sujet d'un four dans le Midrash Rabbah sur la Genèse et Noé. Je veux bien que tu me tiennes au courant quand l'article sortira.
Oui, je t'enverrai un message. Je pense que c'est pour la fin d'année.
Anoushirvan a écrit : 13 août24, 03:57C'est exactement ce que j'essaie d'expliquer depuis le début de cette discussion. Sauf que pareille rupture n'est pas bien compatible avec le narratif de la Tradition islamique, car le Coran y est réputé "muttawatir" / notoire, comme quelques hadiths, c'est-à-dire tellement connu qu'il ne peut pas y avoir eu rupture de transmission.
A quel moment dans l'histoire de l'islam racontée par la Tradition aurait-il pu y avoir une rupture telle qu'on n'ait plus su expliquer correctement le Coran après ?
Il faudrait faire l'histoire de la notion de tawâtur. Beaucoup de musulmans croient au tawâtur du Coran, alors que, pour plusieurs raisons, cela me semble invraisemblable. Quoi qu'il en soit, je ne m'explique pas cette rupture, c'est justement le problème. As-tu des hypothèses sur le sujet ?
Auteur : Anoushirvan
Date : 16 août24, 04:51
Message : Seleucide a écrit : 15 août24, 20:27
Oui, je t'enverrai un message. Je pense que c'est pour la fin d'année.
Merci !
Il faudrait faire l'histoire de la notion de tawâtur. Beaucoup de musulmans croient au tawâtur du Coran, alors que, pour plusieurs raisons, cela me semble invraisemblable. Quoi qu'il en soit, je ne m'explique pas cette rupture, c'est justement le problème. As-tu des hypothèses sur le sujet ?
J'ai bien une hypothèse, qui me satisfait amplement sur le plan de la curiosité personnelle, mais qui risque d'être un peu difficile à défendre sur le plan académique.
Tout d'abord, selon l'islam,
* le Coran est la clé de voûte de cette religion, qui s'est achevé à la mort de Mahomet en 632.
* Il sanctifie les faits et gestes du Prophète (la Sunna).
* Il constitue le livre de doctrine de ses successeurs, qui ont pris le titre de calife.
Et à peu près aucune des théories académiques que j'ai pu consulter sur le sujet, y compris parmi les plus révisionnistes comme celle de Gallez ou d'autres, ne remet substantiellement en cause cette idée que le Coran, soit sous la forme actuelle, soit sous une éventuelle forme originellement plus primitive, demeure le livre fondateur de l'islam et livre de doctrine du pouvoir arabe depuis les conquêtes arabes du 7e siècle.
Éventuellement entre le moment où le Coran, ou un proto-Coran est écrit, et le moment où l'islam prend une forme achevée ressemblant à celle d'aujourd'hui, il a pu s'écouler un temps plus ou moins long.
C'est cette hypothèse, souvent non explicite, que je questionne ainsi :
Le Coran n'a pas été écrit
pour un pouvoir arabe, comme Mahomet ou les califes dit "rashidoun", mais
contre.
Il n'était pas le livre fondateur de l'islam, du moins pas dans le sens évoqué plus haut.
J'admets que c'est sans doute assez difficile à accepter, surtout si ça revient à envisager que des personnages aussi emblématiques comme Abu Bakr ou Omar aient pu être la cible de l'auteur ou des auteurs du Coran, sans parler d'un éventuel Mahomet ôté de sa dimension coranique.
C'était initialement un texte d'opposants et il est resté très longtemps, au moins jusqu'à la fin du 7e siècle, un texte utilisé par divers groupes d'opposants.
Il n'a été intégré que tardivement comme livre de doctrine du pouvoir, vraisemblablement sous le règne d'Abd al-Malik, bien après que son auteur ou ses auteurs soient décédés, et alors que les raisons qui ont poussé à son écriture avaient été oubliées.
Les raisons qui ont pu pousser le calife omeyyade Abd al-Malik à faire une place au Coran dans la doctrine religieuse du pouvoir tenaient assez certainement dans une sorte de tentative de "neutraliser" sa puissance contestataire, alors que le calife faisait face à différentes rebellions (kharijites, Ibn Zubayr, ...) qui s'en prévalaient.
Peut-être une première tentative de "neutralisation" a pu avoir lieu sous le règne d'Othman, lui aussi faisant face à une "fitna", d'où peut-être le fait que la Tradition lui ait attribué le rôle de créer une première recension, mais j'ai quelques doutes.
Les raisons qui ont poussé des opposants à l'écrire au début du 7e siècle n'étaient plus nécessairement les mêmes que celles qui ont poussé d'autres opposants à s'en prévaloir plus tard.
Dans le cadre de cette hypothèse, la rupture d'interprétation s'explique à mon avis plus facilement : le texte se diffuse dans la population sans qu'il y ait de véritable contrôle sur son interprétation, sans qu'il ait de transmission d'exégèse comme ce sera le cas plus tard ; chacun se l'approprie un peu à sa guise.
A partir du 8e siècle, on voit les juristes et théologiens musulmans essayer tant bien que mal de faire une place au Coran au côté des autres traditions et sunnas qui s'étaient développées en parallèle (cf. J. Schacht, Origin of the Muhammadan Jurisprudence).
La raison pour laquelle je me suis intéressé au midrash, c'est que pour décoder ce qui fait du Coran un texte d'opposants, et plus particulièrement un texte d'opposants à la fondation d'un royaume arabe aux environs de 620 J.C., il faut justement comprendre la pensée juive antique, qu'on trouve exposée entre autres dans le midrash, le Talmud, les apocryphes judéo-chrétiens, etc..
Par exemple, pour bien comprendre ce que signifient ces versets 2.30 à 2.33, il faut comprendre la pensée juive antique, comme qu'est-ce que veut dire donner un "nom" aux choses ? Que signifie la "terre" ? Etc.
Voilà, je ne vais pas développer plus ici dans ce post, sinon j'en aurais pour des pages d'explication.
Auteur : Seleucide
Date : 16 août24, 09:43
Message : Anoushirvan a écrit : 16 août24, 04:51J'ai bien une hypothèse, qui me satisfait amplement sur le plan de la curiosité personnelle, mais qui risque d'être un peu difficile à défendre sur le plan académique.
Si ta thèse est argumentée, elle est parfaitement recevable sur le plan académique. Mais il faut qu'elle soit argumentée de manière convaincante, sinon, tu passeras pour un hurluberlu, un amateur ou un polémiste.
Anoushirvan a écrit : 16 août24, 04:51Le Coran n'a pas été écrit
pour un pouvoir arabe, comme Mahomet ou les califes dit "rashidoun", mais
contre. Il n'était pas le livre fondateur de l'islam, du moins pas dans le sens évoqué plus haut. J'admets que c'est sans doute assez difficile à accepter, surtout si ça revient à envisager que des personnages aussi emblématiques comme Abu Bakr ou Omar aient pu être la cible de l'auteur ou des auteurs du Coran, sans parler d'un éventuel Mahomet ôté de sa dimension coranique. C'était initialement un texte d'opposants et il est resté très longtemps, au moins jusqu'à la fin du 7e siècle, un texte utilisé par divers groupes d'opposants. Il n'a été intégré que tardivement comme livre de doctrine du pouvoir, vraisemblablement sous le règne d'Abd al-Malik, bien après que son auteur ou ses auteurs soient décédés, et alors que les raisons qui ont poussé à son écriture avaient été oubliées.
Ceci est donc ta thèse. D'où est-ce qu'elle vient et sur quoi elle se base ?
Anoushirvan a écrit : 16 août24, 04:51La raison pour laquelle je me suis intéressé au midrash, c'est que pour décoder ce qui fait du Coran un texte d'opposants, et plus particulièrement un texte d'opposants à la fondation d'un royaume arabe aux environs de 620 J.C., il faut justement comprendre la pensée juive antique, qu'on trouve exposée entre autres dans le midrash, le Talmud, les apocryphes judéo-chrétiens, etc.. Par exemple, pour bien comprendre ce que signifient ces versets 2.30 à 2.33, il faut comprendre la pensée juive antique, comme qu'est-ce que veut dire donner un "nom" aux choses ? Que signifie la "terre" ? Etc.
Explique donc ton point de vue !
Auteur : Anoushirvan
Date : 30 août24, 09:25
Message : Seleucide a écrit : 16 août24, 09:43
Si ta thèse est argumentée, elle est parfaitement recevable sur le plan académique. Mais il faut qu'elle soit argumentée de manière convaincante, sinon, tu passeras pour un hurluberlu, un amateur ou un polémiste.
Je pense que c'est un peu plus complexe qu'un problème d'argumentation.
Comme dans tout domaine scientifique et académique, il y a un consensus qui s'est établi sur l'état de l'art des connaissances du domaine, à partir des matériaux existants (documents, découvertes archéologiques, etc.) et des théories qui sont débattues.
Je ne dispose pas de matériau nouveau, je propose uniquement une interprétation différente de matériaux existants.
Ce genre de démarche n'est en général recevable au plan scientifique et académique que si ça permet de résoudre un problème considéré jusque là comme non résolu.
Donc à voir si ce que cette thèse adresse est bien considéré comme un problème académique non résolu à l'heure actuelle.
Ceci est donc ta thèse. D'où est-ce qu'elle vient et sur quoi elle se base ?
Explique donc ton point de vue !
Ok, mais désolé ça va être un peu long.
Avant d'en venir aux raisons "techniques" qui me poussent à avancer cette thèse, je voudrais expliquer mon cheminement intellectuel personnel.
J'étais musulman, tendance soufie, jusqu'à il y a une douzaine d'années.
Puis j'ai abandonné l'islam pour des raisons personnelles sur lesquelles je ne m'étendrai pas, tout en gardant une foi monothéiste. Par la suite, je suis devenu complètement athée.
Après les attentats de Paris de 2015 au cours desquels une de mes collègues a été tuée, j'ai souhaité comprendre comment l'origine et l'histoire du Coran, afin de comprendre si ce texte avait vraiment été écrit au départ pour commander ce genre d'acte, puisque ceux qui les commettent se justifient souvent à partir de lui.
Je savais déjà qu'il existait des théories quant à de possibles interpolations ou modifications tardives du Coran, certaines avancées à partir de la Tradition islamique, d'autres à partir d'hypothèses sur une origine syriaque du Coran, etc. Je voulais connaître l'état des connaissances dans ce domaine.
Je suis tombé assez vite sur le coranisme.
Le coranisme est un mouvement religieux, assez hétéroclite au demeurant, qui rejette l'utilisation des hadiths, et de la sunna en général, dans l'interprétation du Coran.
Le coranisme justifie cette approche par divers versets coraniques affirmant que le Coran est complet et détaillé, et qu'il n'y a donc pas de hadith à utiliser pour comprendre le Coran.
De manière générale, l'approche coraniste de l'exégèse du Coran consiste à dire que le Coran doit se comprendre par le Coran seul : pour comprendre un verset difficile, on utilise d'autres versets, que ce soit pour déterminer le sens d'un mot, ou pour établir une analogie.
C'est une approche que les coranistes appellent assez souvent du mot coranique "tartil".
Il faut noter que la distinction classique sourate mecquoise / sourate médinoise n'y existe pas en général dans le coranisme, pas plus que les "circonstances de la Révélation" (asbab an-nouzoul).
En procédant ainsi, de nouvelles significations possibles du Coran se dévoilent, parfois très différentes de celle qu'en donne la Tradition islamique.
Certaines voient même dans le Coran une charge véhémente contre des élites politico-religieuses, comme ici, celle de Dukhani
https://nawaat.org/2016/02/06/ibadat-el ... -le-coran/.
Une interprétation qui n'est toutefois sous doute pas étrangère à la propre problématique de son auteur en Tunisie en 2016, à savoir la tentative des Frères Musulmans d'établir un pouvoir religieux dans ce pays.
Le coranisme m'a mis le doigt sur un problème que j'avais remarqué dès ma jeunesse, et je pense, remarqué aussi par beaucoup de musulmans, à savoir le sentiment que le Coran en général ne correspond pas très bien à la pratique de leur propre religion.
Par exemple, le jeûne du Ramadan tel qu'il est décrit dans le Coran ne ressemble pas vraiment au jeûne du Ramadan pratiqué en Islam.
Le coranisme m'a semblé suffisamment pertinent pour me compter parmi ses adeptes pendant une certaine période. Je ne l'ai quitté il y a sept ans que pour l'athéisme définitif.
En essayant de comprendre la relation entre le Coran et christianisme et judaïsme, et de comprendre la pensée judaïque antique, je suis tombé sur le midrash.
Le midrash est un enseignement judaïque de la volonté divine dans lequel on crée un texte à partir d'autres textes, en utilisant des jeux de mots, des allégories, de métaphores, des allitérations qui renvoient à une double entente ("que celui qui a des oreilles entende").
Ce procédé m'a fait penser au "tartil" des coranistes.
En fait, sans le savoir, Dukhani que j'ai cité plus haut lisait le Coran selon le mode du midrash. Je lui ai d'ailleurs fait la remarque en commentaire d'un de ses textes.
Le problème du coranisme est le même que celui qui nous a amené dans cette discussion : si ce genre d'interprétation est correcte, en particulier celle du type de Dukhani, comme se fait-il qu'elle ait été occultée et qu'on lui ait adjoint les hadiths et la Sunna par la suite ?
La réponse théologique de nombreux coranistes est d'y voir un complot orchestré par Satan contre le Coran. Un tel complot est d'ailleurs mentionné dans le Coran lui-même (verset 22.52).
Mais à moi, cette réponse ne me convient pas, n'étant pas adepte des théories du complot et des conspirations.
C'est à partir de là que je développe une réflexion de nature plus "académique".
Le milieu au sein duquel le Coran a été écrit n'était certainement pas polythéiste tel que le raconte la Tradition musulmane.
Les différents travaux de Christian Julien Robin sur l'Arabie à la veille de l'Islam montre que le polythéisme n'y était plus que résiduel si toutefois il existait encore.
Gerald Hawting, dans Ideas of Idolatry, montre que, si on ne disposait pas de la Tradition musulmane, on ne lirait pas le Coran comme un texte s'adressant à des polythéistes, mais comme un texte polémique utilisant l'accusation classique d’idolâtrie envers des adversaires religieux pratiquant déjà un monothéisme judéo-chrétien.
Gerald Hawting n'identifie pas formellement ce qu'était ce monothéisme judéo-chrétien que devaient pratiquer les adversaires de l'auteur du Coran, mais avance qu'ils croyaient sans doute au pouvoir des anges et d'autres êtres intermédiaires, comme les jinns, ainsi que dans la sorcellerie.
Or ce type de croyance au pouvoir des anges, des jinns, etc, existe en Islam sans que ce soit considéré comme du polythéisme, puisque de toute façon, le Coran mentionne leur existence.
Bien que foncièrement mal vue parce que considérée à la limite du polythéisme, la sorcellerie se pratique aussi chez en terre musulmane sans que ceux qui s'y adonnent soient formellement déclarés apostats.
Comme j'ai expliqué dans un message plus haut, deux parties opposées en conflit pourraient parfaitement revendiquer chacune la qualité de "croyante".
En fait, et malgré des réticences comme celles exprimées ici
https://www.academia.edu/42788512/Quest ... arly_Islam, je pense qu'il est assez clair que le Coran s'adressait à des croyants juifs ou judéo-chrétiens principalement gnostiques.
Le verset 5.116 fait allusion à une Trinité faite du Père, de la Mère et du Fils. Ce genre de trinité ne se trouve pas dans le christianisme trinitaire mais dans le gnosticisme, et en particulier dans le l'Apocryphe de Jean :
http://www.gnosis.org/naghamm/apocjn-davies.html
Plus important, le verset 2.3 s'adresse aux gens qui croient dans l'"invisible", al-ghayb.
Le gnosticisme n'est pas une croyance unique, mais une famille de croyances assez diverses, certaines plutôt juives, d'autres plutôt judéo-chrétiennes, d'autres plutôt syncrétiques, mais dont on peut dire que le point commun est la croyance dans une doctrine où le salut est assuré par la connaissance du monde invisible divin.
Le gnosticisme s'accorde pour dire que régulièrement dans l'histoire de l'humanité, des messagers, angéliques ou humains, sont suscités par le divin pour stimuler les âmes, les éveiller, et leur faire accéder à la connaissance de l'invisible, et donc au salut.
Les textes gnostiques mentionnent assez systématiquement des anges, par exemple Metatron, qui viennent révéler à leurs auteurs un savoir caché.
Cette thématique des messagers qui reviennent à différentes époques n'existe pas dans la tradition biblique classique, juive ou chrétienne : il y a certes des patriarches et des prophètes, mais rien qui ressemble à un cycle comme il apparaît dans le Coran.
Or on retrouve cette idée de cycles de messagers dans différents courants gnostiques, par exemple le manichéisme.
A noter que le mot "umma" dans le Coran ne signifie pas seulement communauté mais aussi ère ou grande époque (ex verset 11.8).
Le mot al-ghayb revient fréquemment dans le Coran, mais pour autant, le Coran dénie toute forme de salut à travers la connaissance de l'invisible. Voyons cela.
La péricope coranique constituée des versets 2.30 à 2.33 met en concurrence les anges, qui appartiennent donc au monde divin invisible, et Adam, l'archétype des messagers humains, dans l'accès au salut : le "nom" a une signification biblique particulière qui est de faire accéder à une sorte de vie après la mort grâce au nom porté par les héritiers (voir
https://biblehub.com/hebrew/8034.htm).
