Quelques livres co-écrits par un juif, un chrétien et un musulman...
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Juifs, chrétiens, musulmans :
lectures qui rassemblent, lectures qui séparent
Un juif, un chrétien et un musulman lisent ensemble quelques récits mettant en scène de grandes figures traversant leurs trois traditions. L’un après l’autre, ils évoquent Adam et Ève, Caïn et Abel, Abraham, Ismaël et Agar, Joseph et ses frères, Moïse, Jonas, David, les figures du prophète et du Messie.
Hommes de dialogue, bons connaisseurs de leurs traditions mutuelles, ils révèlent tout à la fois leurs étonnantes convergences et leurs différences - voire différends - irréductibles.
Grand rabbin René-Samuel Sirat, né en Algérie en 1930, personnalité éminente du judaïsme, il est, depuis 1988, grand rabbin du Consistoire central de France après avoir été grand rabbin de France de 1981 à 1987. Il dirigea le département Moyen-Orient - Afrique du Nord à l’Institut national des langues et civilisations orientales, fut inspecteur général de l’Éducation nationale pour l’enseignement de l’hébreu de 1973 à 1981.
Mgr Olivier de Berranger,né en 1938, évêque de Saint-Denis (93) depuis 1996, actuel président de la Commission épiscopale pour la mission universelle de l’Église, a été prêtre du diocèse de Séoul en Corée du Sud de 1976 à 1993.
Youssef Seddik, né en 1943, en Tunisie, musulman laïc vivant en France, est agrégé de philosophie et anthropologue. Il a enseigné la pensée islamique moderne à la Sorbonne et publié de nombreux essais et traductions autour de l’islam et du patrimoine classique arabe.
Bayard, 2007, 304 pages
N° ISBN - 2227475854
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Les Versets douloureux
Bible, Evangile et Coran entre conflit et dialogue
L'actualité est pleine de paroles menaçantes et de gestes violents.
Que les livres saints des religions -la Torah, l'Évangile, le Coran- contiennent des appels à la violence ou soient invoqués pour justifier le mépris, voilà qui inquiète ou révolte tout être humain et davantage encore les croyants. Un juif, un chrétien et un musulman parcourent ici leurs Écritures respectives et les traditions qui s'en réclament. À bien les comprendre, contiennent-elles vraiment de tels "versets douloureux" ? Si oui, quelle attitude adopter ? Chaque communauté de croyants, instamment invitée au courage de l'autocritique, se doit d'abord de "balayer devant sa porte", Si elle veut être fidèle au coeur du message qu'elle porte.
Mais juifs, chrétiens et musulmans n'ont-ils pas en outre à découvrir les Écritures les uns des autres, à s'interroger ensemble sur la manière dont ils les lisent, à s'engager enfin pour passer du conflit et de la violence à la concertation, aux côtés de toute personne éprise de liberté et de respect ?
Col. L’Autre et les autres, Lessius, 2007, 202 p.
N° ISBN - 978-2-87299-171-6
...Possédant ces deux ouvrages, je ne peux que les conseiller...
Livres à trois voix...
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Le Judaisme se fonde sur le culte du Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. la foi des anciens Israélites et de leurs descendants, les Juifs, serait basée sur une alliance contractée entre Dieu (YHWH) et Abraham, qui aurait ensuite été renouvelée entre Dieu et Moïse.
Le Judaisme se fonde sur le culte du Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. la foi des anciens Israélites et de leurs descendants, les Juifs, serait basée sur une alliance contractée entre Dieu (YHWH) et Abraham, qui aurait ensuite été renouvelée entre Dieu et Moïse.
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Ecrit le 28 oct.09, 00:28Ar c'hi bihan breizhad...
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
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Re: Livres à trois voix...
Ecrit le 28 oct.09, 05:21Lectures qui rassemblent, lectures qui séparent...
Un regard juif sur le christianisme et l'islam
Conclusion du rabbin René-Samuel Sirat
Le Moyen-Âge espagnol, avant de sombrer dans l'horreur de l'Inquisition et de la haine que les rois très catholiques ont portée aux Maures et aux Juifs, a connu le temps de l'äge d'Or, cette époque où les religions monothéistes vivaient plus ou moins en fraternité et en harmonie. Gardons-nous d'une image irénique d'une situation où la violence éclatait parfois. Il suffit de rappeler, par exemple, la tragique élégie composée par Abraham Ibn Ezra (1089-1167) évoquant la destruction du judaïsme espagnol et de toutes les communautés juives d'Afrique du Nord par les rois almohades (2e moitié du XIIe siècle). Mais dans l'ensemble, les communautés religieuses ont vécu dans une période relativement calme durant laquelle les savants et les philosophes musulmans ont permis aux autres communautés de connaître la philosophie grecque qui avait été traduite par leurs soins en arabe et la philosophie musulmane -et juive- traduites en latin à l'intention des communautés de l'Europe chrétienne.
Les relations entre chrétiens et musulmans furent souvent très tendues et il faut attendre Pierre le Vénérable, évêque de Cluny, pour que le maître de la pensée chrétienne de sont temps ose affirmer qu'il voulait "aller chercher les Sarrasins, non pas avec les armes meurtrières mais avec celles de l'amour". Les relations des chrétiens avec les juifs furent souvent empreintes de haine : le même Pierre le Vénérable n'était guère tendre -c'est une litote- à l'égard des communautés juives qui vivaient tout près de son abbaye...
