Posté : 07 mars04, 05:16
Bonjour Jean;
Je ne t'ai pas interpellé...
Mon intervention est purement d'ordre exégétique.
Bonjour les autres... lecteurs,
Par contre, je rebondis sur ce que vient de dire Jean. Il est exact de dire que les bibles dans leurs traductions sont "inexactes" au sens qu'il est impossible de traduire "exactement" une langue en une autre.
Le grec est tellement riche qu'il est impossible de le faire. Inversement, l'hébreu est une langue tellement simple, que la tâche est son contraire. Le vocabulaire français si nuancé pour rendre une langue "parfois bien paysanne, terre à terre !"
Un exemple: le mot berakha se traduit en français par la bénédiction, mais est-ce bien ce qui est exprimé en hébreu et rend-on bien la nuance hébraïque ? Pas du tout,qui se souvient encore , à part les hébraïsants, que l'hébreu n'a pas de mot "abstrait". Or, la "bénédiction" est un mot "abstrait". L'explication est facile quand on "pénètre un peu la culture des Hébreux. Le verbe barakh désigne le ploiement à genou des chameaux... Or quand on "est béni par quelqu'un on se plie devant lui, on se prosterne en signe d'humilité".
Un deuxième exemple pour qui est intéressé ?
(sinon vous pouvez passer)
Le terme Hoq que l'on traduit par "loi". Notre mot "loi" dérive du Droit romain: lex, legis a un rapport avec "ce qui se lit" (legere, lectum, lector)... et c'est une des merveilles qu'ils nous ont laissé. Mais l'hébreu hoq, on se souvient que loi est un mot "abstrait", alors d'où vient ce hoq puisqu'iln'existe pas de terme ancien abstrait. C'est "simplement" le fait de "graver dans la pierre" (cf. la Stèle deHammurabi bien connue, ou les Tables de la Loi de Moïse qui sont en pierre).
Alors quand on goute l'hébreu, il est parfois "amusant" de lire les trouvailles des traducteurs ! Ont-ils torts detraduire comme ils font ? Loin de là, bien au contraire... onne peut pas traduire "littéralement". Car ce qui est littérale n'a pas de sens, sauf pour celui qui connait la "langue qui est à fgtraduire"... mais pour les autres ?
Pour le N.T., le grec dit de Jésus qu'il "avait mal aux tripes"... L'expression est treiviale en français, mais pas en grec! Alors les traducteurs ont souvent traduit le verbe grec σπλάγχνομαι par "être ému de compassion". Qui peut leur vouloir ? Je concède cependant que l'on perd forcément qtoujours quelque chose en traduisant, comele veut le dicton: traduire, c'est trahir un peu !
La Bible fourmille de ces trésors enfouis.
Je voudrais rappeler que la Réforme protestante est née au XVIème siècle, c'est-à-dire en même temps que l'Humanisme qui a redécouvert les Textes anciens dans la langue d'origine. La Réforme, à la suite d'Erasme ou de Lefèbvre d'Etaples ont redécouvert letexte biblique à partir de l'hébreu et du grec. La Réformation de l'Eglise est consécutif à cette découverte du Texte. Dès le XVIème siècle, des éditions critiques de la Bible vont être"impulsées"... et cela ne cesse pas aujourd'hui !
Le problème actuel de nos sociétés occidentale, c'est que les jeunes préfèrent "apprendre à parler un anglais médiocre" plutôt qu'étudier le grec bien plus formateur pour l'esprit. J'ai entendu que les Etats-Unis se remettaient à redonner des cours de grec dans les "bonnes écoles"... je suppose que l'Europe suivra... avec 50 ans de retard.
Au XVIIème siècle, les Français adoraient émailler leur langue d'italianisme, aujourd'hui ils ne savent plus dire "directeur", il leur faut du "manager" par ci, par là.
Suis-je ringard ?
Je ne le crois pas.
Revenons à un problème souvent posé par les "fondamentalistes": le problème de l'innerrance biblique. Je suppose, Jean, que c'est ce àquoi tu voulais faire allusion à propos du iota.