On ne trouve pas cette histoire ainsi racontée dans la Genèse.
Mais on la trouve dans le Midrash Rabbah sur la Genèse.
Cependant, pourquoi le Coran irait-il convoquer un midrash plutôt que la Genèse elle-même ?
Un rabbin du 19e siècle, Abraham Geiger, avait déjà remarqué les nombreux emprunts faits dans le Coran au Talmud ou Midrash, sans être capable de donner une explication pertinente (
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/ ... -_1898.pdf)
Je vois deux raisons au fait que le Coran raconte l'histoire de la création d'Adam de cette façon plutôt qu'à la manière de la Genèse :
* la première est reliée aux thèses gnostiques : dans la péricope coranique, les anges qui vivent pourtant dans la proximité divine se révèlent incapables de faire accéder la "terre" au salut, seul un messager mandaté par Dieu, ici Adam, le peut.
Le prédicateur coranique rejette la thèse gnostique que la connaissance de la réalité divine peut faire accéder au salut.
* la deuxième raison tient à cette question : pourquoi ça pose problème au prédicateur coranique (de la sourate 2) que des gens croient que le salut puisse être obtenu par la connaissance du divin ?
Est-ce seulement parce qu'il n'aime pas cette idée et voudrait empêcher les autres d'y croire, ou bien y a-t-il un enjeu autrement plus important derrière ?
Ceci nous amène à la thèse que je cherche à défendre.
Le verset 2.30 dit que Dieu veut placer sur la "terre" un "khalif", et que les anges se récrient en disant : s'agit-il de placer quelqu'un qui va répandre la corruption ("fassada", mot arabe qui revient constamment dans le Coran) sur la terre ?
Le mot "khalif" est porteur d'un certain nombre de sous-entendus.
Tout d'abord, pour couper court, je ne crois pas qu'il désigne ici le calife arabe, par exemple omeyyade, dans une charge instituée. Ce sens viendra plus tard.
Khalif veut dire successeur. Donc Dieu, dixit le verset 2.30 veut placer sur la terre un successeur.
Mais succéder à quoi ou à qui précisément ? A Dieu lui-même, Adam étant supposé être le premier homme sur terre ?
Il y a en effet des interprétations mystiques de ce genre, en particulier dans le soufisme.
Mais je pense que ça signifie autre chose, et là encore, il faut se tourner vers la pensée judaïque antique pour comprendre.
Ici, je n'ai pas de référence de textes bibliques ou midrashiques à proposer directement.
A la place, j'emprunte le concept qui va suivre aux ouvrages de Maurice Mergui :
* Un étranger sur le toit, les sources midrashiques des Evangiles
* Comprendre les origines du christianisme, de l'eschatologie juive au midrash chrétien
Ainsi qu'au site web qui reprend certains des passages de ces deux ouvrages sus-cités :
https://www.lechampdumidrash.net/
Khalif dans le contexte du verset 2.30 désigne les héritiers de la terre (concept qui revient ailleurs dans le Coran), ou encore les héritiers de la promesse, c'est la même chose.
La promesse en question est celle au sujet de la terre promise.
Au sens littéral, la terre sainte conquise par Josué, mais l'expression doit se lire au sens eschatologique comme une prophétie perpétuellement à l'inaccompli jusqu'à ce que la fin des temps advienne.
Dans une perspective eschatologique, la terre désigne, non pas le globe terrestre, si tant est qu'on pensait que la Terre était ronde, mais l'ensemble des nations.
Hériter de la terre signifie porter le salut à la fin des temps pour l'ensemble des nations.
L'expression "fin des temps" est à lire au sens messianique : c'est la venue du Messie, la fin de l'Exil pour le peuple d'Israël, la restauration du Temple, une Loi renouvelée et allégée, l'entrée des nations (des païens) dans l'Alliance avec Dieu, etc.
Dans le contexte des divisions internes au judéo-christianisme ancien, le débat était de savoir quelle obédience serait légitime à hériter de la terre lorsque la fin des temps adviendra, et possiblement de laquelle sortira le Messie.
L'histoire d'Adam dans le Coran, dans la péricope 2.30-2.33 a beau être une histoire de création, il faut la lire au sens eschatologique, au sujet de la promesse qui doit s'accomplir, qui va s'accomplir, à la fin des temps.
A travers cette histoire, le prédicateur de la sourate 2 veut signifier les choses suivantes :
* ne peuvent être les héritiers de la terre et de la promesse, et apporter le salut aux nations, ceux qui "sèment la corruption" ("fassada") sur la terre
* la connaissance intime du divin n'est d'aucune utilité pour en vue du salut, surtout quand elle est revendiquée par ceux qui "sèment la corruption" sur la terre
* seuls les messagers envoyés par Dieu peuvent faire accéder l'humanité au salut.
L'emploi du verbe "fassada" est extrêmement fort en réalité : il est utilisé par exemple pour désigner le comportement de Pharaon (versets 7.103 et 28.4), qui égorge les fils et viole les femmes.
Au verset 7.85, il désigne le fait de tricher sur les poids et mesures.
Dans la sourate 2, verset 2.205, il désigne le comportement de celui qui saccage culture et bétail.
Au verset 2.220, il désigne le fait de causer du tort aux orphelins.
Le verbe fassada ne désigne pas dans le Coran un refus de croire en un dieu unique, car dans le contexte, ce n'est pas l'enjeu.
Il désigne un comportement contraire à l'éthique telle que Dieu la voudrait, selon le prédicateur, probablement à défaut de loi applicable, ou une situation d'oppression tyrannique.
Avant d'arriver au verset 2.30, le mot "fassada" ou ses dérivés est déjà employé aux versets 2.11, 2.12, 2.27 pour dénoncer le comportement de ceux qui sont la cible du prédicateur.
En particulier, le verset 2.11 parlent de ceux qui sèment la corruption sur la terre tout en se présentant comme "muslihun".
La plupart des tafsirs traditionnels (ex. ici
https://quranx.com/Tafsirs/2.11) semblent avoir du mal à expliquer précisément à qui le reproche est fait (les "hypocrites" ?) et pourquoi. En particulier, le mot "muslihun" (réformateur ?) leur semble assez obscur dans ce contexte.
Aucun bien sûr ne fait le lien avec la péricope 2.30-2.33.
Dans la sourate 7, intervient deux fois cette idée, aux versets 7.56 et 7.85 (ici à propos de Madyan et Chouaïb) : ne semez pas la corruption sur la terre après qu'elle a été "réformée".
Là encore, il conviendrait de se tourner vers la pensée juive ancienne pour comprendre de quoi il s'agit.
Lorsqu'on est à la fin des temps, le Messie doit venir au comble de l'épreuve et des tribulation, et parmi ses prérogatives, il y a celle de renouveler et alléger la Loi et la condition humaine.
Il y a d'ailleurs dans la Tradition islamique un hadith qui mentionne que lorsque Mahomet est monté au ciel pour discuter avec Dieu, Dieu lui a prescrit 50 prières quotidiennes pour les musulmans. Mahomet, en redescendant a croisé Moïse au ciel, qui lui a dit que c'était trop et de négocier avec Dieu une diminution du nombre.
Ainsi Mahomet serait parvenu à négocier 5 prières quotidiennes au lieu de 50.
Ce hadith suit très bien le schéma de l'allègement de la Loi cher à la pensée juive antique.
(Au passage, certaines traditions juives envisagent la possibilité que plusieurs Messies surviennent à différents moments de l'histoire).
Pour en revenir aux versets 2.11 et suivants, ainsi qu'à la péricope 2.30-2.33, nous sommes dans une situation historique et politique qui, qu'elle soit perçue par le prédicateur, ou telle que le prédicateur rapporte la perception de ses adversaires (c'est-à-dire ceux dont il rapporte qu'ils se prétendent "muslihun"), appelle à un changement digne des temps messianiques.
Ceux à qui le prédicateur s'oppose sont en train de mettre en œuvre un nouveau système politico-religieux (ça se dit "din" en arabe coranique), mais ce système, le prédicateur le dénonce comme tyrannique.
A ce stade, il convient de noter un autre aspect du gnosticisme exposé ici :
http://www.gnosis.org/gnintro.htm (attention, cette page expose plutôt une vision modernisée du gnosticisme, il serait préférable de se référer aux textes anciens. Je la cite par facilité).
Le gnosticisme en général méprise les systèmes de règles de conduite, c'est-à-dire les lois, au motif que sont des instruments d'asservissement des puissances maléfiques.
Le gnosticisme préfère une éthique fondée sur l'illumination de l'âme.
Il se trouve que c'est un point fondamental sur lequel les traditions gnostiques juives ou judéo-chrétiennes sont susceptibles de se démarquer des traditions juives plus classiques : dans la Bible, le salut passe par la Loi, c'est-à-dire un système de lois donné par Dieu.
Une éthique fondée sur l'illumination de l'âme est très certainement ce que le Coran appelle avec mépris à plusieurs reprises "suivre les passions" (atba'a al-hawa).
On tient certainement ici le point de discorde fondamental entre le prédicateur coranique et ses adversaires : le prédicateur rejette le salut gnostique par la connaissance du divin parce que cette conception, telle que mise en œuvre par les adversaires du prédicateur, ne les incite pas à développer un système de lois conforme à l'éthique que Dieu voudrait, et par conséquent, conduit à la tyrannie.
Après la péricope sur la création d'Adam et le péché originel (que je n'ai pas expliqué), on trouve une exhortation aux "fils d'Israël", puis un rappel de l'histoire de Pharaon et de Moïse.
A ce propos, il ne faut pas comprendre dans l'expression "fils d'Israël" les juifs en général, mais la société à laquelle appartenait le prédicateur et ses adversaires. Je reviendrai après là-dessus.
Moïse, faut-il le rappeler, fut le "Législateur des Hébreux", selon une formule empruntée à Flavius Josèphe.
Son souvenir est convoqué ici, non pas pour appeler les juifs à suivre Mahomet comme le prétend la Tradition islamique, mais parce que dans la polémique sur la conception du salut que j'ai exposée ci-dessus, le prédicateur rappelle que quand on se désigne comme "fils d'Israël", la Loi doit faire partie de l'identité.
Le prédicateur rappelle ainsi opportunément aux verset 2.44-2.45 que réciter la Torah, le "Livre", pendant la prière, implique aussi de suivre la Loi divine.
Le verset 2.53 indique que furent donnés à Moïse la Torah (le "Livre"), et al-"Furqan".
"Furqan" est un mot particulièrement compliqué dans le Coran, et son sens arabe de "critère" ou "discernement" est certainement erroné.
Fred Donner (voir
https://www.academia.edu/1013511/Quranic_Furqan_2007_) a théorisé que le mot "Furqan" pouvait avoir deux sens possibles :
* l'un assez classique venu du syriaque "purqana", signifiant la rédemption
* l'autre, théorisé par Donner, pourrait résulter d'une confusion graphique d'écriture avec un autre mot syriaque, puqdana, signifiant "commandement".
Le verset 2.53 rappellerait donc, selon Donner, qu'à Moïse furent donnés la Torah et les commandements, c'est-à-dire la Loi.
Le prédicateur rappelle également à travers l'histoire de Moïse combien sa mission de délivrer la Loi au peuple d'Israël fût parsemée d'embûches dues à son propre peuple.
Ainsi, les versets 2.51 et 2.54 rappellent la faute biblique du veau d'or pendant que Moïse était auprès de Dieu pour recueillir les commandements.
Ici, le mot "veau" dans le Coran fait appel à un procédé typique du midrash qui est la double-entente.
Veau dans le Coran se dit ʿij'l (عِجْل), mais le mot est en assonance avec le verbe ajila (عَجِلَ), le nom ʿajal (عَجَل), l'adjectif ʿajūl (عَجُول), de manière général les mots formés sur la racine ʿayn jīm lām (ع ج ل) et dont le champ lexical recouvre celui de la hâte et de l'impatience.
C'est-à-dire que le prédicateur, à travers le mot ʿij'l (عِجْل) / veau, veut qu'on entende la notion d'impatience et d'immédiateté. C'est ce qu'on appelle la double-entente, et c'est typique du midrash. C'est aussi un procédé qu'on retrouve ailleurs dans le Coran.
Cette notion d'impatience et de hâte au sujet d'un récit de portée eschatologique, comme celui de Moïse, renvoie à un débat crucial interne au judaïsme ancien.
Je renvoie ici à l'ouvrage de Maurice Mergui, un Étranger sur le toit qui explique la chose.
Le Messie doit venir, ou revenir, c'est selon, c'est une certitude. Mais la question est celle du moment.
Pour les traditions juives de types pharisiennes, celles qui ont donné le judaïsme rabbinique, le Messie viendra un jour, mais pas tout de suite.
Pour d'autres traditions juives, qui ont donné par exemple le christianisme, le moment, c'est possiblement maintenant.
Il semble assez clair que le Coran donne en général un témoignage d'une pratique du judaïsme dans la société du prédicateur qui n'était pas celle du judaïsme rabbinique.
Ce que suggère cette double-entente de l'histoire du veau rappelée dans le Coran, c'est que le prédicateur reproche à ses adversaires de décréter l'avènement d'une ère messianique de manière prématurée, alors que les commandements n'ont pas encore été donnés.
Par ailleurs, comme je l'ai dit plus haut, la tradition juive veut que le Messie advienne au comble de l'épreuve.
Certains mouvements politico-religieux, tant passés qu'actuels, sont tentés de donner un "coup de pouce" pour hâter la venue du Messie en semant le chaos (au passage, une autre traduction possible du verbe "fassada").
Le prédicateur reproche donc à ses adversaires de semer le chaos (ou la corruption) pour décréter prématurément l'entrée dans une ère messianique, alors que la Loi n'a pas été renouvelée de manière adéquate, le tout avec une conception du salut fondé sur la connaissance du divin qui n'est, selon lui, d'aucune utilité.
Le verset 2.55 rappelle un épisode biblique où les Israélites sont foudroyés après avoir vu Dieu. Dans le contexte du Coran, avec ce que j'ai expliqué précédemment, il semble assez clair que le rappel de cette épisode a été utilisé pour insister davantage sur l'inutilité de la connaissance du divin.
Les versets 2.65 et 2.66 parlent de ceux des fils d'Israël qui ont "transgressé le shabbat" et sont ainsi traités de singes abjects.
Transgresser le shabbat est une expression qui n'a rien à voir avec le fait d'allumer un feu le samedi, ou tout autre activité traditionnellement interdite pendant le shabbat.
Transgresser le shabbat est une expression eschatologique pour décréter que la fin des temps c'est maintenant.
Il est important de noter que ces versets disent : vous avez bien connu ceux qui..., nous les avons punis pour faire un exemple aux autres autour et à ceux qui viennent après.
C'est donc que ces versets doivent probablement faire référence à des événements dans un passé très proche lorsque l'auteur a rendu public la sourate 2 pour la première fois.
Pour ma part, je pense que le Coran dans ces versets 2.65 et 2.66 fait référence aux événements de Jérusalem en 614-617, et en particulier à l'épisode de Néhémie ben Hushiel (
https://en.wikipedia.org/wiki/Nehemiah_ben_Hushiel).
Néhémie ben Hushiel, selon diverses narrations, s'était déclaré Messie, à la faveur de la politique favorable aux Juifs de la part des Perses qui contrôlaient Jérusalem depuis 614.
Il entreprit de reconstruire le Temple.
Des témoignages de chroniqueurs chrétiens racontent les massacres commis contre les chrétiens à Jérusalem par les Juifs et les Perses à ce moment-là.
Puis les Perses changèrent de politique, et favorisèrent les chrétiens.
Néhémie ben Hushiel fut tué ainsi que de nombreux juifs en 617, mettant fin au rêve messianique des Juifs.
Puis Jérusalem fut reprise par les Byzantins.
Si on retient cette interprétation des versets 2.65 et 2.66, alors il convient de lire Sébéos avec une certaine circonspection (
http://remacle.org/bloodwolf/historiens ... _ftnref317)
Sébéos dans sa chronique raconte que les Juifs après avoir été chassés par les Byzantins allèrent trouver en Arabie un marchand du nom de Mahomet, très versé dans la Loi de Moïse, et dont la prédication avait obtenu le ralliement de toute l'Arabie derrière lui, et ce, afin d'obtenir son aide.
Mahomet, d'après Sébéos, les encouragea à reconquérir la Palestine, aidés par une armée arabe.
Pareille narration est passablement contradictoire avec l'interprétation des versets 2.65 et 2.66 que j'ai donnée plus haut.
Sébéos indique que cette histoire lui a été racontée par des prisonniers arabes, ce qui suggère que soit le Mahomet de l'histoire de Sébéos n'est pas l'auteur de la sourate 2, soit à l'époque de Sébéos, une tradition concurrente de la Tradition islamique classique circulait avant de sombrer dans l'oubli.
Les versets 2.58 et 2.59 sont relatifs à l'exploration de la Terre Promise.
Le Coran dit "Entrez dans cette contrée, et mangez-y à l'envie où il vous plaira; mais entrez par la porte", et que les injustes y substituèrent une autre parole.
Il s'agit ici d'une allusion à un épisode de l'Exode appelé parfois "la faute des explorateurs".
Cette faute est narrée dans le Livre des Nombres aux chapitres 13, 14 et suivants, ainsi que dans le Deutéronome, chapitre 2.
Moïse avait envoyé des explorateurs faire une reconnaissance de la Terre Promise, et les explorateur, sauf deux d'entre eux, Josué et Caleb, avaient produit un rapport calomnieux sur elle.
