Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
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Le courant bouddhisme mahāyāna, terme sanskrit signifiant « Grand Véhicule » apparaît vers le 1er siècle de notre ère dans le Nord de l’Inde. Actuellement le bouddhisme mahayana a une forte présence en Chine, au Tibet, au Japon au ve siècle, en Corée en 372, au Viêtnam, à Singapour et Taïwan. La tradition du Mahayana, met l’accent sur la pratique altruiste du bodhisattva comme moyen pour parvenir à l’éveil, à la fois pour soi-même et pour les autres.
Le courant bouddhisme mahāyāna, terme sanskrit signifiant « Grand Véhicule » apparaît vers le 1er siècle de notre ère dans le Nord de l’Inde. Actuellement le bouddhisme mahayana a une forte présence en Chine, au Tibet, au Japon au ve siècle, en Corée en 372, au Viêtnam, à Singapour et Taïwan. La tradition du Mahayana, met l’accent sur la pratique altruiste du bodhisattva comme moyen pour parvenir à l’éveil, à la fois pour soi-même et pour les autres.
Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 31 mars18, 23:44Nichiren Soshu
En juin 1928, Makiguchi se convertit à Nichiren Shōshū (école orthodoxe de Nichiren). Au moment de sa conversion, la Nichiren Shōshū était une très petite branche de l'ensemble des écoles bouddhistes Nichiren. Dans une enquête gouvernementale menée à la fin de 1939, il n'y avait que soixante-quinze temples affiliés et cinquante-deux prêtres. Sa petite taille, cependant, n'a pas empêché cette branche de prétendre qu'elle seule avait fidèlement conservé les enseignements de Nichiren, des enseignements qui représentaient la seule vérité religieuse authentique existante au monde.
La revendication de la Nichiren Shōshū à l’unique possession de la vérité religieuse universelle n'a pas empêché ses dirigeants cléricaux de participer à la frénésie ultranationaliste de l'époque. Arimoto Kōga (1867-1936), ancien directeur général des affaires religieuses de la branche et abbé du temple Myōkōji à Tokyo, en est le représentant. En septembre 1929, Kōga créa la « Société de protection de la nation à travers l'enseignement orthodoxe » (Seikyō Gokoku-kai) dont le quartier général est au sein du temple. C'était en réponse directe à un décret publié par le ministère de l'Éducation plus tôt dans la même année appelant à une mobilisation spirituelle générale du peuple.
Le tract que Kōga rédigea pour la nouvelle organisation se terminait par l'injonction suivante:
"Il est indéniablement temps pour nous, chefs religieux, d'être actifs, d’avancer et de lutter. . . Nous ne devons pas seulement nous tenir aux avant-postes, mais aussi à ceux qui suivent. Nous devons aller de l'avant, en faisant tout notre possible pour développer l’esprit combatif qui guidera toute l'armée.
Protéger l'état est notre devoir. Guider les gens est notre responsabilité. C’est pour cela, que nous avons créé cette association afin de rallier les gens de cette nation, en nous dévouant totalement à utiliser le puissance de l'enseignement orthodoxe [de Nichiren] pour maintenir la loi et l'ordre dans l'état. De plus, nous cherchons à utiliser la majesté du Bouddha authentique pour préserver l'ordre social, et la morale publique. N'est-ce pas la mission originelle du bouddhisme?"
Les activités ultranationalistes de Kōga ne s’arrêtèrent pas par la création de l'organisation ci-dessus. Le 25 mars 1933, il publia une brochure de trente-cinq pages intitulée « Proclamation pour la célébration du Festival du drapeau ». Le premier chapitre contenait la déclaration suivante:
"C'est l'état que les gens doivent protéger avec leur sang et défendre jusqu'à la mort. De même, les gens doivent protéger le drapeau national avec leur sang et le défendre jusqu'à la mort. Le drapeau national est sacré et, par conséquent, personne ne peut, en aucune circonstance, l'insulter."
Il y a bien sûr un danger à tirer des conclusions sur l'orientation politique d'une branche entière basée sur les actions d'un seul prêtre, aussi puissante soit-elle. Pourtant, comme le note le critique religieux Ōki Michiyoshi: "Il y a un accord général entre la pensée de Kōga et celle de la branche dans son ensemble". La vérité de l'affirmation de Ōki n'est nulle part mieux illustrée que dans l'exhortation suivante (kun'yu) émise par Suzuki Nikkyō (1869-1945), chef de Nichiren Shōshū, le 8 décembre 1941, date (au Japon ) de l'attaque du Japon sur Pearl Harbor:
"Aujourd'hui, nous sommes vraiment emportés dans une émotion éternelle et nous sommes émerveillés devant l'édit impérial scintillant qui déclare la guerre aux États-Unis et à la Grande-Bretagne qui nous a été gracieusement accordée. Nous avons la chance d'avoir une armée et une marine incomparablement loyales et courageuses sous la vertu auguste de Sa Majesté l'Empereur. Notre gratitude est infinie pour les fruits merveilleux de la bataille qui ont déjà été réalisés le premier jour de la guerre et nous nous réjouissons d'un avenir radieux. Cependant, compte tenu de l'environnement dans lequel nous nous trouvons, cette prochaine grande guerre exige que nous soyons préparés à l'inévitabilité d'une longue lutte.
Par conséquent, les adhérents de cette secte doivent, dans l'obéissance à l'Esprit Saint et conformément aux instructions de séparation du Bouddha et des Patriarches, brandir la foi religieuse acquise pendant des années d'entraînement, surmonter toutes les difficultés avec une persévérance inlassable, et faire leur devoir au maximum, confiants d'une certaine victoire dans cette grande guerre d'une ampleur sans précédent."
En janvier de l'année précédente entre autres, Nikkyō avait exprimé la "gratitude et l'enthousiasme sans fin" de sa secte pour les accomplissements de l'armée impériale dans sa guerre contre la Chine, exhortant ses compatriotes japonais à travailler encore plus dur pour atteindre un nouvel objectif en Asie.
https://apjjf.org/2014/12/37/Brian-Vict ... ticle.html
En juin 1928, Makiguchi se convertit à Nichiren Shōshū (école orthodoxe de Nichiren). Au moment de sa conversion, la Nichiren Shōshū était une très petite branche de l'ensemble des écoles bouddhistes Nichiren. Dans une enquête gouvernementale menée à la fin de 1939, il n'y avait que soixante-quinze temples affiliés et cinquante-deux prêtres. Sa petite taille, cependant, n'a pas empêché cette branche de prétendre qu'elle seule avait fidèlement conservé les enseignements de Nichiren, des enseignements qui représentaient la seule vérité religieuse authentique existante au monde.
La revendication de la Nichiren Shōshū à l’unique possession de la vérité religieuse universelle n'a pas empêché ses dirigeants cléricaux de participer à la frénésie ultranationaliste de l'époque. Arimoto Kōga (1867-1936), ancien directeur général des affaires religieuses de la branche et abbé du temple Myōkōji à Tokyo, en est le représentant. En septembre 1929, Kōga créa la « Société de protection de la nation à travers l'enseignement orthodoxe » (Seikyō Gokoku-kai) dont le quartier général est au sein du temple. C'était en réponse directe à un décret publié par le ministère de l'Éducation plus tôt dans la même année appelant à une mobilisation spirituelle générale du peuple.
Le tract que Kōga rédigea pour la nouvelle organisation se terminait par l'injonction suivante:
"Il est indéniablement temps pour nous, chefs religieux, d'être actifs, d’avancer et de lutter. . . Nous ne devons pas seulement nous tenir aux avant-postes, mais aussi à ceux qui suivent. Nous devons aller de l'avant, en faisant tout notre possible pour développer l’esprit combatif qui guidera toute l'armée.
Protéger l'état est notre devoir. Guider les gens est notre responsabilité. C’est pour cela, que nous avons créé cette association afin de rallier les gens de cette nation, en nous dévouant totalement à utiliser le puissance de l'enseignement orthodoxe [de Nichiren] pour maintenir la loi et l'ordre dans l'état. De plus, nous cherchons à utiliser la majesté du Bouddha authentique pour préserver l'ordre social, et la morale publique. N'est-ce pas la mission originelle du bouddhisme?"
Les activités ultranationalistes de Kōga ne s’arrêtèrent pas par la création de l'organisation ci-dessus. Le 25 mars 1933, il publia une brochure de trente-cinq pages intitulée « Proclamation pour la célébration du Festival du drapeau ». Le premier chapitre contenait la déclaration suivante:
"C'est l'état que les gens doivent protéger avec leur sang et défendre jusqu'à la mort. De même, les gens doivent protéger le drapeau national avec leur sang et le défendre jusqu'à la mort. Le drapeau national est sacré et, par conséquent, personne ne peut, en aucune circonstance, l'insulter."
Il y a bien sûr un danger à tirer des conclusions sur l'orientation politique d'une branche entière basée sur les actions d'un seul prêtre, aussi puissante soit-elle. Pourtant, comme le note le critique religieux Ōki Michiyoshi: "Il y a un accord général entre la pensée de Kōga et celle de la branche dans son ensemble". La vérité de l'affirmation de Ōki n'est nulle part mieux illustrée que dans l'exhortation suivante (kun'yu) émise par Suzuki Nikkyō (1869-1945), chef de Nichiren Shōshū, le 8 décembre 1941, date (au Japon ) de l'attaque du Japon sur Pearl Harbor:
"Aujourd'hui, nous sommes vraiment emportés dans une émotion éternelle et nous sommes émerveillés devant l'édit impérial scintillant qui déclare la guerre aux États-Unis et à la Grande-Bretagne qui nous a été gracieusement accordée. Nous avons la chance d'avoir une armée et une marine incomparablement loyales et courageuses sous la vertu auguste de Sa Majesté l'Empereur. Notre gratitude est infinie pour les fruits merveilleux de la bataille qui ont déjà été réalisés le premier jour de la guerre et nous nous réjouissons d'un avenir radieux. Cependant, compte tenu de l'environnement dans lequel nous nous trouvons, cette prochaine grande guerre exige que nous soyons préparés à l'inévitabilité d'une longue lutte.
Par conséquent, les adhérents de cette secte doivent, dans l'obéissance à l'Esprit Saint et conformément aux instructions de séparation du Bouddha et des Patriarches, brandir la foi religieuse acquise pendant des années d'entraînement, surmonter toutes les difficultés avec une persévérance inlassable, et faire leur devoir au maximum, confiants d'une certaine victoire dans cette grande guerre d'une ampleur sans précédent."
En janvier de l'année précédente entre autres, Nikkyō avait exprimé la "gratitude et l'enthousiasme sans fin" de sa secte pour les accomplissements de l'armée impériale dans sa guerre contre la Chine, exhortant ses compatriotes japonais à travailler encore plus dur pour atteindre un nouvel objectif en Asie.
https://apjjf.org/2014/12/37/Brian-Vict ... ticle.html
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"Une carte n'est pas le territoire" Alfred Korzybski
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 31 mars18, 23:58Encore une grosse daube version N shoshue....!ça sent le lisier une fois de plus....
