toiujours pour rester dans le domaine qui s'approche de l'astronomie, un aperçu de ce que doit être une page scientifique, je m'aperçois (je suis sûr de ne pas étre le seul) qu'il y a une grande différence avec la formulation, (disons pour rester correct) sommaire de ton site.
7.2. La théorie M
Nous avons donc besoin d'une description mathématique unique qui unifierait les descriptions de toutes les théories des cordes. Quelle pourrait être la forme d'une telle théorie ?
Cette théorie hypothétique est appelée théorie M (M pour matrices, membranes, mystère).
Les D-branes
Avant d'approfondir le sujet, il est nécessaire d'étudier un peu mieux les différentes propriétés des cordes. Et en particulier les conditions aux limites des extrémités des cordes ouvertes.
Pourquoi des conditions aux limites pour les extrémités ? Tout simplement parce qu'une corde ouverte à deux bouts et qu'il faut bien décrire comment ils se comportent !
Quelles conditions peut-on fixer aux extrémités ? Les conditions les plus générales et les plus naturelles sont les conditions aux limites de Neumann. Les extrémités sont astreintes à se déplacer… partout ! C'est à dire dans tout l'espace. Elles sont libres.
Une autre idée est de fixer ces cordes en un point particulier de l'espace (donc en fixant 10 des coordonnées la 11ème, le temps, restant évidemment libre).
Enfin, on peut imaginer des conditions mixtes. C'est à dire imposer les coordonnées dans D dimensions et les laisser libre dans 9 - D dimensions spatiales.
Mathématiquement, les conditions de Dirichlet et de Neumann ont une formulation mathématique précise. On impose donc D conditions de Dirichlet et 9 - D conditions de Neumann. Une telle condition aux limites est appelée une D-brane (D pour dimensions ou pour Dirichlet). Une 0-brane est un point, une 1-brane est une courbe, une 2-brane est une surface (une membrane), etc. Une 9-brane est l'espace tout entier et correspond aux conditions de Neumann montrées plus haut.
Attention, une 1-brane n'est pas une corde ! C'est une condition imposée aux extrémités d'une corde mais elle ne se décrit pas, mathématiquement, du tout de la même manière.
Les conditions de Neumann respectent l'invariance de Lorentz mais pas les conditions de Dirichlet puisque ces dernières imposent des coordonnées particulières. Or en relativité, il n'y a pas de repère (donc pas de point ni de direction) privilégié.
Pour ces raisons on a longtemps utilisé uniquement les conditions de Neumann quand, en développant la théorie, on s'est rendu compte que les conditions de Dirichlet apparaissaient naturellement et étaient indispensables !
Mais les conditions de Dirichlet violent l'invariance de Lorentz ! Comment s'en sortir ?
En réalité cette violation n'est pas surprenante. Prenons la relativité classique avec des particules. Tant qu'il n'y a aucune particule (le vide) l'invariance de Lorentz est respectée. Maintenant plaçons une particule quelque part. L'invariance n'est plus respectée puisqu'il existe un repère privilégié : celui où la particule est au repos ! C'est normal. La théorie sous-jacente est invariante mais un état particulier ne l'est pas. On doit donc considérer une D-brane comme un état particulier du système.
Donc l'ensemble des D-branes possibles pour une corde forme un ensemble d'états possibles. Etat peut-être pris au sens de la mécanique quantique puisque la théorie des cordes est une théorie quantique. Les D-branes sont donc des objets "dynamiques" décrits par un ensemble d'états. Le "vide de D-brane" est un état invariant par transformation de Lorentz mais un état particulier contenant des D-branes ne l'est pas.
Par exemple, une 0-brane, étant un point, est décrite par un ensemble d'états, chacun d'eux correspondant à une position donnée. Donc, une 0-brane se comporte comme une particule (dans un espace-temps à 10 dimensions) ! Mais attention, de telles D-branes ne sont pas des objets isolés puisqu'elles sont reliées par les cordes. Les D-branes ne sont que la conséquence des propriétés assignées aux extrémités des cordes.
