Les grandes énigmes du sacré

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Saint suaire, Vierge de Guadalupe, dalaï-lama...
Les grandes énigmes du sacré
par Claire Chartier
Inouïes, fascinantes, les grandes énigmes du sacré défient la raison. Le saint suaire a-t-il vraiment servi à ensevelir la dépouille mortelle du Christ? Par quel miracle l'étoffe de la Vierge de Guadalupe, au Mexique, est-elle restée intacte au fil des siècles? Comment, alors qu'il n'avait pas 3 ans, le dalaï-lama a-t-il fait la preuve qu'il était la réincarnation du chef spirituel des Tibétains? Tout phénomène doit pouvoir s'expliquer, répliquent les savants. En attendant, nous raffolons de ces mystères, qui bousculent les vérités établies et nous font rêver à un monde sans limites. Un monde réenchanté.



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n nous le reproche assez: nous, Français, serions d'un naturel revêche et d'un cartésianisme obtus. Si la première affirmation ne demande plus à être vérifiée, la seconde mérite examen. Consultons les enquêtes d'opinion: 42% de nos compatriotes déclarent croire aux miracles, 22% à l'utilité du recours aux objets sacrés et 26% affirment avoir vécu une expérience surnaturelle (sondage Ifop, 2004). C'est assez dire combien la raison triomphante ne l'est plus tant que cela au pays de Descartes. Tout se passe comme si la pensée magique prenait sa revanche sur un monde scientiste qui, à force de baliser l'Univers, en ôte toute poésie et mystère.

«Les gens étouffent, constate l'écrivain et journaliste Michel Cazenave, qui scrute la spiritualité contemporaine dans son émission Les Vivants et les dieux, sur France Culture. La pensée rationaliste a tellement dominé pendant des siècles qu'un phénomène de décompensation se produit.» Autrement dit, Homo sapiens postmoderne se lâche, s'immerge avec délice dans une spiritualité ésotérique et brouillonne, qui fait la part belle aux univers parallèles ainsi qu'aux forces surnaturelles.

Les progrès dans l'explication scientifique de l'Univers n'ont donc nullement mis fin à notre goût pour les mondes enchantés. «Les gens fabriquent constamment du merveilleux, même à partir du scientifique, explique Jacques Maître, sociologue des religions. Regardez le rebond de la vogue de l'astrologie: ses partisans reprennent le langage de l'astronomie pour donner une caution de réalité à leur croyance, alors que nous ne sommes plus dans le domaine scientifique!» La nature humaine est ainsi faite, aurait dit Freud. Car, derrière ce goût du merveilleux, c'est toute la force du désir qui se libère. «Cette force nous porte à croire qu'il peut exister une dimension illimitée de l'être, reprend Jacques Maître. Elle entre nécessairement en contradiction avec la raison, puisque celle-ci consiste à mettre des limites.»

Longtemps, le Dieu des églises et des synagogues est venu étancher notre soif d'horizons infinis. Aujourd'hui, ce Dieu-là est à la peine, et tout se complique. C'est le sacré au sens large, et plus seulement la transcendance sous ses atours monothéistes, qui s'exprime. Le sacré, «conjonction tangible du visible et de l'invisible», «rencontre matérielle entre la nature et la surnature», comme le résume le philosophe Marcel Gauchet. Le sacré avec ses déesses mères, ses manifestations fabuleuses. Gloire à toi, Dan Brown! Le public se passionne pour les grandes énigmes qui renvoient à cet au-delà envoûtant, tout en ne retenant souvent que la dimension surnaturelle de ces mystères et en se désintéressant de leur signification religieuse traditionnelle.Rien que depuis l'an 2000, une dizaine d'ouvrages ont été consacrés au saint suaire et aux recherches qui ne cessent d'être menées à son sujet. Cloner le Christ (Albin Michel), l'enquête science-fiction de Didier Van Cauwelaert, s'est vendue à 110 000 exemplaires. Les scientifiques eux-mêmes n'en finissent plus de se crêper le chignon avec, dans un camp, les «sindonologues», partisans de l'authenticité du linceul, et dans l'autre, les «zététiques», du nom d'une discipline antique, la «zététique» ou «doute universel». Mais bien d'autres phénomènes contredisant les lois de la nature suscitent une foule de questions: les lévitations et l'absence de nourriture chez les mystiques chrétiens; la puissance des envoûtements, les «preuves» de la réincarnation du dalaï-lama… Toutes manifestations incroyables que les scientifiques n'ont jamais pu reproduire dans leurs laboratoires.

On peut toujours penser, comme de nombreux savants, qu'il s'agit de supercheries particulièrement bien montées, ou d'autosuggestion. L'Eglise, de fait, s'est toujours montrée très circonspecte sur ces affaires, surtout s'agissant du linceul de Turin, de peur de se discréditer. On peut estimer que la science, limitée dans l'état actuel de ses connaissances, finira bien, un jour ou l'autre, par expliquer l'inexplicable. On peut aussi se dire que ces mystères sont l'œuvre d'une puissance qui nous dépasse et qu'ils n'obtiendront jamais de réponse. L'Express vous invite à découvrir ces fantastiques énigmes du sacré. Et à vous faire, vous-même, votre opinion.