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 00:29Pas du tout ! il s'agit d'un article de Brian Victoria, l'auteur de "zen at war"Ichinen29 a écrit :Encore une grosse daube version N shoshue....!ça sent le lisier une fois de plus....
"Une carte n'est pas le territoire" Alfred Korzybski
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 01:34Même combat!...Salir la mémoire d'un authentique boddhisattva....ça ne vous portera pas chance!
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 01:48Sujet déjà débatu, source en procés pour diffamation .
"Le sage n’est pas celui qui pratique le bouddhisme en dehors des règles de la société mais plutôt celui qui, grâce à une compréhension profonde du monde, connaît la meilleure manière de s’y comporter."
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 04:16Ichinen29 a écrit :Même combat!...Salir la mémoire d'un authentique boddhisattva....ça ne vous portera pas chance!
Intéressant ! Vos réactions ne respirent pas précisément l'équanimité relative à "l'éveil", que vous affirmez pourtant tout les deux avoir expérimenté, mais plutôt l’hystérie de militants extrémistesYvon a écrit :Sujet déjà débatu, source en procés pour diffamation .
"Une carte n'est pas le territoire" Alfred Korzybski
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Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 06:04Comment définir la Sôka Gakkai, alias Gakkai ? Une secte bouddhiste hérétique qui, à l’image du moine Nichiren (1222-1282), dont elle a fait son idole, promeut un bouddhisme agressif et intolérant tout en manifestant un pacifisme sans doute sincère (elle a en effet soutenu, jusqu’à présent, la Constitution et son article 9, qui interdit au Japon tout acte guerrier).
Objet d’incessantes controverses, la Gakkai s’est créé malgré tout, au fil des décennies, une place de choix sur le marché nippon de la religion.
L’une des clés de son incontestable succès est d’abord son refus de toute approche intellectualiste : faisant fi des considérations existentielles, elle promet le bonheur ici-bas. D’où, ensuite, une stratégie religieuse qui cible la classe populaire.
La secte a su épouser au plus près, dans les années qui suivirent la défaite de 1945, les préoccupations des gens de condition modeste.
Enfin, c’est un subtil mariage entre un culte approchant la vacuité – il consiste à répéter la formule Namu-Myôhô-Renge-Kyô (“Salutation au Sutra du Lotus”) – et un réseau d’adeptes extrêmement dense et hiérarchisé.
Ajoutez à cela la condamnation pour lèse-majesté du fondateur, en 1943, qui apporta à la secte la légitimité dont elle avait besoin dans le Japon de l’après-guerre, et l’on obtient une secte tentaculaire, avec ses millions d’adeptes, ses écoles, son université, son journal et, last but not least, son parti politique, le Kômeitô, qui participe depuis octobre à la coalition gouvernementale. Bref, la Gakkai est désormais quasi fréquentable – elle ferait même distinguée, comparée aux obscures sectes new age qui convoitent ardemment sa place.
(source: Courrier international. 22 octobre 2007 par Kazuhiko Yatabe)
A part pour pour les adeptes les plus "staliniens" dans les réactions et le comportement, la légitimité est en train d'en prendre un coup... !
Objet d’incessantes controverses, la Gakkai s’est créé malgré tout, au fil des décennies, une place de choix sur le marché nippon de la religion.
L’une des clés de son incontestable succès est d’abord son refus de toute approche intellectualiste : faisant fi des considérations existentielles, elle promet le bonheur ici-bas. D’où, ensuite, une stratégie religieuse qui cible la classe populaire.
La secte a su épouser au plus près, dans les années qui suivirent la défaite de 1945, les préoccupations des gens de condition modeste.
Enfin, c’est un subtil mariage entre un culte approchant la vacuité – il consiste à répéter la formule Namu-Myôhô-Renge-Kyô (“Salutation au Sutra du Lotus”) – et un réseau d’adeptes extrêmement dense et hiérarchisé.
Ajoutez à cela la condamnation pour lèse-majesté du fondateur, en 1943, qui apporta à la secte la légitimité dont elle avait besoin dans le Japon de l’après-guerre, et l’on obtient une secte tentaculaire, avec ses millions d’adeptes, ses écoles, son université, son journal et, last but not least, son parti politique, le Kômeitô, qui participe depuis octobre à la coalition gouvernementale. Bref, la Gakkai est désormais quasi fréquentable – elle ferait même distinguée, comparée aux obscures sectes new age qui convoitent ardemment sa place.
(source: Courrier international. 22 octobre 2007 par Kazuhiko Yatabe)
A part pour pour les adeptes les plus "staliniens" dans les réactions et le comportement, la légitimité est en train d'en prendre un coup... !
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Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 06:16Ichinen29 a écrit :Même combat!...Salir la mémoire d'un authentique boddhisattva....ça ne vous portera pas chance!
Nammyoho rengue kyo ping pong fu ya ka to ra la lè pre tu o ra si tu cro a pa ou tu cri ti k ton né se ra plat é tu lou che ra !
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 06:51A la fois dans l'EBW et le travail en faveur de la paix du bouddhisme de David Chappell (BP), Tsunesaburo Makiguchi est présenté comme un autre exemple fondateur du bouddhisme engagé. La foi bouddhiste de Makiguchi, est il affirmé, le poussait non seulement à préconiser un monde humain et pacifique, mais à sacrifier sa propre vie en résistant au militarisme japonais.
Virginia Cohn Parkum et J. Anthony Stultz décrivent Makiguchi (et son disciple, Josei Toda) comme ayant fait l'expérience de l'incarcération au Japon pendant la Seconde Guerre mondiale pour avoir résisté à l'effort de guerre et refusé de suivre le culte Shinto (p.360). Un deuxième article du même livre, "Diversité raciale dans le Soka Gakkai " de David Chappel affirme que "lorsque Makiguchi refusa de soutenir la politique gouvernementale durant la guerre, il fut arrêté en 1943 et mourut en prison le 18 novembre 1944 à l'âge de soixante-treize ans (216)."
Bien que plus ambivalent, Peter Harvey ajoute sa voix au chœur dans "Une introduction à l'éthique bouddhiste (IBE)" où il écrit: "Durant la Seconde Guerre mondiale, la plupart des écoles bouddhistes ont accepté de soutenir la nation dans ses efforts. Apparemment, la seule exception était le Soka Gakkai, qui a refusé de prendre part à ce front unifié"(p.270).
Néanmoins, aucune de ces voix ne peut se comparer à celle de Daisaku Ikeda, le président de Soka Gakkai International, qui a les mots d'éloges les plus forts pour Makiguchi. Dans un essai inclus dans BP intitulé "Le Mouvement pour la paix du SGI", Ikeda écrit:
"Au début du XXe siècle (1903), le président Makiguchi publie « La géographie de la vie humaine (Jinsei Chirigaku), qui préconisait fermement un passage à la compétition humanitaire à une époque où l'impérialisme et le colonialisme demeuraient les principaux modes de relations internationales. Il a analysé la compétition entre les nations comme comprenant les phases de la compétition militaire, la compétition politique, la concurrence économique, et la concurrence humanitaire. Il a souligné que l'objectif de l'humanité devrait être la compétition humanitaire" (p.136).
Robert Kisala, cependant, nous présente à nouveau, une vue alternative. Il commence par remarquer que l’élément central du premier livre de Makiguchi, Jinsei Chirigaku, mettait l'accent sur le "lien entre la géographie et la vie quotidienne préconisant l'étude de la géographie à travers des excursions et d'autres expériences pratiques" (p.75). Quant à la soit disant résistance de Makiguchi à la guerre, Kisala explique que le nœud du problème était le refus de Makiguchi de vénérer le talisman d'Amaterasu, la déesse du soleil, émis par le sanctuaire central shintoïste d'Ise. C'est ce refus, affirme-t-il, pas la résistance à la guerre, qui a conduit Makiguchi et une vingtaine d'autres dirigeants de ce qui était alors connu sous le nom de Soka Kyoiku Gakkai (Société académique pour l'éducation créatrice de valeur) à être accusés de lèse-majesté et de violation de la loi sur la préservation de la paix le 6 juillet 1943.
Kisala conclut son étude sur Makiguchi en soulignant que si la littérature de la Soka Gakkai prétend souvent que cette persécution était le seul résultat d'une position anti-militaire prise par Makiguchi, sa lecture de la situation indique que l'opposition de Makiguchi était plus spécifiquement focalisée par la politique religieuse du gouvernement »(page 90).
Les recherches sur Makiguchi montrent que non seulement la conclusion de Kisala étaient correcte, mais qu'il n'a révélé qu'une petite partie de l'histoire. C'est-à-dire que si Makiguchi peut, comme le prétend Ikeda, espérerait l'avènement d'un monde futur fondé sur la compétition "humaine" ». Cette notion n'existait pas encore à son époque. Dans Jinsei Chirigaku, Makiguchi a décrit le monde réel dans lequel il évoluait comme suit:
"Je suis d'avis que la seule raison du danger actuel pour la paix mondiale est la promotion par la Russie de sa propre existence C'est-à-dire qu'à l'ère actuelle de lutte économique pour l'existence, la Russie cherche à exploiter les faiblesses des puissances internationales pour acquérir ce qu'elle doit avoir: l'accès aux océans. Elle est donc en train de s'étendre dans trois directions, depuis le détroit de Dardanelle en Europe de l'Est jusqu'au golfe Persique en Asie occidentale et la mer Jaune en Extrême-Orient" (Makiguchi 1903: 950-951).
En identifiant la Russie comme unique responsable de la mise en danger de la paix mondiale, Makiguchi adopta une position identique à celle du gouvernement japonais de l’époque. Le Japon a utilisé cette prétendue menace pour justifier son attaque surprise contre la Russie l'année suivante, ostensiblement pour protéger l'indépendance de la Corée et empêcher d'autres empiétements russes sur le territoire chinois, en particulier la Mandchourie. La réalité, cependant, c'est qu'après sa victoire sur la Russie en 1905, le Japon a pris le contrôle de la Corée pour en faire une colonie à part entière en 1910. Quant à la Mandchourie, le Japon a progressivement accru son contrôle sur cette région de Chine jusqu'à ce qu'il établisse l'état fantoche du Mandchoukuo en février 1932.
