Bonjour pauline.px,
pauline.px a écrit :Alors, si le sens de « Notre approche écarte donc tout "miracle épistémologique", c'est-à-dire un phénomène surnaturel faisant naître instantanément une connaissance chez un sujet donné sans activité de son esprit » n’était-il pas plus simple dire « sans cerveau, on ne peut pas penser » ?
Pour être honnête, je ne peux pas garantir qu'il s'agit là de ce que Vicomte voulait dire et je regrette qu'il ne soit pas là pour expliciter ce point (quoiqu'il me semble que si on fait la lecture complète de ce fil, il a été déjà abordé plus d'une fois, et on peut trouver des éclaircissements... mais c'est long...). Et même si le sens global est correct, "sans cerveau, on ne peut pas penser" n'est pas aussi spécifique que ce que Vicomte a proposé.
pauline.px a écrit :J’avais cru comprendre que le sujet du topique était une démonstration.
Pour être honnête à nouveau, je ne suis pas convaincu par le caractère purement démonstratif de Vicomte. Mais je ne suis pas sûr d'avoir encore bien compris l'entièreté de son raisonnement. Par contre, je partage de nombreuses positions qu'il a exprimées tout au long de ce laborieux - mais intéressant! - débat.
pauline.px a écrit :Je suis sûrement victime de préjugés sur la notion de démonstration mais je me refuse à parler de démonstration quand des hypothèses implicites ne sont pas établies et/ou quand la conclusion s’introduit dans les hypothèses.
Je ne pense pas que les hypothèses soient implicites. Au contraire, il pose d'entrée de jeu les propositions de bases sur lesquelles il s'appuie. Et a tenté plus d'une fois d'apporter des précisions sur ces hypothèses de départ. Et je ne vois nulle part où la conclusion aurait été introduite dans les hypothèses.
pauline.px a écrit :Et ce n’est pas parce que les scientifiques doivent se passer de la fameuse « hypothèse dieu » que cette déontologie scientifique contraint une démonstration de l’inexistence de D.ieu, béni soit-Il, à poser que « Tout ajout est superflu ou alors doit être justifié ».
Autant dire tout de suite que « Toute intervention divine est impossible ou doit être démontrée scientifiquement. »
Avec « Tout ajout est superflu ou alors doit être justifié » la démontration de l'inexistence de D.ieu, béni soit-Il, se réduit en une affirmation basique mais péremptoire : « dieu n'existe pas puisque l'on n'a pas démontré scientifiquement son existence »
Ca n'a rien à voir avec la déontologie scientifique, c'est une question de méthode. Il peut être très difficile de prouver la légitimité du principe de parcimonie. Mais je crois pourtant qu'on comprend très bien sa pertinence grâce aux absurdités provoquées par son non-respect (cf mes lutins que tu trouvais farfelus). Je pense que si on ne se met pas d'accord sur la méthode avant toute chose, il sera impossible d'avancer. Personnellement, je constate que la méthode scientifique a été jusqu'à présent la seule capable de produire des connaissances, en témoigne l'omniprésence de la technologie dans notre vie de tous les jours. Je refuserai de discuter avec un interlocuteur qui nierait cela (je ne suis pas du tout en train de dire que c'est ton cas). L'utilisation de la méthode scientifique me semble être une idée excellente s'il s'agit de produire des connaissances. Au préalable, il peut être intéressant (peut-être même indispensable) de se demander si la question posée peut être répondue par cette méthode. Si oui, elle est le meilleur choix; si non, il faut encore argumenter d'une autre méthode qui aurait fait ses preuves. Personnellement, je n'en vois aucune.
Quant à "dieu n'existe pas puisque l'on n'a pas démontré scientifiquement son existence", bien que cela te semble péremptoire, je rappellerai deux choses:
1. si le mot "dieu" n'est pas défini, aucune phrase dans laquelle il est utilisé n'a du sens.
2. je reprends mes lutins pour dire "les lutins n'existent pas puisque l'on n'a pas démontré scientifiquement son existence" (n'oubliez pas d'ajouter mentalement "jusqu'à preuve du contraire" si on parle dans le champ de la science)
pauline.px a écrit :Pour l'instant, au risque de répéter des questions sans réponses, voici ce que je perçois aux tout premiers pas de la démonstration :
1 ) Tant que l’on n’a pas démontré que de son point de vue D.ieu, béni soit-Il, n’existe pas il est arbitraire de poser que l’activité de notre cerveau est absolument insensible à l’influence spirituelle de D.ieu, béni soit-Il, (ou, si l’on est athée, l’influence spirituelle d’autres êtres pensants).
Pardonne-moi, mais je trouve un peu culotté de mettre la charrue aussi longtemps avant les boeufs, tout en critiquant que la conclusion de son contradicteur est contenue dans ses prémisses.
Ou alors, tu considères que la position par défaut est d'admettre l'existence de Dieu et là, nous avons, outre le choix de la méthode, un différend de taille sur la position par défaut. Il m'apparaît pourtant absolument clair que, d'une part, nous naissons tous athées, et que d'autre part, quand on s'essaie à construire un paradigme qui explique le monde, on part du plus basique possible (ce qui serait probablement nos représentations sensibles).
pauline.px a écrit :2 ) Tant que l’on n’a pas démontré que de son point de vue D.ieu, béni soit-Il, n’existe pas et tant que l’on n’a pas défini ce que l’on entend par "pensée" ou "penser", il est arbitraire de poser que D.ieu, béni soit-Il, ne pense pas.
Les lois de la nature ne sont-elles pas des pensées de D.ieu ? béni soit-Il. Suis-je autre chose qu’une pensée de D.ieu ? béni soit-Il.
