Qui croire, et quelles conséquences cela peut-il avoir ?
Sous cette question anodine se cachent deux choix idéologiques lourds de conséquences.
En fait, tout le monde a presque unanimement admis, au cours des siècles, une écriture tardive pour le texte de la Révélation.
Et commençons par l'hypothèse la plus probable: la Révélation ne serait pas un texte de l'Apôtre Jean dont parlent les Évangiles, mais un texte très postérieur aux temps apostoliques, écrit vers la
fin du 2ème de notre ère. Dès le début du 3ème siècle, en effet, ce texte est contesté par les autorités chrétiennes, voire purement et simplement interdit dans les Églises locales les plus
anciennes, comme, par exemple, l'Église syriaque.
C'est le Pape Damase, en l'an 382, qui le déclare canonique. Ce qui place la Watchtower dans une énorme contradiction, puisqu'elle affirme la canonicité et l'inspiration de ce texte, alors qu'il fut
rejeté par le Christianisme le plus ancien, et rendu licite par les Papes en pleine "apostasie" !
L'Église d'Orient n'admettra - du bout des lèvres, et pour ne pas créer une division supplémentaire avec Rome - la canonicité de l'Apocalypse, qu'au 10ème siècle, et la Théologie orthodoxe ne la
reconnaîtra officiellement qu'en... 1995 !
Si donc on laisse de côté l'analyse objective, et que l'on s'en tient aux affirmations de la Bible elle-même, la rédaction de l'Apocalypse ne peut être située qu'à la fin du 1er siècle.
Il y a à cela une raison majeure. C'est que Jean, son auteur supposé, date lui-même la rédaction de ce texte. Il dit avoir été alors détenu sur l'île pénitentiaire de Patmos, dans son grand âge, et en exil
pour sa foi. La reconstitution des évènements, sur cette base, semble alors bien indiquer que c'est tout à la fin de son existence, que Jean s'est trouvé dans cette situation, ce qui corroborerait la thèse
selon laquelle la Révélation daterait, au mieux, de la fin du premier siècle.
Sur cette base se sont développés les mouvements de recherche autour de la question de "l'Advent", expression anglo-saxonne mal traduite en français par: "Retour du Christ", et qui désigne en fait la
période où "adviennent" les évènements du "Temps de la Fin".
La réflexion "adventiste" repose sur des bases simples :
a) Les Prophéties sur l'Advent, ou la Parousie, ne se sont pas accomplies, comme l'Histoire en témoigne.
b) La Révélation parle de leur réalisation.
c) Observons donc bien la Révélation et les Prophéties parallèles, pour y discerner si possible l'époque de cette réalisation à venir.
Ce fut là très exactement le raisonnement des Adventistes et parmi eux, notamment, des premiers Témoins de Jéhovah, comme C. T. Russell.
Face à ce mouvement sectaire qui risquait d'emporter tout le Protestantisme, - et qui sait... horreur absolue... d'aboutir à la Vérité !-, le Protestantisme a réagi en jetant en pâture, à ses ouailles, les
raisonnements sataniques d'un théologien de choc, nommé John Arthur Thomas Robinson.
Il est bon de revenir sur les élucubrations de cet individu, car même certains Témoins de Jéhovah se sont laissés abuser par des Anciens de leur organisation, qui leur ont proposé les affabulations de
Robinson, comme parole d'Évangile.
De quoi s'agit-il ?
Comme toute tromperie, celle-ci se présente "en habits de lumière", en grande logique et renfort d'évidences apparentes.
On nous dit donc que la Révélation a été rédigée "forcément" avant l'an 70 de notre ère, et non à la fin du 1er siècle, parce que, pour résumer: "étant donnée l'ampleur de la catastrophe de l'an 70 sur le monde juif, il aurait été impossible que la Révélation n'y fît pas allusion, si elle avait été écrite après cet évènement"
Quant à Claude Tresmontant, son "raisonnement" consistait à dire que, si Jean avait écrit son Évangile tout à la fin du 1er siècle, comme c'est généralement admis par ceux qui ne veulent pas
tenir compte de l'hypothèse principale (une écriture à la fin du 2ème siècle), il n'aurait pas pu décrire la piscine de Bethesda, car celle-ci, "après l'an 70, aurait été recouverte de montagnes de
débris provenant de la destruction de Jérusalem par les Romains" !
