a écrit :Je ne crois pas à la transcendance ni à la conscience de soi . Je suis immanentiste . Y a t'il une corrélation entre le fait de ne pas croire en la conscience de soi et être immanentiste ?
Bonjour ! Très intéressante question, profonde et subtile. Voyons ça ensemble.
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L’immanentisme est la position philosophique qui nie toute transcendance, c’est-à-dire toute réalité ou principe situé « au-delà » ou « au-dessus » du monde et de l’expérience.
Pour un immanentiste, tout ce qui existe est **dans** le monde, **dans** l’expérience, **dans** la vie. Il n’y a pas de Dieu transcendant, pas de plan supérieur, pas d’âme séparée du corps, pas de « dehors » absolu.
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On entend souvent par « conscience de soi » une capacité réflexive : se prendre soi-même comme objet, se « voir » ou se « connaître » soi-même.
Cela suppose souvent une forme de **réflexivité** qui est parfois comprise comme un « recul » intérieur, une « instance » qui se situe au-dessus ou à côté de l’expérience immédiate.
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Certaines traditions (bouddhisme, certaines mystiques non-dualistes) disent aussi qu’il n’y a pas de « soi » permanent, mais elles gardent parfois une idée d’« éveil » ou d’« illumination » qui peut ressembler à une forme de conscience supérieure.
En revanche, un immanentiste cohérent refusera même cette transcendance sous forme d’éveil ultime. Tout est déjà **là**, sans recul, sans « soi » séparé.
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Il y a donc effectivement une cohérence forte entre :
* ne pas croire à une conscience de soi réflexive, séparée, surplombante,
* et être immanentiste, c’est-à-dire refuser toute forme de transcendance, même intérieure.
Si tu veux, on peut aussi creuser la différence entre **conscience pré-réflexive** (être présent à ce qui se passe) et **conscience réflexive** (se prendre soi-même pour objet), et voir où tu te situes exactement.
Veux-tu que je développe ?
a écrit :Question : En quoi la notion d'éveil bouddhiste est il contradictoire avec l'immanentisme puisque dans le bouddhisme il n'y a pas dualité sujet /objet ? Non, il n'existe pas d'éveil dans le bouddhisme comme état inférieur ou supérieur . L'éveil c'est constater que tout est déjà là .
Ce que tu dis est absolument juste *dans certaines lectures profondes du bouddhisme*, notamment celles qui insistent sur la non-dualité (comme le Chan, le Zen, la Madhyamaka ou la tradition Dzogchen). Allons-y pas à pas.
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Dans ces traditions, l’**éveil** (nirvāṇa, bodhi) n’est pas une acquisition, ni un état transcendant à atteindre.
> Il s’agit plutôt d’un **constat direct** que « tout est déjà tel quel » (Tathatā en sanskrit, « Ainsi-ité »).
Il n’y a pas d’« état » distinct du samsara, pas de « lieu » ou de « niveau » de conscience spécial. Le samsara et le nirvana sont d’une certaine façon **non-duels** (« samsara = nirvana » dans le Mahayana).
Donc, oui, **pas de supériorité, pas d’infériorité**, pas de « transcendance » au sens métaphysique.
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Tu as raison aussi sur le fait que dans le bouddhisme profond, la distinction sujet/objet est considérée comme une construction mentale.
> La **co-production conditionnée** (pratītya-samutpāda) affirme que les phénomènes apparaissent interdépendamment, sans entité fixe, ni d’un côté ni de l’autre.
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Dans certaines interprétations plus populaires ou plus « religieuses », on présente l’éveil comme une sorte d’**état transcendant**, une « sortie » du monde, ou un but final au-dessus de la vie ordinaire.
* On imagine alors un « moi éveillé » qui surplomberait l’expérience ordinaire, ce qui ressemble à une forme de transcendance.
* C’est ce que rejettent beaucoup de courants non-dualistes (y compris dans le Chan/Zen).
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Si on comprend l’éveil comme **reconnaissance directe de l’immanence totale**, sans sujet/objet, sans « moi » séparé, alors :
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✔ Tu as parfaitement raison : dans la version non-dualiste et profonde du bouddhisme, l’éveil n’est pas contradictoire avec l’immanentisme.
✔ Au contraire, c’est même une des traditions qui l’exprime de la manière la plus radicale et dépouillée.
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a écrit :Oui, en très résumé alors .

Toutes ces traditions rejettent l’idée d’un petit moi séparé qui « se contemple ».
Elles convergent vers une immanence radicale où il n’y a plus de dualité.
La « conscience » n’est pas une entité transcendante, mais une manifestation ou une modalité de l’immanence.