En particulier une théorie avec des 2-branes est différente d'une "théorie des membranes". C'est à dire une théorie semblable à la théorie des cordes mais qui décrirait des membranes vibrantes au lieu de cordes vibrantes. Ce genre de théorie a déjà été étudié et, bien qu'intéressante, retombe dans les travers de la non renormalisabilité à cause du trop grand nombre de degrés de libertés des membranes.
Les D-branes ne changent rien, formellement, aux cordes (au contraire puisqu'elles fixent des contraintes sur les extrémités des cordes) et la théorie reste renormalisable.
On constate, en étudiant la théorie, que les D-branes peuvent avoir des interactions avec certains champs de jauge et peuvent donc porter une charge dont la conservation assure la stabilité de ces D-branes. Tout comme les cordes ont des interactions avec le champ tensoriel de jauge comme nous avons vu.
Dans ce cas la théorie n'est plus seulement une théorie des cordes mais une théorie des cordes et des D-branes ! Le spectre des particules (bosons, fermions) à un lien étroit non seulement avec les cordes mais aussi avec les D-branes, ce qui n'est pas surprenant puisque la façon dont sont fixées les extrémités joue forcément un rôle pour les vibrations autorisées pour la corde. Tout comme le fait de fixer les cordes d'un violon permet à celles-ci de vibrer selon certains modes précis de vibrations. Ce qui donne des possibilités supplémentaires et… de grandes complications théoriques !
Pour qu'une 2-brane puisse interagir avec un champ de jauge, il faut que celui-ci soit un tenseur du troisième rang. Nous avions présenté les tenseurs mais c'était uniquement des tenseurs du deuxième rang (qui se transforment comme deux vecteurs). Un tenseur du troisième rang est plus complexe. Un tenseur du troisième rang est au tenseur du second rang ce qu'un tenseur du second rang est à un vecteur (appelé parfois tenseur de premier rang). La raison mathématique à cela est qu'une surface (comme une 2-brane) décrit une trajectoire au cours du temps qui est un volume, c'est à dire une variété à trois dimensions. Donc en général, une D-brane a besoin un champ de jauge tensoriel de rang D+1.
Les D-branes stables dépendent donc des champs tensoriels de jauge prédits par la théorie.
Par exemple, la théorie IIA contient un champ tensoriel de troisième rang qui interagit avec des 2-branes. Elles sont donc stables.
Notons aussi que les D-branes peuvent être définies même en présence de cordes fermées (comme la théorie IIA). On peut en effet décrire les D-branes pour des cordes ouvertes (dans la théorie I) puis appliquer les dualités pour passer à des théories avec des cordes fermées. Cela fournit déjà un cadre plus global pour décrire l'ensemble des théories (mais ce n'est pas encore suffisant, ce n'est toujours pas la théorie M recherchée).
La dualité U
On a également découvert une théorie, utilisant des membranes (en faisant un détour par la théorie des cordes avec des D-branes), qui se déroule dans un espace à 11 dimensions et qui est équivalente aux autres théories !
En enroulant les membranes sur un cercle, on repasse à 10 dimensions et les membranes enroulées forment des cordes donnant la théorie IIA.
En enroulant les membranes sur un segment de droite, on retombe sur la théorie des cordes hétérotiques . La correspondance entre ces théories s'appelle la dualité U.
Nous avons donc, comme annoncé, une relation reliant toutes les théories entre elles.
Notons que cette théorie n'est toujours qu'un cas limite avec un domaine d'application particulier. Comme pour chacune des théories des cordes existantes. Ce qui distingue ces théories (fort ou faible couplage, etc.) reste donc aussi d'application pour cette théorie et elle ne constitue donc pas notre fameuse théorie M (bien qu'elle soit parfois abusivement appelée comme cela à cause des membranes).
Il existe même une théorie F à 12 dimensions !
La théorie M
Bien que différente de la théorie présentée ci-dessus, on a pu déterminer que la théorie M serait une théorie à 11 dimensions. Ceci est évidemment très satisfaisant puisque c'était un des problèmes rencontrés. On a vu qu'une théorie de super gravité consistante nécessitait un espace-temps à 11 dimensions.