[à suivre]
Un regard juif sur le christianisme et l'islam
Conclusion du rabbin René-Samuel Sirat
Le Moyen-Âge espagnol, avant de sombrer dans l'horreur de l'Inquisition et de la haine que les rois très catholiques ont portée aux Maures et aux Juifs, a connu le temps de l'äge d'Or, cette époque où les religions monothéistes vivaient plus ou moins en fraternité et en harmonie. Gardons-nous d'une image irénique d'une situation où la violence éclatait parfois. Il suffit de rappeler, par exemple, la tragique élégie composée par Abraham Ibn Ezra (1089-1167) évoquant la destruction du judaïsme espagnol et de toutes les communautés juives d'Afrique du Nord par les rois almohades (2e moitié du XIIe siècle). Mais dans l'ensemble, les communautés religieuses ont vécu dans une période relativement calme durant laquelle les savants et les philosophes musulmans ont permis aux autres communautés de connaître la philosophie grecque qui avait été traduite par leurs soins en arabe et la philosophie musulmane -et juive- traduites en latin à l'intention des communautés de l'Europe chrétienne.
Les relations entre chrétiens et musulmans furent souvent très tendues et il faut attendre Pierre le Vénérable, évêque de Cluny, pour que le maître de la pensée chrétienne de sont temps ose affirmer qu'il voulait "aller chercher les Sarrasins, non pas avec les armes meurtrières mais avec celles de l'amour". Les relations des chrétiens avec les juifs furent souvent empreintes de haine : le même Pierre le Vénérable n'était guère tendre -c'est une litote- à l'égard des communautés juives qui vivaient tout près de son abbaye...
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Re: Livres à trois voix...
Ecrit le 28 oct.09, 08:00[suite]
Le regard du judaïsme sur le christianisme naissant
Essayons toutefois de remonter le temps et de tracer à grands traits le regard porté par le judaïsme sur le christianisme en ses débuts. Un beau texte talmudique relate les relations dépourvues de passion qui existaient entre les plus grands docteurs de la Loi talmudique et les disciples de Jésus le Nazaréen. Rabbi Eliezer ben Horkenos (il fut le maître incontesté de la génération des docteurs de la Loi contemporains de rabbi Akiba) rappela ce souvenir : "Une fois, je me promenais dans le marché supérieur de Sipporis et je fus interpellé par l'un des disciples de Jésus le Nazaréen du nom de Jacob, originaire de Kfar Sekhania, qui me demanda de commenter le verset du Deutéronome : Tu n'apporteras jamais le salaire d'une prostituée ou le vomi d'un chien dans la maison du SEIGNEUR ton Dieu. Peut-on, avec ce salaire, construire les latrines pour le grand prêtre ? Je ne pus répondre à la question. Il reprit : voici l'enseignement que j'ai reçu de Jésus le Nazaréen. Il a affirmé que ce qui viens du salaire de la prostituée retournera au salaire de la prostituée. C'est pourquoi ce salaire qui vient d'une source impure doit retourner à un lieu impur". Rabbi Eliezer ajouta : "Je fus séduit par cet enseignement"
Si un tel dialogue pouvait avoir lieu publiquement au marché supérieur de Sipporis, c'est que les relations entre docteurs de la Loi et disciples de Jésus étaient, sinon amicales (nous ne pouvons bien sûr l'affirmer), en tout cas sans animosité apparente.
En généralisant, on pourrait dire que durant toute la période qui va de la naissance du christianisme à la décennie précédant la destruction du Temple de Jérusalem, les judéos-chrétiens étaient considérés par les juifs commes des juifs à part entière, sectateurs de Jésus qu'ils avaient suivi en tant que roi-messie (c'est-à-dire susceptible de restaurer l'indépendance de la Judée et le respect des valeurs du judaïsme), sans pour autant formuler le même jugement que ces derniers quant à leur conception du rôle du maître de Nazareth. Une telle affirmation ne saurait étonner ceux qui se réfèrent aux générations suivantes et en particulier à celle que rabbi Akiba, mort martyr en 135 -maître incontesté de la génération pharisienne- qui avait suivi Bar Kochba avait même battu monnaie -nous en avons encore le témoignage- datant du début de l'indépendance de Jérusalem. Hélas ! On sait ce qu'il advint des partisans de Bar Kochba : ils ont été décimés par les Romains au moment du siège puis de la destruction sanglante de Betar au début du IIe siècle. A l'époque proche de la destruction du Temple, lorsque les idées de Saul de Tarse se sont répandues -il n'y a plus l'homme et la femme, il n'y a plus ni Juif, ni Grec- et le respect des règles religieuses délibérément aboli, la rupture entre judaïsme et christianisme est devenue totale et définitive.
Il a toujours existé entre juifs et chrétiens une profonde assymétrie : les juifs continuent leur vie spirituelle et pratiquent leur religion sans référence aucune, ni positive, ni négative, à Jésus le Nazaréen. En revanche, les chrétiens qui se veulent une branche "greffée sur l'olivier franc" que représente le judaïsme, se réfèrent constamment -et aujourd'hui plus que jamais- aux racines juives de la religion de Jésus. Malheureusement, la théologie de la substitution -le Verus Israël- en prenant la place de l'ancien Israël, et en substituant l'image du Dieu d'amour à celle d'un Dieu perçu comme un Dieu de rigueur et de justicie implacable, a créé un fossé qui a été à la base de l'anti-judaïsme. Et celui-ci a conduit, peu ou prou, aux horreurs vécues par le peuple juif au milieu du XXe siècle.
Une grande transformation des esprits a commencé avec le concile Vatican II et plus particulièrement avec la publication de la déclaration Nostra Aetate.
[NB Ren' : http://www.vatican.va/archive/hist_coun ... te_fr.html]
L'action admirable du pape Jean XXIII, le pèlerinage du pape Paul VI (qui a laissé un souvenir mitigé en Israël), la 1ère visite d'un souverain pontife, Jean-Paul II, à la synagogue de Rome en 1986, le second pèlerinage, triomphal celui-là, de Jean-Paul II, avec son magnifique discours prononcé à Yad Vashem, plein de noblesse et particulièrement émouvant, et sa déclaration de repentance au mur occcidental où, tel un vieux pèlerin juif, il a tenu à enfouir sa prière entre "les interstices du rocher", ont totalement modifié le paysage et posé les fondements d'une relation apaisée entre chrétiens et juifs. Quant au pape Benoît XVI, dès sa 1ère rencontre avec le judaïsme, au cours de la 1ère année de son pontificat, il a tenu à se situer clairement dans le sillage des papes qui ont montré le chemin depuis Vatican II.