Le Pr. Tresmontant avait simplement oublié un "petit détail": la "destruction de Jérusalem" n'a pas eu lieu en l'an 70.
En l'an 70, Jérusalem connaît quelques dégâts, alors, sans plus.
Mais les Juifs continuent à y habiter, et le Temple continue à y battre monnaie. De plus, on n'aurait jamais jeté des gravats dans l'un des seuls points d'eau de l'agglomération !
C'est la révolte suivante, celle qui se déroule de l'an 132 à l'an 135, qui amène les autorités romaines à raser Jérusalem, à la faire reconstruire, à partir des plans réalisés en l'an 131, selon les normes romaines, et à interdire aux Juifs d'y séjourner (ce sont d'ailleurs ces projets de modernisation de Jérusalem, qui se trouvent à l'origine de ladite révolte).
La ville devient alors Aelia Capitolina. Par conséquent, si des modifications du site de Bethesda ont eu lieu, c'est, de toutes façons, bien après la mort de Jean, et cela n'apporte rien au
"raisonnement" de Robinson.
L'argumentaire "historique", pour justifier un achèvement du Nouveau Testament avant l'an 70, est donc complètement vide.
Les affirmations de Robinson sont ridicules.
Si la Révélation a été rédigée vers l'année 96 couramment admise, ou après, les évènements de 70 dataient alors de près de trente ans, et n'étaient, de toutes façons, plus d'actualité.
Pourquoi en aurait-on fait obligatoirement mention dans la Révélation ?
Et ce, d'autant plus que ces évènement de l'an 70 n'accomplissaient nullement la Prophétie de Jésus concernant la fin de Jérusalem: comme vu plus haut, ce ne fut pas encore la fin de Jérusalem, et cela ne déboucha pas sur la "Fin du Monde" que les Chrétiens attendaient (à tort ou à raison, peu importe ici).
Donc, les Chrétiens ne pouvaient, en tout état de cause, que se faire discrets à propos de cette Prophétie ratée, et se placer dans l'attente d'éclaircissements sur cette étrange situation.
Précisément, "Jean" (ou tout autre rédacteur) va tenter d'apporter un nouvel espoir.
Il va le faire en combinant nécessité d'attente patiente et fidèle, et des merveilles promises pour l'avenir.
Et c'est là tout l'objet de la rédaction de l'Apocalypse ou "Révélation".
De plus, la Révélation s'adressait non à des synagogues, mais à des groupes chrétiens. En quoi y aurait-il eu là matière à débattre des difficultés passées du Sanctuaire de Jérusalem ? "Jean" écrit
pour prévenir des Chrétiens. Point à la ligne.
Mais ce qui sous-tend vraiment le raisonnement de Robinson, c'est sa croyance - qui n'est autre que celle de toute la Chrétienté -, selon laquelle la Révélation parle d'évènements pouvant avoir un
rapport réel ou symbolique avec le sol et le peuple "charnel" d'Israël, ou, tout au moins, avec les Juifs, en tant que tels.
C'est là une absurdité de compréhension tellement enracinée dans les croyances chrétiennes, que le simple fait de la remettre en cause, peut faire grimper aux rideaux tous nos zélés Pharisiens
modernes.
Par exemple, lorsque l'on trouve dans Révélation 14: 20 la "distance de 1.600 stades", soit 300 kilomètres, le choeur des Zélotes s'écrie: "Il s'agit de la longueur du pays d'Israël, du nord au sud !".
Bien. Et s'il s'agissait d'autre chose ?
Jean précise qu'il écrit la Révélation, à partir de l'île de Patmos où il est assigné à résidence. L'île de Patmos se trouve au large de la ville d'Éphèse, juste "derrière" l'île de Samos.