Différentes approches et études des différentes théories ont déjà permis d'audacieuses idées et spéculations.
Ainsi, on a par exemple imaginé que notre univers (à quatre dimensions) ne serait rien d'autre qu'une 3-brane (plus le temps) se déplaçant dans un univers à 10 dimensions (d'espace).
Les particules (fermions et bosons de jauge obéissant aux groupes habituels ) ne seraient que les modes de vibrations des cordes dont l'extrémité est attachée à la 3-brane (notre univers). Extrémités qui se comporteraient comme des particules !
Le graviton serait une corde fermée se déplaçant dans la totalité de l'espace à 10 dimensions (il n'est pas attaché à la D-brane). Une conséquence intéressante est que cela explique naturellement la faiblesse de la gravité par rapport aux autres interactions fondamentales.
Ce genre d'univers autoriserait même un repliement de ces dimensions sur des distances beaucoup plus grande que la longueur de Planck. En effet, les photons (la lumière) et les particules (qui nous composent) étant astreint à se déplacer sur la 3-brane, ils ne nous permettraient pas de "voir" les dimensions supplémentaires ! Mais l'enroulement ne peut pas dépasser le millimètre car la gravité a été testée jusqu'à cette distance sans constater d'écart avec la gravité normale. En effet, à grande échelle l'enroulement des dimensions supplémentaires rend celles-ci sans influence et la gravité se comporte comme elle est décrite par la relativité générale (et la théorie de Newton) dans un espace-temps à 4 dimensions. Mais pour des distances de l'ordre des dimensions enroulées, le graviton pouvant se déplacer dans des dimensions supplémentaires, les lois classiques devraient fortement dévier de la gravité observée.
On peut même imaginer qu'il y a plusieurs 3-branes et donc plusieurs univers qui n'interagiraient que par l'intermédiaire de la gravité à travers l'espace entre les 3-branes (appelé bulk). Ce qui donne des idées pour expliquer l'origine de la masse manquante de l'univers (voir les théories cosmologiques) ! Ce genre de théorie a même déjà été envisagé en dehors du contexte de la théorie des cordes (univers gémellaires, etc.).
En tout cas, toutes spéculatives qu'elles soient, ces idées autorisent des enroulements plus variés des dimensions et enrichissent encore la théorie.
Quoi qu'il en soit, la théorie M est encore imparfaitement comprise et sa forme mathématique reste en réalité complètement à imaginer. En particulier on a besoin d'outils non perturbatifs plus puisant pour "débroussailler" la théorie.
Toutefois de nombreux résultats quant à ses propriétés ont déjà été établis, c'est encourageant.
Une formulation matricielle des théories des cordes semble actuellement donner un cadre qui pourrait s'avérer le bon (cela reste encore à voir).
Un certain rapprochement avec les théories géométriques (géométries non commutatives, théorie des boucles, mousses de spin,…) est également en train de se faire. Mais ce n'est pas sans difficulté puisque l'espace-temps des cordes, quel que soit le nombre de dimensions envisagé, a une géométrie commutative. Pire encore, l'espace-temps de la théorie des cordes est indépendant du contenu, contrairement à la relativité générale (comme on l'a vu), d'où de grosses difficultés pour relier les deux théories.
Mais ces rapprochements ne sont pas impossibles. Par exemple, la relativité générale a pour cadre un espace-temps courbe, mais il est possible de la formuler différemment : dans un espace-temps plat où ce qui tient normalement lieu de courbure est décrit par un champ du troisième rang (en relativité générale ce sont les symboles de Christoffel). On s'est ainsi rendu compte que la géométrie classique n'était probablement pas la meilleure pour décrire les cordes et des résultats fort encourageants ont déjà été obtenu.
évidemment pour qui ne veut pas s'en donner la peine, c'est une lecture rébutante, mais enfin si on veut causer science et notamment astronomie et cosmologie, il faut en passer par là