En punition, les Hébreux ont été condamnés à errer dans le désert pendant 40 ans, jusqu'à ce que cette génération s'éteigne.
Pendant leur errance, les Hébreux ont reçu de Dieu et de Moïse la consigne de traverser trois contrées sans y faire la guerre.
Dans la tradition juive ancienne, cet épisode a été ensuite interprété dans un sens eschatologique, voire a peut-être été écrit dès le début en ce sens.
Au sens eschatologique, la faute des explorateurs désigne la réticence de la part d'une partie des Juifs à préparer les conditions de l'entrée dans l'ère messianique promise et le monde à venir.
La curieuse expression employée par le Coran "entrez par la porte" est en fait une expression qu'on retrouve souvent dans la pensée juive ancienne, midrashs, Nouveau Testament, etc., et désigne symboliquement le fait de se convertir, plus spécialement au monde à venir.
Derrière ces versets 2.58 et 2.59, le prédicateur de la sourate 2 reproche donc à ses adversaires de commettre la faute des explorateurs en ne préparant correctement l'entrée dans le monde à venir.
A noter que le verbe sajjada dans le verset 2.58 ne voulait probablement pas dire se prosterner dans le Coran, mais plutôt écouter et obéir (les deux ensembles).
Une fois encore, on peut mesurer un décalage entre le sermon de la sourate 2 et le récit de Sébéos, à se demander s'il s'agit bien de la même personne.
D'ailleurs, le Mahomet de la narration de Sébéos rappelle la promesse inconditionnelle de Dieu que la descendance d'Abraham, tant par Isaac que par Ismaël, héritera de la Terre Promise, alors que le prédicateur de la sourate 2 au verset 2.124 a une vision beaucoup plus restrictive de l'héritage en ce sens que l'engagement de Dieu à l'égard de la descendance d'Abraham ne concerne pas les injustes.
Le verset 2.85 reproche à son auditoire ou ses adversaires de s'entretuer, d'expulser les gens de leurs maisons, d'exiger une rançon de leurs coreligionnaires captifs.
On pourrait continuer avec les autres versets, mais à ce stade, mesurons le décalage entre ce qu'on peut comprendre du Coran par la pensée juive antique et ce qu'en raconte la Tradition islamique.
Dans la Tradition islamique, les Arabes, juifs et polythéistes vaquaient tranquillement en toute insouciance à leurs petites occupations quotidiennes.
La Révélation coranique a alors sonné comme un coup de tonnerre dans un ciel serein.
Elle a déboulé tel un chien dans un jeu de quilles alors qu'ils n'avaient rien demandé, et a tout renversé.
Les Juifs, selon la Tradition islamique qui fait de leurs rabbins avoir une lecture quasi-littérale et foncièrement naïve de la Bible, attendaient un prophète mais rien qui soit relié à une situation critique.
Les versets de la sourate 2 relatifs à Moïse que j'ai cités plus haut devaient les convaincre de l'authenticité de la prophétie de Mahomet, et évidemment, ça n'a pas marché.
Quant aux polythéistes mecquois, ils ne persécutaient les musulmans qu'en réaction à la prédication de Mahomet.
En somme, si la situation a tourné au conflit, ce n'est qu'en raison de la volonté de Mahomet de soumettre l'Arabie à sa prédication à laquelle certaines tribus se sont opposées.
Le Coran décrypté à travers la pensée juive antique donne une toute autre image de la situation de l'Arabie, ou en tout cas du Hedjaz.
En fait, la situation telle que la perçoit le prédicateur de la sourate 2 est catastrophique : des groupes sèment le choas ou exercent une domination tyrannique.
Mais cette situation catastrophique signifie aussi qu'elle était mûre pour un changement d'ère selon les signes (Ayat) caractéristiques du monde à venir décrits dans les enseignements judaïques.
Cette lecture soulève toutefois un grave problème : comment se fait-il que la Tradition islamique ait pu passer ainsi sous silence une situation pareille où régnait le chaos à l'époque de Mahomet ?
C'est incompréhensible, à moins que...?
A moins que ce soit écrit mais que nous n'arrivions pas à le voir.
Parvaneh Pourshariati dans son ouvrage Décline and Fall of the Sasanian Empire, consacré à la chute de l'empire perse a montré de façon très brillante et précise, en croisant les textes racontant la conquête arabe de la Perse avec des sceaux royaux de l'époque que les Arabes auraient commencé à attaquer la Perse beaucoup plus tôt que ce que raconte la Tradition islamique.
Plutôt vers 627 que vers 636.
Or en 627, Mahomet était réputé être en grande difficulté à Médine.
Par ailleurs, la conquête de la Perse est réputée avoir eu lieu après les guerres de Ridda, placées entre 632 et 634.
Il serait logique de respecter cet ordre chronologique en déplaçant le début de la conquête de la Perse de 636 à 627, ce qui placerait les guerres de Ridda par exemple vers 623, voire peut-être avant, vers 620 ou 621.
En effet, face à des Arabes affaiblis par leurs guerres internes, les Perses n'auraient eu certainement aucun mal à reprendre le dessus à ce moment-là.
Les guerres de Ridda sont un épisode passablement obscur de l'histoire de l'islam.
Dans la Tradition islamique, elles ont pour origine la mort de Mahomet et le refus de la plupart des tribus arabes de continuer à payer le tribut, la zakat, à son successeur Abu Bakr.
Elles sont aussi appelées guerres d'apostasie, pourtant il n'y a pas eu de tentative de retour au polythéisme.
La Tradition islamique raconte qu'un certain nombre de "faux" prophètes s'y sont illustrés, dont l'énigmatique Musaylima, qui avait la fâcheuse tendance à plagier la Révélation coranique de Mahomet.
Même au sein de l'islam, les guerres de Ridda continuent à susciter un malaise, car si on lit bien, Abu Bakr a en réalité mené une guerre sans merci contre d'autres croyants, y compris contre des gens réputés fervents musulmans selon la Tradition.
C'est avec grand peine que la Tradition islamique a tenté de justifier théologiquement ces guerres.
S'il y a un épisode historique qui pourrait parfaitement correspondre à la situation catastrophique que décrit le prédicateur de la sourate 2, où des croyants rançonnaient d'autres croyants et leur faisaient la guerre, c'est bien le temps des guerres de Ridda, si on veut bien admettre que le prédicateur n'était pas du côté d'Abu Bakr, ou éventuellement de son prédécesseur, mais était l'un de ses (nombreux) opposants.
Le fait que dans cette histoire, tout le monde se revendiquait "croyant" a certainement rendu compliqué pour les transmetteurs de tradition, des décennies après dans les narrations, de faire correctement la part des choses, si tant est qu'ils aient eu cette intention.
Je fais l'hypothèse qu'il s'est passé la chose suivante.
La guerre entre les deux grands empires, byzantin et perse, a été vu comme un signe que le Messie allait venir ou revenir, car dans la pensée juive antique, l'affrontement des empires est un signe de la fin des temps.
Cette vision a suscité différents prophètes en Arabie se prenant pour le Messie.
L'un d'eux au Hedjaz vers 620 ou 621 a pris le titre énigmatique de MHMD, que je ne m'explique pas très bien mais qui semble avoir une résonance messianique, et a entrepris de fédérer toute l'Arabie sous sa férule, ce qui a engendré les guerres dites de Ridda, qui feront l'objet plus tard d'une réinterprétation par la Tradition islamique.
Un de ses opposants a alors entrepris de rédiger une série de sermons pour dénoncer cette façon de faire.
Ces sermons plus d'autres seront plus tard rassemblés dans l'ouvrage qu'on appelle aujourd'hui "Coran".
Bien longtemps après, la Tradition islamique réussira ce tour de force de condenser les deux personnages opposés en un seul, en jouant sur l'ambiguïté des mots, et le caractère extrêmement elliptique du Coran.
A la mort de MHMD, un successeur lui est désigné, qui prend aussi un nom messianique : Abu Bakr, le père de la Vierge, c'est-à-dire non pas le père d'Aïcha, mais le "père" du Nouvel Israël.
Le successeur d'Abu Bakr, Omar, surnommé Farouq, est probablement celui qui concentre le plus de narrations relatives à des attributs messianiques sur sa personne, en particulier :
* Farouq ne signifie pas comme en arabe celui qui discerne le bien du faux, mais vient du syriaque Paroqa, le Rédempteur
* La Tradition islamique raconte qu'il est entré à Jérusalem à dos d'âne lors de la reddition de la ville, à la manière de Jésus
* Un document d'époque, la Doctrina Jacobi, rapporte, sans le nommer, outre qu'il revendiquait être prophète, qu'il clamait détenir les "clés du paradis". Cette curieuse expression, qu'on attribue aussi à Pierre, disciple de Jésus, fait allusion à un midrash rapporté dans le Talmud : lors de la prise et de la destruction du Temple de Salomon par Nabuchodonosor, un groupe de prêtres lancèrent vers le ciel (donc vers Dieu) les clés du Temple en criant "Reprends tes clés, nous n'en avons pas été dignes".
Ce qui implique que le Messie, envoyé donc par Dieu, reviendra avec les fameuses clés pour rebâtir le Temple.
Je n'ai pas trouvé de narration évidente sur le profil messianique de Othman, qui a peut-être laissé un trop mauvais souvenir pour cela.
Quant à Ali, Mohamed Ali Amir-Moezzi a rapporté des hadiths chiites où il aurait revendiqué être le deuxième Messie, mais je n'ai pas les références.
Quant à Mu'awyia, une chronique chrétienne d'époque (la Chronique Maronite, de mémoire, à confirmer) raconte qu'il se fit acclamer roi par une assemblée de notables arabes sur le Mont Golgotha à Jérusalem, le lieu de la crucifixion du Christ, qu'un tremblement de terre se fit sentir, et qu'il allât se recueillir sur la tombe de Marie.
On aurait voulu faire signifier par là qu'il était le Christ revenu sur terre qu'on n'aurait pas fait plus explicite.
L'événement est totalement passé sous silence dans la Tradition islamique.
Le Mont Golgotha n'a aucune signification coranique étant donné que le Coran nie explicitement la crucifixion du Messie.
On a donc de MHMD à Mu'awyia une succession de chefs arabes dont les narrations rapportent, soit directement, soit indirectement, qu'ils ont prétendu au titre de Messie revenu sur terre.
Or dans la Tradition islamique, ces prétentions messianiques sont gommées, ou font l'objet de réinterprétations diverses.
Deux choses fondamentales de l'histoire des débuts de l'islam ont donc été occultées par la Tradition islamique ultérieure :
* Les prétentions messianiques des premiers dirigeants arabes
* Le Coran comme texte d'opposants à ces mêmes dirigeants.
Avec ce qui précède, la raison pour laquelle le sens du Coran comme texte d'opposition aux premiers dirigeants arabes a été oubliée devient à mon avis facile à comprendre : le prédicateur du Coran n'a jamais eu le pouvoir, il est peut-être tombé lors des guerres de Ridda.
Sa prédication s'est diffusée de manière incontrôlée via les différents canaux d'opposition au cours du 7e siècle, par exemple peut-être les Kharijites, ou Ibn Zubayr.
La raison pour laquelle le Coran a pu continuer à être utilisé par des opposants après alors que ses motivations initiales ont été oubliées est qu'une promesse écrite à l'inaccompli ne peut que perpétuellement vouée à être accomplie : la tyrannie et l'oppression demeurent, donc nous ne sommes pas encore entrés dans le monde d'après, celui de l'ère messianique, nous sommes encore dans l'ère de la fitna, donc il faut lutter (verset 2.191). Voilà en somme le raisonnement qui a sous-tendu la perpétuation de la prédication coranique pendant le 7e siècle.
Pendant ce temps, faute de contrôle, centralisé, le Coran a vraisemblablement subi ajouts et interpolations diverses.
Le cycle s'est cassé lorsque le pouvoir a décidé de s'emparer de cette prédication : c'est ce qu'a fait le calife Abd al-Malik à la fin du 7e siècle, et c'est à ce moment qu'on commence à voir le Coran vraiment entrer dans l'histoire (cf Fred Donner, Qur’ânicization of Religio-Political Discourse in the Umayyad Period
https://journals.openedition.org/remmm/7085?lang=fr)
Je n'ai pas malheureusement pas de références précises à donner sur ce point, juste une hypothèse que je trouve logique : Abd al-Malik a probablement commandé à différents savants religieux de produire une narration racontant l'accomplissement de la promesse, sans trop remettre en cause ses prédécesseurs qui constituaient l'assise de son pouvoir.
Le gommage des traits messianiques trop proéminents qui étaient associés aux premiers dirigeants arabes pourrait venir de là, car on ne peut pas entrer dans l'ère de la promesse accomplie tant que chaque nouveau dirigeant prétend être un Messie.
A la place, ils sont requalifiés en "califes", titre qui a l'avantage d'être compatible avec le Coran.
Je dis qu'il s'agit d'une commande de la part du calife, car le récit de Sébéos semble être une narration concurrente de la narration traditionnelle.
Comme si plusieurs narrations avaient été élaborées en parallèle avant que l'une d'elles, celle que nous connaissons aujourd'hui, s'impose sur les autres.
Que penser des narrations selon lesquelles le Coran aurait été compilé sous les ordres du troisième calife, Othman ?
Il y a plusieurs hypothèses envisageables.
Il se peut que le Coran ait en effet été compilé à l'époque d'Othman, mais que "à l'époque" ait ultérieurement été compris comme "sous les ordres de".
Une autre hypothèse est qu'il aura fallu un peu atténuer la mauvaise réputation d'Othman en lui attribuant un mérite quelconque par charité.
Il y a une autre hypothèse qui m'a été inspirée à partir une remarque fondamentale trouvée chez Alfred-Louis de Prémare, les Fondations de l'Islam.
Si on admet que le mot arabe qur'an vient du syriaque qeryana qui signifiait lectionnaire, alors ce mot en arabe n'a certainement pas été inventé pour désigner le seul Coran dont nous parlons.
Mais qu'au contraire, il y a eu très certainement de multiples lectionnaires différents, et donc autant de corans tous différents les uns des autres.
Quand les collecteurs ultérieurs de traditions ont rassemblé les narrations rapportées au sujet du "coran", comment être sûr que ces narrations parlaient bien du Coran dont nous parlons ?
L'hypothèse que différents textes aient été appelés chacun "coran" et distincts du corpus du Coran pourrait assez bien expliquer certaines narrations pour le moins étranges :
* les chiites qui se plaignent qu'on a enlevé du Coran les passages où Mahomet désigne Ali pour lui succéder. C'est totalement impossible que ce genre de passage ait jamais existé dans le Coran dont nous parlons, mais ça pourrait s'expliquer si le premier Messie arabe MHMD avait un lectionnaire (un "coran") dans lequel il désignait quelqu'un de sa famille comme successeur.
* des hadiths qui mentionnent des passages ou des sourates qui n'existent pas.
* une mystérieuse sourate la Chamelle mentionnée par Jean de Damas, qui ne se trouve pas dans le Coran.
Alors Othman aurait très bien pu ordonner la collecte d'un lectionnaire (un "coran"), qui n'a rien à voir avec le coran "Coran", lectionnaire perdu depuis, ou éventuellement intégré au corpus de hadiths.
Pour déjà complexe qu'il puisse sembler, ce schéma que j'ai exposé dans ce post est sans doute encore trop simpliste.
Le Coran témoigne que le prédicateur a eu à faire face à une dissidence de son propre mouvement.
Ces dissidents sont appelés "munafiqun" dans le Coran.
Munafiq ne voulait pas dire hypocrite au sens de la contradiction entre la pensée et les actes, même si ce sens n'est peut-être pas complètement absent du Coran.
Munafiq désignait ce qui sort, typiquement donc des dissidents. Le mot est relié à d'autres mots de même racine qui signifient dépenses, dans le sens de ce qui sort de la poche.
Le sens est volontiers le même que kharijite (ceux qui sont sortis).
La Tradition n'est pas très claire sur ce que deviennent ces munafiqun, ils semblent rentrer dans le rang et disparaître de l'histoire.
Le Coran n'est pas non plus très clair sur ce qui est reproché à ces dissidents, si ce n'est qu'ils sont surtout dissidents.
Je pense toutefois que ces dissidents ont joué un rôle beaucoup plus grand dans la genèse de l'islam que ce qu'on pense.
La raison en est la suivante. En islam, la shahada, la profession de foi par laquelle on atteste qu'il n'y a de divinité que Dieu, et que MHMD est le messager de Dieu, est le pilier numéro de la foi. C'est en la prononçant qu'on se convertit à l'islam.
Pour autant, elle est totalement absente du Coran. Nulle part dans le Coran il n'est exigé de prononcer ce serment pour adhérer à la prédication du Coran.
Cette absence est tout de même surprenante.
Plus intéressant encore, le seul endroit où un serment similaire est évoqué est au verset 63.1, où le prédicateur s'offusque qu'on prononce ce serment "nous attestons que tu es le messager de Dieu", au motif que Dieu sait bien qu'il est Son messager, et que donc ce serment est une tromperie.
Encore plus intéressant, au verset 63.1, ce sont ces fameux dissidents qui prononcent ce serment.
La shahada n'apparaît mentionnée dans l'histoire qu'à partir du règne d'Abd al-Malik.
Sa ressemblance avec le serment du verset 63.1 indique qu'elle a été colportée au fil du temps par ces dissidents, ou bien un mouvement initié par les dissidents d'origine.