L'innerrance est par définition unfaux problème car personne ne possède à ce jour les manuscrits originaux. Nous n'avons que des copies... très nombreuses, il est vrai et suffisante pour estimer que nos traductions sont "fidèles" pour l'essentiel.
L'innerrance concerne dès lors les choses essentielles de la vie spirituelle et non "tel mot grec ou hébreu de tel verset".
Un exemple. Le texte de la rencontre de Philippe avec l'eunuque éthiopien dans Actes 8:26-40.
Pendant que mon collèguelisait en français , lors du culte, moi je lisais le texte grec. Ma passion pour cette langue ne s'est jamais amoindrie avec le temps, que du contraire.
Et puis j'ai été un peu surpris d'entendre des différences entre ce que je comprenais du texte et ce que j'entendais en français. Le problème n'est cependant pas bien grave.
En effet, le texte grec dit simplement: au vv.36-38: "en chemin, ils 'allèrent' sur un (point d') eau et l'eunuque dit: Voici (de l') eau! Qu'est-ce qui empêche que je sois immergé ? et donnant ordre d'arrêter le char, il descendit alors; ils descendirent dans l'eau, Philippe et l'Ethiopien, et il l'immergea."
Le texte est court.
En français, j'ai entendu dire au v.37 cette adjonction: "situ crois dans ton coeur, c'est permis. L'eunuque répondit: Je crois que Jésus Christ est le Fils de Dieu!"
Cette phrase existe dans beaucoup de manuscrits. C'est une raison suffisante pour l'avoir inscrite dans les Bibles, mais pas dant toute. La TOB l'a supprimée par exemple, mais l'ajoute en notes de bas de page.
Mon texte critique a une demi page de notes surle nombre de manuscrit l'ayant et ceux qui ne l'ont pas.
Le traducteur moderne peut donc décider à juste titre de retirer ce "demi verset" qui n'ajoute rien à l'acte du baptême de ce grand commis de l'Etat de la reine d'Ethiopie.
Il est vraisemblable que des copistes, bien intentionnés, ont complété bona fide ce que l'ethiopien a dû confesser car au fil du temps, on connait les "confessions publiques" de ceux qui se convertissent. Les premières "confessions auriculaires" sont publiques et connues par coeur, elles serviront très vite de canevas utiles pour "instruire" les futurs "nouveau-nés en christ".
Ce sont donc les manuscrits du IIème siècle qui ont cette adjonction, mais pas les plus anciens!
Au IIème siècle ! on est encore très proche des évènements et des fils ou petit-fils ont connu des apôtres: leur mémoire est fiable et ils n'auraient pas manqué de critiquer si les adjonctions avaient été contredites par ce qu'ils savaient eux par leurs parents ou grands-parents.
Cet exemple n'est pas unique dans la Bible maison en exagère souventle nombre quand on n'y connait rien et qu'on en parle parce qu'on a lu un article qui traite de cette question.
En gros, on peut dire que le chapitre 16 de Marc est aussi concerné. La majorité des plus anciens manuscrits s'arrêtent à Marc 16:1-8... donc, les versets suivant, qui parlent de l'apparition du ressuscité (les vv. 9 -20) sont des ajouts.
En dehors de quelques cas minuscules, pas grand-chose... par contre, jepeux affirmer que les manuscrits anciens sont en plusieurs milliers (plus de vingt-mille) d'exemplaire: leur concordance a toujours fait l'unanimité auprès des spécialistes. Les "cas problématiques" sont connus et peu nombreux" et ne portent jamais sur des matières importantes et, de toute façon, ne remettent pas en cause lesraisons que nous avons de croire en la fiabilité des récits bibliques. C'est ça, l'incroyable. La bible est une aventure extraordinaire faite d'hommes faillibles et pourtant Dieu veut nous parler par ces "hommes là" etpas par des "hommes parfaits!"
Le Coran est bien supérieur sur ceplan, mais voilà, il est "trop parfait" et unique... pas du tout "à la dimension de l'humain".
