phylactère
Ta réponse démontre hélas une réalité qui me navre et que tu devrais généraliser.
La traduction d'un texte biblique et l'orientation qui lui est donnée est fonction "souvent" de la croyance de son auteur.
Tu viens, d'un revers de main, de décrédibiliser la traduction du pauvre Louis Segond en nous rappelant sa réticence à croire en la trinité.
Et de nous citer la bible de Jérusalem, bien catholique et donc "sans parti pris" pour ramener le pauvre homme dans le bercail trinitaire.
Louis Segond est pourtant l'un des traducteurs adoubé par le monde protestant. Ils doivent bien lui trouver des qualités d'honnêteté !
Je te fais néanmoins remarquer que j'ai produit la traduction interlinéaire "mot à mot" que je reproduis ci-dessous et que c'est évidement elle qui est à la base de mes explications.
Je mets ci-dessous le texte grec et sa traduction brute interlinéaire de Segond.Phil 2:5-6.
Τοῦτο (ceci) γὰρ (pour) φρονείσθω (être désiré )ἐν (par) ὑμῖν (vous) ὃ (qui)καὶ (aussi)ἐν (dans) χριστῷ (Christ) Ἰησοῦ (Jésus): ὃς (qui) ἐν (dans) μορφῇ (une forme) θεοῦ (le Dieu) ὑπάρχων (était), οὐχ (pas) ἁρπαγμὸν (une usurpation) ἡγήσατο (a médité) τὸ (le) εἶναι (pour être) ἶσα (comme) θεῷ (le Dieu) ἀλλ’ (mais) ἑαυτὸν (lui-même) ἐκένωσεν (dépouillé), μορφὴν (une forme) δούλου (d'esclave) λαβών (a pris), ...
phylactère a écrit :
Tu l'écris bien : il avait la forme de Dieu (la nature divine) et il a pris la condition de serviteur (la nature humaine). C'est en cela qu'il ne resta pas arc-bouté à son égalité avec le Père : parce qu'il a accepté la mission donnée par le Père, qui consistait à venir sur terre, parmi les êtres humains, en tant qu'être humain. Jésus se devait donc de donner l'exemple parfait de dévotion, de soumission, dans le cadre de cette mission, en tant qu'être humain.
Seulement ton analyse se fait sur la traduction que tu as soigneusement choisie pour "coller" au sens qui correspond à ta croyance du moment.
Je note pour ma part, que le grec original emploie le mot "usurpation". ἁρπαγμὸν.
Et qu'il te serait difficile de le placer dans ta façon très soft de traduire ce texte.
Jésus n'aurait donc pas voulu s'arc-bouté à ce qu'il était, mais usurper .. Et tout est dans ce mot.
Le sens fondamental de ce verbe tient quand même à "s'octroyer une position que l'on n'a pas" par un acte souvent violent et toujours en opposition avec celui qui détient le titre usurpé.
Ce ne serait donc pas une attitude d'esprit paisible que Jésus aurait évité mais une opposition à Dieu par une usurpation d'égalité.
Le mot grec
harpazo est à l'origine de ce mot :
Definition to seize, catch up, snatch away NASB Translation carry off (1), caught (4), snatch (2), snatched...away (1), snatches (1), snatches away (1), snatching (1), take...away...by force (1), take...by force (2).
à saisir, rattraper,
arracher emporter (1), pris (4),
arracher (2),
arraché ... loin (1), des bribes (1), enlève (1),
arraché (1),
prendre ... loin ... par la force (1),
prendre ... par la force (2).
phylactère a écrit :
Le texte de Paul dit plus bas qu'il est devenu obéissant. Je crois qu'il faudrait s'attarder sur ce point. Qui devient obéissant sinon celui qui n'avait pas à l'être préalablement ? Si le Fils n'avait pas à être obéissant, c'est pour l'une de ces deux raisons-ci :
- le Fils est le parfait égal du Père, depuis toujours et pour toujours ;
- le Père aime tellement son Fils qu'il en fait son égal, coûte que coûte.
L'autre sens est que le fils au ciel n'avait pas eu la moindre occasion de souffrir pour montrer une obéissance déjà affirmée et que sur terre l'apprentissage de l'obéissance s'est fait dans la douleur et à un niveau impossible au ciel.