Évidemment, ces dissidents ne se désignaient pas comme dissidents eux-mêmes, mais certainement comme croyants, voire comme musulmans.
Du point de vue des collecteurs ultérieurs de traditions, ils sont donc certainement indiscernables des autres croyants et des autres musulmans. Encore une fois, il a dû leur être compliqué de faire la part des choses quand tout le monde revendique les mêmes qualités.
Bien que le Coran soit passablement évasif sur les raisons de cette dissidence, il semble tout de même, et on retrouve un peu cette idée dans la Tradition, que ces dissidents voulaient se concilier le pouvoir arabe, contre lequel luttait le prédicateur.
C'est-à-dire utiliser l'élan de la prédication coranique pour promouvoir une inflexion politico-religieuse avec le pouvoir arabe.
Avec bien sûr à la clé, d'éventuels avantages en terme politique, financier, etc.
D'où le dépit du prédicateur, qui estime donc se faire rouler par ces dissidents.
Toutefois, en dépit de ses menaces de tout dévoiler de leurs agissements (verset 9.64), il n'en sera rien, à moins que cette partie n'ait pas été transmise.
Il s'agissait peut-être de ne pas totalement se couper d'eux au cas où (voir le verset 57.13 où leur sort auprès de Dieu semble assez ambigu).
Ultérieurement, sous le règne d'Abd al-Malik, ce mouvement initié par la dissidence originelle plusieurs décennies auparavant est nécessairement devenu un maillon essentiel entre le calife et les mouvements se réclamant de la prédication coranique.
Eux seuls auraient été en mesure d'avoir des relais auprès de l'entourage du calife tout en étant capable d'instrumentaliser l'interprétation du Coran dans l'intérêt du calife.
Eux seuls pouvaient concilier l'histoire de MHMD et de ses successeurs avec celle du prédicateur du Coran et de condenser ainsi les deux personnages en un seul, parce que précisément depuis le début, ils étaient dans une démarche de conciliation entre les deux tendances.
Si on fait le bilan :
* des différents arguments qui précèdent, il y en a pour lesquels j'ai pu apporter une démonstration, et d'autres qui me semblent malheureusement indémontrables, en tout cas à partir de ce dont j'ai connaissance.
* le Coran était au départ un texte d'opposants farouchement opposés à la manière dont le pouvoir arabe a fondé un Etat vers 620/621. C'est le décodage par la pensée judaïque antique qui l'indique.
* Le premier dirigeant avait le titre ou le nom de MHMD, ce qui implique que la prédication coranique était dirigée contre MHMD et non pas émanait de lui.
* les guerres de Ridda ont certainement eu lieu beaucoup plus tôt que ce qu'indique la Tradition, et les premières sourates (en particulier la sourate 2) ont vraisemblablement été écrites dans ce contexte.
* la prédication coranique a vraisemblablement continué à se diffuser via des canaux non contrôlés d'opposants aux successeurs de MHMD.
* Ces oppositions récurrentes galvanisées par le Coran ont vraisemblablement motivé le calife Abd al-Malik à la fin du 7e siècle à s'en emparer à son tour pour leur couper l'herbe sous le pied.
* les dissidents (munafiqun) ont vraisemblablement joué un rôle fondamental dans l'intégration du Coran au sein du corpus de traditions des Arabes de plusieurs manières :
-- en restant en lien avec le pouvoir politique en dehors de mouvements d'opposants
-- en réorientant l'interprétation du Coran dans un sens plus favorable au pouvoir politique afin d'en neutraliser le contenu contestataire
-- en produisant des narrations capables de concilier des narrations historiques opposées.
-- bien entendu, ces dissidents ne se désignaient pas eux-mêmes sous ce vocable munafiqun.
Ils n'avaient peut-être même conscience d'être visés ainsi par ce terme.
On tiendrait peut-être là une explication de certaines exégèses du verset 2.11 qui indiquent que ces sont les munafiqun qui étaient visés.
-- ce rôle supposé des dissidents donne une coloration un peu "complotiste" à la thèse que je défends. Toutefois, ces dissidents sont mentionnés dans le Coran. Je ne fais que supposer qu'ils n'ont pas disparu comme par magie.
* ces deux modes de transmission, via des canaux non contrôlés d'opposants, et via des dissidents prêts se concilier le pouvoir, expliquent, je pense, très bien pourquoi le sens d'origine du Coran s'est perdu, et pourquoi on n'est pas capable d'expliquer facilement la présence de certains mots dans le Coran.
Auteur : Yacine
Date : 30 août24, 10:17
Message : Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25
Bien que foncièrement mal vue parce que considérée à la limite du polythéisme, la sorcellerie se pratique aussi chez en terre musulmane sans que ceux qui s'y adonnent soient formellement déclarés apostats.
Juste en passant, cela est faux.
Auteur : Anoushirvan
Date : 30 août24, 18:12
Message : Yacine a écrit : 30 août24, 10:17
Juste en passant, cela est faux.
Faux, c'est-à-dire que ceux qui font de la sorcellerie sont vraiment déclarés apostats ?
Si on va par là, il faudrait déclarer l'ensemble du Maroc et des pays africains musulmans apostats.
Au Maroc, la sorcellerie est tellement pratiquée que je suis tombé par hasard sur une séance de sorcellerie en me baladant sur la plage de Casablanca.
En lisant un bouquin sur l'Afghanistan, à l'autre bout, j'y ai appris qu'on donnait très vite des surnoms aux gens (laqab) pour éviter qu'ils soient la cible des sorciers.
Mais les sorciers n'agissent que parce qu'ils ont des clients.
Auteur : Yacine
Date : 30 août24, 19:53
Message : Il y a aucun doute la dessus, la sorcellerie est peut être le seul méfait qui mène direct à l'apostasie, contrairement à ce que j'ai expliqué pour la cas de la Riba par exemple. D'autant plus qu'elle n'est pratiquée qu'a travers des rituels qui visent à souiller tout ce qui est saint en Islam, comme piétiner le Coran, écrire des versets avec des excréments et des saletés etc. Il faut bien entendre ce que rapporte bon nombre de sorciers repentis.
Tu fais du beau travail de recherche et d'analyse même si on peut être en désaccord sur la majorité de ce qui est dit, mais on ne peut qu'admirer la beauté de la démarche et de l’étalage. Ceci étant, il me semble aussi que il te manque un peu du coté de la théologique islamique, alors que là c'est comme sauter une étape pour une personne ex-musulmane. Mais là aussi je présume d'après votre pseudo que tu es d'origine iranienne, et l'Islam iranien chiite déjà inculque au gens tout sauf un Islam naturel.
Auteur : Anoushirvan
Date : 30 août24, 22:30
Message : Non non, je suis bien d'origine sunnite, je n'ai rien à voir avec le chiisme.
Auteur : Seleucide
Date : 02 sept.24, 00:47
Message : Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25En essayant de comprendre la relation entre le Coran et christianisme et judaïsme, et de comprendre la pensée judaïque antique, je suis tombé sur le midrash. Le midrash est un enseignement judaïque de la volonté divine dans lequel on crée un texte à partir d'autres textes, en utilisant des jeux de mots, des allégories, de métaphores, des allitérations qui renvoient à une double entente ("que celui qui a des oreilles entende"). Ce procédé m'a fait penser au "tartil" des coranistes. En fait, sans le savoir, Dukhani que j'ai cité plus haut lisait le Coran selon le mode du midrash. Je lui ai d'ailleurs fait la remarque en commentaire d'un de ses textes.
Peux-tu donner des exemples précis de procédés midrashiques qui seraient à l'oeuvre dans le Coran ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Le milieu au sein duquel le Coran a été écrit n'était certainement pas polythéiste tel que le raconte la Tradition musulmane. Les différents travaux de Christian Julien Robin sur l'Arabie à la veille de l'Islam montre que le polythéisme n'y était plus que résiduel si toutefois il existait encore. Gerald Hawting, dans Ideas of Idolatry, montre que, si on ne disposait pas de la Tradition musulmane, on ne lirait pas le Coran comme un texte s'adressant à des polythéistes, mais comme un texte polémique utilisant l'accusation classique d’idolâtrie envers des adversaires religieux pratiquant déjà un monothéisme judéo-chrétien. Gerald Hawting n'identifie pas formellement ce qu'était ce monothéisme judéo-chrétien que devaient pratiquer les adversaires de l'auteur du Coran, mais avance qu'ils croyaient sans doute au pouvoir des anges et d'autres êtres intermédiaires, comme les jinns, ainsi que dans la sorcellerie. Or ce type de croyance au pouvoir des anges, des jinns, etc, existe en Islam sans que ce soit considéré comme du polythéisme, puisque de toute façon, le Coran mentionne leur existence.
En ce qui concerne le polythéisme et les idoles, je suis d'accord sur le décalage entre tradition islamique et données coraniques d'une part, données historiques d'autre part. Je retiens surtout de Hawting, d'une part qu'il fallait être prudent avec le caractère polémique de bien des données coraniques, la polémique ayant en effet une propension à déformer et ridiculiser la position de ses adversaires, d'autre part que la qualification d'idolâtre, voire de polythéiste, est un motif récurrent dans les disputes intra-monothéistes. Pour le reste, je n'ai pas été entièrement convaincu par sa lecture du Coran.
Il y a plusieurs hypothèses pour expliquer ce verset. On a effectivement dit qu'il pouvait s'agir d'un reliquat de judéo-christianisme dont les tendances resteraient à définir. D'autres pourtant évoquent une argumentation par l'absurde, précisément dans un contexte polémique, ce qui me semble possible. D'autres enfin considèrent qu'il s'agit d'une erreur du locuteur coranique, ce que j'ai du mal à croire. Au final, on ne sait pas très bien comment comprendre ce verset.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Plus important, le verset 2.3 s'adresse aux gens qui croient dans l'"invisible", al-ghayb. Le gnosticisme n'est pas une croyance unique, mais une famille de croyances assez diverses, certaines plutôt juives, d'autres plutôt judéo-chrétiennes, d'autres plutôt syncrétiques, mais dont on peut dire que le point commun est la croyance dans une doctrine où le salut est assuré par la connaissance du monde invisible divin.
Il me semble que Chabbi a écrit sur le sujet selon le point de vue de l'anthropologie historique.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Le gnosticisme s'accorde pour dire que régulièrement dans l'histoire de l'humanité, des messagers, angéliques ou humains, sont suscités par le divin pour stimuler les âmes, les éveiller, et leur faire accéder à la connaissance de l'invisible, et donc au salut. Les textes gnostiques mentionnent assez systématiquement des anges, par exemple Metatron, qui viennent révéler à leurs auteurs un savoir caché. Cette thématique des messagers qui reviennent à différentes époques n'existe pas dans la tradition biblique classique, juive ou chrétienne : il y a certes des patriarches et des prophètes, mais rien qui ressemble à un cycle comme il apparaît dans le Coran. Or on retrouve cette idée de cycles de messagers dans différents courants gnostiques, par exemple le manichéisme.
Je crois qu'on retrouve aussi cela dans le montanisme.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Je vois deux raisons au fait que le Coran raconte l'histoire de la création d'Adam de cette façon plutôt qu'à la manière de la Genèse : * la première est reliée aux thèses gnostiques : dans la péricope coranique, les anges qui vivent pourtant dans la proximité divine se révèlent incapables de faire accéder la "terre" au salut, seul un messager mandaté par Dieu, ici Adam, le peut. Le prédicateur coranique rejette la thèse gnostique que la connaissance de la réalité divine peut faire accéder au salut.
Est-ce que tu peux argumenter pour justifier cette interprétation ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Khalif veut dire successeur. Donc Dieu, dixit le verset 2.30 veut placer sur la terre un successeur. Mais succéder à quoi ou à qui précisément ? A Dieu lui-même, Adam étant supposé être le premier homme sur terre ? Il y a en effet des interprétations mystiques de ce genre, en particulier dans le soufisme. Mais je pense que ça signifie autre chose, et là encore, il faut se tourner vers la pensée judaïque antique pour comprendre. Khalif dans le contexte du verset 2.30 désigne les héritiers de la terre (concept qui revient ailleurs dans le Coran), ou encore les héritiers de la promesse, c'est la même chose. La promesse en question est celle au sujet de la terre promise. Au sens littéral, la terre sainte conquise par Josué, mais l'expression doit se lire au sens eschatologique comme une prophétie perpétuellement à l'inaccompli jusqu'à ce que la fin des temps advienne. Dans une perspective eschatologique, la terre désigne, non pas le globe terrestre, si tant est qu'on pensait que la Terre était ronde, mais l'ensemble des nations. Hériter de la terre signifie porter le salut à la fin des temps pour l'ensemble des nations. L'expression "fin des temps" est à lire au sens messianique : c'est la venue du Messie, la fin de l'Exil pour le peuple d'Israël, la restauration du Temple, une Loi renouvelée et allégée, l'entrée des nations (des païens) dans l'Alliance avec Dieu, etc. Dans le contexte des divisions internes au judéo-christianisme ancien, le débat était de savoir quelle obédience serait légitime à hériter de la terre lorsque la fin des temps adviendra, et possiblement de laquelle sortira le Messie. L'histoire d'Adam dans le Coran, dans la péricope 2.30-2.33 a beau être une histoire de création, il faut la lire au sens eschatologique, au sujet de la promesse qui doit s'accomplir, qui va s'accomplir, à la fin des temps.
Khalîfa peut aussi signifier représentant, représentant de Dieu sur terre. Reynolds a fait toute une étude sur le sujet en montrant le sous-texte para-biblique de cette histoire (imago Dei, le Christ premier Adam etc). Je ne suis pas loin de penser qu'il faut traduire ainsi.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25A travers cette histoire, le prédicateur de la sourate 2 veut signifier les choses suivantes : * ne peuvent être les héritiers de la terre et de la promesse, et apporter le salut aux nations, ceux qui "sèment la corruption" ("fassada") sur la terre * la connaissance intime du divin n'est d'aucune utilité pour en vue du salut, surtout quand elle est revendiquée par ceux qui "sèment la corruption" sur la terre * seuls les messagers envoyés par Dieu peuvent faire accéder l'humanité au salut.
Je ne suis convaincu, ni par ton premier point, ni par ton second.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Pour en revenir aux versets 2.11 et suivants, ainsi qu'à la péricope 2.30-2.33, nous sommes dans une situation historique et politique qui, qu'elle soit perçue par le prédicateur, ou telle que le prédicateur rapporte la perception de ses adversaires (c'est-à-dire ceux dont il rapporte qu'ils se prétendent "muslihun"), appelle à un changement digne des temps messianiques. Ceux à qui le prédicateur s'oppose sont en train de mettre en œuvre un nouveau système politico-religieux (ça se dit "din" en arabe coranique), mais ce système, le prédicateur le dénonce comme tyrannique. On tient certainement ici le point de discorde fondamental entre le prédicateur coranique et ses adversaires : le prédicateur rejette le salut gnostique par la connaissance du divin parce que cette conception, telle que mise en œuvre par les adversaires du prédicateur, ne les incite pas à développer un système de lois conforme à l'éthique que Dieu voudrait, et par conséquent, conduit à la tyrannie.
Si je comprends bien ta lecture, le prédicateur s'oppose à des groupes messianiques gnostiques. Ils hâtent la venue du messie en provoquant les tribulations par leur violence, et ils prétendent que cela a pour but d'alléger ou de redonner un esprit nouveau à la loi. S'ils réforment, ils réforment la loi ou leur compréhension de la loi, qui mène peut-être à des excès ce que le prédicateur considère être un abandon de la loi qu'il dénonce.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Après la péricope sur la création d'Adam et le péché originel (que je n'ai pas expliqué), on trouve une exhortation aux "fils d'Israël", puis un rappel de l'histoire de Pharaon et de Moïse. A ce propos, il ne faut pas comprendre dans l'expression "fils d'Israël" les juifs en général, mais la société à laquelle appartenait le prédicateur et ses adversaires. Je reviendrai après là-dessus.
Attendons donc que tu reviennes là-dessus.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Moïse, faut-il le rappeler, fut le "Législateur des Hébreux", selon une formule empruntée à Flavius Josèphe. Son souvenir est convoqué ici, non pas pour appeler les juifs à suivre Mahomet comme le prétend la Tradition islamique, mais parce que dans la polémique sur la conception du salut que j'ai exposée ci-dessus, le prédicateur rappelle que quand on se désigne comme "fils d'Israël", la Loi doit faire partie de l'identité. Le prédicateur rappelle ainsi opportunément aux verset 2.44-2.45 que réciter la Torah, le "Livre", pendant la prière, implique aussi de suivre la Loi divine.
L'interprétation est cohérente.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Ainsi, les versets 2.51 et 2.54 rappellent la faute biblique du veau d'or pendant que Moïse était auprès de Dieu pour recueillir les commandements. Ici, le mot "veau" dans le Coran fait appel à un procédé typique du midrash qui est la double-entente. Veau dans le Coran se dit ʿij'l (عِجْل), mais le mot est en assonance avec le verbe ajila (عَجِلَ), le nom ʿajal (عَجَل), l'adjectif ʿajūl (عَجُول), de manière général les mots formés sur la racine ʿayn jīm lām (ع ج ل) et dont le champ lexical recouvre celui de la hâte et de l'impatience. C'est-à-dire que le prédicateur, à travers le mot ʿij'l (عِجْل) / veau, veut qu'on entende la notion d'impatience et d'immédiateté. C'est ce qu'on appelle la double-entente, et c'est typique du midrash. C'est aussi un procédé qu'on retrouve ailleurs dans le Coran.
