( Chèrs membres de ce forum,
je vous prie de m'excuser d'interrompre le fil de vos débats sur le bien et le mal; je me suis absenté quelques jours sans avoir pu discuter avec F_Five sur le thème du sujet, les miracles, ce que je désirerais faire à nouveau ici. )
bonjour F_five,
Il me semble saisir un peu mieux ta réflexion; J'aimerais entamer une partie un peu moins frontale du débat.
Esaïe parle en image quand il dit apparence il parle de tout ce qui est visible directement, actions, apparences physiques ou encore vesitmentaire, statut social, professions, ou encore réputation.
Par opposition à ce qui n'est pas directement visible. Enseignement, connaissance, spiritualité.
Bon. C'est ton interprêtation de ce passage d'Isaïe, qui de toute façon, c'est vrai, est paraît-il un des plus débattus de la Bible parmi les exégètes. Moi je prétends qu'il ne s'agit pas là de miracle, mais de référence aux honneurs de société. Admettons qu'il y a là une marge indéfinie , un flou artistique. Mais tu admettras (peut-être !) que tout dépend ici de l'interprêtation qu'on donne à deux mots, "apparence" et "aspect". ça me semble un peu vague, mais je reconnais tout-à-fait l'intérêt que tu donnes à ce passage dans le cadre de ta vision des choses.
Tu dis que Jésus n'a pas le monopole du miracle, je ne voulais même pas discuter de ça. Car on sait bien que personne n'a jamais eu le pouvoir de guérir miraculesement des aveugles, des sourds, des lépreux ou encore des paralysés.
Je suis allé trop vite en disant que d'autres faisaient les mêmes miracles que lui, avant lui. C'est vrai que les Evangiles nous montrent une série de guérisons par simple imposition des mains ou commandment de la voix, sans aucun rituel. C'est totalement inédit, c'est vrai. Ca devait sacrément forcer la foi, c'est vrai.
Je veux reconnaître ici ton doute : pourquoi dès lors, ne l'aurait-on pas immédiatement suivi? Il est un peu justifié.
A ceci, j'aimerais quand même faire apparaître plusieurs facettes de la question. D'abord :
On sait que jamais personne n'a eu le pouvoir de marcher sur l'eau ou de multiplier de la nourriture, ou de transformer de l'eau en vin. A part lui si on prend ces miracles dans le sens propre.
- Il se trouve que ces miracles que tu cites ici sont pour moi, précisément ceux qui auraient pu être rajoutés, soit par déformation, soit par reformulation d'idées religieuses. Tu me rétorqueras peut-être : "pourquoi ceux-là et pas tous les autres?" Précisément parce qu'ils ont une portée symbolique
particulièrement importante, ou bien , comme les noces de Cana, sont isolés en un seul Evangile... En ce point, je pense que la portée de certains actes ou discours du Christ pourraient éventuellement avoir été extrapolés par la transmission et la ferveur en faits miraculeux.
Mais étendre cette éventualité , systématiquement, à tous les miracles, me semble outrancier. Et voir derrière chacun d'eux une mystification de certains discours de Jésus me semble impropre à l'ensemble des idées de l'Evangile
-En effet, (c'est une question que j'ai déjà évoquée dans un autre post, à laquelle tu n'as pas répondu) comment expliquer, selon toi, que puissent coexister dans les mêmes récits des "guérisons spirituelles" transposées par les rédacteurs en miracles réels, et des passages qui affirmeraient que Jésus n'a fait aucun miracle? (je veux parler ici du fameux dialogue sur le signe de Jonas, la condamnation de Corozaïn, Bethsaïde, etc )
D'une part, donc, comment se ferait-il que des passages qui se contredisent au sujet des miracles figurent dans le même récit, et d'autre part,
pourquoi les évangélistes auraient maquillé les discours libérateurs de Jésus en miracles corporels? Pourquoi? tu n'es pas clair à ce sujet. Tu dis qu'ils auraient fort bien pu être mal informés ou ont pu mal expliquer :
On sait que les évangélistes pour écrire les évangiles, se sont fonder sur des témoignages divers des évenements, d'où l'aspect de ces textes. Et qu'il est donc tout à fait possible qu'ils ont mal compris et/ou mal expliqué certaines choses.
Entre mal expliquer et transformer un sermon sur la purification du coeur en guérison de la lèpre, c'est énorme !
D'accord, il y a eu quelques disaines d'années entre les faits et la rédaction finale des évangiles, mais ça ne suffit pas à ne pas faire de ces évangiles des mensonges ou des affabulations éhontées et absurdes que les témoins directs encore vivants à l'époque n'auraient pas manqué de contester. Pour la raison qui suit :
Quittons, si tu le veux bien, le texte lui-même pour garder à l'esprit le message global de l'Evangile: Jésus ne cessait de rabrouer les malhonnêtes, ceux qui se mentaient à eux-mêmes, les faux prophètes, ni de rendre hommage aux petits, aux humbles, aux gens tout simples. Comment les gens qui furent touchés par ce message auraient pu laisser les évangélistes transformer Jésus en faiseur de miracles, s'il ne l'avait pas été? Passe encore pour quelques épisodes dont on a parlé plus haut, noyés dans le croisement des témoignages, mais pas pour l'ensemble... Comment les gens auraient pu laisser être dénaturé le portrait de leur Messie, sans aucune contestation? Des contestations aux Evangiles, il y en a eu, mais pas de cet ordre là?