Du côté du judaïsme, un long et profond travail de réflexion se met lentement et difficilement en place. Il s'agit en particulier de surmonter les souvenirs cuisants laissés par de nombreux siècles de persécutions dramatiques. Depuis 1947 -date de la conférence de Seelisberg- le nombre de participants au dialogue judéo-chrétien croît d'année en année. A présent, ces rencontres interreligieuses sont devenues à la mode et les dirigeants de la communauté juive ont le devoir de s'inquiéter face à la participation à ces rencontres de juifs qui parlent au nom du judaïsme, alors qu'ils devraient tout d'abord se former de manière approfondie dans leur propre foi avant de s'autoriser à parler au nom de la religion dont ils sont issus. On peut toutefois espérer que le XXIe siècle sera le siècle de l'affermissement du dialogue entre juifs et chrétiens et verra la réalisation prochaine de la prophétie de Sophonie : "Je donnerai à toutes les nations de la terre, dit le Seigneur, une langue épurée afin d'évoquer ensemble le Nom du SEIGNEUR et Le servir épaule contre épaule"... Ou, pour reprendre une autre métaphore, "adorer Dieu d'un coeur à l'unissons"
[à suivre]
Le regard du judaïsme sur le christianisme naissant
Essayons toutefois de remonter le temps et de tracer à grands traits le regard porté par le judaïsme sur le christianisme en ses débuts. Un beau texte talmudique relate les relations dépourvues de passion qui existaient entre les plus grands docteurs de la Loi talmudique et les disciples de Jésus le Nazaréen. Rabbi Eliezer ben Horkenos (il fut le maître incontesté de la génération des docteurs de la Loi contemporains de rabbi Akiba) rappela ce souvenir : "Une fois, je me promenais dans le marché supérieur de Sipporis et je fus interpellé par l'un des disciples de Jésus le Nazaréen du nom de Jacob, originaire de Kfar Sekhania, qui me demanda de commenter le verset du Deutéronome : Tu n'apporteras jamais le salaire d'une prostituée ou le vomi d'un chien dans la maison du SEIGNEUR ton Dieu. Peut-on, avec ce salaire, construire les latrines pour le grand prêtre ? Je ne pus répondre à la question. Il reprit : voici l'enseignement que j'ai reçu de Jésus le Nazaréen. Il a affirmé que ce qui viens du salaire de la prostituée retournera au salaire de la prostituée. C'est pourquoi ce salaire qui vient d'une source impure doit retourner à un lieu impur". Rabbi Eliezer ajouta : "Je fus séduit par cet enseignement"
Si un tel dialogue pouvait avoir lieu publiquement au marché supérieur de Sipporis, c'est que les relations entre docteurs de la Loi et disciples de Jésus étaient, sinon amicales (nous ne pouvons bien sûr l'affirmer), en tout cas sans animosité apparente.
En généralisant, on pourrait dire que durant toute la période qui va de la naissance du christianisme à la décennie précédant la destruction du Temple de Jérusalem, les judéos-chrétiens étaient considérés par les juifs commes des juifs à part entière, sectateurs de Jésus qu'ils avaient suivi en tant que roi-messie (c'est-à-dire susceptible de restaurer l'indépendance de la Judée et le respect des valeurs du judaïsme), sans pour autant formuler le même jugement que ces derniers quant à leur conception du rôle du maître de Nazareth. Une telle affirmation ne saurait étonner ceux qui se réfèrent aux générations suivantes et en particulier à celle que rabbi Akiba, mort martyr en 135 -maître incontesté de la génération pharisienne- qui avait suivi Bar Kochba avait même battu monnaie -nous en avons encore le témoignage- datant du début de l'indépendance de Jérusalem. Hélas ! On sait ce qu'il advint des partisans de Bar Kochba : ils ont été décimés par les Romains au moment du siège puis de la destruction sanglante de Betar au début du IIe siècle. A l'époque proche de la destruction du Temple, lorsque les idées de Saul de Tarse se sont répandues -il n'y a plus l'homme et la femme, il n'y a plus ni Juif, ni Grec- et le respect des règles religieuses délibérément aboli, la rupture entre judaïsme et christianisme est devenue totale et définitive.
Il a toujours existé entre juifs et chrétiens une profonde assymétrie : les juifs continuent leur vie spirituelle et pratiquent leur religion sans référence aucune, ni positive, ni négative, à Jésus le Nazaréen. En revanche, les chrétiens qui se veulent une branche "greffée sur l'olivier franc" que représente le judaïsme, se réfèrent constamment -et aujourd'hui plus que jamais- aux racines juives de la religion de Jésus. Malheureusement, la théologie de la substitution -le Verus Israël- en prenant la place de l'ancien Israël, et en substituant l'image du Dieu d'amour à celle d'un Dieu perçu comme un Dieu de rigueur et de justicie implacable, a créé un fossé qui a été à la base de l'anti-judaïsme. Et celui-ci a conduit, peu ou prou, aux horreurs vécues par le peuple juif au milieu du XXe siècle.
Une grande transformation des esprits a commencé avec le concile Vatican II et plus particulièrement avec la publication de la déclaration Nostra Aetate.
