@ Erwan
Après avoir fini mon « petit travail », je vais répondre maintenant à tes deux posts.
D’abord, moi je trouve que j’ai bien profité de ce fil, car au départ je n’y connaissais vraiment rien et j’avais le désir de comprendre un peu mieux ce point depuis longtemps. Les liens de cagoule m’ont aidé à démarrer et ensuite j’ai complété par quelques lectures personnelles (internet).
Tu dis d’abord que « le fait que les musulmans ne disposent pas du mushaf reconstitué à l’époque d’Uthman et que l’existence des variantes » est bien connu des musulmans ». Je pense que tu veux parler des musulmans informés, car ni Yass, ni Hamza sur ce fil ne sont disposés à admettre ce point de vue.
Pour la copie d’Ibn Mas’ud, il est difficile de connaître ce qu’il contenait puisqu’il n’est plus accessible. Sans rechercher la référence, je crois me souvenir qu’il y avait des témoignages indiquant qu’il y avait quelques différences sur certains passages du Coran, pas seulement la question des sourates de début et de fin et l’ordre des sourates. Toujours est-il que « je » vois la chose comme ça : Ibn Mas’ud connaissait bien « son » Coran appris de la bouche même de Muhammad, il s’en est fait où une copie personnelle. OK. Après la recension d’Uthman, il s’est retrouvé avec une « variante authentique ». En fait ce n’est pas un problème car il y a des hadiths Muhammad reconnait lui-même l’authenticité d’une variante de récitation du même verset. Après la fixation du codex d’Uthman – en rasm pur – il y a eu des variantes compatibles avec le rasm et des variations non compatibles . Au minimum certaines variantes de la copie d’Ibn Mas’ud n’était pas compatibles avec le rasm fixé par Uthman. C’est une raisons suffisante pour supprimer cette copie d’Ibn Mas’ud.
Pour la copie d’Hafsa (Abu Bakr), j’avoue que cela me reste un peu en travers de la gorge … ainsi que la destruction des supports matériels du Coran laissés par Muhammad. J’ai du mal à croire que c’est l’acte d’un homme authentiquement religieux. J’y vois là une volonté de centralisation du pouvoir : un acte de force et non un acte de droit.
Si le sujet du fil est de dire que le Coran est un faux,
il est mal introduit. Le fait que l’on ne dispose plus du mushaf reconstitué à l’époque d’Uthman, mais d’une copie ultérieure ne signifie pas que le texte soit un faux. Il faut éviter la confusion entre le texte – qui peut nous être parvenu – et le support matériel (manuscrit ou codex) – qui a disparu (sous réserve de découvertes ultérieures). Tu parles de l’acte de foi musulmane dans le fait que les versets et le mushaf donnés par Dieu ont été préservés. Cette approche accusatrice n’a par ailleurs rien à voir avec un « dialogue ».
Pour les chrétiens, nous plaçons notre foi en Jésus-Christ ressuscité ; il est impropre de dire que nous plaçons notre foi « dans les versets ou le texte de la Bible ». Au final c’est l’éclairage de la vie, de la mort et de la résurrection de Jésus qui donnent sens à la Bible et à la fois l’abroge « comme loi ». Pour la Parole de Dieu dans le Coran c’est différent, elle ne peut être que récitée et transmise qu’avec les mots mêmes reçus par Muhammad. Si il y a « reconstitution » dans le cas du Coran (c’est ton mot, je crois qu’on dit habituellement « collecte » ou « recension »), ce mot n’est pas du tout approprié pour la Bible. L’inspiration biblique n’a rien à voir avec des « versets qui descendraient » et qui seraient à recoller – passivement - comme un puzzle. Pas de comparaison possible ici.
Sur le plan chronologie, également rien à voir entre Bible. Pour l’Ancien Testament : un texte « rabâché » pendant dix à dix huit siècles, des sources multiples soutenues pas des institutions religieuses diverses qui convergent (c’est ce qu’on appelle la théorie documentaire), se soudent et son réinterprétés au fil des événements historiques avec des apports des cultures environnantes sur 30 à 60 générations (30 ans par génération). Pour le Coran, une Révélation sur une génération (610 à 632), mise par écrit après 1 an (Abu Bakr : 633). Pas de comparaison possible ici non plus.
Pour les manuscrit de Sanaa, je n’en tire pas trop de conclusions … sauf que maintenant c’est très mal parti pour une approche scientifique. C’est pourquoi j’ai signalé que le manuscrit du Ma’il à la British Library était insuffisamment « exploité » : il contiendrait 95% du Coran et très proche du Coran actuellement reçu. Mais cela ne signifie pas qu’il n’y a pas eu d’autres variantes.
Je n’osais pas le dire, mais effectivement
le Coran « originel » est d’abord oral. Simplement il faut bien comprendre cette formule … ce qui ne signifie pas que le texte qui a été transmis après est un faux. Je n’aborde pas la question de l’abrogation. C’est trop compliqué pour moi.
Comme je l’ai dit, il y a des travaux depuis de nombreuses années sur les Evangiles en syriaque (araméen). Je viens de découvrir un Evangéliaire selon la récitation orale des Apôtres. Texte des quatre Evangiles selon la Peshitto. Ce qui est révolutionnaire c’est le texte du IVème siècle comporte un découpage qui scande la récitation orale. Cette transmission de récitation orale chrétienne pr la tradition orientale (disparue de la tradition occidentale) correspond à un état du texte évangélique antérieur à l’état rédactionnel dernier dans lequel nous lisons aujourd’hui (transmis en grec).
Tes Evangiles en araméens existent donc bel et bien ! Source :
http://eecho.fr/?p=59&cpage=1