-Revenons au texte, pour évoquer l'une des phrases qui a été l'occasion du débat entre Ilibade et toi :
Mt 12:24- Mais les Pharisiens, entendant cela, dirent : " Celui-là n'expulse les démons que par Béelzéboul, le prince des démons. "
Mt 12:25- Connaissant leurs sentiments, il leur dit : " Tout royaume divisé contre lui-même court à la ruine ; et nulle ville, nulle maison, divisée contre elle-même, ne saurait se maintenir.
Mt 12:26- Or, si Satan expulse Satan, il s'est divisé contre lui-même : dès lors, comment son royaume se maintiendra-t-il ?
Mt 12:27- Et si moi, c'est par Béelzéboul que j'expulse les démons, par qui vos adeptes les expulsent-ils ? Aussi seront-ils eux-mêmes vos juges.
Mt 12:28- Mais si c'est par l'Esprit de Dieu que j'expulse les démons, c'est donc que le Royaume de Dieu est arrivé jusqu'à vous.
comment expliquer la présence de ce dialogue dans l'Evangile, si il ne se passe pas après un évènement miraculeux? De quoi les pharisiens parlaient-ils, si non?
Pourquoi selon toi Jésus demande-t-il à plusieurs reprises aux miraculés de se taire au lieu d'ébruiter le miracle?
Pourquoi lui reproche-t-on de violer le Sabbat quand il guérit les malades? A cela, Jésus répond :
" Mon Père est à l'œuvre jusqu'à présent et j'œuvre moi aussi "
Jésus prétend donc agir, oeuvrer, pour Dieu, le jour du Sabbat, "faire des choses" : ce qui est interdit le jour du Sabbat. Parler et discourir sur le bien et le mal dans le coeur des hommes ne fait pas partie de ce qui est interdit.
-Tu dis :
Je pense que si le peuple ne l'a pas suivit, c'est parce qu'il n'a pas réelement fait ces miracles.
Nous avons eu un différent sur le fait que "le peuple" l'ai , ou non, suivi. Admettons que le peuple tout entier ne l'ait pas suivi. Admettons-le, car c'est vrai! Et pourtant, Jésus, dès le début de son ministère, avait une réputation de grand prophète. On l'acclame à son arrivée à Jérusalem. Il y avait un réel enthousiasme dans les foules. Tu ne peux pas dire que "le peuple", tout entier , du moins, ne l'a pas suivi.
Ses miracles, combien y en a-t-il ? Une vingtaine? Une trentaine? combien de personnes en ont été témoin? Moi je pense que toutes celles qui ont vu ces miracles l'ont cru tout de suite, comme tu l'analyses si bien.
Mais le peuple entier n'a pas vu ces miracles. tous les pharisiens, surtout, farouchement opposés à Jésus, n'avaient pas vu ses miracles et c'est pour cela qu'inévitablement leur réflexe est de ne pas y croire, ou de s'imaginer, puisque des témoignages courrent quand même, qu'ils viennent du démon...
De là leur requête, faite à Jésus, de bien vouloir leur donner un signe qui "vienne du ciel". C'est une question particulièrement perverse, et je te demande de bien vouloir l'examiner en supposant que Jésus ait déjà, avant cette demande, fait des miracles : Les pharisiens viennent provoquer Jésus, exiger un miracle "sur commande" : Est-ce que ce n'était pas là une demande un peu minable, sans aucun respect pour ce que représentait un vrai miracle? En somme, ils venaient leur demander un tour de magie pour en avoir plein les yeux.
Même en supposant que Jésus ait accompli des miracles, comment imaginer qu'il ait pu réagir autrement qu'en les envoyant promener?
Moi je ne peux pas l'imaginer, je pense que Jésus était de toute manière trop intègre, et c'est pour cela que ton hypothèse ne peut se fonder sur cet échange.
Enfin, F_Five, mais là je sais bien que j'aborde les convictions personnelles et un peu moins les arguments objectifs de discussion, quoique :
Je crois que tout le sens de l'Evangile est de dire que Dieu est présent au milieu des Hommes et que leur vie peut changer, les évènements peuvent évoluer pour celui qui croit, quelquefois même de façon extraordinaire: C'est le sens des miracles de Jésus. Ils disent que Dieu peut agir réellement, concrètement pour ceux qui se confient à Lui.
Et c'est pour ça aussi que je pense que ton hypothèse démonte la cohérence des Evangiles et qu'elle en détourne le sens profond.
Alors, je conçois tout-à-fait que tu réfutes la version des Evangélistes. Mais ce faisant, tu les prends pour des gourous de communautés qui auraient soit imposé, soit récolté une vision complètement dénaturée du christianisme alors que ce dernier avait 70 ans tout au plus.
De plus, tu décortiques les textes, tu prends pour preuves des passages qui collent à ton hypothèse, alors que ces morceaux coexistent, au sein d'une même oeuvre, avec des allusions qui les contredisent directement.
Voilà.
Je reconnais sincèrement que ta question m'a fait m'interroger très sérieusement. Je ne te ressors pas en vrac une idéologie que je considère comme figée; j'ai essayé de me poser très objectivement la question du rôle, de la vraisemblabilité des miracles dans la vie de Jésus, et j'ai voulu examiner de très près tes arguments.