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L'action admirable du pape Jean XXIII, le pèlerinage du pape Paul VI (qui a laissé un souvenir mitigé en Israël), la 1ère visite d'un souverain pontife, Jean-Paul II, à la synagogue de Rome en 1986, le second pèlerinage, triomphal celui-là, de Jean-Paul II, avec son magnifique discours prononcé à Yad Vashem, plein de noblesse et particulièrement émouvant, et sa déclaration de repentance au mur occcidental où, tel un vieux pèlerin juif, il a tenu à enfouir sa prière entre "les interstices du rocher", ont totalement modifié le paysage et posé les fondements d'une relation apaisée entre chrétiens et juifs. Quant au pape Benoît XVI, dès sa 1ère rencontre avec le judaïsme, au cours de la 1ère année de son pontificat, il a tenu à se situer clairement dans le sillage des papes qui ont montré le chemin depuis Vatican II.
Du côté du judaïsme, un long et profond travail de réflexion se met lentement et difficilement en place. Il s'agit en particulier de surmonter les souvenirs cuisants laissés par de nombreux siècles de persécutions dramatiques. Depuis 1947 -date de la conférence de Seelisberg- le nombre de participants au dialogue judéo-chrétien croît d'année en année. A présent, ces rencontres interreligieuses sont devenues à la mode et les dirigeants de la communauté juive ont le devoir de s'inquiéter face à la participation à ces rencontres de juifs qui parlent au nom du judaïsme, alors qu'ils devraient tout d'abord se former de manière approfondie dans leur propre foi avant de s'autoriser à parler au nom de la religion dont ils sont issus. On peut toutefois espérer que le XXIe siècle sera le siècle de l'affermissement du dialogue entre juifs et chrétiens et verra la réalisation prochaine de la prophétie de Sophonie : "Je donnerai à toutes les nations de la terre, dit le Seigneur, une langue épurée afin d'évoquer ensemble le Nom du SEIGNEUR et Le servir épaule contre épaule"... Ou, pour reprendre une autre métaphore, "adorer Dieu d'un coeur à l'unissons"
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Re: Livres à trois voix...
Ecrit le 28 oct.09, 19:16[suite]
Regard du judaïsme sur les deux religions qui en dérivent
Le christianisme comme l'islam ont une vocation essentiellement prosélyte. Le chrétien se doit d'annoncer à tous que Jésus est mort pour les péchés de l'humanité. Le musulman a la conviction que, face au Dar al-Islam, la communauté des croyants, se dresse le Dar al-harb, la maison de perdition, et qu'il est nécessaire de convertir à la foi de Mahomet les païens et ceux qui ne croient pas en un Dieu unique. Le judaïsme, lui, ne prône en aucune manière la nécessité d'une conversion à la religion de Moïse pour avoir droit au salut. Dieu, dans Sa souveraine bonté, a créé les êtres humains comme une fratrie où chaque frère est différent de l'autre, tout en ayant la vocation de vivre avec lui en harmonie, et avec le sentiment bien ancré dans son coeur de l'amour du prochain. Il suffit de respecter sept lois, appelées dans la tradition juive les lois noahides, parce qu'elles remontent au patriarche Noé, père de l'ensemble de l'humanité depuis l'époque du Déluge, et qui constituent des lois de morale naturelle.
Maïmonide, "l'Aigle de la Synagogue", les a formulées dans son Code : "Six lois ont été imposées à Adam. Elles concernent l'interdiction de l'idolâtrie, l'interdiction du blasphème, l'interdiction de l'assassinat, l'interdiction du vol et de la tromperie, les relations sexuelles interdites, l'obligation d'établir des tribunaux afin que les lois de la cité soient respectés. A ces lois s'est ajoutée, à partir de l'époque de Noé, c'est-à-dire de l'autorisation donnée à l'homme de devenir carnivore, l'interdiction de faire souffrir un animal vivant"
Face à l'islam, il n'a jamais existé de contentieux semblable à l'affirmation chrétienne du "Verus Israel". Dès sa fondation, l'islam s'est voulu une religion qui reconnaît ses origines dans les religions qui l'ont précédé -le judaïsme et le christianisme- mais il n'en procède pas directement et n'en constitue pas uniquement l'aboutissement. Pour ce qui touche à la foi en un Dieu unique, Maïmonide avait déjà posé comme principe : "il n'est pas de monothéisme plus pur que celui des musulmans" ; alors qu'il faudra attendre le maître de Perpignan, rabbi Menahem, surnommé le Meiri, pour considérer que la foi des chrétiens dans le mystère de la Trinité ne leur enlevait pas leur caractère de monothéistes. En revanche, un juif qui adhérerait au dogme de la Trinité se mettrait définitivement en dehors du judaïsme authentique.
L'une des pierres d'achoppement entre musulmans et juifs est bien évidemment la personnalité du prophète Mahomet. Cette question a été l'objet de controverses nombreuses, le judaïsme affirmant que la prophétie a disparu avec les derniers prophètes de la Bible hébraïque : Aggée, Zacharie et Malachie. Par contre, il convient de citer ici une position qui sort de l'ordinaire, due à l'un des grands philosophes juifs médiévaux, contemporain un peu plus âgé de Maïmonide. il s'agit de rabbi Netanael al Fuyyumi, auteur du Boustan al-Uqul. L'original en langue arabe a été édité de nos jours par le célèbre rabbin Yoseph Kapakh avec une remarquable traduction en hébreu. Nous disposons d'ailleurs d'un témoignage de Maïmonide, dans l'Epître au Yémen, qui indique l'extrême respect que "l'Aigle de la Synagogue" avait pour notre auteur : "A Son Eminence, Sa Sainteté, mon Maître Rabbi Jacob (...) et Rabbi Netanael le Maître aux connaissances si étendues et Prince du pays de Yémen"...