Ce qui est parlant, c’est que ni Ikeda ni Kisala ne mentionnent un deuxième livre fondateur que Makiguchi publia pour la première fois en novembre 1912. Intitulé Kyodoka Kenkyå (Étude de la culture populaire), ce volume était une extension des idées contenues dans Jinsei Chirigaku, et insistait particulièrement sur leur pertinence pour la vie et les structures des communautés locales. Makiguchi voulait que les éducateurs ruraux (plutôt que les bureaucrates du gouvernement central) prennent la direction d’ initiatives d'éducation auprès des communautés locales. Mais à quel but ? Le dernier chapitre du livre expliquait le but de Makiguchi pour l’éducation comme suit :
"Indépendamment de notre classe sociale, chacun doit être conscient de la destinée de notre nation, harmoniser sa vie avec cette destinée et, à tous moment, être prêt à partager cette destinée. C'est pour cette raison que le travail de l'éducation nationale est de nous préparer nous-même à faire exactement cela, sans rien omettre dans ce processus, Cependant, pour ce faire, et avant de nous mettre au service de l'Etat, nous devons d'abord contribuer à la zone locale qui nous a nourris et avec laquelle nous partageons des intérêts communs" (Makiguchi 1933: 460-461).
Il convient de noter que Makiguchi a écrit ce qui précède spécifiquement pour une édition agrandie de 1933 de ce livre (voir Makiguchi 1933: 6). Malgré le fait qu'il défendait l'éducation rurale sous contrôle local, en 1933, lui et son éditeur, nul autre que Soka Kyoiku Gakkai, partageaient une vision de l'éducation qui était "centrée sur l'État" comme n'importe lequel de ses contemporains.
Seulement quelques années plus tard, des millions de jeunes Japonais seront appelés à sacrifier leurs vies et celles de leurs victimes, dans le procédé qui consistait à "se mettre au service de l'État". Ainsi, la querelle de Makiguchi avec les bureaucrates du gouvernement central à propos du contrôle de l'éducation locale, ne portait pas sur savoir s'il fallait ou non promouvoir le service à l'État, mais simplement sur la meilleure façon d'atteindre cet objectif.
Si, comme le démontre la citation précédente, Makiguchi croyait que le but ultime de l'éducation était de servir l'État, quel rôle l'empereur avait-il joué dans ce rôle? Makiguchi était-il en quelque sorte opposé ou critique de l'empereur ou du système impérial? Bien que critiquant le patriotisme pour des raisons superficielles, Makiguchi a écrit:
"Sa Majesté, l'Empereur, sur qui est centré l'exercice de l'autorité impériale, le fait par l'intermédiaire de ses fonctionnaires militaires et civils. La raison pour laquelle il exerce cette autorité n'est définitivement pas pour son propre bénéfice. Plutôt, en tant que chef et tête de la nation entière, il exerce gracieusement au nom de tout le peuple. C'est pour cette raison que, dans notre pays, l’état et l'empereur, en tant que chef d’état, doivent être considérés comme totalement un et indivisibles. Nous devons faire comprendre à nos enfants que le service loyal à leur souverain est synonyme d'amour du pays, je crois que c'est seulement ainsi que nous pouvons clarifier le vrai sens de l'expression « loyauté à son souverain et amour de la patrie" [chåkun aikoku] (Makiguchi 1933: 411-412).
En exhortant ses collègues éducateurs à faire comprendre aux enfants de la nation que le service loyal à leur souverain était synonyme d'amour du pays, nous retrouvons à nouveau Makiguchi dans le courant dominant de la ferveur nationaliste qui caractérise de plus en plus les années 1930. Peu importe comment la position de Makiguchi envers l'empereur a pu changer plus tard, en 1933, Makiguchi a défendu la proposition largement répandue que l'amour de la patrie était synonyme de loyaux services à l'empereur. C'est précisément cette idéologie éducative qui a servi de fondement à la demande de l'armée japonaise d'obéissance absolue et inconditionnelle de ses soldats, affirmant que "les ordres de ses supérieurs sont les ordres de l'empereur".
Makiguchi a également évoqué la colonisation de la Corée par le Japon, affirmant que la Corée, avant d'être formellement annexée par le Japon en août 1910, était dans un tel état d'anarchie qu'elle était incapable de se défendre ou de protéger ses citoyens. Non seulement cela, mais que les Chinois se trouvaient actuellement exactement dans la même situation (voir Makiguchi 1933: 413). L'implication évidente de cette dernière affirmation était que la Chine, comme la Corée avant elle, bénéficierait grandement du contrôle japonais. C'était bien sûr un sentiment partagé par le gouvernement japonais, comme on le voit, par exemple, dans la déclaration d'avril 1934 publiée par son ministère des Affaires étrangères. La Chine, déclarait ce communiqué, ne devait pas se prévaloir de l'assistance de tout pays autre que le Japon.
Ceci dit, il est également clair que le principal souci de Makiguchi dans ses écrits favorables à l'expansion du Japon sur le continent asiatique était, comme toujours, orientée vers la manière dont les enfants du Japon devaient être éduqués. Makiguchi a vu, dans une discussion sur le passé récent de la Corée et le présent de la Chine, une occasion en or de montrer aux enfants japonais à quel point ils avaient la chance de vivre au Japon. Makiguchi a continué,
"C'est lorsque nous regardons ces exemples concrets [de la Corée et de la Chine] que les pensées sur notre propre pays nous viennent à l’esprit. Le résultat est que nous ne pouvons nous empêcher d'être reconnaissants et de vouloir rembourser la dette de gratitude que nous devons à l'État."
"L'application pratique de l'étude de la culture populaire est de fournir la base fondamentale pour une compréhension de l'État en demandant à [nos enfants] de regarder des situations comme celles-ci qui sont sous leurs yeux. Je sens très profondément que nous devons chercher vigoureusement à créer des personnes de caractère qui mèneront à l'avenir une vie centrée sur l'État, ayant d'abord acquis le germe de l'idée de servir l'État au niveau local de la ville et du village" (Makiguchi 1933: 413)
Makiguchi démontre encore une fois que son souci ultime était d'implanter chez les enfants japonais une volonté de servir l’état. Makiguchi pensait simplement qu'il savait comment faire cela d'une manière plus efficace que les bureaucrates du gouvernement central qui montraient si peu d'intérêt ou de compréhension des spécificités locales.
S'il est vrai que Makiguchi a été arrêté en juillet 1943 pour avoir refusé de vénérer un talisman de la déesse Sdu soleil, Amaterasu, émis par le sanctuaire d'Ise, cela n'avait rien à voir avec le fait d'être déloyal envers l'empereur. Comme il l’a ré affirmé à ses interrogateurs de la police,"Je pense que c'est pour nous, Japonais, la Voie du Sujet que d'être loyal. C'est ce que j'ai réalisé à partir de mon étude de la vérité du Sutra du Lotus" (Akashi & Matsara, 1975). En outre, aussi contradictoire que cela puisse paraître, le refus de Makiguchi de vénérer un talisman de la Déesse du Soleil ne signifiait même pas un manque de respect pour cette ancêtre présumée de la famille impériale. Makiguchi l'a clairement dit quand il a dit à la police,
"La Déesse du Soleil est la vénérable ancêtre de notre famille impériale, sa vertu divine ayant été transmise à chaque empereur successif qui monta sur le trône jusqu'à l'empereur actuel inclus. Ainsi sa vertu a été transformée en la vertu auguste de Sa Majesté qui, éclairant le peuple, lui apporte le bonheur. C'est pour cette raison que l'article III de la Constitution stipule: « La personne de l'Empereur est sacrée et inviolable.Tout comme nous [les membres de l'association] reconnaissons l'unité fondamentale de la piété filiale et de la loyauté, nous sommes convaincus qu'il est approprié de vénérer Sa Majesté avec vénération selon l'opinion moniste que "Sa Majesté, l'Empereur est Un et Indivisible" [Tenn 'Ichigen -ron], rendant ainsi inutile de rendre hommage au Grand Sanctuaire d'Ise. A la lumière de cela, il n’y a personne d’autre que Sa Majesté, l'empereur lui-même, il n’y a rien à prier avec respect?" (Akashi & Matsåra, éds 1975: 174-175).
Dans les faits, nulle part dans les écrits de Makiguchi, que ce soit avant ou pendant la guerre, en prison ou à l’extérieur de celle-ci, nous ne trouvons de déclarations critiquant la politique militaire du Japon. Au contraire, Makiguchi a non seulement justifié la colonisation de la Corée par le Japon (et la guerre avec la Russie), mais il a consacré toute sa vie d'éducateur à concevoir des moyens plus efficaces d'inculquer le "service à l'État" aux enfants japonais. Il a ajouté que ces mêmes enfants comprenaient tout à fait que le service loyal à leur souverain était synonyme d'amour du pays. Même après l'emprisonnement, il a affirmé que la loyauté envers l'empereur n'était qu'une part naturelle de "la voie du sujet" basé sur sa compréhension de le Sutra du Lotus. Et, comme nous l'avons vu, en ce qui concerne l'empereur, Makiguchi demanda: "Qui, en dehors de Sa Majesté, l'Empereur lui-même, devrions nous prier respectueusement?"
Pour les apologistes qui déclarent maintenant que, malgré son emprisonnement et sa mort, Makiguchi a résisté ou s'est opposé à l'effort de guerre du Japon, revient à vouloir essayer de transformer une chose en son contraire. Comme la vision unilatérale de Paula Green sur Nichidatsu Fuji vu antérieurement, c'est un autre exemple pour tenter de minimiser la désillusion que peut accompagner la religion ou que la religion peut produire.
En évaluant Makiguchi, il est difficile de ne pas admirer la fermeté de sa foi face à l'emprisonnement et au regard de sa mort éventuellement due à la malnutrition et à son âge avancé. C'est surtout le cas lorsque l'on considère que sur les vingt dirigeants de la Société initialement arrêtés avec lui, dix-neuf ont été libérés après avoir renoncé à leur foi. À la lumière de cela, il est raisonnable de supposer que Makiguchi et Toda auraient également été libérés s'ils avaient fait de même. Mais ils ne le firent pas.
Pourtant, comme le révèlent les rapports d'interrogatoire de la police et les écrits antérieurs de Makiguchi, il n'y a pas la moindre allusion que Makiguchi s'opposait à l'agression militaire du Japon pas plus qu'il ne s'était auparavant opposé aux déclarations ultranationalistes des chefs de sa secte. Au contraire, le soutien indéfectible des dirigeants aux attaques du Japon contre la Chine et ensuite envers les États-Unis n'a pas empêché Makiguchi de poursuivre ses activités de prosélytisme énergiques, du moins jusqu'au moment de son arrestation en 1943.
En février 2000, un porte-parole de Sōka Gakkai International (SGI) a affirmé, à la lumière de mes recherches, que pour Makiguchi, "critiquer et rejeter le shintoïsme d'État en pleine conscience des conséquences de telles actions était, à notre avis, équivalent" Cette revendication ne peut toutefois pas être soutenue, car la véritable cause de l'emprisonnement de Makiguchi réside dans ses croyances religieuses exclusives et absolutistes qui n'ont rien à voir avec une critique de l'agression japonaise ou de l'impérialisme centré sur l'empereur.