Encore une fois, je ne comprends pas le sens de la phrase "Dieu pense" ou son contraire "Dieu ne pense pas". Je ne sais pas ce qu'est Dieu.
pauline.px a écrit :3 ) Tant que l’on n’a pas défini ce que l’on entend par "pensée" ou "penser", comment poser que des méta-organismes comme une espèce biologique ou le cosmos ou l’Histoire … ne "pensent" pas ?
ou encore, comment poser que la réduction de la fonction d'onde de la mécanique quantique n'est pas un phénomène de "pensée" ?
Effectivement, on peut dire tout et n'importe quoi d'un mot qui n'a pas été défini, mais rien n'aura de sens non plus. J'ai cru pourtant voir passer différentes tentatives de définition de "penser". Elles me paraissaient plutôt sensées, mais tu n'avais pas l'air d'y adhérer. On n'y parlait pas assez de "D.ieu" sans doute?
pauline.px a écrit :4 ) Peut-on définir la pensée (encore que l’item A1 ne parle que de la connaissance) comme le fruit de l’activité neurologique du sujet ?
Cette équivalence ne saute pas aux yeux, à moins d’y voir une tautologie sous-produite par des définitions ad-hoc.
Équivalence difficile car il est audacieux d’affirmer que toute activité neurobiologique est de la "pensée".
À ce stade de la démonstration, comment écarter par principe l’existence d’autres agents tout aussi importants (voire plus importants) dans la "pensée" d'un sujet ?
Encore une fois parce qu'on tente une construction du bas vers le haut et non l'inverse. Et je pense que la proposition de Vicomte n'est pas que toute activité neurobiologique est de la pensée, mais plutôt que toute pensée est une activité neurobiologique. C'est très différent.
pauline.px a écrit :5 ) Tant que l’on n’a pas démontré que de son point de vue D.ieu, béni soit-Il, n’existe pas il est arbitraire de poser que ce n’est pas naturel (la démonstration parle explicitement de "surnaturel") quand D.ieu, béni soit-Il, intervient dans l’histoire d’un sujet.
Tout ce qui existe n’est-il pas naturel par définition ?
Encore une charrue avant les boeufs.
pauline.px a écrit :6 ) Tant que l’on n’a pas démontré qu’une réalité matérielle (le "réel voilé", par exemple) précède les sensations, les connaissances et les concepts, on se retrouve avec un concept de "cerveau" qui n’a aucune antériorité logique sur le concept de "pensée".
Pour vous paraphraser : « Sans pensée pas de cerveau. » et si j’ai compris la définition : « Sans pensée, rien n’existe. » Dès lors comment définir la "pensée" par le "cerveau" ?
Celle-ci est plus délicate. Je crains qu'il y ait des choses qu'on ne pourra pas démontrer et que l'on devra poser pourtant comme axiome. Il me paraît important que les postulats soient les plus réduits possibles, mais ils sont de toute façon inévitables. Le problème vient certainement que l'on ne choisit pas les mêmes. De mon point de vue, il me semble que tu prends des postulats très forts, trop forts.
pauline.px a écrit :Mais peut-être qu’en réalité le projet du topique est de répéter inlassablement l’apologétique athée à celles et ceux qui s'obstinent à demander au "démonstrateur" de démontrer ce qu'il avance.
Allons, allons. N'accuse donc pas les autres de mauvaise foi
pauline.px a écrit :À mes yeux, vous ne donnez pas davantage de consistance à la démonstration en répondant à chaque objection par une formule équivalente en dernière instance à "prouvez-moi que dieu existe".
C'est une critique pertinente. Mais je ne cherche pas à rajouter de la consistance à la démonstration de Vicomte (car je ne suis pas sûr qu'il s'agit bien d'une démonstration). Par contre, je cherche à donner de la consistance aux différentes idées qui en émanent.
Pour résumer mon point de vue à ce stade:
- j'en viens de plus en plus à croire que l'existence de Dieu est un postulat pour toi. Qu'il faut d'abord admettre son existence, et puis seulement trouver ("trouver" et non pas "chercher") des failles dans les propositions de ceux qui ne sont pas d'accords.
- je ne suis pas sûr non plus qu'on soit d'accord sur le choix de la méthode. Je souscris à la méthode scientifique.
- Mais il faut de toute façon se demander si la question posée peut seulement être répondue par la méthode choisie.
- Quant à la question de Dieu en particulier, je suis plutôt partisan de demander à celui qui m'en parle de me dire de quoi il parle. Et de ne pas m'aventurer dans une démonstration de son inexistence car je ne sais pas, de toute façon, de quoi on parle. Si on regarde bien la démonstration de Vicomte, il me semble que c'est ce qu'il fait aussi en fin de compte. Car la suite de sa démonstration pourrait sans doute se résumer ainsi: Dieu n'existe pas (jusqu'à preuve du contraire), car aucune définition jusqu'à présent proposée n'est satisfaisante. (Insatisfaisante pour plusieurs raisons: ne renvoie à rien dans la réalité, pas de pouvoir explicatif, pas de pouvoir prédictif, en contradiction avec des connaissances prouvées, en contradiction interne, etc.)
Je pense qu'il faut se mettre d'accord sur certains points avant de continuer le débat. Si l'accord n'est pas trouvé, je propose d'en arrêter là car je ne vois pas l'intérêt de poursuivre. Les points en question sont:
- la position par défaut: celle où pose l'existence de dieu ou celle où on ne la pose pas?
- le choix d'une méthode propre à produire des connaissances.
Cordialement