Ici, je serais un peu plus réservé. Il faudrait que tu puisses argumenter pour montrer qu'il s'agit bel et bien d'un procédé midrashique, et pas d'une interprétation arbitraire sortie d'on ne sait où.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Les versets 2.65 et 2.66 parlent de ceux des fils d'Israël qui ont "transgressé le shabbat" et sont ainsi traités de singes abjects. Transgresser le shabbat est une expression qui n'a rien à voir avec le fait d'allumer un feu le samedi, ou tout autre activité traditionnellement interdite pendant le shabbat. Transgresser le shabbat est une expression eschatologique pour décréter que la fin des temps c'est maintenant.
Et comment es-tu arrivé à cette conclusion ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Pour ma part, je pense que le Coran dans ces versets 2.65 et 2.66 fait référence aux événements de Jérusalem en 614-617, et en particulier à l'épisode de Néhémie ben Hushiel (
https://en.wikipedia.org/wiki/Nehemiah_ben_Hushiel). Néhémie ben Hushiel, selon diverses narrations, s'était déclaré Messie, à la faveur de la politique favorable aux Juifs de la part des Perses qui contrôlaient Jérusalem depuis 614. Il entreprit de reconstruire le Temple. Des témoignages de chroniqueurs chrétiens racontent les massacres commis contre les chrétiens à Jérusalem par les Juifs et les Perses à ce moment-là. Puis les Perses changèrent de politique, et favorisèrent les chrétiens. Néhémie ben Hushiel fut tué ainsi que de nombreux juifs en 617, mettant fin au rêve messianique des Juifs. Puis Jérusalem fut reprise par les Byzantins.
J'ai l'impression que tu surinterprètes beaucoup le texte coranique, tout de même.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Dans la tradition juive ancienne, cet épisode a été ensuite interprété dans un sens eschatologique, voire a peut-être été écrit dès le début en ce sens. Au sens eschatologique, la faute des explorateurs désigne la réticence de la part d'une partie des Juifs à préparer les conditions de l'entrée dans l'ère messianique promise et le monde à venir.
La curieuse expression employée par le Coran "entrez par la porte" est en fait une expression qu'on retrouve souvent dans la pensée juive ancienne, midrashs, Nouveau Testament, etc., et désigne symboliquement le fait de se convertir, plus spécialement au monde à venir.
Derrière ces versets 2.58 et 2.59, le prédicateur de la sourate 2 reproche donc à ses adversaires de commettre la faute des explorateurs en ne préparant correctement l'entrée dans le monde à venir.
Sur la portée eschatologique de ce passage dans le patrimoine rabbinique, tu as des sources peut-être ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Parvaneh Pourshariati dans son ouvrage Décline and Fall of the Sasanian Empire, consacré à la chute de l'empire perse a montré de façon très brillante et précise, en croisant les textes racontant la conquête arabe de la Perse avec des sceaux royaux de l'époque que les Arabes auraient commencé à attaquer la Perse beaucoup plus tôt que ce que raconte la Tradition islamique. Plutôt vers 627 que vers 636. Or en 627, Mahomet était réputé être en grande difficulté à Médine. Par ailleurs, la conquête de la Perse est réputée avoir eu lieu après les guerres de Ridda, placées entre 632 et 634. Il serait logique de respecter cet ordre chronologique en déplaçant le début de la conquête de la Perse de 636 à 627, ce qui placerait les guerres de Ridda par exemple vers 623, voire peut-être avant, vers 620 ou 621. En effet, face à des Arabes affaiblis par leurs guerres internes, les Perses n'auraient eu certainement aucun mal à reprendre le dessus à ce moment-là.
J'ai entendu parler de la thèse de Parvaneh Pourshariati. Je ne sais pas du tout ce qu'elle vaut, il faudrait que je lise les comptes rendus qui en ont été faits.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Je fais l'hypothèse qu'il s'est passé la chose suivante.
La guerre entre les deux grands empires, byzantin et perse, a été vu comme un signe que le Messie allait venir ou revenir, car dans la pensée juive antique, l'affrontement des empires est un signe de la fin des temps.
Cette vision a suscité différents prophètes en Arabie se prenant pour le Messie.
L'un d'eux au Hedjaz vers 620 ou 621 a pris le titre énigmatique de MHMD, que je ne m'explique pas très bien mais qui semble avoir une résonance messianique, et a entrepris de fédérer toute l'Arabie sous sa férule, ce qui a engendré les guerres dites de Ridda, qui feront l'objet plus tard d'une réinterprétation par la Tradition islamique.
Un de ses opposants a alors entrepris de rédiger une série de sermons pour dénoncer cette façon de faire.
Ces sermons plus d'autres seront plus tard rassemblés dans l'ouvrage qu'on appelle aujourd'hui "Coran".
Et qu'en est-il de l'hégire dans ta thèse ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25A la mort de MHMD, un successeur lui est désigné, qui prend aussi un nom messianique : Abu Bakr, le père de la Vierge, c'est-à-dire non pas le père d'Aïcha, mais le "père" du Nouvel Israël.
Là encore, même si je salue l'interprétation ingénieuse, elle me semble quelque peu artificielle. Ne devrait-ce pas être, d'ailleurs, Abû Bikr, père de la Vierge ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25On a donc de MHMD à Mu'awyia une succession de chefs arabes dont les narrations rapportent, soit directement, soit indirectement, qu'ils ont prétendu au titre de Messie revenu sur terre.
Pour Abu Bakr, Uthman, Mu'awiyya, la chose est vraiment douteuse. Qu'en est-il du titre khalîfa dans cette thèse ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Le cycle s'est cassé lorsque le pouvoir a décidé de s'emparer de cette prédication : c'est ce qu'a fait le calife Abd al-Malik à la fin du 7e siècle, et c'est à ce moment qu'on commence à voir le Coran vraiment entrer dans l'histoire (cf Fred Donner, Qur’ânicization of Religio-Political Discourse in the Umayyad Period
https://journals.openedition.org/remmm/7085?lang=fr). Je n'ai pas malheureusement pas de références précises à donner sur ce point, juste une hypothèse que je trouve logique : Abd al-Malik a probablement commandé à différents savants religieux de produire une narration racontant l'accomplissement de la promesse, sans trop remettre en cause ses prédécesseurs qui constituaient l'assise de son pouvoir.
Et nous n'avons aucune trace d'une autre vision de l'histoire ? La tradition arabe, orale, a été entièrement réécrite sans ne laisser aucun souvenir, aucun hiatus ? Je veux bien qu'il y ait eu des reconstructions, mais l'absence de traces, de traditions, de versions de l'histoire concurrente laisse quelque peu pantois. N'est-ce pas donner un peu trop de pouvoir au calife ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Comme si plusieurs narrations avaient été élaborées en parallèle avant que l'une d'elles, celle que nous connaissons aujourd'hui, s'impose sur les autres.
Mais les sources arabes ne rapportent qu'une version ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25Que penser des narrations selon lesquelles le Coran aurait été compilé sous les ordres du troisième calife, Othman ? Il y a plusieurs hypothèses envisageables. Il se peut que le Coran ait en effet été compilé à l'époque d'Othman, mais que "à l'époque" ait ultérieurement été compris comme "sous les ordres de". Une autre hypothèse est qu'il aura fallu un peu atténuer la mauvaise réputation d'Othman en lui attribuant un mérite quelconque par charité. Il y a une autre hypothèse qui m'a été inspirée à partir une remarque fondamentale trouvée chez Alfred-Louis de Prémare, les Fondations de l'Islam. Si on admet que le mot arabe qur'an vient du syriaque qeryana qui signifiait lectionnaire, alors ce mot en arabe n'a certainement pas été inventé pour désigner le seul Coran dont nous parlons. Mais qu'au contraire, il y a eu très certainement de multiples lectionnaires différents, et donc autant de corans tous différents les uns des autres. Quand les collecteurs ultérieurs de traditions ont rassemblé les narrations rapportées au sujet du "coran", comment être sûr que ces narrations parlaient bien du Coran dont nous parlons ?
Quelles traces avons-nous de ces autres lectionnaires ?
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25* les chiites qui se plaignent qu'on a enlevé du Coran les passages où Mahomet désigne Ali pour lui succéder. C'est totalement impossible que ce genre de passage ait jamais existé dans le Coran dont nous parlons, mais ça pourrait s'expliquer si le premier Messie arabe MHMD avait un lectionnaire (un "coran") dans lequel il désignait quelqu'un de sa famille comme successeur. * des hadiths qui mentionnent des passages ou des sourates qui n'existent pas. * une mystérieuse sourate la Chamelle mentionnée par Jean de Damas, qui ne se trouve pas dans le Coran.
Le Coran a une histoire de rédaction à établir, une histoire de production aussi, à la fois orale et écrite, ce qui rend la chose compliquée. Il est possible que des passages aient été supprimées (la tradition islamique évoque elle-même des cas d'abrogation). Pour Jean de Damas, je ne m'explique pas son témoignage : le seul Coran auquel il a pu avoir accès est un Coran établi par la famille omeyyade, donc un Coran similaire au nôtre.
Anoushirvan a écrit : 30 août24, 09:25* Le premier dirigeant avait le titre ou le nom de MHMD, ce qui implique que la prédication coranique était dirigée contre MHMD et non pas émanait de lui.
Comment interprètes-tu les versets coraniques qui évoquent Muhammad ?
Auteur : Yacine
Date : 02 sept.24, 19:36
Message : Seleucide a écrit : 02 sept.24, 00:47
Ne devrait-ce pas être, d'ailleurs, Abû Bikr, père de la Vierge ?
Bah oui
Auteur : Anoushirvan
Date : 02 sept.24, 20:26
Message : Yacine a écrit : 02 sept.24, 19:36Bah oui
Bakr c'est une jeune chamelle déjà assez grande.
J'ai toujours entendu dire que ce surnom lui avait été donné par rapport à Aïcha, sa fille, bien sûr vierge avant son mariage avec Mahomet.
Maintenant, si tu me dis que c'est pas ça l'origine de ce surnom, et que c'est une autre raison, je te crois volontiers parce qu'il y a tellement de récits contradictoires dans la tradition islamique que ce qu'on peut entendre d'un côté peut être contredit par un autre récit d'un autre côté.
Auteur : Yacine
Date : 02 sept.24, 21:10
Message : Anoushirvan a écrit : 02 sept.24, 20:26
J'ai toujours entendu dire que ce surnom lui avait été donné par rapport à Aïcha, sa fille,
Ca je l'ai jamais entendu. Ce que je sais c'est que cela était son surnom depuis toujours, alors que son vrai prénom c'est Abdallah. Dans toutes la Tradition on trouve que AbuBakr, alors que sa fille Aïcha n'est née que bien plus tard.
Auteur : Anoushirvan
Date : 02 sept.24, 21:36
Message : Malheureusement c'est une chose dont j'ai entendu parler à l'époque où j'étais encore musulman et où je ne me souciais pas des sources et de l'origine des informations.
Il est possible que j'ai pu trouver ça dans le Mathnawi de Rumi. Mais si c'est le cas, le livre est beaucoup trop gros pour que je retrouve le passage facilement.
Auteur : Anoushirvan
Date : 13 sept.24, 21:59
Message : Seleucide a écrit : 02 sept.24, 00:47
Peux-tu donner des exemples précis de procédés midrashiques qui seraient à l'oeuvre dans le Coran ?
Peut-être conviendrait-il avant d'expliquer un peu plus le midrash.
Il y a un consensus pour dire que le midrash est une forme d'exégèse de la Bible.
Cependant Paul Mandel, dans Origin and Nature of the Midrash a montré que cette idée était certainement erronée.
Le midrash, selon Mandel, est un enseignement de la Loi et de la volonté divine.
Le midrash n'est pas entre un exégète et un texte, mais entre un enseignant et des disciples, pour reprendre son expression.
Sur la forme, le midrash est un genre littéraire qui produit des textes à partir d'autres textes par allusion, allitérations, allégories, paraboles, métaphores, jeux de mots, gématrie.
La forme littéraire spécifique du midrash est responsable des similitudes qu'on détecte entre différents textes produits par la pensée judaïque au cours des siècles, par exemple entre les évangiles et la Torah, voire d'autres midrashs ou même le Talmud.
Le midrash en général ne donne pas ses clés d'interprétation. C'est au lecteur ou à l'auditeur de comprendre.
Le risque est bien sûr qu'une rupture de transmission engendre une perte de sens.
Personnellement, je distingue trois composantes dans le genre littéraire midrashique :
* Les paraboles, allégories et métaphores ne sont pas arbitraires mais forment un code, lexique ou dictionnaire.
Par exemple, l'occident renvoie à la fin des temps, l'orient à la résurrection.
Ou encore, le pain, le vin, l'eau, le vêtement sont autant de métaphores de la loi (et il y en a d'autres).
Ce code se retrouve aussi dans le Talmud alors même que le Talmud est normalement considéré comme un genre distinct du midrash.
* Les allitérations, jeux de mots, gématrie (en hébreu, syriaque, et éventuellement arabe), destinés à faire entendre une idée, insister dessus. C'est la double-entente.
* Des récits de base, dans la Bible, des apocryphes, d'autres midrashs, pourvoyeurs d'allusions diverses.
A partir du code, de la double-entente, des récits de base, un savant religieux prodiguait ses enseignements, si besoin en créant un nouveau récit.
Le Coran en tant qu'exposé de la volonté divine pourrait être un midrash sur le fond, mais ce serait abusif de clamer ça, car on attend du midrash qu'il ait aussi, et d'abord, la forme littéraire associée.
De manière générale, les histoires d'origine bibliques dans le Coran relèvent du genre midrashique à un degré ou l'autre, principalement par le code, ainsi que dans une moindre mesure par la double-entente (la langue arabe se prêtant moins bien aux allitérations et jeux de mots portés originellement par les récits en hébreu, et pas du tout à la gématrie).
A condition de reconnaître le point crucial que je développe après au sujet de Hawting.
Je reviendrai après sur l'histoire de Moïse et du veau pour expliciter la démarche.
Voici un autre exemple, plus simple, dans la sourate 19 (Maryam), verset 2
ذِكْرُ رَحْمَتِ رَبِّكَ عَبْدَهُ زَكَرِيَّا
Traduction de Hamidullah : C’est un récit de la miséricorde de ton Seigneur envers Son serviteur Zacharie.
Voici le verset arabe en phonétique :
Dhikru Raĥmati Rabbika `Abdahu
Zakarīyā
Il y a une allitération partielle entre le mot dhikr et le nom Zacharie.
L'allitération est partielle parce qu'en arabe, la lettre dh de dhikr et la lettre z de Zacharie sont différentes, et se prononcent un peu différemment.
Alors qu'en hébreu et syriaque, les allitérations sont totales.
Cependant, ce verset est une allusion au verset 1.72 de Luc (ou éventuellement un texte similaire) :
1.67 Zacharie, son père, fut rempli d’Esprit Saint et prononça ces paroles prophétiques :
1.68 « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, qui visite et rachète son peuple.
(...)
1.72 amour qu’il montre envers nos pères,
mémoire de son alliance sainte,
Dans les anciennes traductions en syriaque des évangiles, qu'on appelle Peshitta, ce verset 1.72 donnait en translittération :
dnᶜbd ḥnnᵓ ᶜm ᵓbhyn
wᵓtdkr ldytqwhy qdyštᵓ
J'ai souligné le mot qui renvoie à "mémoire" ou souvenir, ou rappel.
(Les traductions syriaques plus récentes utilisent un autre mot pour dire mémoire).
Ce genre d'allitération a pour but de créer une entente sur le mot dhikr, le souvenir ou le rappel.
Le souvenir est un concept-clé dans la pensée juive ancienne : c'est que Dieu allait se souvenir de son peuple (Israël) et lui envoyer un sauveur.
L'histoire de Zacharie, c'est cela, tant dans les évangiles que dans le Coran.
C'est pour cela que le mot dhikr est omniprésent dans le Coran.
Mais on retrouve cette entente par assonance via le mot dhakar, mâle, dans certains versets.
Par exemple le verset 3.36 de la sourate 3 (la famille d'Imran)
فَلَمَّا وَضَعَتْهَا قَالَتْ رَبِّ إِنِّي وَضَعْتُهَا أُنثَى وَاللَّهُ أَعْلَمُ بِمَا وَضَعَتْ وَلَيْسَ الذَّكَرُ كَالْأُنثَى وَإِنِّي سَمَّيْتُهَا مَرْيَمَ وَإِنِّي أُعِيذُهَا بِكَ وَذُرِّيَّتَهَا مِنَ الشَّيْطَانِ الرَّجِيمِ
Puis, lorsqu'elle en eut accouché, elle dit: « Seigneur, voilà que j'ai accouché d'une fille » or Allah savait mieux ce dont elle avait accouché ! Le garçon n'est pas comme la fille. « Je l'ai nommée Maryam, et je la place, ainsi que sa descendance, sous Ta protection contre le Diable, le banni ».
Falammā Wađa`at/hā Qālat Rabbi 'Innī Wađa`tuhā 'Unthá Wa Allāhu 'A`lamu Bimā Wađa`at Wa Laysa Adh-Dhakaru Kāl'unthá Wa 'Innī Sammaytuhā Maryama Wa 'Innī 'U`īdhuhā Bika Wa Dhurrīyatahā Mina Ash-Shayţāni Ar-Rajīmi
Wa Laysa Adh-Dhakaru Kāl'unthá : Le garçon n'est pas comme la fille, voilà une phrase pour le moins curieuse. Bien sûr que le garçon n'est pas comme la fille, pourquoi ce besoin de le préciser ?