En fait, on pourrait arguer qu'en admettant que l'emprisonnement de Makiguchi était dû à sa critique et au rejet du Shinto d'État plutôt qu'à une position pacifiste ou anti-guerre, le représentant de la SGI a démontré la thèse de cet article. Pour le démontrer, supposons qu'il y ait un pays en guerre dans lequel le catholicisme romain était la religion officielle de l'État. Dans l'espoir d'unifier les citoyens de ce pays dans l'effort de guerre, le gouvernement a décrété que toutes les églises protestantes devaient remplacer leurs croix "des de personnage" par un crucifix de style catholique et que ceux qui ne le feraient pas seraient emprisonnés. Est-ce que les pasteurs protestants qui auraient refusé, et auraient été emprisonnés, seraient considérés comme "pacifistes" opposés à la guerre contre d'autres nations ? La réponse est claire.
Comme Nichiren, sept cents ans plus tôt, Makiguchi était convaincu qu'il n'y avait qu'un seul chemin vers le salut pour l'individu, la nation et même l'empereur, descendant de la Déesse du Soleil et bénéficiaire de sa vertu divine comme on le croyait. Le chemin du salut ne consistait en rien de plus, et rien de moins, que la foi dans le Sûtra du Lotus tel qu'interprété et exposé par Nichiren, que Makiguchi considérait comme le seul et unique "vrai Bouddha" de l'époque actuelle.
En poursuivant son objectif, Makiguchi était tout à fait prêt à être persécuté, car comme l'a noté George Tanabe, la persécution joue depuis longtemps un rôle important dans la tradition Nichiren, dont les origines remontent à la mentalité et à la religion fondée par Nichiren lui même. En ce sens, Makiguchi ne faisait que suivre les traces de son illustre prédécesseur.
Il faut répéter que la propre persécution de Nichiren, ainsi que celle de ses disciples ultérieurs, a toujours été provoquée par leur propre intolérance envers les autres religions. Nichiren et ses disciples ont non seulement tenté de convertir les autres par la force, mais encore plus important, ils ont constamment dénoncé le gouvernement de ne pas adhérer exclusivement au Sûtra du Lotus tel que propagé par Nichiren. Le Sûtra du Lotus prédisant que ses dévots seront persécutés, les disciples de Nichiren considèrent la persécution comme une confirmation de la véracité de ce sutra, et justifient ainsi leur fidélité à celui-ci.
Ce qui distinguait Makiguchi de ses contemporains, y compris même des chefs religieux de sa secte, était sa foi absolue en Nichiren et ses enseignements, considérés comme préservés et enseignés par la seule Nichiren Shōshū. Il ne tolérerait aucun compromis, car selon lui, seule cette foi pouvait sauver à la fois l'adhérent individuel et le Japon dans son ensemble, ce qui impliquait nécessairement la destruction des envahisseurs, tout comme les Mongols envahisseurs du 13ème siècle araient été détruits par la prière d'intercession de Nichiren. La foi dans tout autre enseignement religieux était, par définition, une mauvaise pratique qui devait être éradiquée. En d'autres termes, malgré les affirmations contraires de la SGI, Makiguchi excepté pour lui-même, n'avait aucune sympathie pour la "liberté de religion" envers tous ceux qui n'adhéraient pas strictement à son point de vue sectaire
Il convient de noter que, dans l'immédiat après-guerre, l'extrême intolérance de Sōka Gakkai envers les autres religions n’avait pas changée. Par exemple, le 31 octobre 1954, Toda Jōsei monta un cheval blanc (auparavant prérogative exclusive de l'empereur) sur le terrain de parade Taisekiji et s'adressa aux membres assemblés des divisions des jeunes hommes et des jeunes femmes comme suit:
"Dans notre tentative de kosen rufu [convertir le monde entier], nous sommes sans alliés. Nous devons considérer toutes les religions comme nos ennemis, et nous devons les détruire. Mesdames et Messieurs, il est évident que le chemin à parcourir est plein d'obstacles. Par conséquent, vous devez vénérer le Gohonzon (le rouleau sacré), prendre l'esprit Sōka Gakkai à cœur, et cultiver la force de la jeunesse. Je m'attends à ce que vous saisissiez l'occasion de relever les nombreux défis qui vous attendent."
Comme son mentor, Toda ne parlait pas métaphoriquement quand il a exhorté la destruction de toutes les autres religions. Néanmoins, les représentants de Sōka Gakkai prétendent maintenant que les choses ont changé. Tout en admettant que « Sōka Gakkai demande aux nouveaux membres de cesser de vénérer tous les autres objets religieux », ils affirment que « aujourd'hui, la suppression des objets religieux de la foi précédente est toujours encouragée mais n'est pas une nécessité absolue »
Du moins, l'intolérance religieuse de Sōka Gakkai semble s'être adoucie ces dernières années, d'autant plus qu'elle cherche des convertis dans des sociétés religieusement pluralistes en dehors du Japon où « il n'existe aucune règle standard concernant le traitement des objets d'autres religions. » Pourtant, jusque dans les années 1960, sinon plus tard, les publications officielles de Sōka Gakkai avertissait ainsi les adhérents:
Vouloir garder les reliques des autres religions sous le prétexte que vous ne leur rendez pas de culte indique votre attachement à une religion perverse. Dans ces conditions, vous ne pouvez pas dire que votre foi est pure. Il y a des cas de gens qui pensaient à tort pouvoir disposer comme bon leur semblait des tablettes et des talismans de ces religions mauvaises (tout ce qui n’est pas la sgi ndlr). Cependant, parce que ces objets sont restés dans leurs maisons, ces personnes ont souffert une punition divine sévère. 51
Adouci ou pas, compte tenu de son intolérance permanente envers les « religions diaboliques », il est ahurissant de noter le succès que les dirigeants de Sōka Gakkai, surtout sous Ikeda Daisaku, ont connu ces dernières années en se présentant au monde comme de dignes représentants. de la longue tradition de tolérance religieuse du bouddhisme. C'est non moins étonnant que le succès que la Sōka Gakkai a eu en se présentant comme une organisation dédiée à la paix mondiale comme le prouverait l'opposition de son fondateur, même jusqu'à la mort, au militarisme japonais.
Cet article a au moins commencé à remettre les pendules à l'heure. Il reste à voir, cependant, si Sōka Gakkai, ciblant la seule Nichiren Shōshu, reconnaîtra jamais sa propre « responsabilité de guerre ». Robert Kisala identifie un obstacle majeur à cette reconnaissance dans son livre Prophets of Peace de 1999. Il est très réconfortant, dit-il, de présenter Makiguchi et ses partisans comme des victimes et non comme des partisans du militarisme japonais, car « cette conscience de victime sert à absoudre les croyants Sōka Gakkai de toute responsabilité directe pour le Japon durant la guerre. . . "52
À cet égard, il convient de mentionner que ce n'est que ces dernières années que des documents présentant la complicité de Nichiren Shōshū en temps de guerre ont été rendus publics. La divulgation de ces documents est étroitement liée au différend interne qui a éclaté entre Nichiren Shōshū et Sōka Gakkai en 1991, ce qui a amené les prêtres de Nichiren Shōshū à prendre la mesure extraordinaire d'excommunier l'ensemble des membres laïcs de Sōka Gakkai. Ostensiblement, l'excommunication était le résultat de différences doctrinales, mais des questions concernant l'autorité décisionnelle entre les dirigeants religieux de la secte et les leaders laïques de la Soka Gakkai, en particulier Ikeda Daisaku, étaient partie intégrante de cette division très conflictuelle. Les deux parties ayant chacune accusé l'autre de corruption financière et d'autres formes de malversations. Bien qu'une discussion détaillée de cet affrontement dépasse le cadre de cet article.
Qu'il suffise de dire que, depuis lors, dans l’intérêt sinon pour la défense de la Sōka Gakkai sa maison mère a été présentée comme ayant depuis longtemps trahi les enseignements de Nichiren, notamment par son soutien à l'agression militaire japonaise. Ce soutien est, bien sûr, dépeint comme l'antithèse même de tout ce qui a été dit ou fait par son propre fondateur et martyr Makiguchi et son fidèle disciple Toda.
Aussi attrayante que cette interprétation soit en surface, elle reste, au mieux, une affirmation partielle et unilatérale. Comme nous l'avons vu, Makiguchi a non seulement justifié l’annexion coloniale de la Corée par le Japon (et la guerre avec la Russie), mais il a aussi consacré une grande partie de sa vie à développer un moyen plus efficace pour aider les enfants japonais à servir l’état de l’époque. Il a en outre préconisé que ces mêmes enfants devaient "comprendre parfaitement que le service loyal à leur souverain était synonyme d'amour de leur pays ». Même lorsqu'il était emprisonné, il affirmait que la loyauté envers l'empereur n'était qu'une partie naturelle de « la Voie du sujet ». Et comme si cela ne suffisait pas, Makiguchi demanda: « Qui y a t il d’autre, à part Sa Majesté, l'Empereur lui-même, que nous devons prier respectueusement? "Jusqu'à et à moins que Sōka Gakkai puisse admettre sa propre histoire de soutien, ou du moins de collaboration avec les actions militaristes centrées sur l'empereur du Japon, il est difficile que les autres religions, bouddhistes ou non-bouddhistes, la reconnaissent comme une véritable force pour la paix mondiale.
Sources
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Borton, Hugh. Japan’s Modern Century. New York: Ronald Press, 1970.
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Kisala, Robert. Prophets of Peace -- Pacifism and Cultural Identity in Japan’s New Religions. Honolulu: University of Hawai’i Press,1999.
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Tessa Morris-Suzuki, "Lavish are the Dead: Re-envisioning Japan's Korean War," The Asia-Pacific Journal, Vol. 11, Issue 52, No. 3, December 30, 2013.
Murata, Kiyoaki. Japan’s New Buddhism -- An Objective Account of Soka Gakkai. New York: Weatherhill, 1969.
Ōki Michiyoshi. Bukkyō-sha no Sensō Sekinin -- Nichiren Shōshū no Rekishi Kaizan o Itou [The War Responsibility of Buddhists -- Questioning the Falsification of History by Nichiren Shôshû]. Tokyo: Bungei-sha, 1998.
Suzuki Nikkyō. “Kun’yu Dai Nijū-go” (Exhortation, Number Twenty-Nine) in the monthly publication Dai-Nichiren, January 1942.
______“Shinkō no Hongi” (The True Meaning of Religious Faith) in the monthly publication Dai-Nichiren, April 1942.
Toda Jōsei. “Sōka Gakkai no Rekishi to Kakushin” (The History of Sōka Gakkai and an Unshakable Faith) in Daibyakurenge, No. 16, July 1951.
Victoria, Brian. Zen at War, 2nd ed.. Boulder, CO: Rowman and Littlefield, 2006.
Notes
1 In his book Prophets of Peace, Robert Kisala introduces the wartime records of two other Nichiren-related “new religions”: Risshō Kōsei-kai
(co-founded by Niwano Nikkyō) and Nipponzan Myōhōji (founded by Fujii Nichidatsu). See pages 103-4 and 50-51 respectively. As in this chapter, Kisala finds that the respective founders of these two organizations, despite postwar claims to the contrary, generally supported Japan’s war efforts.
