InfoHay1915 a écrit : ↑11 avr.23, 11:05
. https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Alexandre_Dumas
Une amie franco-arménienne m'a envoyé son texte rédigé il y a plus de 10 ans. Ci-dessous, il n'y a pas encore les références bibliographiques. Il s'agit de passages du livre d'Alexandre Dumas sur le Caucase avec des témoignages sur les Arméniens.
PS - À retrouver des Google.Books ou des PDFs de Gallica ou encore Archives-org sur les deux livres sur le Caucase.
Auteur connu du grand public actuel surtout par les nombreux films tirés de ses oeuvres comme LES TROIS MOUSQUETAIRES ou LE COMTE DE MONTE CRISTO, il fut par moment très à la mode et lu par des millions d’adolescents passionnés par les aventures de ses personnages pittoresques et par son style extrêmement vif.
Il s’essaya au théâtre et obtint très tôt le succès avec des pièces tombées depuis dans l’oubli.Il aborda ensuite le roman sur fond historique, genre dans lequel il excella même si la précision historique en est absente et si la psychologie des personnages reste rudimentaire. L’intrigue mêlant personnalités historiques et personnages fictifs en fit l’un des grands auteurs populaires français du l9ème siècle.
Homme extravagant, dépensant démesurément, endetté, il se fit journaliste et écrivit des récits de voyages avec peu de succès. Si les cadets de Gascogne et l’abbé Faria sont ainsi connus de tous, les deux ouvrages d’Alexandre Dumas père, sur la Russie et le Caucase (l858-59) , nous intéressent particulièrement puisqu’ils nous livrent les impressions de Dumas sur les Arméniens qu’il y rencontre.
Dumas se targue de faire « un voyage que personne n’a fait jusqu’à présent ...en 6 mois 3.OOO lieues ». Il visite d’abord l’Allemagne, le Danemark, Saint-Petersbourg, la Finlande, Moscou, Nijni-Novgorod, Astrakan, il traverse le Caucase, s’arrête à Derbent et à Bakou, séjourne à Tiflis et rentre en France via Trébizonde !
A Astrakan « les femmes arméniennes, qui ne sortent guère que le soir, vont enveloppées de longs voiles blancs qui dans le crépuscule leur donnent l’air de fantômes. Ces voiles, admirablement drapés, fisant valoir les formes qu’ils dessinent, rappellent, vus de près, les lignes élégantes des statues grecques. La ressemblance avec les chefs d’oeuvre de l’antiquité est doublée encore lorsque, par coquetterie, ces spectres vivants laissent voir leurs visages, purs et suaves, réunion de la beauté grecque et asiatique »
« Le lendemain de notre arrivée (à Astrakan) le maître de police vint nous prendre pour nous faire visiter l’intérieur de quelques familles arménienes et tatares. ....La première famille .....que l’on nous présenta, était arménienne:elle se composait du père, de la mère, d’un fils et de trois filles. Ces braves gens avaient fait des frais pour nous recevoir. Nous trouvâmes le fils qu fourneau, faisant un schaslik,-nous vous dirons tout à l’heure ce que c’est qu’un schaslik, -tandis que les trois filles et la mère avaient couvert une table de confitures de toute sorte et de risins de trois ou quatre espèces.....Quant aux confitures, je doute qu’il y ait au monde un peuple qui les fasse mieux que les Arméniens......CONFITURES DE POTIRON
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On fait blanchir les tranches de potiron dans de l’eau et de la chaux pendant trois jours ; puis , pendant six autres jours, on les laisse tremper dans de l’eau froide que l’on change deux fois par jour ; on les saupoudre de cannelle, on les fait cuire dans le miel, et on les met en pots. » Dumas donne ainsi les recettes des confitures de roses, celle de radis noir, de noix, d’asperges (en arménien latchers dit-il).. et celle du schaslik. Quelques lignes plus bas, Dumas rconte les trois actes principux de la vie chez les Arméniens, la naissance, le mariage et la mort. « LA NAISSANCE.- Lorsque naît un enfant,-et la joie est toujours plus vive lorsque c’est un garçon que lorsque c’est une fille,-on lui fait grande fête, en rassemblant autour du lit de l’accouchée les parents, les amis, particulièrement du sexe féminin. Le lendemain, le prêtre vient dans la maison et asperge l’enfnt d’(eau bénite. Au bout d’un mois ou deux, le père sort, cherche un jeune garçon dont la figure lui plaît, et même sans le connaître, le prie de le suivre à la maison. L’inconnu, qui devine dans quel but, ne refuse jamais. Le jeune homme prend l’enfant dans ses bras et l’emporte à l’église, suivi de tout ce qu’il y a de parents et d’amis à la maison. A l’église, on lave l’enfant dans l’eau tiède, le prêtre lui met au front de l’huile d’olive, roule un fil rouge et un fil blanc, les lui passe au cou en forme de collier, et les scelle avec une boulette de cire à bougie, sur laquelle il appuie un cachet qui laisse l’empreinte d’une croix. L’enfant garde le cordon jusqu’à ce qu’il se casse par un long usage ou par accident....Le parrain rapporte l’enfant, etle glisse dans le lit de la mère, qui, à partir de ce jour, peut se lever.On se met à table et on dîne. Seulement , toute faïence et toute verrerie ayant servi à ce dîner est brisée. Le premier jour de l’an qui suit la naissnce, le parrain, selon sa fortune, envoie des cadeaux à la mère. »
« Au nord le kouban et le Terk, au sud le Cyrus,e t l’Araxe, forment les limites de l’isthme caucasien ....le berger Caucase, paissant ses troupeaux sur le mont Niphate, qui spare l’Arménie de l’Assyrie, et au pied duquel, selon Strabon, le Tigre prend sa source, celui-ci eut l’imprudence de vouloir diputer le massge au fuyard. Saturne le tua d’un coup de faux, et Jupiter, pour éterniser le souvenir de ce meurtre, donna le nom de la victime à toute la chaîne caucasique... » sont les lignes d’introduction du second livre LE CAUCASE.