Rabbi Netanael enseigne : "Sache mon frère qu'il n'est pas impossible que le Saint -béni soit-il, qu'Il soit exalté- envoie dans le monde qui est le Sien tel envoyé qu'Il aura choisi dans un temps qu'Il aura seul déterminé -car la plénitude du monde de la sainteté est éternelle, sans solution de continuité... Le Saint -béni soit-il, qu'Il soit exalté- a envoyé aux autres nations des prophètes avec le don de la Torah comme l'ont dit les rabbins -que la paix soit sur eux : "Les nations du monde ont connu sept prophètes avant la Révélation du Sinaï : Laban, Jethro, Bileam, Job, Eliphaz, Bildad et Tsofar". Rien ne saurait empêcher Dieu d'envoyer aux autres nations tel envoyé qui viendra avec le don de la Torah afin que le monde ne reste pas dépourvu de foi. Les prophètes d'Israël nous ont déjà enseigné que le Seigneur sera révéré de l'Orient au Ponant comme cela est indiqué dans la prophétie de Malachie (...) Il n'en demeure pas moins que le Saint -béni soit-il, qu'Il soit exalté- nous a choisis et nous a désignés parmi les nations, non pas en vertu de nos mérites antérieurs, mais en raison de Sa grâce accordée aux patriarches Abraham et Jacob, comme il est dit : Ce n'est pas parce que vous êtes le plus nombreux parmi les peuples que le SEIGNEUR vous a accordé Son amour infini et qu'Il vous a choisis car vous êtes le moins nombreux de tous les peuples, mais parce que le SEIGNEUR vous aime et qu'Il est fidèle à l'alliance qu'il a contractée avec vos pères"
Rabbi Netanael al Fayyumi explique donc que, de même que dans les textes bibliques anciens, Dieu a sucité des prophètes pour les Gentils -le plus célèbre d'entre eux étant Bileam- de même nous ne saurions être interpellés par l'envoi par Dieu aux musulmans d'un prophète en la personne de Mahomet. D'ailleurs, le message de ce dernier reprend des points fondamentaux de la pensée biblique, en particulier le monothéisme, l'aumône, le devoir vis-à-vis d'autrui, la prière adressée uniquement au Créateur, la foi dans les prophètes antérieurs de l'histoire biblique.
En résumé, pour Netanael al Fayyumi, la mission de Mahomet peut être considérée par le judaïsme comme une mission prophétique authentique ayant pour conséquence la diffusion du monothéisme biblique à travers l'humanité. Il est juste, cependant, de reconnapitre que ce regard juif sur l'islam n'a pas été admis par tous malgré le respecté dont était entouré Netanael al Fayyumi.
Evoquons à présent les 5 piliers de l'islam et leur application :
- L'aumône, la zakât : il serait très intéressant de comparer les notions, juive et musulmane, de tsedaqa et de zakât qui sont très proches. Qu'il me suffise de souligner que le devoir d'aumône est avant tout considéré par les juifs et les musulmans comme un acte de justice et non pas comme un acte qui irait au-delà de la justice. L'homme qui ne pratiquerait pas la tsedaqa/zakât contreviendrait aux principes fondamentaux de sa religion. Rappelons sur ce point l'injonction de la Bible : N'opprimez pas l'étranger ni ne le molestez car vous fûtes des étrangers dans le pays d'Egypte. De même, n'opprimez pas la veuve, ni l'orphelin. Si vous désobéissez et que l'opprimé crie vers Moi, J'entendrai certainement sa plainte, Je dirigerai Mon courroux contre vous ; vous mourrez de mort violente, vos femmes seront veuves et vos enfants orphelins (...) Si tu as pris en gage le vêtement de ton prochain, rends-le lui au coucher du soleil car il s'agit de son unique vêtement. Avec quoi se couvrirait-il ? S'il gémit vers Moi, Je l'entendrais, car Je suis miséricordieux.
- le jeûne : une mise en parallèle des formulations concernant le Ramadan et celles du Yom Kippour serait très instructive. Certes, le 1er dure un mois alors que le 2nd ne dure qu'un jour, mais il existe bien des points de convergence
- le pèlerinage : on sait l'importance du pèlerinage à La Mecque pour tout bon musulman. de son côté, la Bible insiste sur l'obligation de se rendre en pèlerinage à Jérusalem trois fois par an
- l'affirmation de l'unicité de Dieu : elle rappelle la prière biquotidienne du juif : "Ecoute, Israël, l'Eternel notre Dieu, l'Eternel est Un"
- les cinq prières de l'Islam reprennent les prières que le juif adresse à son Créateur : tois prières quotidiennes à l'office public et les prières d'action de grâce récitées après les principaux repas (à l'époque, le matin et le soir)
[à suivre]
Regard du judaïsme sur les deux religions qui en dérivent
Le christianisme comme l'islam ont une vocation essentiellement prosélyte. Le chrétien se doit d'annoncer à tous que Jésus est mort pour les péchés de l'humanité. Le musulman a la conviction que, face au Dar al-Islam, la communauté des croyants, se dresse le Dar al-harb, la maison de perdition, et qu'il est nécessaire de convertir à la foi de Mahomet les païens et ceux qui ne croient pas en un Dieu unique. Le judaïsme, lui, ne prône en aucune manière la nécessité d'une conversion à la religion de Moïse pour avoir droit au salut. Dieu, dans Sa souveraine bonté, a créé les êtres humains comme une fratrie où chaque frère est différent de l'autre, tout en ayant la vocation de vivre avec lui en harmonie, et avec le sentiment bien ancré dans son coeur de l'amour du prochain. Il suffit de respecter sept lois, appelées dans la tradition juive les lois noahides, parce qu'elles remontent au patriarche Noé, père de l'ensemble de l'humanité depuis l'époque du Déluge, et qui constituent des lois de morale naturelle.