2 Quoted in Victoria, Zen at War, p. 159.
3 Quoted on the official website of Soka Gakkai International (accessed on 1 August 2000).
4 Narrated in “Daisaku Ikeda -- Close Up (New English Version).” Kimura Keiko, Executive Producer. Videotape, 60 minutes, distributed by the Sōka Gakkai Public Relations Office, 1999.
5 Ikeda Daisaku. “Seishun Taiwa” (Discussions on Youth) in SGI Gurafu, August 2000, p. 36.
6 Murata. Japan’s New Buddhism, pp. 73-74.
7 Makiguchi, Jinsei Chirigaku, p. 947.
8 Ibid., p. 946.
9 Ibid., pp. 948-51.
10 Murata, Japan’s New Buddhism, p. 74.
11 Borton, Japan’s Modern Century, p. 379.
12 Murata, Japan’s New Buddhism, p. 74.
13 Makiguchi, Kyōdoka Kenkyū, rev. 10th ed., p. 1.
14 Ibid., pp. 460-61.
15 Ibid., p. 6.
16 Ibid., pp. 411-12.
17 Quoted in Bix, Hirohito and the Making of Modern Japan, p. 314.
18 Ibid., p. 315.
19 Makiguchi, Kyōdoka Kenkyū, rev. 10th ed., p. 412.
20 Burton, Japan’s Modern Century, p. 383.
21 Makiguchi, Kyōdoka Kenkyū, rev. 10th ed., p. 413.
22 Bethel, Makiguchi -- The Value Creator, p. 73.
23 See details in Murata, Japan’s New Buddhism, pp. 70-71.
24 Quoted in Ōki, Bukkyō-sha no Sensō Sekinin, p. 204.
25 Ibid., p. 195.
26 Ibid., p. 198.
27 Suzuki Nikkyō, “Kun’yu Dai Nijū-go” (Exhortation, Number Twenty-Nine) in the monthly publication Dai-Nichiren, January 1942, p. 1.
28 Quoted in Ōki, Bukkyō-sha no Sensō Sekinin, p. 116.
29 Suzuki Nikkyō, “Shinkō no Hongi” (The True Meaning of Religious Faith) in the monthly publication Dai-Nichiren, April 1942, p. 13.
30 Ibid., p. 13.
31 Quoted in Murata, Japan’s New Buddhism, p. 82.
32 Toda Jōsei, “Sōka Gakkai no Rekishi to Kakushin” (The History of Sōka Gakkai and an Unshakable Faith) in Daibyakurenge, No. 16, July 1951, p. 1-2.
33 Ibid., p. 1. The “great object of worship” or daigohonzon refers to the sacred tablet on which Nichiren himself is claimed to have inscribed the holy phrase, “Nam(u)-myōhō-renge-kyō” (Homage to the Lotus Sutra). This tablet is enshrined at Taisekiji temple and forms the chief basis for the sect’s claim to orthodoxy in the transmission of Nichiren’s teachings.
34 Membership numbers vary. Makiguchi put his membership at 1,500 during his interrogation by the police in July 1943. See Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), p. 179. According to Murata Kiyoaki, however, Sōka Gakkai had 5,000 members as of mid-1943. See Japan’s New Buddhism, p. 84.
35 Bethel, Makiguchi -- The Value Creator, pp. 96-98.
36 See details in Ōki, Bukkyō-sha no Sensō Sekinin, pp. 64-65.
37 Quoted in Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), p. 154.
38 Ibid., p. 172. The passage in the Imperial Rescript on Education that Makiguchi referred to reads as follows: “Our Imperial Ancestors have founded Our Empire on a basis broad and everlasting and have deeply and firmly implanted virtue; Our subjects ever united in loyalty and filial piety have from generation to generation illustrated the beauty thereof.” (Italics mine)
39 Ibid., p. 172
40 Ibid., pp. 174-75.
41 Interestingly, as early as 1938 all Nichiren-related sects came under suspicion of having committed lese majesty exactly because of the marginal position they accorded Amaterasu on the sect’s central object of worship, i.e., gohonzon. In response, the main Nichiren sect headquartered on Mt. Minobu actually deleted Amaterasu’s name altogether from their gohonzon thus eliminating any appearance of disrespect to the Imperial ancestress. Nichiren Shōshū, on the other hand, never went so far as to alter their gohonzon even though they eventually called on their followers to accept amulets of the Sun Goddess.
42 Quoted in Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), pp. 171-72.
43 For further discussion of the Nichiren Shōshū view of Nichiren, see Murata, Japan’s New Buddhism, pp. 63-67. Mappō refers to the Mahayana belief that following Buddha Shakyamuni’s death there would come a time of decline, dissension and schism in the Buddha Dharma. The last stage (out of three) in this process would be the age of the degenerate Dharma lasting, according to some sources, for some 10,000 years. During this time only a diluted form of Buddhism would exist, and enlightenment rarely attained. Nichiren was convinced that the world had already entered this final stage.
44 Quoted in Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), p. 179.
45 This statement was made by Tokihisa (Andy) Sumimoto, SGI Office of Public Information, in a letter to the author dated 14 February 2000.
46 Tanabe, “The Matsumoto Debate” in Lopez (ed.), Buddhism in Practice, p. 241.
47 In its webpage entitled “The Three Founding Presidents,” Sōka Gakkai International claimed the following: “His [Makiguchi’s] humanistic, student-centered views and defense of religious freedom often brought him into conflict with authority. Arrested with other top Soka Gakkai leaders in 1943 as a "thought criminal" for his unyielding opposition to the militarist regime and its forced imposition of state-sponsored religion, Makiguchi died in prison at the age of 73 in November 1944.” (accessed 13 July 2014).
48 Quoted in Murata, Japan’s New Buddhism, p. 100.
49 This statement was made by Tokihisa (Andy) Sumimoto, SGI Office of Public Information, in an e-mail message to the author dated 24 November 2000.
50 Ibid.
51 Quoted in Murata, Japan’s New Buddhism, p.106.
52 Kisala, Prophets of Peace, p. 91.
53 As Tessa Morris-Suzuki revealed in her article, “Lavish Are The Dead: Re-envisioning Japan’s Korean War,” although Japan was not officially involved in the Korean War, inasmuch as it was under Allied Occupation until April 1952 and not yet a member of the United Nations, it nevertheless supplied an estimated 8,000 or more Japanese nationals to the war zone in military related-roles. (accessed on 29 August 2014).
54 Available on the Web here (accessed on 11 July 2014).
https://apjjf.org/2014/12/37/Brian-Vict ... ticle.html
Virginia Cohn Parkum et J. Anthony Stultz décrivent Makiguchi (et son disciple, Josei Toda) comme ayant fait l'expérience de l'incarcération au Japon pendant la Seconde Guerre mondiale pour avoir résisté à l'effort de guerre et refusé de suivre le culte Shinto (p.360). Un deuxième article du même livre, "Diversité raciale dans le Soka Gakkai " de David Chappel affirme que "lorsque Makiguchi refusa de soutenir la politique gouvernementale durant la guerre, il fut arrêté en 1943 et mourut en prison le 18 novembre 1944 à l'âge de soixante-treize ans (216)."
Bien que plus ambivalent, Peter Harvey ajoute sa voix au chœur dans "Une introduction à l'éthique bouddhiste (IBE)" où il écrit: "Durant la Seconde Guerre mondiale, la plupart des écoles bouddhistes ont accepté de soutenir la nation dans ses efforts. Apparemment, la seule exception était le Soka Gakkai, qui a refusé de prendre part à ce front unifié"(p.270).
Néanmoins, aucune de ces voix ne peut se comparer à celle de Daisaku Ikeda, le président de Soka Gakkai International, qui a les mots d'éloges les plus forts pour Makiguchi. Dans un essai inclus dans BP intitulé "Le Mouvement pour la paix du SGI", Ikeda écrit:
"Au début du XXe siècle (1903), le président Makiguchi publie « La géographie de la vie humaine (Jinsei Chirigaku), qui préconisait fermement un passage à la compétition humanitaire à une époque où l'impérialisme et le colonialisme demeuraient les principaux modes de relations internationales. Il a analysé la compétition entre les nations comme comprenant les phases de la compétition militaire, la compétition politique, la concurrence économique, et la concurrence humanitaire. Il a souligné que l'objectif de l'humanité devrait être la compétition humanitaire" (p.136).
Robert Kisala, cependant, nous présente à nouveau, une vue alternative. Il commence par remarquer que l’élément central du premier livre de Makiguchi, Jinsei Chirigaku, mettait l'accent sur le "lien entre la géographie et la vie quotidienne préconisant l'étude de la géographie à travers des excursions et d'autres expériences pratiques" (p.75). Quant à la soit disant résistance de Makiguchi à la guerre, Kisala explique que le nœud du problème était le refus de Makiguchi de vénérer le talisman d'Amaterasu, la déesse du soleil, émis par le sanctuaire central shintoïste d'Ise. C'est ce refus, affirme-t-il, pas la résistance à la guerre, qui a conduit Makiguchi et une vingtaine d'autres dirigeants de ce qui était alors connu sous le nom de Soka Kyoiku Gakkai (Société académique pour l'éducation créatrice de valeur) à être accusés de lèse-majesté et de violation de la loi sur la préservation de la paix le 6 juillet 1943.
Kisala conclut son étude sur Makiguchi en soulignant que si la littérature de la Soka Gakkai prétend souvent que cette persécution était le seul résultat d'une position anti-militaire prise par Makiguchi, sa lecture de la situation indique que l'opposition de Makiguchi était plus spécifiquement focalisée par la politique religieuse du gouvernement »(page 90).
Les recherches sur Makiguchi montrent que non seulement la conclusion de Kisala étaient correcte, mais qu'il n'a révélé qu'une petite partie de l'histoire. C'est-à-dire que si Makiguchi peut, comme le prétend Ikeda, espérerait l'avènement d'un monde futur fondé sur la compétition "humaine" ». Cette notion n'existait pas encore à son époque. Dans Jinsei Chirigaku, Makiguchi a décrit le monde réel dans lequel il évoluait comme suit:
"Je suis d'avis que la seule raison du danger actuel pour la paix mondiale est la promotion par la Russie de sa propre existence C'est-à-dire qu'à l'ère actuelle de lutte économique pour l'existence, la Russie cherche à exploiter les faiblesses des puissances internationales pour acquérir ce qu'elle doit avoir: l'accès aux océans. Elle est donc en train de s'étendre dans trois directions, depuis le détroit de Dardanelle en Europe de l'Est jusqu'au golfe Persique en Asie occidentale et la mer Jaune en Extrême-Orient" (Makiguchi 1903: 950-951).