Tu oublies ainsi la fin de la phrase qui va dans mon sens. Jésus est devenu obéissant
jusqu'à la mort. C'est cette expérience unique pour lui que Paul met en avant ici. D'obéissant, Jésus est devenu obéissant
jusqu'à la mort.
phylactère a écrit :Je penche pour la seconde, et elle me fait penser à un père humain qui finit par traiter son fils humain en égal parce que ce dernier a gagné sa confiance et qu'il s'est montré digne. Mais Dieu, lui, aime gratuitement. C'est là que la Trinité prend tout son sens : elle est le témoignage d'un Dieu qui se tourne vers l'Autre, d'un Dieu fondamentalement différent de ce que prêchent les autres monothéistes, qui voient davantage le courroux de Dieu que son amour inconditionnel.
Tu vas finir par nous comprendre car tu es plus proche de nos convictions que tu ne le penses.
Néanmoins,Jésus, au ciel, après sa résurrection, est loin d'être l'égal de Dieu. Tout ce qu'il a, il le reçoit de Dieu et quand il a réussi finalement sa mission, Paul ramène ses lecteurs à la réalité en I Cor 15.
Médite sur la façon dont Paul l'écrit : Verset 27. "
En effet, il a tout mis sous ses pieds. Mais lorsqu'il dit que tout lui a été soumis, il est évident que c'est à l'exception de celui qui lui a tout soumis."
Pourquoi ce bémol de Paul ? Il semble qu'il veuille à ne pas aller trop loin.. Il vient de nous montrer un Christ triomphant, vainqueur. Tous lui est soumis.. Et en écrivant cela il semble se dire : attention, n'allons pas trop loin. Jésus même à ce stade sera toujours soumis à son Père, Dieu. (verset 24 et 28).
Ton hypothèse d'un Père qui finit par traiter en égal son fils obéissant m’intéresse car elle détient une partie de la vérité à mon sens. Tu pars forcement du fait que Jésus ne serait pas l'égal de Dieu à priori car dans ce cas, ton hypothèse n'aurait aucun sens.
Nous pensons nous que Dieu élève son fils au niveau le plus haut qu'il puisse offrir à quelqu'un. Jésus devient le second personnage de l'Univers et se voit offrir des pouvoirs que seul Dieu possède de façon innée.
Mais cela s'arrête là, et Paul nous ramène à l'évidence: quoi qu'il arrive, le fils sera toujours soumis au Père.
phylactère a écrit :
C'est un parti pris. Nous pouvons difficilement trancher la question du mot "arpagmon" car il n'est employé nulle part ailleurs dans la Bible (Septante et Nouveau Testament) et figure rarement dans les textes grecs de l'Antiquité.
Il est logique de penser que le Fils se soit soumis avant de venir sur terre. Sa décision a été prise nécessairement avant son avènement humain. Mais cela ne signifie pas qu'il soit devenu le serviteur de son Père dès son engendrement.
Le mot "arpagmon" signifie "bien mal acquis" et se traduit par "usurper". L'acquisition avec ce mot est toujours connotée négativement et se traduit par le mot "mal" dans "
mal acquis".
Que ce terme ne soit pas employé ailleurs dans la bible ne vous octroie pas le droit d'en changer le sens courant reconnu par tous les hellénistes. Il s'agit de manœuvrer pour prendre ou acquérir illégalement un droit ..
Donne moi une seule bonne raison de décider que le sens commun du mot "arpagmon" doit être changé ici ?
Il me semble que c'est la croyance en l'égalité qui a été à la manœuvre pour décider de lui faire dire autre chose.
Ne faut-il donc pas aller du texte pour établir la croyance, et non pas le contraire, partir de la croyance pour changer le sens des mots du texte..
Tu reconnais néanmoins logiquement que Jésus a du se soumettre à Dieu (et non pas au Père dans le texte) avant de venir sur terre car c'est le sens de la démonstration de Paul. Il me reste à te démontrer qu'il était déjà soumis avant ce que le mot "arpagmon" sous-entend.
phylactère a écrit :
On peut tout à fait concevoir que le Fils soit devenu obéissant alors qu'il était toujours au ciel, car cette soumission entrait dans un cadre très précis : sa mission terrestre.
Dans ta définition de l'expression "devenir obéissant".