Or Jean doit envoyer des messagers rapporter le texte de la Révélation à sept villes précisément nommées (Révélation 1: 9-11), données dans un ordre précis: Éphèse, Smyrne, Pergame,
Thyatire, Sardes, Philadelphie et Laodicée.
Cet ordre est ensuite très exactement repris dans le détail des prescriptions qui s'adressent spécifiquement à chacune d'elles, après quoi le reste de la Révélation, dans tout ce qui s'adresse à
la collectivité de ces 7 Congrégations, sera sans cesse marqué du chiffre "7", pour que l'on ne puisse pas faire de confusion, et que l'on comprenne bien que tout ce qui est dit, s'adresse à ces 7
"Congrégations", et non à la Planète "Terre" toute entière.

Or nous constatons qu'au retour de Patmos, les messagers de Jean (souvent confondus avec des "anges" emplumés, par une ridicule erreur de traduction) faisant la tournée des villes citées, dans l'ordre demandé, parcourent très exactement 300 kilomètres soit les 1.600 stades annoncés dans Révélation 14: 18-20 .
Dans ce cas, la Révélation ne ferait nullement allusion au pays d'Israël (depuis longtemps vidé de tout Israélite, et devenu simplement "pays des Juifs" - ce qui n'est pas la même chose), mais à une
autre réalité.
Et alors le raisonnement de Robinson s'effondrerait.
Car si la Révélation ne parle pas de la "Terre Promise", même au sens symbolique, elle n'a aucune raison de parler des évènements... de l'an 70 !
Et c'est là exactement la finalité du raisonnement corrosif et démoniaque des disciples de Robinson.
Le coeur même de leur doctrine, c'est d'ailleurs "le Salut Universel", doctrine parfaitement contraire à la Bible, en général, et à l'Apocalypse en particulier, qui séparent bien, elles, y compris
par la bouche de Jésus, ce qui est sauvé, de ce qui est "damné".
Or, tout est faux dans ce raisonnement.
Tout d'abord, la Révélation n'annonce pas un jugement sur Jérusalem ou sur Israël, mais un jugement sur les Sept Congrégations (Révélation 1: 10 à 3: 22). C'est comme cela. Nous n'y
pouvons rien.
Si l'esprit Saint prend bien soin d'écarter la question du Jugement, fort loin du sol d'Israël, par l'exemple des Sept Congrégations, ce n'est évidemment pas pour rien, mais tout simplement parce
que, ayant vu à l'avance la confusion que certains tenteraient d'opérer pour démobiliser les "serviteurs de Jéhovah", en leur laissant croire que l'affaire de l'an 70 avait mis un terme aux
Prophéties, l'esprit Saint a pensé qu'il convenait d'ôter tout argument sérieux aux Prophètes de la Résignation.
L'an 70 n'a concerné qu'une ville vide de sens, où ne se trouvait qu'un sanctuaire hérodien, édomite, et donc "haï de Yéhowah", au milieu de provinces édomites, la Judée et l'Idumée, devenues la terre d'un Ésaü triomphant et se substituant définitivement - du moins le croyait-il - à Israël. Mais pourquoi "Yéhowah" accepterait-il, lui, cette imposture ?
L'Écriture n'a rien à faire de ces péripéties historiques menées par "Satan", pour semer la confusion dans les esprits. La Jérusalem du temps de Jésus n'existe pas devant "Yéhowah".
Matthieu 24, Marc 13 ou Luc 21 ne peuvent donc pas parler prophétiquement de cette cité-là, même si Jésus croyait, lui, à l'importance de "sa" Jérusalem. Mais n'est pas Christ qui veut.
Ceux qui ont propagé les thèses de Robinson parmi des groupes voués "à Yéhowah", portent une lourde responsabilité, car ils ont donné une bonne conscience à ceux qui étaient prêts à tout
entendre, pourvu que ce fût une justification de la paresse, et ils ont fourni des excuses à ceux qui hésitaient à s'investir pleinement dans la recherche de la Vérité et dans le sacrifice de leur
existence...