En identifiant la Russie comme unique responsable de la mise en danger de la paix mondiale, Makiguchi adopta une position identique à celle du gouvernement japonais de l’époque. Le Japon a utilisé cette prétendue menace pour justifier son attaque surprise contre la Russie l'année suivante, ostensiblement pour protéger l'indépendance de la Corée et empêcher d'autres empiétements russes sur le territoire chinois, en particulier la Mandchourie. La réalité, cependant, c'est qu'après sa victoire sur la Russie en 1905, le Japon a pris le contrôle de la Corée pour en faire une colonie à part entière en 1910. Quant à la Mandchourie, le Japon a progressivement accru son contrôle sur cette région de Chine jusqu'à ce qu'il établisse l'état fantoche du Mandchoukuo en février 1932.
Ce qui est parlant, c’est que ni Ikeda ni Kisala ne mentionnent un deuxième livre fondateur que Makiguchi publia pour la première fois en novembre 1912. Intitulé Kyodoka Kenkyå (Étude de la culture populaire), ce volume était une extension des idées contenues dans Jinsei Chirigaku, et insistait particulièrement sur leur pertinence pour la vie et les structures des communautés locales. Makiguchi voulait que les éducateurs ruraux (plutôt que les bureaucrates du gouvernement central) prennent la direction d’ initiatives d'éducation auprès des communautés locales. Mais à quel but ? Le dernier chapitre du livre expliquait le but de Makiguchi pour l’éducation comme suit :
"Indépendamment de notre classe sociale, chacun doit être conscient de la destinée de notre nation, harmoniser sa vie avec cette destinée et, à tous moment, être prêt à partager cette destinée. C'est pour cette raison que le travail de l'éducation nationale est de nous préparer nous-même à faire exactement cela, sans rien omettre dans ce processus, Cependant, pour ce faire, et avant de nous mettre au service de l'Etat, nous devons d'abord contribuer à la zone locale qui nous a nourris et avec laquelle nous partageons des intérêts communs" (Makiguchi 1933: 460-461).
Il convient de noter que Makiguchi a écrit ce qui précède spécifiquement pour une édition agrandie de 1933 de ce livre (voir Makiguchi 1933: 6). Malgré le fait qu'il défendait l'éducation rurale sous contrôle local, en 1933, lui et son éditeur, nul autre que Soka Kyoiku Gakkai, partageaient une vision de l'éducation qui était "centrée sur l'État" comme n'importe lequel de ses contemporains.
Seulement quelques années plus tard, des millions de jeunes Japonais seront appelés à sacrifier leurs vies et celles de leurs victimes, dans le procédé qui consistait à "se mettre au service de l'État". Ainsi, la querelle de Makiguchi avec les bureaucrates du gouvernement central à propos du contrôle de l'éducation locale, ne portait pas sur savoir s'il fallait ou non promouvoir le service à l'État, mais simplement sur la meilleure façon d'atteindre cet objectif.
Si, comme le démontre la citation précédente, Makiguchi croyait que le but ultime de l'éducation était de servir l'État, quel rôle l'empereur avait-il joué dans ce rôle? Makiguchi était-il en quelque sorte opposé ou critique de l'empereur ou du système impérial? Bien que critiquant le patriotisme pour des raisons superficielles, Makiguchi a écrit:
"Sa Majesté, l'Empereur, sur qui est centré l'exercice de l'autorité impériale, le fait par l'intermédiaire de ses fonctionnaires militaires et civils. La raison pour laquelle il exerce cette autorité n'est définitivement pas pour son propre bénéfice. Plutôt, en tant que chef et tête de la nation entière, il exerce gracieusement au nom de tout le peuple. C'est pour cette raison que, dans notre pays, l’état et l'empereur, en tant que chef d’état, doivent être considérés comme totalement un et indivisibles. Nous devons faire comprendre à nos enfants que le service loyal à leur souverain est synonyme d'amour du pays, je crois que c'est seulement ainsi que nous pouvons clarifier le vrai sens de l'expression « loyauté à son souverain et amour de la patrie" [chåkun aikoku] (Makiguchi 1933: 411-412).
En exhortant ses collègues éducateurs à faire comprendre aux enfants de la nation que le service loyal à leur souverain était synonyme d'amour du pays, nous retrouvons à nouveau Makiguchi dans le courant dominant de la ferveur nationaliste qui caractérise de plus en plus les années 1930. Peu importe comment la position de Makiguchi envers l'empereur a pu changer plus tard, en 1933, Makiguchi a défendu la proposition largement répandue que l'amour de la patrie était synonyme de loyaux services à l'empereur. C'est précisément cette idéologie éducative qui a servi de fondement à la demande de l'armée japonaise d'obéissance absolue et inconditionnelle de ses soldats, affirmant que "les ordres de ses supérieurs sont les ordres de l'empereur".
Makiguchi a également évoqué la colonisation de la Corée par le Japon, affirmant que la Corée, avant d'être formellement annexée par le Japon en août 1910, était dans un tel état d'anarchie qu'elle était incapable de se défendre ou de protéger ses citoyens. Non seulement cela, mais que les Chinois se trouvaient actuellement exactement dans la même situation (voir Makiguchi 1933: 413). L'implication évidente de cette dernière affirmation était que la Chine, comme la Corée avant elle, bénéficierait grandement du contrôle japonais. C'était bien sûr un sentiment partagé par le gouvernement japonais, comme on le voit, par exemple, dans la déclaration d'avril 1934 publiée par son ministère des Affaires étrangères. La Chine, déclarait ce communiqué, ne devait pas se prévaloir de l'assistance de tout pays autre que le Japon.
Ceci dit, il est également clair que le principal souci de Makiguchi dans ses écrits favorables à l'expansion du Japon sur le continent asiatique était, comme toujours, orientée vers la manière dont les enfants du Japon devaient être éduqués. Makiguchi a vu, dans une discussion sur le passé récent de la Corée et le présent de la Chine, une occasion en or de montrer aux enfants japonais à quel point ils avaient la chance de vivre au Japon. Makiguchi a continué,
"C'est lorsque nous regardons ces exemples concrets [de la Corée et de la Chine] que les pensées sur notre propre pays nous viennent à l’esprit. Le résultat est que nous ne pouvons nous empêcher d'être reconnaissants et de vouloir rembourser la dette de gratitude que nous devons à l'État."
"L'application pratique de l'étude de la culture populaire est de fournir la base fondamentale pour une compréhension de l'État en demandant à [nos enfants] de regarder des situations comme celles-ci qui sont sous leurs yeux. Je sens très profondément que nous devons chercher vigoureusement à créer des personnes de caractère qui mèneront à l'avenir une vie centrée sur l'État, ayant d'abord acquis le germe de l'idée de servir l'État au niveau local de la ville et du village" (Makiguchi 1933: 413)
Makiguchi démontre encore une fois que son souci ultime était d'implanter chez les enfants japonais une volonté de servir l’état. Makiguchi pensait simplement qu'il savait comment faire cela d'une manière plus efficace que les bureaucrates du gouvernement central qui montraient si peu d'intérêt ou de compréhension des spécificités locales.
S'il est vrai que Makiguchi a été arrêté en juillet 1943 pour avoir refusé de vénérer un talisman de la déesse Sdu soleil, Amaterasu, émis par le sanctuaire d'Ise, cela n'avait rien à voir avec le fait d'être déloyal envers l'empereur. Comme il l’a ré affirmé à ses interrogateurs de la police,"Je pense que c'est pour nous, Japonais, la Voie du Sujet que d'être loyal. C'est ce que j'ai réalisé à partir de mon étude de la vérité du Sutra du Lotus" (Akashi & Matsara, 1975). En outre, aussi contradictoire que cela puisse paraître, le refus de Makiguchi de vénérer un talisman de la Déesse du Soleil ne signifiait même pas un manque de respect pour cette ancêtre présumée de la famille impériale. Makiguchi l'a clairement dit quand il a dit à la police,
"La Déesse du Soleil est la vénérable ancêtre de notre famille impériale, sa vertu divine ayant été transmise à chaque empereur successif qui monta sur le trône jusqu'à l'empereur actuel inclus. Ainsi sa vertu a été transformée en la vertu auguste de Sa Majesté qui, éclairant le peuple, lui apporte le bonheur. C'est pour cette raison que l'article III de la Constitution stipule: « La personne de l'Empereur est sacrée et inviolable.Tout comme nous [les membres de l'association] reconnaissons l'unité fondamentale de la piété filiale et de la loyauté, nous sommes convaincus qu'il est approprié de vénérer Sa Majesté avec vénération selon l'opinion moniste que "Sa Majesté, l'Empereur est Un et Indivisible" [Tenn 'Ichigen -ron], rendant ainsi inutile de rendre hommage au Grand Sanctuaire d'Ise. A la lumière de cela, il n’y a personne d’autre que Sa Majesté, l'empereur lui-même, il n’y a rien à prier avec respect?" (Akashi & Matsåra, éds 1975: 174-175).
Dans les faits, nulle part dans les écrits de Makiguchi, que ce soit avant ou pendant la guerre, en prison ou à l’extérieur de celle-ci, nous ne trouvons de déclarations critiquant la politique militaire du Japon. Au contraire, Makiguchi a non seulement justifié la colonisation de la Corée par le Japon (et la guerre avec la Russie), mais il a consacré toute sa vie d'éducateur à concevoir des moyens plus efficaces d'inculquer le "service à l'État" aux enfants japonais. Il a ajouté que ces mêmes enfants comprenaient tout à fait que le service loyal à leur souverain était synonyme d'amour du pays. Même après l'emprisonnement, il a affirmé que la loyauté envers l'empereur n'était qu'une part naturelle de "la voie du sujet" basé sur sa compréhension de le Sutra du Lotus. Et, comme nous l'avons vu, en ce qui concerne l'empereur, Makiguchi demanda: "Qui, en dehors de Sa Majesté, l'Empereur lui-même, devrions nous prier respectueusement?"
Pour les apologistes qui déclarent maintenant que, malgré son emprisonnement et sa mort, Makiguchi a résisté ou s'est opposé à l'effort de guerre du Japon, revient à vouloir essayer de transformer une chose en son contraire. Comme la vision unilatérale de Paula Green sur Nichidatsu Fuji vu antérieurement, c'est un autre exemple pour tenter de minimiser la désillusion que peut accompagner la religion ou que la religion peut produire.
En évaluant Makiguchi, il est difficile de ne pas admirer la fermeté de sa foi face à l'emprisonnement et au regard de sa mort éventuellement due à la malnutrition et à son âge avancé. C'est surtout le cas lorsque l'on considère que sur les vingt dirigeants de la Société initialement arrêtés avec lui, dix-neuf ont été libérés après avoir renoncé à leur foi. À la lumière de cela, il est raisonnable de supposer que Makiguchi et Toda auraient également été libérés s'ils avaient fait de même. Mais ils ne le firent pas.