Un exemple pour t'expliquer.
Ma petite fille sait se déplacer à vélo.
Mais hier ma petite fille a appris à se déplacer à vélo sans les roulettes..
La seconde phrase n'indique pas qu'elle ne savait pas se déplacer à vélo avant hier, mais qu'hier, elle a appris à le faire dans une circonstance différente.
Jésus, et tu le dis toi-même, a obéi à son Père en se soumettant à lui pour venir sur terre, mais sur terre, Jésus est devenu obéissant... jusqu'à la mort. Son obéissance déjà effective avant, est devenu plus forte à cause de l'opposition violente qu'elle a connue pour s'exercer.
A vaincre sans péril, il n'y pas de gloire. A obéir sans opposition, sans tentation, sans risque, il n'y a pas d'obéissance éprouvée.
phylactère a écrit :
Revenons sur l'introduction de ce chapitre. Paul interpelle les Philippiens et leur enjoint de considérer les autres comme étant supérieurs à eux.
La lettre de Paul s'adressait à tous les Philippiens convertis au christianisme. Imaginons un instant que Paul n'ait pas écrit cette lettre et qu'il en ait donné le contenu à chacun de ces Philippiens.
Il aurait dit à X ceci : "N'accorde rien à l'esprit de parti, rien à la vaine gloire, mais par l'humilité estime les autres supérieurs à toi."
Il aurait dit à Y ceci : "N'accorde rien à l'esprit de parti, rien à la vaine gloire, mais par l'humilité estime les autres supérieurs à toi."
Il aurait dit à Z ceci : "N'accorde rien à l'esprit de parti, rien à la vaine gloire, mais par l'humilité estime les autres supérieurs à toi."
Et ainsi de suite jusqu'à avoir obtenu une entrevue avec chacun des Philippiens appartenant au christianisme.
La question que je me pose est celle-ci : qui de X, Y, Z et tous les autres est le supérieur ? Y a-t-il un supérieur qui ne soit pas inférieur aux autres ? Non. Il n'y a pas de supérieur absolu, il n'y a que des supérieurs relatifs. X est supérieur à Y du point de vue de X, alors que Y est pourtant supérieur à X du point de vue de Y cette fois !
Le Fils a considéré son Père comme lui étant supérieur, dans un souci d'humilité. Mais est-ce une supériorité absolue ou une supériorité relative ? N'oublie pas que c'est Paul qui donne cet exemple...
Je reconnais la pertinence de ta logique mais j'y oppose la réalité du phénomène explicatif en général. On va toujours vers l'utilisation d'exemple qui vont au delà de ce qu'on veut expliquer. Des sortes d'hyperboles.
Quand Jésus dit qu'un chameau passera plus facilement par le chat d'une aiguille qu'un riche n'accepte la vérité, personne ne pense que ce sera aussi difficile pour le riche que pour ce pauvre chameau. Un exemple qui va beaucoup plus loin est d'autant plus efficace.
De plus, je mets quand même un bémol à ta logique.
Si tu place le point retenu par Paul sur la notion d'égalité, tu pourrais avoir raison.
Si tu place le point retenu par Paul sur la notion de forme de Dieu, alors j'ai raison.
Or c'est ce point qui est d'abord mis en avant par Paul. Jésus était dans une forme de Dieu, comme Dieu, et pourtant, il n'usurpe pas l'égalité avec Dieu. Le désir d'usurpation de l'égalité pouvait naître de la nature ou forme commune que Jésus a avec son Père.
Ce qu'a fait Satan en réalité..
Le point commun entre Jésus et Dieu, c'est que tous les deux sont dans une forme de Dieu.. des divins, comme les anges (Psa 8:5).
phylactère a écrit :
Non, cela signifie qu'à un moment précis, le Fils bascule dans la soumission par rapport au Père, mais c'est dans son humanité que cette soumission intervient.
Je me permets d'insister car ta réponse n'a rien d'explicatif.
Jésus est Dieu selon toi. Au ciel et sur la terre. Il ne peut donc refuser l'égalité avec lui-même.
Il aurait fallu lire que Jésus refusait cette égalité avec le Père, mais pas avec Dieu. Et d'ailleurs, toi même tu prends soin naturellement de mettre le mot Père pour parler de cette égalité.