Maïmonide, "l'Aigle de la Synagogue", les a formulées dans son Code : "Six lois ont été imposées à Adam. Elles concernent l'interdiction de l'idolâtrie, l'interdiction du blasphème, l'interdiction de l'assassinat, l'interdiction du vol et de la tromperie, les relations sexuelles interdites, l'obligation d'établir des tribunaux afin que les lois de la cité soient respectés. A ces lois s'est ajoutée, à partir de l'époque de Noé, c'est-à-dire de l'autorisation donnée à l'homme de devenir carnivore, l'interdiction de faire souffrir un animal vivant"
Face à l'islam, il n'a jamais existé de contentieux semblable à l'affirmation chrétienne du "Verus Israel". Dès sa fondation, l'islam s'est voulu une religion qui reconnaît ses origines dans les religions qui l'ont précédé -le judaïsme et le christianisme- mais il n'en procède pas directement et n'en constitue pas uniquement l'aboutissement. Pour ce qui touche à la foi en un Dieu unique, Maïmonide avait déjà posé comme principe : "il n'est pas de monothéisme plus pur que celui des musulmans" ; alors qu'il faudra attendre le maître de Perpignan, rabbi Menahem, surnommé le Meiri, pour considérer que la foi des chrétiens dans le mystère de la Trinité ne leur enlevait pas leur caractère de monothéistes. En revanche, un juif qui adhérerait au dogme de la Trinité se mettrait définitivement en dehors du judaïsme authentique.
L'une des pierres d'achoppement entre musulmans et juifs est bien évidemment la personnalité du prophète Mahomet. Cette question a été l'objet de controverses nombreuses, le judaïsme affirmant que la prophétie a disparu avec les derniers prophètes de la Bible hébraïque : Aggée, Zacharie et Malachie. Par contre, il convient de citer ici une position qui sort de l'ordinaire, due à l'un des grands philosophes juifs médiévaux, contemporain un peu plus âgé de Maïmonide. il s'agit de rabbi Netanael al Fuyyumi, auteur du Boustan al-Uqul. L'original en langue arabe a été édité de nos jours par le célèbre rabbin Yoseph Kapakh avec une remarquable traduction en hébreu. Nous disposons d'ailleurs d'un témoignage de Maïmonide, dans l'Epître au Yémen, qui indique l'extrême respect que "l'Aigle de la Synagogue" avait pour notre auteur : "A Son Eminence, Sa Sainteté, mon Maître Rabbi Jacob (...) et Rabbi Netanael le Maître aux connaissances si étendues et Prince du pays de Yémen"...
Rabbi Netanael enseigne : "Sache mon frère qu'il n'est pas impossible que le Saint -béni soit-il, qu'Il soit exalté- envoie dans le monde qui est le Sien tel envoyé qu'Il aura choisi dans un temps qu'Il aura seul déterminé -car la plénitude du monde de la sainteté est éternelle, sans solution de continuité... Le Saint -béni soit-il, qu'Il soit exalté- a envoyé aux autres nations des prophètes avec le don de la Torah comme l'ont dit les rabbins -que la paix soit sur eux : "Les nations du monde ont connu sept prophètes avant la Révélation du Sinaï : Laban, Jethro, Bileam, Job, Eliphaz, Bildad et Tsofar". Rien ne saurait empêcher Dieu d'envoyer aux autres nations tel envoyé qui viendra avec le don de la Torah afin que le monde ne reste pas dépourvu de foi. Les prophètes d'Israël nous ont déjà enseigné que le Seigneur sera révéré de l'Orient au Ponant comme cela est indiqué dans la prophétie de Malachie (...) Il n'en demeure pas moins que le Saint -béni soit-il, qu'Il soit exalté- nous a choisis et nous a désignés parmi les nations, non pas en vertu de nos mérites antérieurs, mais en raison de Sa grâce accordée aux patriarches Abraham et Jacob, comme il est dit : Ce n'est pas parce que vous êtes le plus nombreux parmi les peuples que le SEIGNEUR vous a accordé Son amour infini et qu'Il vous a choisis car vous êtes le moins nombreux de tous les peuples, mais parce que le SEIGNEUR vous aime et qu'Il est fidèle à l'alliance qu'il a contractée avec vos pères"
Rabbi Netanael al Fayyumi explique donc que, de même que dans les textes bibliques anciens, Dieu a sucité des prophètes pour les Gentils -le plus célèbre d'entre eux étant Bileam- de même nous ne saurions être interpellés par l'envoi par Dieu aux musulmans d'un prophète en la personne de Mahomet. D'ailleurs, le message de ce dernier reprend des points fondamentaux de la pensée biblique, en particulier le monothéisme, l'aumône, le devoir vis-à-vis d'autrui, la prière adressée uniquement au Créateur, la foi dans les prophètes antérieurs de l'histoire biblique.
En résumé, pour Netanael al Fayyumi, la mission de Mahomet peut être considérée par le judaïsme comme une mission prophétique authentique ayant pour conséquence la diffusion du monothéisme biblique à travers l'humanité. Il est juste, cependant, de reconnapitre que ce regard juif sur l'islam n'a pas été admis par tous malgré le respecté dont était entouré Netanael al Fayyumi.
Evoquons à présent les 5 piliers de l'islam et leur application :
- L'aumône, la zakât : il serait très intéressant de comparer les notions, juive et musulmane, de tsedaqa et de zakât qui sont très proches. Qu'il me suffise de souligner que le devoir d'aumône est avant tout considéré par les juifs et les musulmans comme un acte de justice et non pas comme un acte qui irait au-delà de la justice. L'homme qui ne pratiquerait pas la tsedaqa/zakât contreviendrait aux principes fondamentaux de sa religion. Rappelons sur ce point l'injonction de la Bible : N'opprimez pas l'étranger ni ne le molestez car vous fûtes des étrangers dans le pays d'Egypte. De même, n'opprimez pas la veuve, ni l'orphelin. Si vous désobéissez et que l'opprimé crie vers Moi, J'entendrai certainement sa plainte, Je dirigerai Mon courroux contre vous ; vous mourrez de mort violente, vos femmes seront veuves et vos enfants orphelins (...) Si tu as pris en gage le vêtement de ton prochain, rends-le lui au coucher du soleil car il s'agit de son unique vêtement. Avec quoi se couvrirait-il ? S'il gémit vers Moi, Je l'entendrais, car Je suis miséricordieux.