Mais ça se comprend si ce verset est analysé sous l'angle du midrash : le Coran veut faire entendre le mot "dhikr" derrière dhakar.
Pourquoi cela ?
Tout d'abord, il faut remarquer la déception de la femme d'Imran : elle attendait un "dhakar" mais elle a accouché d'une fille, Maryam.
Dans les traditions tant chrétiennes que musulmanes, Marie / Maryam est parée de toutes les vertus.
C'est la femme modèle, la meilleure, le Coran le dit aussi, d'ailleurs un peu plus loin.
Mais le Coran (et aussi les évangiles d'ailleurs, mais ça se voit moins bien) est plus ambigu qu'il n'y paraît au sujet de Maryam.
Au verset 19.20, au sujet de l'annonce qu'elle va avoir un fils sans avoir connu d'homme :
Elle dit : « Comment aurais-je un fils, quand aucun homme ne m’a touchée, et que je ne suis pas prostituée ? »
Elle exprime ici sa profonde incrédulité (similaire à celle d'Abraham à l'annonce qu'il va avoir un fils, similitude qui procède typiquement du genre midrashique).
Explication : Maryam, ou la vierge, c'est métaphoriquement la communauté des pieux, ou le Nouvel Israël.
Ils ne se compromettent pas avec l'idolâtrie (ils sont "vierges", ils ne sont pas sous la tutelle de Baal, qui veut aussi dire le mari).
Ils n'ont qu'un défaut, le seul : ils estiment n'avoir pas besoin de sauveur, ni ne se sentent légitimes à porter la bonne nouvelle aux nations païennes.
L'Esprit de Dieu va alors un peu les forcer à sortir de leur zone de confort : Kāna 'Amrāan Maqđīyāan, c'est une affaire déjà décidée.
Déjà dans le chapitre 12 du livre des Nombres, Miriam, sœur d'Aaron et de Moïse, et dont Maryam est le clone midrashique, avait refusé que Moïse porte la bonne parole aux païens, et avait été frappée par la lèpre en punition.
Enfin...techniquement Miriam avait critiqué que son frère épouse une femme païenne, mais ça que ça veut dire.
Donc pour en revenir à dhakar / dhikr, le Coran veut faire entendre que ce n'est pas cette communauté des pieux elle-même qui sera l'héritière de la promesse (Maryam n'est pas directement l'héritière attendue), mais c'est par elle et un messager issu d'elle que se manifestera le rappel, dhikr, de la promesse (mais c'est par Maryam que l'héritier arrivera).
Un peu plus loin, on a le verset 19.7 :
يَا زَكَرِيَّا إِنَّا نُبَشِّرُكَ بِغُلَامٍ اسْمُهُ يَحْيَى لَمْ نَجْعَل لَّهُ مِن قَبْلُ سَمِيًّا
"Ô Zacharie, Nous t'annonçons la bonne nouvelle d'un fils. Son nom sera Yahya. Nous ne lui avons pas donné auparavant d'homonyme."
Yā Zakarīyā 'Innā Nubashiruka Bighulāmin Asmuhu Yaĥyá Lam Naj`al Lahu Min Qablu Samīyāan
Dans ce verset, on a au moins deux concepts midrashiques à l'oeuvre, peut-être trois, mais je ne sais pas interpréter le troisième.
Tout d'abord, très facilement, on a la forme bushira (بُشِّرَ), annoncer une bonne nouvelle. Ce mot renvoie à l'hébreu bessora, la bonne nouvelle que la promesse de salut va s'accomplir. Le mot a donné en français via le grec le mot évangile.
Ensuite, plus complexe, on a le mot ghulām (غُلَٰم).
Le mot veut dire tantôt fils, tantôt garçon.
Le fils désigne dans la pensée juive ancienne de manière allégorique le sauveur, le Messie, ou le salut.
Le Coran emploie ici ce mot ghulam à la place de l'usuel walad ou banu.
C'est que graphiquement, sans les points diacritiques, ce mot ressemble à 'alam, qui veut dire monde, mais qui renvoie plus spécifiquement au monde à venir (en hébreu, ça se dit olam haba).
On retrouve cette entente chez Isaïe quand il emploie le mot 'alma pour dire la vierge au lieu de betoula, choix qui laisse perplexe de confusions les théologiens qui ne le comprennent pas, d'autant que ce choix s'est répercuté ensuite dans les évangiles.
Il y a plusieurs autres occurrences du mot ghulam dans le Coran. Ce qu'il faut retenir, c'est que quand il apparaît dans une histoire biblique, il s'agit du fils eschatologique, celui qui sera l'héritier de la terre, et de la promesse accomplie.
Le possible troisième concept à l’œuvre dans ce verset est "nous ne lui avons pas donné auparavant d'homonyme".
Je ne sais pas expliquer en ce moment cette expression, elle renvoie sans doute au nom comme métaphore du salut, comme dans le verset 2.30, ou dans la Genèse.
J'ai d'autres exemples en apparence moins bibliques (les "houris", les fleuves du Paradis, la brûlure de l'enfer), mais je vais m'arrêter là, ça fait trop long.
En ce qui concerne le polythéisme et les idoles, je suis d'accord sur le décalage entre tradition islamique et données coraniques d'une part, données historiques d'autre part. Je retiens surtout de Hawting, d'une part qu'il fallait être prudent avec le caractère polémique de bien des données coraniques, la polémique ayant en effet une propension à déformer et ridiculiser la position de ses adversaires, d'autre part que la qualification d'idolâtre, voire de polythéiste, est un motif récurrent dans les disputes intra-monothéistes. Pour le reste, je n'ai pas été entièrement convaincu par sa lecture du Coran.
J'ai surtout cité Hawting pour dire que la démarche d'étudier le Coran sans utiliser les hadiths existait aussi dans la recherche académique et n'était pas réservée au mouvement coraniste, pas tant pour être d'accord sans réserve.
Et aussi que faire cela changeait substantiellement la signification générale du Coran.
Il y a donc un choix méthologique crucial à faire dès le démarrage de toute étude de ce genre : utiliser, partiellement ou complètement les hadiths et autres narrations de la tradition islamique pour analyser le Coran, ou ne pas du tout les utiliser, sachant que ne pas du tout les utiliser implique un choix bien mûrement réfléchi et des efforts supplémentaires.
Et non seulement ne pas utiliser les hadiths et les narrations exégétiques islamiques donne un sens assez différent au Coran, mais en plus, cela implique de faire l'hypothèse que l'auteur du texte avait pleinement conscience de ce qu'il écrivait.
Alors que quand on utilise les hadiths et les narrations exégétiques, au fond, l'auteur du texte n'a pas vraiment conscience du texte (des narrations rapportent même une sorte de transe ou d'état modifié de conscience pendant la révélation d'un verset), et il en donne la signification après-coup.
Dans cette hypothèse là, Mahomet est Pythie, puis oracle.
L'analyse que je fais ici du Coran est totalement incompatible avec les narrations exégétiques de la tradition islamique, elle suppose que l'auteur a déroulé un argumentaire véritablement construit dans chaque sourate, et qu'il ne s'agissait pas d'une simple juxtaposition de versets au gré des circonstances de la geste du prophète.
Il y a plusieurs hypothèses pour expliquer ce verset. On a effectivement dit qu'il pouvait s'agir d'un reliquat de judéo-christianisme dont les tendances resteraient à définir. D'autres pourtant évoquent une argumentation par l'absurde, précisément dans un contexte polémique, ce qui me semble possible. D'autres enfin considèrent qu'il s'agit d'une erreur du locuteur coranique, ce que j'ai du mal à croire. Au final, on ne sait pas très bien comment comprendre ce verset.
Ok.
Il me semble que Chabbi a écrit sur le sujet selon le point de vue de l'anthropologie historique.
Je n'ai lu de Jacqueline Chabbi essentiellement que le Seigneur des tribus, et j'ai écouté aussi certaines de ses interventions sur les réseaux sociaux.
Grosso modo, si j'ai bien compris, sa thèse est la suivante : Mahomet, comme d'autres prophètes à la même époque en Arabie, avait au départ une vision très locale de sa prophétie.
Sa prophétie était complètement façonnée par la culture tribale arabe, et il se voulait être avant tout le prophète du dieu de sa tribu, les Quraysh.
Ensuite, face aux juifs de Médine, il a cherché une légitimité en se réclamant des prophètes bibliques, ce qui l'a amené à étendre sa prophétie et sa prédication au-delà de sa propre tribu.
Cependant sa perception des prophètes bibliques, selon J. Chabbi, se faisait essentiellement selon le prisme de la culture tribale arabe.
Quant à al-ghayb, J. Chabbi explique que ça signifiait dans l'esprit des hommes des tribus d'Arabie l'absence de visibilité sur le futur (voir
https://www.facebook.com/lesmotsducoran ... 950011948/)
De manière générale, J. Chabbi minimise passablement la signification des emprunts judaïques dans le Coran, une position qui la singularise plutôt parmi la recherche académique sur le sujet, puisqu'en général, la plupart des historiens tentent d'établir un lien entre le Coran et des courants judéo-chrétiens au Proche et Moyen-Orients.
Ceci dit, l'approche de J. Chabbi est en phase avec le narratif de la tradition islamique qui, lui aussi, minimise le rôle des emprunts judaïques dans le Coran.
Je ne suis pas totalement convaincu par son explication sur al-ghayb, en partie parce que les versets où le Coran dévoile une explication de ce concept sont souvent très proches ou même parties des histoires bibliques.
Cependant, il est envisageable que al-ghayb dans le Coran révèle une adaptation typiquement arabe d'un concept gnostique originellement judéo-chrétien.
Je crois qu'on retrouve aussi cela dans le montanisme.
Peut-être. Je ne connais pas le montanisme.
Est-ce que tu peux argumenter pour justifier cette interprétation ?
Sur le rejet du salut par la gnose, il y a de nombreux versets sur le sujet (traduction de Hamidullah, où j'ai changé Inconnaissable par Invisible) :
3.179 Allah n’est point tel qu’Il laisse les croyants dans l’état où vous êtes jusqu’à ce qu’Il distingue le mauvais du bon.
Et Allah n’est point tel qu’Il vous dévoile l’Invisible. Mais Allah choisit parmi Ses messagers qui Il veut. Croyez donc en Allah et en Ses messagers. Et si vous avez la foi et la piété, vous aurez alors une récompense énorme.
6.50 Dis : « Je ne vous dis pas que je détiens les trésors d’Allah,
ni que je connais l’Invisible, et je ne vous dis pas que je suis un ange. Je ne fais que suivre ce qui m’est révélé. » Dis : « Est-ce que sont égaux l’aveugle et celui qui voit ? Ne réfléchissez-vous donc pas ? »
6.59
C’est Lui qui détient les clefs de l’Invisible. Nul autre que Lui ne les connaît. Et Il connaît ce qui est dans la terre ferme, comme dans la mer. Et pas une feuille ne tombe qu’Il ne le sache. Et pas une graine dans les ténèbres de la terre, rien de frais ou de sec, qui ne soit consigné dans un livre explicite.
7.188 Dis : « Je ne détiens pour moi-même ni profit ni dommage, sauf ce qu’Allah veut.
Et si je connaissais l’Invisible, j’aurais eu des biens en abondance et aucun mal ne m’aurait touché. Je ne suis, pour les gens qui croient, qu’un avertisseur et un annonciateur ».
(...)
Hamidullah a traduit al-ghayb par l'Inconnaissable (et sa traduction de al-ghayb n'est pas toujours consistante à travers les différents versets), mais j'estime que le sens premier est plutôt l'Invisible.
D'ailleurs :
6.73 Et c’est Lui qui a créé les cieux et la terre, en toute vérité. Et le jour où Il dit : « Sois ! » Cela est, Sa parole est la vérité. A Lui, la royauté, le jour où l’on soufflera dans la Trompe. C’est Lui le Connaisseur de al-ghayb et de ash-shahadat. Et c’est Lui le Sage et le Parfaitement Connaisseur.
Dieu est donc le Connaisseur de al-ghayb et de ce qui est manifeste (ash-shahadat), de l'Invisible et du Visible.
Mais quel que soit la nuance de traduction qu'on donne à al-ghayb, c'est bien cette connaissance de al-ghayb qui est en jeu dans ces versets-ci ainsi que les autres que je n'ai pas cités.
Ces différents versets disent que seul Dieu connaît l'Invisible. Même son messager (le prédicateur de ces sourates) ne le connaît pas.
En fait, même ses messagers ne connaissent pas l'invisible :
5.109 le jour où Allah rassemblera les messagers, et qu’Il dira : « Que vous a-t-on donné comme réponse ? » Ils diront : « Nous n’avons aucun savoir : c’est Toi le Connaisseur des Invisibles (al-ghuyub) ».
Ce verset 5.109 est probablement celui qui manifeste le plus le rejet du gnosticisme, à supposer qu'il ait été écrit par le même auteur que le reste. En tout état de cause, il est cohérent avec le reste du texte.
En effet, dans les différents courants gnostiques, les messagers sont envoyés par le Vrai Dieu pour dévoiler aux hommes une partie de l'Invisible afin de stimuler les âmes et les faire échapper au monde physique.
Donc en affirmant que les messagers ne détiennent aucun savoir qui relève de l'Invisible, le Coran s'oppose frontalement et radicalement à cette idée gnostique.
En effet, s'il s'avère illusoire de connaître l'Invisible, thèse du Coran, alors il n'est pas possible de gagner le salut par cette connaissance.
Khalîfa peut aussi signifier représentant, représentant de Dieu sur terre. Reynolds a fait toute une étude sur le sujet en montrant le sous-texte para-biblique de cette histoire (imago Dei, le Christ premier Adam etc). Je ne suis pas loin de penser qu'il faut traduire ainsi.
Khalifa comme "représentant de Dieu" sur terre est certes souvent l'interprétation par défaut.
Par exemple dans une des traductions que je consulte, il est traduit par vicaire.
Des traductions en anglais disent vicegerent.
Louis XIV aurait pu dire lieutenant de Dieu sur terre.
Qui est ce vicaire sur la terre fait lui aussi l'objet de différentes interprétations.
Ce pourrait être le calife, lequel est chargé de garantir que Mahomet demeure à jamais le Sceau des Prophètes.
Ce pourrait être l'être humain en général comme image de Dieu sur terre. On trouve ce genre d'interprétation dans le soufisme.
Je ne suis pas d'accord que khalifa signifie représentant de Dieu sur terre.
Tout d'abord, il n'y a aucun mot de la même racine qui a ailleurs le sens de "représentant" dans le Coran.
Le mot est utilisé au verset 38.26 pour dire que David aura un khalifa sur la terre.
Or le khalifa de David en question est bien sûr Salomon qui fut son successeur et son héritier.
Au pluriel, il y a deux mots avec une graphie un peu différente : خَلَائِفَ et خُلَفَاءَ
Je ne sais pas dire s'il y a une vraie nuance entre les deux en arabe classique, mais dans le Coran, il n'y en a pas d'évidente.
Au verset 10.73, à propos du peuple de Noé :
Ils le traitèrent de menteur. Nous le sauvâmes, lui et ceux qui étaient avec lui dans l’arche, desquels Nous fîmes les "khalāifa". Nous noyâmes ceux qui traitaient de mensonge Nos preuves. Regarde comment a été la fin de ceux qui avaient été avertis !
Clairement, ici, ceux qui étaient dans l'arche sont devenus les successeurs, les héritiers de la terre.
Ensuite, si on dit que khalifa désigne un représentant de Dieu sur terre : soit le calife, soit l'humanité, soit encore autre chose, alors force est de constater que le Coran ne fait rien de cette idée par ailleurs.
Il n'y a aucun développement théologique associé à l'idée d'un représentant en dehors de ce verset.
Par exemple, pas de "soyez donc à l'image de Dieu, votre Père" ou de chose de ce genre.
Ou pas d'explication sur comment désigner le calife après le messager, alors que ce serait tout de même la moindre des choses.
On en revient à ce que j'ai dit plus : si on présuppose que le Coran est une simple juxtaposition de péricopes et injonctions sans véritables articulations des unes aux autres, on en tire une lecture très différente de si on présuppose qu'il y a un argumentaire à peu près construit.
Une autre critique est que ça ne cadre pas avec l'objection des anges : "vas-tu y placer quelqu'un qui va semer la corruption et faire couler le sang ?".
Cette objection des anges est en fait assez embarrassante pour un certain nombre de commentateurs musulmans.
Par exemple Rumi, dans Fihi ma Fihi (de mémoire à moins que ce soit dans le Mathnawi), se demande comment les anges pouvaient savoir que l'humanité allait semer le désordre et faire couler le sang, alors qu'elle n'avait pas encore été créée.
Une des ses hypothèses est que les anges l'auraient lu sur Lawl Mahfouz, la Table gardée des décrets divins.
Le problème est qu'au fond, dans leur critique du projet divin, les anges se montrent extrêmement provocateurs, pour ne pas dire injurieux envers Dieu en Lui en Lui faisant un procès d'intention aussi énorme.
Et pourtant, le Coran ne dit pas que Dieu a châtié les anges pour s'être montrés si impudents, bien que ces derniers l'auraient bien mérité.
Non, Dieu se contente de dire qu'Il sait des choses et pas les anges.