Pourtant, comme le révèlent les rapports d'interrogatoire de la police et les écrits antérieurs de Makiguchi, il n'y a pas la moindre allusion que Makiguchi s'opposait à l'agression militaire du Japon pas plus qu'il ne s'était auparavant opposé aux déclarations ultranationalistes des chefs de sa secte. Au contraire, le soutien indéfectible des dirigeants aux attaques du Japon contre la Chine et ensuite envers les États-Unis n'a pas empêché Makiguchi de poursuivre ses activités de prosélytisme énergiques, du moins jusqu'au moment de son arrestation en 1943.
En février 2000, un porte-parole de Sōka Gakkai International (SGI) a affirmé, à la lumière de mes recherches, que pour Makiguchi, "critiquer et rejeter le shintoïsme d'État en pleine conscience des conséquences de telles actions était, à notre avis, équivalent" Cette revendication ne peut toutefois pas être soutenue, car la véritable cause de l'emprisonnement de Makiguchi réside dans ses croyances religieuses exclusives et absolutistes qui n'ont rien à voir avec une critique de l'agression japonaise ou de l'impérialisme centré sur l'empereur.
En fait, on pourrait arguer qu'en admettant que l'emprisonnement de Makiguchi était dû à sa critique et au rejet du Shinto d'État plutôt qu'à une position pacifiste ou anti-guerre, le représentant de la SGI a démontré la thèse de cet article. Pour le démontrer, supposons qu'il y ait un pays en guerre dans lequel le catholicisme romain était la religion officielle de l'État. Dans l'espoir d'unifier les citoyens de ce pays dans l'effort de guerre, le gouvernement a décrété que toutes les églises protestantes devaient remplacer leurs croix "des de personnage" par un crucifix de style catholique et que ceux qui ne le feraient pas seraient emprisonnés. Est-ce que les pasteurs protestants qui auraient refusé, et auraient été emprisonnés, seraient considérés comme "pacifistes" opposés à la guerre contre d'autres nations ? La réponse est claire.
Comme Nichiren, sept cents ans plus tôt, Makiguchi était convaincu qu'il n'y avait qu'un seul chemin vers le salut pour l'individu, la nation et même l'empereur, descendant de la Déesse du Soleil et bénéficiaire de sa vertu divine comme on le croyait. Le chemin du salut ne consistait en rien de plus, et rien de moins, que la foi dans le Sûtra du Lotus tel qu'interprété et exposé par Nichiren, que Makiguchi considérait comme le seul et unique "vrai Bouddha" de l'époque actuelle.
En poursuivant son objectif, Makiguchi était tout à fait prêt à être persécuté, car comme l'a noté George Tanabe, la persécution joue depuis longtemps un rôle important dans la tradition Nichiren, dont les origines remontent à la mentalité et à la religion fondée par Nichiren lui même. En ce sens, Makiguchi ne faisait que suivre les traces de son illustre prédécesseur.
Il faut répéter que la propre persécution de Nichiren, ainsi que celle de ses disciples ultérieurs, a toujours été provoquée par leur propre intolérance envers les autres religions. Nichiren et ses disciples ont non seulement tenté de convertir les autres par la force, mais encore plus important, ils ont constamment dénoncé le gouvernement de ne pas adhérer exclusivement au Sûtra du Lotus tel que propagé par Nichiren. Le Sûtra du Lotus prédisant que ses dévots seront persécutés, les disciples de Nichiren considèrent la persécution comme une confirmation de la véracité de ce sutra, et justifient ainsi leur fidélité à celui-ci.
Ce qui distinguait Makiguchi de ses contemporains, y compris même des chefs religieux de sa secte, était sa foi absolue en Nichiren et ses enseignements, considérés comme préservés et enseignés par la seule Nichiren Shōshū. Il ne tolérerait aucun compromis, car selon lui, seule cette foi pouvait sauver à la fois l'adhérent individuel et le Japon dans son ensemble, ce qui impliquait nécessairement la destruction des envahisseurs, tout comme les Mongols envahisseurs du 13ème siècle araient été détruits par la prière d'intercession de Nichiren. La foi dans tout autre enseignement religieux était, par définition, une mauvaise pratique qui devait être éradiquée. En d'autres termes, malgré les affirmations contraires de la SGI, Makiguchi excepté pour lui-même, n'avait aucune sympathie pour la "liberté de religion" envers tous ceux qui n'adhéraient pas strictement à son point de vue sectaire
Il convient de noter que, dans l'immédiat après-guerre, l'extrême intolérance de Sōka Gakkai envers les autres religions n’avait pas changée. Par exemple, le 31 octobre 1954, Toda Jōsei monta un cheval blanc (auparavant prérogative exclusive de l'empereur) sur le terrain de parade Taisekiji et s'adressa aux membres assemblés des divisions des jeunes hommes et des jeunes femmes comme suit:
"Dans notre tentative de kosen rufu [convertir le monde entier], nous sommes sans alliés. Nous devons considérer toutes les religions comme nos ennemis, et nous devons les détruire. Mesdames et Messieurs, il est évident que le chemin à parcourir est plein d'obstacles. Par conséquent, vous devez vénérer le Gohonzon (le rouleau sacré), prendre l'esprit Sōka Gakkai à cœur, et cultiver la force de la jeunesse. Je m'attends à ce que vous saisissiez l'occasion de relever les nombreux défis qui vous attendent."
Comme son mentor, Toda ne parlait pas métaphoriquement quand il a exhorté la destruction de toutes les autres religions. Néanmoins, les représentants de Sōka Gakkai prétendent maintenant que les choses ont changé. Tout en admettant que « Sōka Gakkai demande aux nouveaux membres de cesser de vénérer tous les autres objets religieux », ils affirment que « aujourd'hui, la suppression des objets religieux de la foi précédente est toujours encouragée mais n'est pas une nécessité absolue »
Du moins, l'intolérance religieuse de Sōka Gakkai semble s'être adoucie ces dernières années, d'autant plus qu'elle cherche des convertis dans des sociétés religieusement pluralistes en dehors du Japon où « il n'existe aucune règle standard concernant le traitement des objets d'autres religions. » Pourtant, jusque dans les années 1960, sinon plus tard, les publications officielles de Sōka Gakkai avertissait ainsi les adhérents:
Vouloir garder les reliques des autres religions sous le prétexte que vous ne leur rendez pas de culte indique votre attachement à une religion perverse. Dans ces conditions, vous ne pouvez pas dire que votre foi est pure. Il y a des cas de gens qui pensaient à tort pouvoir disposer comme bon leur semblait des tablettes et des talismans de ces religions mauvaises (tout ce qui n’est pas la sgi ndlr). Cependant, parce que ces objets sont restés dans leurs maisons, ces personnes ont souffert une punition divine sévère. 51
Adouci ou pas, compte tenu de son intolérance permanente envers les « religions diaboliques », il est ahurissant de noter le succès que les dirigeants de Sōka Gakkai, surtout sous Ikeda Daisaku, ont connu ces dernières années en se présentant au monde comme de dignes représentants. de la longue tradition de tolérance religieuse du bouddhisme. C'est non moins étonnant que le succès que la Sōka Gakkai a eu en se présentant comme une organisation dédiée à la paix mondiale comme le prouverait l'opposition de son fondateur, même jusqu'à la mort, au militarisme japonais.
Cet article a au moins commencé à remettre les pendules à l'heure. Il reste à voir, cependant, si Sōka Gakkai, ciblant la seule Nichiren Shōshu, reconnaîtra jamais sa propre « responsabilité de guerre ». Robert Kisala identifie un obstacle majeur à cette reconnaissance dans son livre Prophets of Peace de 1999. Il est très réconfortant, dit-il, de présenter Makiguchi et ses partisans comme des victimes et non comme des partisans du militarisme japonais, car « cette conscience de victime sert à absoudre les croyants Sōka Gakkai de toute responsabilité directe pour le Japon durant la guerre. . . "52
À cet égard, il convient de mentionner que ce n'est que ces dernières années que des documents présentant la complicité de Nichiren Shōshū en temps de guerre ont été rendus publics. La divulgation de ces documents est étroitement liée au différend interne qui a éclaté entre Nichiren Shōshū et Sōka Gakkai en 1991, ce qui a amené les prêtres de Nichiren Shōshū à prendre la mesure extraordinaire d'excommunier l'ensemble des membres laïcs de Sōka Gakkai. Ostensiblement, l'excommunication était le résultat de différences doctrinales, mais des questions concernant l'autorité décisionnelle entre les dirigeants religieux de la secte et les leaders laïques de la Soka Gakkai, en particulier Ikeda Daisaku, étaient partie intégrante de cette division très conflictuelle. Les deux parties ayant chacune accusé l'autre de corruption financière et d'autres formes de malversations. Bien qu'une discussion détaillée de cet affrontement dépasse le cadre de cet article.
Qu'il suffise de dire que, depuis lors, dans l’intérêt sinon pour la défense de la Sōka Gakkai sa maison mère a été présentée comme ayant depuis longtemps trahi les enseignements de Nichiren, notamment par son soutien à l'agression militaire japonaise. Ce soutien est, bien sûr, dépeint comme l'antithèse même de tout ce qui a été dit ou fait par son propre fondateur et martyr Makiguchi et son fidèle disciple Toda.
Aussi attrayante que cette interprétation soit en surface, elle reste, au mieux, une affirmation partielle et unilatérale. Comme nous l'avons vu, Makiguchi a non seulement justifié l’annexion coloniale de la Corée par le Japon (et la guerre avec la Russie), mais il a aussi consacré une grande partie de sa vie à développer un moyen plus efficace pour aider les enfants japonais à servir l’état de l’époque. Il a en outre préconisé que ces mêmes enfants devaient "comprendre parfaitement que le service loyal à leur souverain était synonyme d'amour de leur pays ». Même lorsqu'il était emprisonné, il affirmait que la loyauté envers l'empereur n'était qu'une partie naturelle de « la Voie du sujet ». Et comme si cela ne suffisait pas, Makiguchi demanda: « Qui y a t il d’autre, à part Sa Majesté, l'Empereur lui-même, que nous devons prier respectueusement? "Jusqu'à et à moins que Sōka Gakkai puisse admettre sa propre histoire de soutien, ou du moins de collaboration avec les actions militaristes centrées sur l'empereur du Japon, il est difficile que les autres religions, bouddhistes ou non-bouddhistes, la reconnaissent comme une véritable force pour la paix mondiale.
Sources
Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō, eds. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge) (History of Suppression by the Special Higher Police Division -- Suppression of Religious Persons (Part Two). Tokyo: Taihei Shuppan-sha, 1975.
Bethel, Dayle M. Makiguchi -- The Value Creator. New York: Weatherhill, 1973.
Bix, Herbert P. Hirohito and the Making of Modern Japan. New York: HarperCollins, 2000.
Borton, Hugh. Japan’s Modern Century. New York: Ronald Press, 1970.
Ikeda Daisaku. “Seishun Taiwa” (Discussions on Youth) in SGI Gurafu, August 2000.
Kimura Keiko, Exec. Producer. “Daisaku Ikeda -- Close Up (New English Version).” Videotape, 60 minutes, distributed by the Sōka Gakkai Public Relations Office, 1999.