- le jeûne : une mise en parallèle des formulations concernant le Ramadan et celles du Yom Kippour serait très instructive. Certes, le 1er dure un mois alors que le 2nd ne dure qu'un jour, mais il existe bien des points de convergence
- le pèlerinage : on sait l'importance du pèlerinage à La Mecque pour tout bon musulman. de son côté, la Bible insiste sur l'obligation de se rendre en pèlerinage à Jérusalem trois fois par an
- l'affirmation de l'unicité de Dieu : elle rappelle la prière biquotidienne du juif : "Ecoute, Israël, l'Eternel notre Dieu, l'Eternel est Un"
- les cinq prières de l'Islam reprennent les prières que le juif adresse à son Créateur : tois prières quotidiennes à l'office public et les prières d'action de grâce récitées après les principaux repas (à l'époque, le matin et le soir)
[à suivre]
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...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
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Re: Livres à trois voix...
Ecrit le 31 oct.09, 02:54[suite]
Un regret et une espérance
Après ce bref panorama des regards juifs sur le christianisme et sur l'islam, je voudrais formuler à la fois un regret et une espérance.
Le regret est celui de la distance qui existe entre les principes fondamentaux de la foi et leur application dans les faits. Nous, juifs, en avons subi les tristes conséquences durant les siècles passés. Il est juste de reconnaître toutefois ques les distortions entre foi et pratique dont nous fûmes les victimes furent plus graves en pays chétiens qu'en pays musulmans.
D'un autre côté, le demi-siècle qui vient de s'écouler n'a pas connu un seul jour de paix entre Israël et Ismaël. C'est pourquoi, du côté juif non plus, la possibilité n'a pas été donnée d'appliquer les princies fondamentaux que la Bible formule sur les droits de l'étranger. Je relève toutefois une expression admirable du regretté Premier Ministre Rabin, disant que ce qui l'évait motivé pour préparer et signer les accords d'Oslo, c'est l'application du principe fondamental selon lequel le peuple juif n'a pas le droit moral de dominer un autre peuple. Lorsque la paix sera restaurée, Israël sera mis, lui aussi, au défi d'harmoniser les principes fondamentaux que la Bible a révélés et leur mise en pratique quotidienne. C'est à cette aune que l'on considérera le caractère éthique de l'Etat d'Israël. Dès la création de l'Etat, l'interdiction de la peine de mort, même pour les terroristes ayant commis les crimes les plus barbares (sauf pour Eichmann...) en est un signe manifeste.
L'espérance est de voir se développer dans l'islam comme dans le judaïsme des philosophes de l'envergure d'Averroès et de Maïmonide.
Dans son "Commentaire sur la République de Platon", Averroès demande : "Les femmes possèdent-elles une nature similaire à celle de chacune des classes de citoyens -et en particulier celles des gardiens de l'Etat- ou bien les natures féminines sont-elles différentes des natures masculines ? Si le premier postulat est vrai, alors les femmes sont essentiellement au même degré que les hommes par rapport aux activités civiques dans les mêmes classes [de citoyens] et on trouvera parmi elles des soldats, des philosophes, des chefs d'Etat ou autres. Sinon, les femmes seront capables seulment des activités que la population mâle entière est incapable d'assumer dans l'Etat comme dans l'éducation, la procréation. Nous disons que la nature des femmes et celles des hommes sont d'une même espèce et que cette nature d'une même espèce se tournera donc vers une même activité dans l'Etat. Il est évident que les femmes auront les mêmes activités que les hommes, si ce n'est qu'elles sont plus faibles... Puisque certaines femmes se distinguent par leurs dispositions naturelles bonnes et louables, il n'est pas impossible que se trouvent parmi elles des philosophes et des femmes d'Etat"
Dans le débat ouvert en Occident sur le statut de la femme et la notion "unité/parité/complémentarité", la philosophie musulmane médiévale était très en avance sur les positions les plus pointues de la philosphie et de la théologie contemporaines.
Sans vouloir manquer de respect à la mémoire de Maïmonide, on ne peut que regretter que, contrairement à Averroès qui tenait en haute estime l'enseignement de Platon, Maïmonide ait été un aristotélicien convaincu, ce qui explique son attitude vis-à-vis de la femme.
En revanche, j'appelle de mes voeux l'apparition à notre époque d'un philosophe et d'un théologien, disciple de Maïmonide et qui aurait le courage qu'a montré l'Aigle de la Synagogue lorsqu'il lui a paru indispensable de prendre fermement position contre toute forme d'anthropomorphisme en usage de son temps, de superstition ou de dévotion frelatée. Je pense en particulier à l'attitude que le judaïsme devrait prôner vis-à-vis de la femme ou encore vis-à-vis d'une conception épurée du judaïsme. Je vois en effet venir avec une grande inquiétude le temps ou de pseudos-rabbins, ou plutôt des gourous, s'arrogent indûment le titre de maître et prônent l'usage d'amulettes, de fil rouge attaché au poignet, d'imposition des mains ou autres grigris du même acabit, et enfin de pèlerinages tous azimuts... Cette mode pernicieuse est déjà présente dans bien des communautés juives, y compris -hélas !- la mienne.
Je souhaite, enfin, que ce maître à penser tant nécessaire puisse favoriser et amplifier le dialogue interreligieux.
