Blaphafas a écrit :
Je te dis que le corps enveloppé dans le suaire n'a pas été badigeonné, et tu me réponds "c'est donc une peinture sur toile". C'est là qu'on voit bien ton mode de raisonnement.
Et nous voici avec un protestant adorateur de reliques. Luthérien, peut-être ?
http://www.info-bible.org/histoire/refo ... calvin.htm
Jean Calvin : Le traité des reliques
Le saint suaire
Il est temps de traiter du suaire, auquel ils ont encore mieux montré tant leur impudence que leur sottise. Car outre le suaire de la Véronique, qui se montre à Rome en l'église de Saint-Pierre, et le couvre-chef que la Vierge Marie, comme ils disent, mit sur les parties honteuses de notre Seigneur, qui se montre à Saint-Jean de Latran, lequel aussi bien est derechef aux Augustins de Carcassonne; item, le suaire qui fut mis sur sa tête au sépulcre, qui se montre là même; il y a une demi-douzaine de villes, pour le moins, qui se vantent d'avoir le suaire de la sépulture tout entier; comme Nice, celui qui a été transporté là de Chambéry; item, Aix en Allemagne; item, le Traict; item, Besançon; item, Cadoin en Limousin; item, une ville de Lorraine, assise au port d'Aussois; sans les pièces qui en sont dispersées d'un côté et d'autre; comme à Saint-Salvador en Espagne, et aux Augustins d'Albi. Je laisse encore un suaire entier qui est à Rome en un monastère de femmes, pource que le pape a défendu de le montrer solennellement.
Je vous prie, le monde n'a-t-il pas été bien enragé, de trotter cent ou six vingt lieues loin, avec gros frais et grande peine, pour voir un drapeau duquel il ne pouvait nullement être assuré, mais plutôt était contraint d'en douter? Car quiconque estime le suaire être en un certain lieu, il fait faussaires tous les autres qui se vantent de l'avoir; comme pour exemple : celui qui croit que le drapeau de Chambéry soit le vrai suaire, celui-là condamne ceux de Besançon, d'Aix, de Cadoin, de Trier et de Rome, comme menteurs, et qui font méchamment idolâtrer le peuple en le séduisant et lui faisant croire qu'un drapeau profane est le linceul où fut enveloppé son Rédempteur.
Venons maintenant à l'Évangile; car ce serait peu de chose qu'ils se démentissent l'un l'autre, mais le Saint-Esprit leur contredisant à tous, les rend tous ensemble confondus, autant les uns que les autres.
Pour le premier, c'est merveille que les évangélistes ne font nulle mention de cette Véronique, laquelle toucha la face de Jésus-Christ d'un couvre-chef, vu qu'ils parlent de toutes les femmes lesquelles l'accompagnèrent à la croix. C'était bien une chose notable et digne d'être mise en registre, que la face de Jésus-Christ eût été miraculeusement imprimée en un linceul. Au contraire, il semble avis que cela n'emporte pas beaucoup, de dire que certaines femmes ayant accompagné Jésus-Christ à la croix, sans qu'il leur soit advenu aucun miracle. Comment est-ce doncques que les évangélisles racontent des choses menues et de légère importance, se taisant des principales? Certes, si un tel miracle avait été fait, comme on fait croire, il nous faudrait accuser le Saint-Esprit d'oubliance ou d'indiscrétion, qu'il n'aurait su prudemment élire ce qui était le plus expédient de raconter. Cela est pour leur Véronique, afin qu'on connoisse combien c'est un mensonge évident, de ce qu'ils en veulent persuader.
Quant est du suaire auquel le corps fut enveloppé, je leur fais une semblable demande : les évangélistes racontent diligemment les miracles qui furent faits à la mort de Jésus-Christ, et ne laissent rien de ce qui appartient à l'histoire; comment est-ce que cela leur est échappé, de ne sonner mot d'un miracle tant excellent, c'est que l'effigie du corps de notre Seigneur Jésus était demeurée au linceul auquel il fut enseveli ? Cela valait bien autant d'être dit comme plusieurs autres choses. Même l'évangéliste saint Jean déclare comment saint Pierre étant entré au sépulcre, vit les linges de la sépulture, l'un d'un côté, l'autre d'autre. Qu'il y eût aucune pourtraiture miraculeuse, il n'en parle point. Et n'est pas à présumer qu'il eût supprimé une telle œuvre de Dieu, s'il en eût été quelque chose. Il y a encore un autre doute à objecter; c'est que les évangélistes ne parlent point que nul des disciples, ni les femmes fidèles, aient transporté les linceuxdont il est question, hors du sépulcre; mais plutôt ils donnent à connaître qu'ils les ont ont là laissés, combien qu'ils ne l'expriment pas.
Or, le sépulcre était gardé des gendarmes, qui eurent depuis le linceul en leur puissance. Est-il à présumer qu'ils le baillassent à quelque fidèle pour en faire des reliques? vu que les Pharisiens les avaient corrompus pour se parjurer, disant que les disciples avaient dérobé le corps? Je laisse à les rédarguer de fausseté par la vue même des pourtraitures qu'ils en montrent; car il est facile à voir que ce sont peintures faites de main d'homme. Et ne me suis assez ébahir, premièrement comme ils ont été si lourdauds, de ne point avoir meilleure astuce pour tromper; et encore plus comment le monde a été si niais de se laisser ainsi éblouir les yeux, pour ne voir point une chose tant évidente.
Qui plus est, ils ont bien montré qu'ils avaient les peintres à commandement. Car quand un suaire a été brûlé, il s'en est toujours trouvé un nouveau le lendemain. On disait bien que c'était celui-là même qui avait été auparavant, lequel s'était par miracle sauvé du feu; mais la peinture était si fraîche, que le mentir n'y valait rien, s'il y eut eu des yeux pour regarder. Il y a, pour faire fin, une raison péremptoire, par laquelle ils sont du tout convaincus de leur impudence. Partout où ils se disent avoir le saint suaire, ils montrent un grand linceul qui couvrait tout le corps avec la tête; et voit-on là l'effigie d'un corps tout d'un tenant. Or, l'évangéliste saint Jean dit que Jésus-Christ fut enseveli à la façon des Juifs. Et quelle était cette façon, non-seulement on le peut entendre parla coutume que les Juifs observent encore aujourd'hui, mais aussi par leurs livres, qui montrent assez l'usage ancien : c'est d'envelopper à part le corps jusques aux épaules, puis envelopper la tête dedans un couvre-chef, le liant aux quatre coins. Ce qu'aussi l'évangéliste exprime, quand il dit que saint Pierre vit les linges d'un côté, où le corps avait été enveloppé; et d'un autre côté le suaire qui avait été posé sur la tête. Car telle est la signification de ce mot de suaire, de le prendre pour un mouchoir, ou couvre-chef, et non pas pour un grand linceul qui serve à envelopper le corps.
Pour conclure brièvement, il faut que l'évangéliste saint Jean soit menteur, ou bien que tous ceux qui se vantent d'avoir le saint suaire soient convaincus de fausseté, et qu'on voie ouvertement qu'ils ont séduit le pauvre peuple par une impudence trop extrême.