a écrit :Le problème à mon sens Homère, c'est que tu raisonnes comme les TJ le font pour le serviteur fidèle et avisé. C'est à dire que tu penses que ce sera une situation réelle, alors que c'est avant tout un enseignement. Certes, Jésus viendra dans sa gloire et jugera les nations. Mais il faut voir l'enseignement, et ne pas comme les TJ, croire qu'il y aura réellement un esclave fidèle et avisé identifié, et réellement des gens qui poseront la question "quand t'avons nous vu...?".
Le but de toutes ces paraboles, c'est l'enseignement. Si on oublie ça, on tombe dans le piège dans lequel est tombé la WT.
MLP,
Je rappelle le statut HYBRIDE de Mt 25,31ss qui est à la fois parabole ou allégorie (du berger, des moutons et des chèvres, d'un "roi" jugeant ses sujets) et prophétie, ou plus exactement vision apocalyptique. Le langage du texte
oscille constamment entre ces genres. Donc ce texte ne se résume pas à une parabole.
Nous avons pas la même lecture du texte, il m’apparaît que l'auteur met en scène l'ignorance des "petits" et des "frères" que j'assimile aux nécessiteux en général, ou aux
missionnaires nécessiteux en particulier (là-dessus les avis sont partagés).
Pour moi c'est ici
l'élément social qui prime (un peu comme dans l'épître de Jacques, qui est thématiquement très proche de Matthieu). Le roi en gloire tout en haut de l'échelle sociale, devant qui tout le monde spontanément se prosterne, s'identifie à ceux qui sont tout au bas de la même échelle, et que les classes moyennes (les vrais destinataires) ont tendance à mépriser. Que ceux-là soient présentés (démonstratif!) au jugement comme des membres de la famille royale, et qu'en les honorant ou en les humiliant on ait honoré ou humilié le roi lui-même, c'est un retournement de situation typiquement... évangélique (les premiers seront les derniers, et vice versa).
Par rapport à ça, la question de savoir si les nécessiteux désignés sont "tous les nécessiteux" ou "les missionnaires mendiants" est secondaire. Dans le contexte de Matthieu je pencherais vers la seconde hypothèse; si on était dans l'évangile de Luc, ce serait résolument vers la première.
Mais même en retenant la seconde, le point clé à mes yeux est que les missionnaires en question sont des petites gens dans une situation extrêmement précaire, tels que l'étaient les disciples répondant à l'ordre de mission du
chapitre 10 (à relire très littéralement). Des gens dont on pouvait facilement se débarrasser, ou à qui on pouvait au contraire offrir une
coupe d'eau, un repas, le gîte pour la nuit. Des gens qui pouvaient aussi se retrouver en prison, et à qui les bonnes âmes du coin, sympathisantes ou non de leur message, pouvaient apporter du secours.Le dénuement que vivent ces petits de la parabole/prophétie (faim, soif, besoin d'être accueilli et vêtu, risque de la maladie ou de la prison) correspond bien aux conditions précaires de la mission des disciples, telle que Jésus l'a décrite au
chapitre 10.
Pour Matthieu ces petits que sont les
disciples sont caractérisés par leur
situation de précarité, l'équivalent est à chercher chez Luc dans la figure des « pauvres ». La statistique alors s'inverse : le terme "pauvre" se trouve 10 fois chez Luc, contre 5 fois chez Matthieu.
L'ignorance est au
centre du récit. Ni les "moutons" ni les "chèvres" ne SAVAIENT que ceux qui avaient faim, soif, étaient les "frères" du roi. Ni que leur action ou omission (car il s'agit bien de faire ou de ne pas faire le bien, ça c'est un thème matthéen habituel, cf. 7,21ss). Ce point me semble clair et incontournable. Les actes jugés ont été commis (ou omis) dans
l'ignorance totale de l'enjeu (d'où la protestation des uns et des autres,
quand t'avons-nous vu...). Ils sont cependant suffisants pour que le jugement soit sans appel.
Cette parabole/prophétie a bien une MORALE : une invitation à la générosité bien sûr, mais surtout à l'ATTENTION. On a beau savoir, on ne sait jamais. Qu'on ait fait ou qu'on n'ait pas fait par le passé, faire ou ne pas faire est grave. A chaque fois.
Une petite remarque supplémentaire :
1) Attention aux idées préconçues qui empêchent de lire les textes les plus simples, et qui se cachent derrière des formules comme "il (n')est (pas) raisonnable de penser que", dont la Watch est friande. Si, par exemple, tu as décidé d'avance qu'il était impossible que Dieu privilégie les pauvres pour la seule raison qu'ils sont pauvres, tu ne POURRAS pas lire les textes qui disent noir sur blanc que, justement, c'est cela qu'il fait (Luc p. ex., encore plus que Matthieu). Il FAUDRA que tu leur fasses dire autre chose que ce qu'ils disent. Et je ne doute pas un instant que tu y arriveras!