https://fr.wikipedia.org/wiki/Natura_naturans:
DANS un article ou il distingue 2 sens du terme nature, particulière (comme l’essence humaine) et générale (ensemble des êtres individuels interagissants), on trouve l’expression nature naturante chez St Thomas :Les deux termes sont courants dans la scolastique : « Le terme de 'nature' peut désigner parfois l'essence d'une chose quelconque, qui est principe d'un certain mouvement. C'est ainsi que l'on attribue à Dieu une nature ordinairement appelée 'nature naturante', de même que la créature est appelée 'nature naturée' » (Johann Clauberg, Meletemata philosophica, 1665, p. 66).
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Thomas d'Aquin parle parfois de Dieu en termes de Natura naturans : il est la Nature suprême qui donne à chaque être sa nature constitutive et son achèvement.
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L'auteur qui a rendu la terminologie et l'opposition classiques est Spinoza. Il oriente sa réflexion dans un sens panthéiste. « Je veux expliquer ici, ou plutôt faire remarquer ce qu'il faut entendre par Nature naturante et Nature naturée. Car déjà par ce qui précède j'estime qu'il est établi que, par Nature naturante, il faut entendre ce qui est en soi et est conçu par soi, autrement dit les attributs de la substance qui expriment une essence éternelle et infinie, c'est-à-dire Dieu, en tant qu'il est considéré comme cause libre. Par Nature naturée, j'entends tout ce qui suit de la nécessité de la nature de Dieu, autrement dit de la nécessité de chacun des attributs de Dieu, c'est-à-dire tous les modes des attributs de Dieu en tant qu'ils sont considérés comme des choses qui sont en Dieu, et qui ne peuvent ni être, ni être conçues sans Dieu » (Éthique, I, proposition XXIX, scolie).
I-II, 87 ART 6
6 : Ces défauts sont-ils de quelque manière naturels à l’homme ?
En sens contraire, 1. Tout ce qui est naturel à l’homme, c’est Dieu qui l’a fait dans l’homme. Or il est dit dans la Sagesse (1, 13) : “ Dieu n’a pas fait la mort. ” Donc elle n’est pas naturelle à l’homme.
2. Ce qui est selon la nature ne peut être appelé ni peine ni mal, parce qu’il y a convenance entre une chose et ce qui lui est naturel. Or la mort et les déficiences analogues sont, avons-nous dit, la peine du péché originel. Elles ne sont donc pas naturelles à l’homme.
3. La matière est proportionnée à la forme, et chaque chose à sa fin. Or la fin de l’homme est la béatitude perpétuelle, nous l’avons dit. La forme du corps humain est l’âme rationnelle, laquelle est incorruptible, nous l’avons vu dans la première Partie. Donc le corps humain est incorruptible par nature.
Réponse : De chaque réalité corruptible nous pouvons parler de deux façons : du point de vue de la nature en général, et du point de vue d’une nature particulière. - Une nature particulière est la vertu active propre à chaque
chose et travaillant à conserver cette chose. Par rapport à elle, toute corruption et toute privation sont contre nature, dit le Philosophe, puisqu’il y a une vertu qui cherche l’existence et la conservation de l’être en qui elle existe.
La nature universelle au contraire est la vertu active qui réside en quelque grand principe de l’univers, par exemple dans l’un des corps célestes ou dans l’une des substances supérieures ; c’est ainsi que Dieu est appelé par certains “ la nature naturante ”. Cette grande force cherche le bien et la conservation de l’univers, ce qui exige alternance de génération et de corruption dans les choses. De ce point de vue, la corruption et les privations sont naturelles aux choses, non certes d’après les tendances de la forme, qui est principe d’existence et de perfection, mais d’après celles de la matière, laquelle est attribuée à telle et telle forme suivant une certaine proportion distributive que règlent les grands agents de l’univers. Et, bien que toute forme cherche, autant qu’elle peut, à exister perpétuellement, aucune cependant dans l’ordre des réalités corruptibles ne peut obtenir la perpétuité de son être. Sauf l’âme rationnelle, parce qu’elle n’est pas entièrement soumise comme les autres formes au monde de la matière et qu’elle a en propre, bien au contraire, une activité immatérielle, on l’a établi dans la première Partie e.
En gros, il est contre la nature individuelle de la gazelle d’être tuée par le lion, mais c’est conforme à la nature générale, qui est hiérarchisée et implique des maux particuliers pour le bien du tout, une sorte de soumission des gazelle aux lions, et de l’herbe aux gazelles.
« Nature », comme dans le langage courant, a donc bien 2 sens, et St Thomas fait la nuance. Beaucoup de problèmes sont réglés par des distinctions de ce genre.