Et pour leur montrer, Il fait apprendre le nom des choses à Adam. Et Adam s'acquitte du défi sans problème, alors que les anges échouent.
Or on ne voit pas le rapport entre réciter le nom des choses, même à supposer que c'est une prérogative humaine, et l'objection des anges sur les futurs crimes commis par l'humanité.
Certes, faire réciter des noms par Adam se trouve dans la Genèse, mais pas du tout en réponse à une objection angélique sur le fait que l'humanité commettra des crimes.
Dans le midrash rabbah sur la genèse, les anges se contentent de demander : l'homme, à quoi est-il bon ? Ce à quoi Dieu répond que sa sagesse est plus grande que la leur. La suite est similaire au Coran : Adam connaît le nom des choses mais pas les anges.
Il s'agit d'un écart notable en comparaison de la version coranique alors que la version coranique reste tout de même plus proche de celle du midrash que de celle de la genèse.
Le Coran met en scène des anges qui objectent avec audace et insolence à Dieu et à son projet de création d'un khalifa ; la thèse du khalifa comme représentant de Dieu sur terre n'explique pas de manière suffisante, de mon point de vue, cette outrecuidance.
A contrario l'explication que j'ai donnée dans le post précédent, à défaut de préserver un sens mystique au verset, s'inscrit beaucoup mieux dans l'argumentaire du début de la sourate 2, voire de l'ensemble du Coran.
L'objection des anges apparaît essentiellement comme une question rhétorique destinée à dénier l'héritage de la promesse à ceux qui sèment le chaos et font couler le sang.
Je ne suis convaincu, ni par ton premier point, ni par ton second.
Ok
Si je comprends bien ta lecture, le prédicateur s'oppose à des groupes messianiques gnostiques. Ils hâtent la venue du messie en provoquant les tribulations par leur violence, et ils prétendent que cela a pour but d'alléger ou de redonner un esprit nouveau à la loi. S'ils réforment, ils réforment la loi ou leur compréhension de la loi, qui mène peut-être à des excès ce que le prédicateur considère être un abandon de la loi qu'il dénonce.
Oui c'est l'idée.
Attendons donc que tu reviennes là-dessus.
Je ne sais plus pourquoi j'ai écrit ça comme ça. J'ai peut-être oublié d'enlever cette phrase avant de poster.
Ici, je serais un peu plus réservé. Il faudrait que tu puisses argumenter pour montrer qu'il s'agit bel et bien d'un procédé midrashique, et pas d'une interprétation arbitraire sortie d'on ne sait où.
L'histoire complète du veau dans le Coran est éclatée entre plusieurs sourates.
Sourate 2, verset 51
وَإِذْ وَاعَدْنَا مُوسَى أَرْبَعِينَ لَيْلَةً ثُمَّ اتَّخَذْتُمُ الْعِجْلَ مِن بَعْدِهِ وَأَنتُمْ ظَالِمُونَ
Et lorsque Nous donnâmes rendez-vous à Moïse pendant quarante nuits !... Puis en son absence vous avez pris le Veau alors que vous étiez injustes.
Sourate 7
7.148
وَاتَّخَذَ قَوْمُ مُوسَى مِن بَعْدِهِ مِنْ حُلِيِّهِمْ عِجْلًا جَسَدًا لَّهُ خُوَارٌ أَلَمْ يَرَوْا أَنَّهُ لَا يُكَلِّمُهُمْ وَلَا يَهْدِيهِمْ سَبِيلًا اتَّخَذُوهُ وَكَانُوا ظَالِمِينَ
Et le peuple de Moïse adopta après lui un veau, fait de leurs parures : un corps qui semblait mugir. N’ont-ils pas vu qu’il ne leur parlait point et qu’il ne les guidait sur aucun chemin ? Ils l’adoptèrent, et ils étaient des injustes.
7.150
وَلَمَّا رَجَعَ مُوسَى إِلَى قَوْمِهِ غَضْبَانَ أَسِفًا قَالَ بِئْسَمَا خَلَفْتُمُونِي مِن بَعْدِي أَعَجِلْتُمْ أَمْرَ رَبِّكُمْ وَأَلْقَى الْأَلْوَاحَ وَأَخَذَ بِرَأْسِ أَخِيهِ يَجُرُّهُ إِلَيْهِ قَالَ ابْنَ أُمَّ إِنَّ الْقَوْمَ اسْتَضْعَفُونِي وَكَادُوا يَقْتُلُونَنِي فَلَا تُشْمِتْ بِيَ الْأَعْدَاءَ وَلَا تَجْعَلْنِي مَعَ الْقَوْمِ الظَّالِمِينَ
Et lorsque Moïse retourna à son peuple, fâché, attristé, il dit : « Vous avez très mal agi pendant mon absence ! Avez-vous voulu hâter le commandement de votre Seigneur ? » Il jeta les tablettes et prit la tête de son frère, en la tirant à lui : « O fils de ma mère, dit (Aaron), le peuple m’a traité en faible, et peu s’en est fallu qu’ils ne me tuent. Ne fais donc pas que les ennemis se réjouissent à mes dépens, et ne m’assigne pas la compagnie des gens injustes ».
Sourate 20,
20.83
وَمَا أَعْجَلَكَ عَن قَوْمِكَ يَا مُوسَى
« Pourquoi Moïse t’es-tu hâté de quitter ton peuple ? »
20.84
قَالَ هُمْ أُولَاءِ عَلَى أَثَرِي وَعَجِلْتُ إِلَيْكَ رَبِّ لِتَرْضَى
Ils sont là sur mes traces, dit Moïse. Et je me suis hâté vers Toi, Seigneur, afin que Tu sois satisfait.
20.85
قَالَ فَإِنَّا قَدْ فَتَنَّا قَوْمَكَ مِن بَعْدِكَ وَأَضَلَّهُمُ السَّامِرِيُّ
Allah dit : « Nous avons mis ton peuple à l’épreuve après ton départ. Et le Sâmirî les a égarés ».
20.86
فَرَجَعَ مُوسَى إِلَى قَوْمِهِ غَضْبَانَ أَسِفًا قَالَ يَا قَوْمِ أَلَمْ يَعِدْكُمْ رَبُّكُمْ وَعْدًا حَسَنًا أَفَطَالَ عَلَيْكُمُ الْعَهْدُ أَمْ أَرَدتُّمْ أَن يَحِلَّ عَلَيْكُمْ غَضَبٌ مِّن رَّبِّكُمْ فَأَخْلَفْتُم مَّوْعِدِي
Moïse retourna donc vers son peuple, courroucé et chagriné ; il dit : « O mon peuple, votre Seigneur ne vous a-t-Il pas déjà fait une belle promesse ? L’alliance a-t-elle donc été trop longue pour vous ? ou avez-vous désiré que la colère de votre Seigneur s’abatte sur vous, pour avoir trahi votre engagement envers moi ? »
20.87
قَالُوا مَا أَخْلَفْنَا مَوْعِدَكَ بِمَلْكِنَا وَلَكِنَّا حُمِّلْنَا أَوْزَارًا مِّن زِينَةِ الْقَوْمِ فَقَذَفْنَاهَا فَكَذَلِكَ أَلْقَى السَّامِرِيُّ
Ils dirent : « Ce n’est pas de notre propre gré que nous avons manqué à notre engagement envers toi. Mais nous fûmes chargés de fardeaux d’ornements du peuple ; nous les avons donc jetés tout comme le Sâmirî les a lancés.
20.88
فَأَخْرَجَ لَهُمْ عِجْلًا جَسَدًا لَّهُ خُوَارٌ فَقَالُوا هَذَا إِلَهُكُمْ وَإِلَهُ مُوسَى فَنَسِيَ
Puis il en a fait sortir pour eux un veau, un corps à mugissement. Et ils ont dit : « C’est votre divinité et la divinité de Moïse ; il a donc oublié » !
20.90
وَلَقَدْ قَالَ لَهُمْ هَارُونُ مِن قَبْلُ يَا قَوْمِ إِنَّمَا فُتِنتُم بِهِ وَإِنَّ رَبَّكُمُ الرَّحْمَنُ فَاتَّبِعُونِي وَأَطِيعُوا أَمْرِي
Certes, Aaron leur avait bien dit auparavant : « O mon peuple, vous êtes tombés dans la tentation à cause de lui. Or, c’est al-Rahman qui est vraiment votre Seigneur. Suivez-moi donc et obéissez à mon commandement ».
20.95
قَالَ فَمَا خَطْبُكَ يَا سَامِرِيُّ
Alors [Moïse] dit : « Quel a été ton dessein ? O Sâmirî ? »
20.96
قَالَ بَصُرْتُ بِمَا لَمْ يَبْصُرُوا بِهِ فَقَبَضْتُ قَبْضَةً مِّنْ أَثَرِ الرَّسُولِ فَنَبَذْتُهَا وَكَذَلِكَ سَوَّلَتْ لِي نَفْسِي
Il dit : « J’ai vu ce qu’ils n’ont pas vu : j’ai donc pris une poignée de la trace de l’Envoyé ; puis, je l’ai lancée. Voilà ce que mon âme m’a suggéré ».
Je n'ai pas mis tous les versets entre 20.83 et 20.96, seulement ceux qui concernent mon point.
Je n'ai pas non plus mis les translittérations, ça fait trop long.
On peut d'ors et déjà remarquer une chose, surtout à propos de la péricope de la sourate 20 : le récit n'a apparemment ni queue ni tête.
Pourtant les traductions (Hamidullah, Blachère) sont valables sur ces versets.
L'incohérence du récit n'est donc pas due aux traductions.
Par exemple, quel est le rapport entre prendre une trace de l'Envoyé (verset 20.96) et le veau ?
Donc soit on en reste avec cette constatation (l'incohérence manifeste du récit), soit on se dit que le récit veut faire entendre quelque chose qu'il faut arriver à capturer.
On peut essayer d'utiliser les tafsirs, asbab an-nouzoul et autres hadiths pour tenter de comprendre.
Moi j'y vois des procédés typiques du midrash : code, ententes multiples, récit construit sur des récits de base.
Ces différents versets de la sourate 7 et de la sourate 20 font entendre la hâte du peuple de Moïse.
On a l'emploi dans ces différents versets du verbe ʿajila (عَجِلَ), se dépêcher et du verbe aʿjala (أَعْجَلَ), faire se dépêcher ou faire se hâter.
On voit donc bien que le veau, ʿij'l (عِجْل), a quelque chose à voir avec cette hâte, tout simplement parce que ces différents versets en font bien la conséquence de cette hâte.
L'assonance entre le mot ʿij'l et les verbes ʿajila et aʿjala, qui crée une double entente entre le veau et la hâte, ne fait qu'insister sur la relation entre les deux.
De quoi donc le peuple de Moïse avait-il hâte selon le Coran ?
Les versets 7.150 et 20.86 l'expliquent d'une certaine façon. Cette péricope éclatée en plusieurs sourates parle du don de la Loi divine. Mais tant que la loi n'est pas donnée ou n'est pas renouvelée et allégée, nous ne sommes pas encore entrés dans l'ère de la promesse accomplie.
Et tant que nous ne sommes pas entrés dans l'ère de la promesse accomplie, c'est que nous sommes encore dans l'ère de l'épreuve.
La tentation est grande d'accélérer le processus.
Le Coran emploie le mot fitna (فِتْنَة) et le verbe associé fatanu (فَتَنُ) pour désigner l'épreuve et le fait d'être dans l'épreuve.
Le mot fitna est redoutablement complexe à traduire parce que dans le Coran, il désigne par le même mot dans différents versets des situations qui en français apparaissent de gravités différentes : test, épreuve, discorde, dissensions, oppression...
Au verset 20.85, le peuple de Moïse se retrouve donc dans la fitna, et c'est à cette occasion qu'il chute en prenant le veau (pour utiliser une phraséologie d'origine chrétienne).
De quoi est fait ce veau ?
Le verset 20.96 explique, dans la version coranique, que le Samiri l'a concocté à partir des "traces" du Messager.
De même, le verset 20.84 dit que le peuple de Moïse est sur ses "traces".
Que sont donc ces fameuses "traces", athar dans le texte arabe ?
D'après certaines exégèses, il s'agirait de la poussière des pas de Moïse que le Samiri aurait jetées dans le feu par un rituel de sorcellerie, et duquel aurait surgi ce veau.
En fait, et c'est assez simple, le mot athar a deux sens, et le Coran veut faire entendre le deuxième sens à travers le premier.
Au premier sens, celui du flot narratif de l'histoire de Moïse, les athar c'est ce qui reste.
Au deuxième sens, les athar sont des cousins des hadiths, ils sont une des trois formes de narration classiques : hadiths, athar, khabar.
******************************************
On a par exemple des hadiths qui disent de suivre les "athar" du Prophète :
https://www.hadithdujour.com/hadiths/ha ... r_3610.asp
D'après Abou Houreira (qu'Allah l'agrée) : Le Prophète (que la prière d'Allah et Son salut soient sur lui) a été interrogé : Qui sont les meilleurs des gens ?
Il a dit: « Moi et ceux qui sont avec moi puis ceux qui sont sur le athar puis ceux qui sont sur le athar ».
Puis c'est comme s'il avait refusé de mentionner les autres.
(Rapporté par l'imam Ahmed dans son Mousnad n°8483 et authentifié par Cheikh Albani dans la Silsila Sahiha vol 4 p 455)
******************************************
Ce que veut expliquer le prédicateur dans cette péricope, c'est que dans sa hâte d'entrer dans l'ère de la promesse accomplie, le peuple de Moïse n'a pas eu la patience d'attendre les lois données par Dieu à Moïse et a concocté un dispositif juridique fait de bric et de broc à partir de diverses narrations sur Moïse.
C'est ça la faute du veau, version coranique.
Mais pourquoi raconte-t-il cette histoire au sujet de Moïse et du veau ?
Le midrash, comme j'ai expliqué au-dessus, n'est pas une exégèse de la Bible, c'est un enseignement de la volonté divine (selon la perception de l'enseignant).
Le Coran ne raconte pas ce genre d'histoire pour tenter d'attirer les Juifs à lui comme le prétend la Tradition islamique, mais parce que le prédicateur s'adressait à son auditoire, disciples ou adversaires : c'est à eux qu'il reproche d'utiliser les athar des messagers précédents pour tenter de bâtir à la hâte un corpus juridique (et donc bancal de son point de vue).
Pour aller plus loin, un hadith comme celui que j'ai mentionné au-dessus est strictement incompatible avec le Coran vu que c'est précisément de prendre les athar des messagers que rejette le Coran.
Il n'est donc pas issu du même auteur que celui des sourates 2, 7, et 20.
De manière générale, l'islam n'est pas que le Coran : utiliser le Coran seul, c'est le coranisme.
Au contraire, l'islam est construit autour de deux sources : le Coran et la Sunna.
La Sunna est faite en particulier de hadiths et autres narrations rattachées au Prophète.
Etant donné que le Coran rejette le fait de construire un système juridique sur la base de narrations rattachées à des messagers, il s'ensuit que cette construction, l'islam, est en réalité la synthèse de deux traditions initialement opposées l'une à l'autre.
On a ici une autre corroboration de ce que j'expliquais dans mon post précédent : à un moment donné dans l'histoire (mais quand ?), il fallu ménager la chèvre et le chou en fusionnant deux traditions opposées.
Une corroboration supplémentaire de cette synthèse ultérieure est fournie par l'analyse de J. Schacht dans son ouvrage Origins of the Muhammadan Jurisprudence dans lequel il explique, un peu incidemment d'ailleurs, la perplexité des savants religieux et juristes du 8e siècle face à l'apparente contradiction entre le Coran et les traditions.
Et Sh'afi, explique Schacht, décide de privilégier les traditions en cas de désaccord entre elles et le Coran, au motif que le Prophète savait mieux comment interpréter le Coran.
A travers l'analyse interne du Coran (par le midrash) et l'analyse externe au Coran, par Schacht à travers les traditions et comment elles ont été traitées par les juristes au 8e siècle, on voit que la tradition juridique en islam à partir du 8e siècle correspond davantage à la manière dont ceux auxquels le prédicateur coranique s'opposait au 7e siècle plutôt qu'à la façon de procéder qu'il voulait promouvoir.
La façon de procéder que voulait promouvoir le prédicateur coranique est typiquement celle qu'on trouve dans la pensée juive antique, c'est-à-dire la loi divine qui tombe comme une pluie, d'où l'emploi récurrent du nazala pour dire révéler, mais qui au sens littéral est utilisé pour parler de la pluie qui tombe.
Et comment es-tu arrivé à cette conclusion ?
C'est expliqué dans Un Étranger sur le Toit de Maurice Mergui, certes dans le contexte de la naissance du christianisme.
L'image fonctionne de la manière suivante : dans les évangiles, Jésus fait des guérisons le jour du shabbat, c'est-à-dire le septième jour, et il lui est reproché de ne pas attendre le huitième jour.
Le début du shabbat correspond métaphoriquement à la fin des temps, tandis que le huitième jour correspond métaphoriquement au commencement d'une nouvelle création.
En effet la première création a commencé le premier jour, donc la résurrection doit commencer le huitième jour, une fois la semaine écoulée, et en particulier le shabbat terminé.
Donc en transgressant le shabbat, Jésus veut hâter symboliquement la fin des temps et le début de la résurrection, car c'est seulement dans ces conditions que le Messie doit advenir.
C'est ça l'idée portée par les péricopes évangéliques de transgression du shabbat.