« Nous arrivâmes à Kislar le 7 novembre l858, à deux heures de l’après-midi. C’était la première ville que nous rencontrions depuis Astrakan. ...;Ce sont les Arméniens qui font le vin et l’eau-de-vie. En général, dans le Caucase et dansles provinces qui en dépendent, ce sont les Arméniens qui font tout. Chaque peuple a sa spécialité. Le Persan vend des soieries, le Lsghien vend des drps, le Tatar vend des armes; l’Arméniens n’a pas de spécialité, il vend de tout ce qui se vend, et même de tout ce qui ne se vend pas.En général, la réputation e l’Arménien n’est ps très bonne. »
Gourmet réputé et cuisinier, Dumas ne peut s’empêcher de donner une seconde fois la « recette » du schaslik qu’il fait lui-même.
Ses impressions sur Kislar « Kislar, est au rste, pour un artiste, une ville d’un pittoresque merveilleux. C’était la première fois que le mélange des costumes frappait nos regards. arméniens, Tatars,Kalmouks, Nogaïs, Juifs, se pressent dans les rues, chacun portant sns altération l’habit national. »
Plus loin, il décrit GIUMRI et ses magnifiques vergers, la grande muraille du Caucase et BAKOU. avec son naphte « il y a donc tout lieu de croire qu’un banc immense de naphte passe sous la mer Caspienne et s’étend jusque dans le pays des Turcomans...... » et sa population « Bakou se compose tout particulièrement de Persans, d’Arméniens et de Tatars ...L’Arménien et à peu près de la taille du Persan ; mais il engraisse, ce que le Persan ne fait jamais. Il a , comme le Persan, les traits d’une admirable régularité : des yeux mgnifiques, un regard qui n’appartient qu’à lui, et qui renferme à la fois, comme les trois rayons tordus dela foudre, la réflexion, la gravité, la tristesse ou la soumission, peut-être l’une et l’autre. Il a conservé les moeurs des Patriarches....le père est le maître absolu de la maison. »
Il rapproche ensuite la nation arménienne de la nation juive par « des souvenirs historiques qui rmontent à l’origine du monde. C’est en Arménie qu’était situé le paradis terrestre ; c’est en Arménie que prenaient leurs sources les quatre fleuves primitifs qui arrosaient la terre ; c’est sur la plus ahute montagne de l’Arménie que s’est arrêtée l’arche ; c’est en Arménie que s’est repeuplé le monde détruie ; c’est en Arménie, enfin, que Noé, le patron des buveurs de tous les pays, a planté la vigne et essayé la puissance du vin. »
Dans le chapître consacré aux Oudiouks « une des tribus du caucase....ils viennent on ne sait d’où, parlent une langue que personne ne comprend et qui n’a d’analogie avec aucune langue. » « Moïse Khoressatzi (orthographié par Dumas) dans son Histoire de Géorgie parle des Oudiouks, mais il ignore leur origine....Un historien arménien, Tchamtchiantz, les cite dans son Histoire del’Arménie, édition de Venise. » Bizarrement, Dumas ne spécifie pas que Khorénatzi est aussi arménien. Un Oudi, maître d’école, ré pond à Dumas sur son origine « qu’ils descendaient d’un des petits-fils de Noé, resté en Arménie après le déluge, et que la lnue qu’ils parlaient, inconnue des modernes à cause de son ancienneté même, était probablement celle des patriarches.Il s’appelait Sorghi-Bejanof. »
Plusieurs chapîtres de la fin de l’ouvrge sont consacrés à TIFLIS, aux voleurs arméniens qu’on vient de pendre . « c’étaient des Arméniens :chose extraordinaire ! Les Arméniens, avec leur caractère humble et doux, sont souvent voleurs,quelquefois filous, mais bien rarement meurtriers. »
« Le principal caravansérail de Tiflis a été bâti par un Arménie, qui en a payé le terrain seul quatre-vingt mille francs, ...c’est un spectacle curieux quela vue de ce caravansérail, par toutes les portes duquel entrent, conduisant des chameaux, des chevaux et de ânes, des députations de toutes les nations de l’Orient et de l’Europe du Nord : Turcs, Arméniens, Persans, Arabes, Hindous, Chinois, Kalmouks, Turkomns, Tatars, Tcherkesses, Georgiens, Mingréliens, Sibériens, que sais-je, moi ! »
Invité à passer Noël à Tiflis, le voyage de Dumas prend du retard et compromet son voyage à Erivan et »la visite que je comptais faire au mont Ararat...un ou deux jours de neige rendraient le voyage impossible, à cause du défilé de Dilegent et des mauvais chemins d’Alexandropol. »
Sorte de reporter du l9ème siècle, Alexandre Dumas a par ces deux ouvrages montré sa curiosité pour des contrées qu’il ignorait complètement et aussi sa compréhension des usages très différents qu’il a pu rencontrer. S’il est vrai que les imprécisions et les erreurs sont flagrantes, nous ne pouvons que rendre hommage au romancier d’avoir voulu étendre sa connaissance du monde et d’avoir parlé des Arméniens, parfois avec beaucoup de contradictions certes, mais de les montrer actifs artisans, commerçants, s’entendant très bien avec les diverses populations.
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InfoHay1915
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