Bonne semaine à tous,
Patrick
Je ne t'ai pas interpellé...
Mon intervention est purement d'ordre exégétique.
Bonjour les autres... lecteurs,
Par contre, je rebondis sur ce que vient de dire Jean. Il est exact de dire que les bibles dans leurs traductions sont "inexactes" au sens qu'il est impossible de traduire "exactement" une langue en une autre.
Le grec est tellement riche qu'il est impossible de le faire. Inversement, l'hébreu est une langue tellement simple, que la tâche est son contraire. Le vocabulaire français si nuancé pour rendre une langue "parfois bien paysanne, terre à terre !"
Un exemple: le mot berakha se traduit en français par la bénédiction, mais est-ce bien ce qui est exprimé en hébreu et rend-on bien la nuance hébraïque ? Pas du tout,qui se souvient encore , à part les hébraïsants, que l'hébreu n'a pas de mot "abstrait". Or, la "bénédiction" est un mot "abstrait". L'explication est facile quand on "pénètre un peu la culture des Hébreux. Le verbe barakh désigne le ploiement à genou des chameaux... Or quand on "est béni par quelqu'un on se plie devant lui, on se prosterne en signe d'humilité".
Un deuxième exemple pour qui est intéressé ?
(sinon vous pouvez passer)
Le terme Hoq que l'on traduit par "loi". Notre mot "loi" dérive du Droit romain: lex, legis a un rapport avec "ce qui se lit" (legere, lectum, lector)... et c'est une des merveilles qu'ils nous ont laissé. Mais l'hébreu hoq, on se souvient que loi est un mot "abstrait", alors d'où vient ce hoq puisqu'iln'existe pas de terme ancien abstrait. C'est "simplement" le fait de "graver dans la pierre" (cf. la Stèle deHammurabi bien connue, ou les Tables de la Loi de Moïse qui sont en pierre).
Alors quand on goute l'hébreu, il est parfois "amusant" de lire les trouvailles des traducteurs ! Ont-ils torts detraduire comme ils font ? Loin de là, bien au contraire... onne peut pas traduire "littéralement". Car ce qui est littérale n'a pas de sens, sauf pour celui qui connait la "langue qui est à fgtraduire"... mais pour les autres ?
Pour le N.T., le grec dit de Jésus qu'il "avait mal aux tripes"... L'expression est treiviale en français, mais pas en grec! Alors les traducteurs ont souvent traduit le verbe grec σπλάγχνομαι par "être ému de compassion". Qui peut leur vouloir ? Je concède cependant que l'on perd forcément qtoujours quelque chose en traduisant, comele veut le dicton: traduire, c'est trahir un peu !
La Bible fourmille de ces trésors enfouis.
Je voudrais rappeler que la Réforme protestante est née au XVIème siècle, c'est-à-dire en même temps que l'Humanisme qui a redécouvert les Textes anciens dans la langue d'origine. La Réforme, à la suite d'Erasme ou de Lefèbvre d'Etaples ont redécouvert letexte biblique à partir de l'hébreu et du grec. La Réformation de l'Eglise est consécutif à cette découverte du Texte. Dès le XVIème siècle, des éditions critiques de la Bible vont être"impulsées"... et cela ne cesse pas aujourd'hui !
Le problème actuel de nos sociétés occidentale, c'est que les jeunes préfèrent "apprendre à parler un anglais médiocre" plutôt qu'étudier le grec bien plus formateur pour l'esprit. J'ai entendu que les Etats-Unis se remettaient à redonner des cours de grec dans les "bonnes écoles"... je suppose que l'Europe suivra... avec 50 ans de retard.
Au XVIIème siècle, les Français adoraient émailler leur langue d'italianisme, aujourd'hui ils ne savent plus dire "directeur", il leur faut du "manager" par ci, par là.
Suis-je ringard ?
Je ne le crois pas.
Revenons à un problème souvent posé par les "fondamentalistes": le problème de l'innerrance biblique. Je suppose, Jean, que c'est ce àquoi tu voulais faire allusion à propos du iota.