C'est lié à des débats internes au sein du judaïsme ancien sur les signes de la fin des temps et de l'entrée dans le monde à venir.
Cependant, dans le cas du Coran, je ne perçois pas ce verset dénonçant la transgression du shabbat comme une manifestation d'hostilité envers le christianisme, parce que je pense que le christianisme n'était pas le sujet.
Le sujet, c'était les contemporains du prédicateur qui voulaient décréter l'avènement du nouveau monde avant que les conditions "nécessaires" au sens biblique soient remplies.
J'ai l'impression que tu surinterprètes beaucoup le texte coranique, tout de même.
Peut-être, mais je pense que le Coran n'est pas totalement déconnecté des événements de cette époque.
Après tout, dans la sourate 30, il est question des Romains / Byzantins qui ont perdu une bataille.
Sur la portée eschatologique de ce passage dans le patrimoine rabbinique, tu as des sources peut-être ?
Dans le Talmud, Mishna Sanhedrin 10 3, il est dressé une liste de ceux qui n'auront pas de part dans le
monde à venir, et les dix explorateurs qui ont fait un rapport mauvais sur la Terre Promise en font partie.
Voici une traduction en anglais du passage en question :
https://www.sefaria.org/Mishnah_Sanhedrin.10.3?lang=bi
J'ai entendu parler de la thèse de Parvaneh Pourshariati. Je ne sais pas du tout ce qu'elle vaut, il faudrait que je lise les comptes rendus qui en ont été faits.
Ok
Et qu'en est-il de l'hégire dans ta thèse ?
On aura réinterprété la date de fondation du royaume arabe, qui était initialement appelée "ère des Arabes" en un événement de nature eschatologique.
Là encore, même si je salue l'interprétation ingénieuse, elle me semble quelque peu artificielle. Ne devrait-ce pas être, d'ailleurs, Abû Bikr, père de la Vierge ?
Du temps où j'étais encore musulman il me semblait avoir entendu dire ou lu, que le surnom d'Abu Bakr lui avait été donné en relation avec Aïcha, mais je n'ai pas essayé de reconfirmer cela avant d'écrire, car j'imaginais que ça faisait partie du fond narratif connu en islam. J'aurais dû le faire.
Je réessaierai de me pencher ultérieurement sur le cas d'Abu Bakr.
En attendant, je ne sais pas s'il lui est associé des revendications messianiques.
En revanche, pour Omar c'est bien clair, et ce n'est même pas ma thèse personnelle. On la trouve par exemple chez Prémare dans Fondations de l'Islam, et chez d'autres certainement.
Pour Abu Bakr, Uthman, Mu'awiyya, la chose est vraiment douteuse. Qu'en est-il du titre khalîfa dans cette thèse ?
Pour le titre de khalifa, il n'apparaît jamais dans les documents administratifs arabes du 7e siècle.
Apparaît à la place le titre de "amir al-muminin", commandeur des croyants, avec Mu'awiya dans ces documents.
Je renvoie à l'article de Fred Donner sur la coranisation du discours politico-religieux à l'époque d'Abd al-Malik, qui évoque le cas du khalifa.
Au sujet de Mu'awiya, son assimilation au Messie est assez explicite dans une passage de la chronique maronite.
Pour une traduction en anglais complète du passage en question, voir Robert Hoyland, Seeing Islam as Others Saw It.
Pour une traduction partielle en français du passage en question, voir
https://www.culture-islam.fr/contrees/m ... e-maronite
Je me réfère à la traduction anglaise, car celle en français du site ci-dessus élude une mention importante.
Ce que dit cette chronique :
* Mu'awyia va à Jérusalem en 660 J.C.
* Il se rend au mont Golgotha, le lieu de la crucifixion du Christ, et y prie
* Il se fait acclamer roi par une assemblée arabe
* il y a un tremblement de terre à ce moment-là (voir la traduction anglaise, c'est le passage qui manque dans la traduction française)
* il va ensuite prier sur la tombe de Marie à Gethsemani.
Le mont Golgotha n'a aucune signification islamique puisque le Coran nie la crucifixion du Messie.
Cependant il recèle certainement signification pour Mu'awiya, et non seulement lui, mais aussi pour les Arabes qui l'y acclament roi.
Le tremblement de terre à ce moment-là, s'il a une quelconque réalité historique, a été interprété par certains historiens (dont Hoyland, je crois, à vérifier), comme une marque de reproche de la part de l'auteur de la chronique maronite à l'égard d'un musulman (Mu'awiya) qui s'approprie des symboles chrétiens.
Or c'est probablement une erreur manifeste d'interprétation : l'auteur, s'il est maronite, devait certainement être plutôt favorable à Mu'awiya, qui a tranché en faveur des Maronites dans un différent avec les Jacobites.
Non, le tremblement de terre lors du couronnement de Mu'awiya renvoie en fait au tremblement de terre mentionné dans les évangiles lorsque le Christ a expiré sur la Croix.
La chute des murs de Jéricho qui est évoquée est autre symbole eschatologique : c'est la conquête de la terre sainte par Josué (dont Jésus est le clone par midrash).
Le symbole du couronnement de Mu'awiya est donc assez limpide dans cette chronique : c'est l'inversion eschatologique, où Mu'awiya est le Messie revenu sur Terre.
Il ne veut pas porter de couronne comme les autres rois, reflétant certainement par cet acte une volonté d'humilité christique.
On peut se poser la question de la réalité historique de l'événement (le couronnement messianique de Mu'awiya) racontée par la chronique maronite.
Car la Tradition islamique n'est fait absolument pas mention.
Cependant, que ce couronnement ait une réalité historique ou pas n'a pas autant d'importance qu'on pourrait le croire.
Ce qui compte, c'est la fait même qu'une pareille narration ait existé, qui raconte ce point de vue.
C'est l'existence même de cette narration qui est cruciale, parce qu'elle indique que Mu'awiya a certainement été perçu comme un Messie par beaucoup de gens.
Si Mu'awiya avait été "calife" (le cinquième) dans le sens strict islamique, jamais personne n'aurait eu l'idée de composer une pareille narration.
Deux autres informations sont à prendre en compte au sujet de cette chronique.
Tout d'abord, une information assez énigmatique selon laquelle Mu'awiya a refusé de s'installer sur "le trône de Muhammad". Je ne sais pas très bien comment interpréter ce passage, mais il semble signifier une rupture forte dans la transmission du pouvoir arabe, comme si une nouvelle dynastie s'était établie.
L'autre information concerne le rejet des pièces de monnaie mises en circulation par Mu'awiya parce qu'elles ne comportaient de croix.
Il semble que de telles pièces ne soient apparues que sous Abd al-Malik, c'est-à-dire nettement plus tard.
L'auteur de la chronique aura donc fait une confusion entre les deux souverains.
Et si c'est le cas, alors la chronique aura été écrite après le règne d'Abd al-Malik.
Ce qui implique qu'elle a été écrite à une époque déjà avancée dans la dynastie omeyyade, mais encore suffisamment reculée pour que la nature islamique du régime n'apparaisse pas encore de manière évidente aux contemporains.
Et nous n'avons aucune trace d'une autre vision de l'histoire ? La tradition arabe, orale, a été entièrement réécrite sans ne laisser aucun souvenir, aucun hiatus ? Je veux bien qu'il y ait eu des reconstructions, mais l'absence de traces, de traditions, de versions de l'histoire concurrente laisse quelque peu pantois. N'est-ce pas donner un peu trop de pouvoir au calife ?
J'ai lu récemment un ouvrage extrêmement intéressant : "Representing the enemy : Musaylima in Muslim literature", d'Al Makin.
Le sujet concerne Musaylima.
On ne connaît à son sujet que ce que la tradition islamique a raconté sur lui, et bien sûr, à sens unique.
Ses propos qui ont été rapportés sont très peu nombreux.
Toutefois, Al Makin, en étudiant de subtiles nuances de narration et de chaînes de rapporteurs, arrive à déduire beaucoup de choses plausibles au sujet de Musaylima.
Une chose sûre se dégage de l'analyse d'Al Makin : les narrations rapportées par la tradition islamique n'étaient pas des chroniques historiques.
C'était des oeuvres littéraires destinées à servir en premier lieu les intérêts de la dynastie arabe régnante au moment où elles ont été élaborées puis rapportées, et en particulier les conforter dans leur rôle de gardiens du "sceau de la prophétie".
Et en deuxième lieu à fixer les rapports hiérarchiques entre tribus arabes (telle tribu qui a envoyé une délégation chez le prophète a plus de mérite qu'une autre qui ne l'a pas fait).
Mais les sources arabes ne rapportent qu'une version ?
Oui.
Quelles traces avons-nous de ces autres lectionnaires ?
En arabe, directement, aucune bien sûr, sinon ce serait un événement fantastique.
Al Makin, dont j'ai mentionné l'ouvrage au-dessus sur Musaylima, fait l'hypothèse que les rares productions de Musaylima rapportées par la tradition islamique pourraient avoir constitué un "coran" de Musaylima.
Premare, dans son ouvrage "Fondations de l'Islam", rapporte un hadith selon lequel il y avait plusieurs "corans" dont un qui indique comment pratiquer la prière (il n'y a rien de tel dans le Coran dont nous parlons).
Je ne suis pas loin de penser que bon nombre de hadiths pourraient avoir été à l'origine des "corans" utilisés par les premiers dirigeants arabes.
Une autre hypothèse, dans la veine des théories de Günther Lüling au sujet du Ur-Quran, est que le Coran actuel soit le résultat de la fusion de plusieurs corans distincts à l'origine.
Ceci pourrait expliquer le style disparate entre sourates dites mecquoises et sourates dites médinoises.
Par exemple, dans les sourates dites mecquoises, je ne trouve rien qui aille vraiment dans le sens de ce que je peux décoder (comme au-dessus) à partir des sourates dites médinoises. Ni dans le sens contraire d'ailleurs.
Le Coran a une histoire de rédaction à établir, une histoire de production aussi, à la fois orale et écrite, ce qui rend la chose compliquée. Il est possible que des passages aient été supprimées (la tradition islamique évoque elle-même des cas d'abrogation). Pour Jean de Damas, je ne m'explique pas son témoignage : le seul Coran auquel il a pu avoir accès est un Coran établi par la famille omeyyade, donc un Coran similaire au nôtre.
J'avais lu un papier qui évoquait l'idée d'une interpolation ultérieure des écrits de Jean de Damas lui-même. Je ne sais pas si j'arriverai à retrouver la référence.
Comment interprètes-tu les versets coraniques qui évoquent Muhammad ?
Il n'y a que quatre versets en tout et pour tout dans le Coran qui explicitement évoquent Muhammad (
https://corpus.quran.com/search.jsp?q=muhammad).
Tout le reste des mentions n'apparaissent que dans les traductions du fait de la compréhension propre au traducteur.
Pour un ouvrage de plusieurs milliers de pages sensé avoir émané de Mahomet (écrit ou révélé, comme on veut), ça paraît étrangement peu.
Même si on peut des trouver des explications plausibles à cette rareté.
En outre, pour ces quatre versets, à chaque fois, ils sont insérés d'une façon qui n'a pas de lien particulier avec le reste du texte
Ou qui pourrait être un commentaire du texte autour, par exemple un commentaire inséré par un lecteur ou par un imam pour un prêche à la mosquée, et ensuite recopié par des scribes comme s'il faisait partie du texte d'origine.
A ce petit jeu, et pour peu que ce soit cette version qui survive, on se retrouve quelques décennies plus tard avec un texte chargé d'interpolations.
Auteur : enso
Date : 21 oct.24, 04:36
Message : lekh lekha our kasdim (kaldu) vers YRH our shalim
http://ghansel.free.fr/ismael.html
https://topbible.topchretien.com/dictio ... ur-ou-our/
je lirai ce qui a eté dit tete reposé
L'interprétation que donne Ibn 'Arabî ci-dessous coïncide avec celle de 'Alî, pour qui ce mot signifiait
« l'illumination de l'aurore» (tanwîr al-subh), cf. Tabarî, Jâmi al-bayân XV 318-9.
Selon Ibn 'Arabî, l'expression coranique fâra l-tannûr signifiait métaphoriquement chez les Arabes l'apparition de la clarté de l'aube (daw' al-fajr) ;
cf. Futûhât I 493, à propos de la prière surérogatoire de l'aube et I 608, à propos du début du temps du jeûne.
Le verbe fâra associe l'eau et le feu,
puisqu'il signifie « jaillir » pour l'eau,
« bouillonner » pour la marmite
et « rougeoyer de chaleur » pour le four.
FAYD
http://www.bahai-biblio.org/centre-doc/ ... ieu-13.htm
Chapitre II. Théologie de la théophanie en islam
https://books.openedition.org/editionscnrs/8065?lang=fr
http://esprit-universel.over-blog.com/2 ... e-noe.html
http://projetbabel.org/forum/viewtopic.php?t=22890
https://fr.wikipedia.org/wiki/Athanor_(four)
aurore aurum
viewtopic.php?p=1559311#p1559311
https://fr.wiktionary.org/wiki/aurum
https://dictionnaire.lerobert.com/definition/aurore
Lueur brillante et rosée qui suit l'aube et précède le lever du soleil ; moment où le soleil va se lever...
au figuré Aube, commencement. L'aurore des Temps modernes.
Aurore boréale, polaire ou australe : arc lumineux (jet d'électrons solaires) qui apparaît dans les régions polaires de l'atmosphère.
Auteur : LeilaMekki
Date : 24 oct.24, 03:41
Message : C'est vrai que la
sorcellerie est souvent perçue comme contraire aux principes islamiques et peut être vue comme un acte de polythéisme. Dans de nombreuses communautés musulmanes, ces pratiques sont condamnées en raison de En raison de sa violation des choses sacrées.
Auteur : imago
Date : 25 oct.24, 04:50
Message : Vous connaissez l'histoire de l'humiliation ; Numérisé par rapport au texte original (hébreu) 6.22.16.14.5 l'humiliation est strictement comme la séquence AGAR qui a donc la même réduction finale 4 qu’Israël, descendance de SARAÏ : ce qui signifie que Sara a fabriqué cette humiliation et que Dieu faisant noter ce terme « l’humiliation », d’ordre 4, se projette vers Israël et vers Agar, Elle ne pouvait que demander ce retour à la source de cette humiliation. Et Agar retourne chez sa maîtresse et va projeter au visage de celle-ci sa propre humiliation. Le problème est que depuis plus de 2000 ans, Israel et Ismael sont de la même souche ISMAeL et ISRAeL;Seule différence entre les deux le M à la place de R !!!
Auteur : omar13
Date : 25 oct.24, 05:48
Message : imago a écrit : 25 oct.24, 04:50
Vous connaissez l'histoire de l'humiliation ; Numérisé par rapport au texte original (hébreu) 6.22.16.14.5 l'humiliation est strictement comme la séquence AGAR qui a donc la même réduction finale 4 qu’Israël, descendance de SARAÏ : ce qui signifie que Sara a fabriqué cette humiliation et que Dieu faisant noter ce terme « l’humiliation », d’ordre 4, se projette vers Israël et vers Agar, Elle ne pouvait que demander ce retour à la source de cette humiliation. Et Agar retourne chez sa maîtresse et va projeter au visage de celle-ci sa propre humiliation. Le problème est que depuis plus de 2000 ans, Israel et Ismael sont de la même souche ISMAeL et ISRAeL;Seule différence entre les deux le M à la place de R !!!
il me semble que tu es dans la confusion totale !
Ismaël et Isaac sont des frères et tous deux fils d'Abraham.
Ismaël c'est l'oncle paternelle de Israel fils d'ISAAC.
Sara, était la grand mère d'irael.
Ismael plus grand de 14 ans par rapport a Isaac était le Fils de Agar, tandis que Isaac etait le fils de Sara.
Isaac avait épousé une cousine paternelle, ils ont eu deux enfants, Giacob et Esau.
Esau était l’aîné des deux frères mais le Dieu Unique Allah swt avait choisi Giacob pour l’héritage de Isaac .
A partir de ce moment, Giacob, était appelé Israël d'ou la descendance de Israélites.
je que le nom juif a commencé a exister qu'avec Jude, d'ou la falsification de la Torah.
Esau, qui a donné la descendance de tous les romains et/ou Européens, et qui faisant parti des païens.
Les paiens, n’étaient pas concerné par le message divin transmis par Jesus, puisque ce dernier a été envoyé qu'aux brebis juives égarées, dont le le principale but était de remettre les juifs qui s’étaient éloigné du chemin que Moise leur avait indiqué et leur annoncer la bonne nouvelle qui est la venu de l’Élu envoyé pour toute l'humanité et qui est le prophète Mohamed ppsl.
Auteur : Salam Salam
Date : 25 oct.24, 06:27
Message : omar13 a écrit : 25 oct.24, 05:48
Les paiens, n’étaient pas concerné par le message divin transmis par Jesus, puisque ce dernier a été envoyé qu'aux brebis juives égarées, dont le le principale but était de remettre les juifs qui s’étaient éloigné du chemin que Moise leur avait indiqué et leur annoncer la bonne nouvelle qui est la venu de l’Élu envoyé pour toute l'humanité et qui est le prophète Mohamed ppsl.
Je sais que tu sais que c’est Jésus alayhi salam qui reviendra à la fin des temps pour toute l’Humanité et pas Muhammad saws
Alors quel prophète boucle la boucle?
Qui peut tuer le Dajjal à part Jésus alayhi salam?
Avec la permission d’Allah
Nombre de messages affichés : 121