Kisala, Robert. Prophets of Peace -- Pacifism and Cultural Identity in Japan’s New Religions. Honolulu: University of Hawai’i Press,1999.
Lopez, Donald S., Jr, ed. Buddhism in Practice. Princeton: Princeton University Press, 1995.
Makiguchi, Tsunesaburō. Jinsei Chirigaku (The Geography of Human Life). Tokyo: Bunkaidō, 1903.
______ Kyōdoka Kenkyū (Research on Folk Culture), rev. 10th ed. Tokyo: Sōka Kyōiku Gakkai, 1933.
Tessa Morris-Suzuki, "Lavish are the Dead: Re-envisioning Japan's Korean War," The Asia-Pacific Journal, Vol. 11, Issue 52, No. 3, December 30, 2013.
Murata, Kiyoaki. Japan’s New Buddhism -- An Objective Account of Soka Gakkai. New York: Weatherhill, 1969.
Ōki Michiyoshi. Bukkyō-sha no Sensō Sekinin -- Nichiren Shōshū no Rekishi Kaizan o Itou [The War Responsibility of Buddhists -- Questioning the Falsification of History by Nichiren Shôshû]. Tokyo: Bungei-sha, 1998.
Suzuki Nikkyō. “Kun’yu Dai Nijū-go” (Exhortation, Number Twenty-Nine) in the monthly publication Dai-Nichiren, January 1942.
______“Shinkō no Hongi” (The True Meaning of Religious Faith) in the monthly publication Dai-Nichiren, April 1942.
Toda Jōsei. “Sōka Gakkai no Rekishi to Kakushin” (The History of Sōka Gakkai and an Unshakable Faith) in Daibyakurenge, No. 16, July 1951.
Victoria, Brian. Zen at War, 2nd ed.. Boulder, CO: Rowman and Littlefield, 2006.
Notes
1 In his book Prophets of Peace, Robert Kisala introduces the wartime records of two other Nichiren-related “new religions”: Risshō Kōsei-kai
(co-founded by Niwano Nikkyō) and Nipponzan Myōhōji (founded by Fujii Nichidatsu). See pages 103-4 and 50-51 respectively. As in this chapter, Kisala finds that the respective founders of these two organizations, despite postwar claims to the contrary, generally supported Japan’s war efforts.
2 Quoted in Victoria, Zen at War, p. 159.
3 Quoted on the official website of Soka Gakkai International (accessed on 1 August 2000).
4 Narrated in “Daisaku Ikeda -- Close Up (New English Version).” Kimura Keiko, Executive Producer. Videotape, 60 minutes, distributed by the Sōka Gakkai Public Relations Office, 1999.
5 Ikeda Daisaku. “Seishun Taiwa” (Discussions on Youth) in SGI Gurafu, August 2000, p. 36.
6 Murata. Japan’s New Buddhism, pp. 73-74.
7 Makiguchi, Jinsei Chirigaku, p. 947.
8 Ibid., p. 946.
9 Ibid., pp. 948-51.
10 Murata, Japan’s New Buddhism, p. 74.
11 Borton, Japan’s Modern Century, p. 379.
12 Murata, Japan’s New Buddhism, p. 74.
13 Makiguchi, Kyōdoka Kenkyū, rev. 10th ed., p. 1.
14 Ibid., pp. 460-61.
15 Ibid., p. 6.
16 Ibid., pp. 411-12.
17 Quoted in Bix, Hirohito and the Making of Modern Japan, p. 314.
18 Ibid., p. 315.
19 Makiguchi, Kyōdoka Kenkyū, rev. 10th ed., p. 412.
20 Burton, Japan’s Modern Century, p. 383.
21 Makiguchi, Kyōdoka Kenkyū, rev. 10th ed., p. 413.
22 Bethel, Makiguchi -- The Value Creator, p. 73.
23 See details in Murata, Japan’s New Buddhism, pp. 70-71.
24 Quoted in Ōki, Bukkyō-sha no Sensō Sekinin, p. 204.
25 Ibid., p. 195.
26 Ibid., p. 198.
27 Suzuki Nikkyō, “Kun’yu Dai Nijū-go” (Exhortation, Number Twenty-Nine) in the monthly publication Dai-Nichiren, January 1942, p. 1.
28 Quoted in Ōki, Bukkyō-sha no Sensō Sekinin, p. 116.
29 Suzuki Nikkyō, “Shinkō no Hongi” (The True Meaning of Religious Faith) in the monthly publication Dai-Nichiren, April 1942, p. 13.
30 Ibid., p. 13.
31 Quoted in Murata, Japan’s New Buddhism, p. 82.
32 Toda Jōsei, “Sōka Gakkai no Rekishi to Kakushin” (The History of Sōka Gakkai and an Unshakable Faith) in Daibyakurenge, No. 16, July 1951, p. 1-2.
33 Ibid., p. 1. The “great object of worship” or daigohonzon refers to the sacred tablet on which Nichiren himself is claimed to have inscribed the holy phrase, “Nam(u)-myōhō-renge-kyō” (Homage to the Lotus Sutra). This tablet is enshrined at Taisekiji temple and forms the chief basis for the sect’s claim to orthodoxy in the transmission of Nichiren’s teachings.
34 Membership numbers vary. Makiguchi put his membership at 1,500 during his interrogation by the police in July 1943. See Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), p. 179. According to Murata Kiyoaki, however, Sōka Gakkai had 5,000 members as of mid-1943. See Japan’s New Buddhism, p. 84.
35 Bethel, Makiguchi -- The Value Creator, pp. 96-98.
36 See details in Ōki, Bukkyō-sha no Sensō Sekinin, pp. 64-65.
37 Quoted in Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), p. 154.
38 Ibid., p. 172. The passage in the Imperial Rescript on Education that Makiguchi referred to reads as follows: “Our Imperial Ancestors have founded Our Empire on a basis broad and everlasting and have deeply and firmly implanted virtue; Our subjects ever united in loyalty and filial piety have from generation to generation illustrated the beauty thereof.” (Italics mine)
39 Ibid., p. 172
40 Ibid., pp. 174-75.
41 Interestingly, as early as 1938 all Nichiren-related sects came under suspicion of having committed lese majesty exactly because of the marginal position they accorded Amaterasu on the sect’s central object of worship, i.e., gohonzon. In response, the main Nichiren sect headquartered on Mt. Minobu actually deleted Amaterasu’s name altogether from their gohonzon thus eliminating any appearance of disrespect to the Imperial ancestress. Nichiren Shōshū, on the other hand, never went so far as to alter their gohonzon even though they eventually called on their followers to accept amulets of the Sun Goddess.
42 Quoted in Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), pp. 171-72.
43 For further discussion of the Nichiren Shōshū view of Nichiren, see Murata, Japan’s New Buddhism, pp. 63-67. Mappō refers to the Mahayana belief that following Buddha Shakyamuni’s death there would come a time of decline, dissension and schism in the Buddha Dharma. The last stage (out of three) in this process would be the age of the degenerate Dharma lasting, according to some sources, for some 10,000 years. During this time only a diluted form of Buddhism would exist, and enlightenment rarely attained. Nichiren was convinced that the world had already entered this final stage.
44 Quoted in Akashi Hirotaka & Matsuura Sōzō. Shōwa Tokkō Dan’atsu-shi 4 -- Shūkyō-jin ni taisuru Dan’atsu (ge), p. 179.
45 This statement was made by Tokihisa (Andy) Sumimoto, SGI Office of Public Information, in a letter to the author dated 14 February 2000.
46 Tanabe, “The Matsumoto Debate” in Lopez (ed.), Buddhism in Practice, p. 241.
47 In its webpage entitled “The Three Founding Presidents,” Sōka Gakkai International claimed the following: “His [Makiguchi’s] humanistic, student-centered views and defense of religious freedom often brought him into conflict with authority. Arrested with other top Soka Gakkai leaders in 1943 as a "thought criminal" for his unyielding opposition to the militarist regime and its forced imposition of state-sponsored religion, Makiguchi died in prison at the age of 73 in November 1944.” (accessed 13 July 2014).
48 Quoted in Murata, Japan’s New Buddhism, p. 100.
49 This statement was made by Tokihisa (Andy) Sumimoto, SGI Office of Public Information, in an e-mail message to the author dated 24 November 2000.
50 Ibid.
51 Quoted in Murata, Japan’s New Buddhism, p.106.
52 Kisala, Prophets of Peace, p. 91.
53 As Tessa Morris-Suzuki revealed in her article, “Lavish Are The Dead: Re-envisioning Japan’s Korean War,” although Japan was not officially involved in the Korean War, inasmuch as it was under Allied Occupation until April 1952 and not yet a member of the United Nations, it nevertheless supplied an estimated 8,000 or more Japanese nationals to the war zone in military related-roles. (accessed on 29 August 2014).
54 Available on the Web here (accessed on 11 July 2014).
https://apjjf.org/2014/12/37/Brian-Vict ... ticle.html
"Une carte n'est pas le territoire" Alfred Korzybski
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 01 avr.18, 21:39Sujet déjà débatu, source en procés pour diffamation .
"Le sage n’est pas celui qui pratique le bouddhisme en dehors des règles de la société mais plutôt celui qui, grâce à une compréhension profonde du monde, connaît la meilleure manière de s’y comporter."
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 02 avr.18, 02:14Déjà répondu: http://www.forum-religion.org/mahayana/ ... 8-255.htmlYvon a écrit :Sujet déjà débatu, source en procés pour diffamation .
Vos propos ne traduisent que votre égarement !
"Une carte n'est pas le territoire" Alfred Korzybski
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 02 avr.18, 03:20Vous ne faites que ressasser encore et encore les mêmes conneries .
"Le sage n’est pas celui qui pratique le bouddhisme en dehors des règles de la société mais plutôt celui qui, grâce à une compréhension profonde du monde, connaît la meilleure manière de s’y comporter."
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Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 02 avr.18, 04:07Information mensongère, il n'y aucun procès en cours, Makiguchi est bien tel que le décrit BV.Yvon a écrit :Sujet déjà débatu, source en procés pour diffamation .
La fiction de procès que vous perpétrez montre une capacité certaine à affabuler pour défendre des fantasmes autour du personnage !
Il n'y aura jamais de procès car il le perdrait et ce serait trop médiatisé et destructeur pour la légende qui est entrennue sur makiguchi et le soit disant
pacifisme de la soka gakkai !
Re: Soka Gakkai: Makiguchi homme de paix ?
Ecrit le 02 avr.18, 04:10Il n'y a pas de procés ? Qu'en savez vous ? C'est pas parceque vous trouvez rien sur internet que celui ci n'existe pas .
De toute façon on verra bien lors du jugement .
De toute façon on verra bien lors du jugement .
"Le sage n’est pas celui qui pratique le bouddhisme en dehors des règles de la société mais plutôt celui qui, grâce à une compréhension profonde du monde, connaît la meilleure manière de s’y comporter."
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