L'innerrance est par définition unfaux problème car personne ne possède à ce jour les manuscrits originaux. Nous n'avons que des copies... très nombreuses, il est vrai et suffisante pour estimer que nos traductions sont "fidèles" pour l'essentiel.
L'innerrance concerne dès lors les choses essentielles de la vie spirituelle et non "tel mot grec ou hébreu de tel verset".
Un exemple. Le texte de la rencontre de Philippe avec l'eunuque éthiopien dans Actes 8:26-40.
Pendant que mon collèguelisait en français , lors du culte, moi je lisais le texte grec. Ma passion pour cette langue ne s'est jamais amoindrie avec le temps, que du contraire.
Et puis j'ai été un peu surpris d'entendre des différences entre ce que je comprenais du texte et ce que j'entendais en français. Le problème n'est cependant pas bien grave.
En effet, le texte grec dit simplement: au vv.36-38: "en chemin, ils 'allèrent' sur un (point d') eau et l'eunuque dit: Voici (de l') eau! Qu'est-ce qui empêche que je sois immergé ? et donnant ordre d'arrêter le char, il descendit alors; ils descendirent dans l'eau, Philippe et l'Ethiopien, et il l'immergea."
Le texte est court.
En français, j'ai entendu dire au v.37 cette adjonction: "situ crois dans ton coeur, c'est permis. L'eunuque répondit: Je crois que Jésus Christ est le Fils de Dieu!"
Cette phrase existe dans beaucoup de manuscrits. C'est une raison suffisante pour l'avoir inscrite dans les Bibles, mais pas dant toute. La TOB l'a supprimée par exemple, mais l'ajoute en notes de bas de page.
Mon texte critique a une demi page de notes surle nombre de manuscrit l'ayant et ceux qui ne l'ont pas.
Le traducteur moderne peut donc décider à juste titre de retirer ce "demi verset" qui n'ajoute rien à l'acte du baptême de ce grand commis de l'Etat de la reine d'Ethiopie.
Il est vraisemblable que des copistes, bien intentionnés, ont complété bona fide ce que l'ethiopien a dû confesser car au fil du temps, on connait les "confessions publiques" de ceux qui se convertissent. Les premières "confessions auriculaires" sont publiques et connues par coeur, elles serviront très vite de canevas utiles pour "instruire" les futurs "nouveau-nés en christ".
Ce sont donc les manuscrits du IIème siècle qui ont cette adjonction, mais pas les plus anciens!
Au IIème siècle ! on est encore très proche des évènements et des fils ou petit-fils ont connu des apôtres: leur mémoire est fiable et ils n'auraient pas manqué de critiquer si les adjonctions avaient été contredites par ce qu'ils savaient eux par leurs parents ou grands-parents.
Cet exemple n'est pas unique dans la Bible maison en exagère souventle nombre quand on n'y connait rien et qu'on en parle parce qu'on a lu un article qui traite de cette question.
En gros, on peut dire que le chapitre 16 de Marc est aussi concerné. La majorité des plus anciens manuscrits s'arrêtent à Marc 16:1-8... donc, les versets suivant, qui parlent de l'apparition du ressuscité (les vv. 9 -20) sont des ajouts.
En dehors de quelques cas minuscules, pas grand-chose... par contre, jepeux affirmer que les manuscrits anciens sont en plusieurs milliers (plus de vingt-mille) d'exemplaire: leur concordance a toujours fait l'unanimité auprès des spécialistes. Les "cas problématiques" sont connus et peu nombreux" et ne portent jamais sur des matières importantes et, de toute façon, ne remettent pas en cause lesraisons que nous avons de croire en la fiabilité des récits bibliques. C'est ça, l'incroyable. La bible est une aventure extraordinaire faite d'hommes faillibles et pourtant Dieu veut nous parler par ces "hommes là" etpas par des "hommes parfaits!"
Le Coran est bien supérieur sur ceplan, mais voilà, il est "trop parfait" et unique... pas du tout "à la dimension de l'humain".
Bonne semaine à tous,
Patrick