[Fin ; je pense qu'il y a déjà largement matière à discuter dans ce chapitre, mais je posterai tout de même sous peu un extrait de l'autre livre que je citais]
Un regret et une espérance
Après ce bref panorama des regards juifs sur le christianisme et sur l'islam, je voudrais formuler à la fois un regret et une espérance.
Le regret est celui de la distance qui existe entre les principes fondamentaux de la foi et leur application dans les faits. Nous, juifs, en avons subi les tristes conséquences durant les siècles passés. Il est juste de reconnaître toutefois ques les distortions entre foi et pratique dont nous fûmes les victimes furent plus graves en pays chétiens qu'en pays musulmans.
D'un autre côté, le demi-siècle qui vient de s'écouler n'a pas connu un seul jour de paix entre Israël et Ismaël. C'est pourquoi, du côté juif non plus, la possibilité n'a pas été donnée d'appliquer les princies fondamentaux que la Bible formule sur les droits de l'étranger. Je relève toutefois une expression admirable du regretté Premier Ministre Rabin, disant que ce qui l'évait motivé pour préparer et signer les accords d'Oslo, c'est l'application du principe fondamental selon lequel le peuple juif n'a pas le droit moral de dominer un autre peuple. Lorsque la paix sera restaurée, Israël sera mis, lui aussi, au défi d'harmoniser les principes fondamentaux que la Bible a révélés et leur mise en pratique quotidienne. C'est à cette aune que l'on considérera le caractère éthique de l'Etat d'Israël. Dès la création de l'Etat, l'interdiction de la peine de mort, même pour les terroristes ayant commis les crimes les plus barbares (sauf pour Eichmann...) en est un signe manifeste.
L'espérance est de voir se développer dans l'islam comme dans le judaïsme des philosophes de l'envergure d'Averroès et de Maïmonide.
Dans son "Commentaire sur la République de Platon", Averroès demande : "Les femmes possèdent-elles une nature similaire à celle de chacune des classes de citoyens -et en particulier celles des gardiens de l'Etat- ou bien les natures féminines sont-elles différentes des natures masculines ? Si le premier postulat est vrai, alors les femmes sont essentiellement au même degré que les hommes par rapport aux activités civiques dans les mêmes classes [de citoyens] et on trouvera parmi elles des soldats, des philosophes, des chefs d'Etat ou autres. Sinon, les femmes seront capables seulment des activités que la population mâle entière est incapable d'assumer dans l'Etat comme dans l'éducation, la procréation. Nous disons que la nature des femmes et celles des hommes sont d'une même espèce et que cette nature d'une même espèce se tournera donc vers une même activité dans l'Etat. Il est évident que les femmes auront les mêmes activités que les hommes, si ce n'est qu'elles sont plus faibles... Puisque certaines femmes se distinguent par leurs dispositions naturelles bonnes et louables, il n'est pas impossible que se trouvent parmi elles des philosophes et des femmes d'Etat"
Dans le débat ouvert en Occident sur le statut de la femme et la notion "unité/parité/complémentarité", la philosophie musulmane médiévale était très en avance sur les positions les plus pointues de la philosphie et de la théologie contemporaines.
Sans vouloir manquer de respect à la mémoire de Maïmonide, on ne peut que regretter que, contrairement à Averroès qui tenait en haute estime l'enseignement de Platon, Maïmonide ait été un aristotélicien convaincu, ce qui explique son attitude vis-à-vis de la femme.
En revanche, j'appelle de mes voeux l'apparition à notre époque d'un philosophe et d'un théologien, disciple de Maïmonide et qui aurait le courage qu'a montré l'Aigle de la Synagogue lorsqu'il lui a paru indispensable de prendre fermement position contre toute forme d'anthropomorphisme en usage de son temps, de superstition ou de dévotion frelatée. Je pense en particulier à l'attitude que le judaïsme devrait prôner vis-à-vis de la femme ou encore vis-à-vis d'une conception épurée du judaïsme. Je vois en effet venir avec une grande inquiétude le temps ou de pseudos-rabbins, ou plutôt des gourous, s'arrogent indûment le titre de maître et prônent l'usage d'amulettes, de fil rouge attaché au poignet, d'imposition des mains ou autres grigris du même acabit, et enfin de pèlerinages tous azimuts... Cette mode pernicieuse est déjà présente dans bien des communautés juives, y compris -hélas !- la mienne.
Je souhaite, enfin, que ce maître à penser tant nécessaire puisse favoriser et amplifier le dialogue interreligieux.
[Fin ; je pense qu'il y a déjà largement matière à discuter dans ce chapitre, mais je posterai tout de même sous peu un extrait de l'autre livre que je citais]
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Re: Livres à trois voix...
Ecrit le 01 nov.09, 06:39Les Versets douloureux
De l'autocritique au dialogue et à la concertation
Les réponses du rabbin David Meyer lors de la "table ronde" servant de conclusion à l'ouvrage
David, vous apparaissez comme l'auteur ou l'inventeur de cette expression "versets douloureux" et celui qui eut la première initiative de cette entreprise collective. Quelles circonstances, quels événements ou quelles expériences vous ont amené à ce projet ?
Ce qui m'a amené à ce projet, initialement, ce sont deux situations spécifiques ou, pour être plus précis, une réflexion de nature plutôt intellectuelle d'une part, et un événement plutôt ponctuel de l'autre. Tout d'abord, une réflexion de longue durée sur l'engagement dans le dialogue que j'ai eu depuis une quinzaine d'années en tant que rabbin. Ces expériences de dialogue interreligieux très concrètes m'ont confronté à un certain nombre de problèmes récurrents au coeur même de toute tentative de dialogue. Le problème le plus important qui m'est apparu a été de prendre conscience de ce que, trop souvent, les partenaires d'un tel dialogue "se jettent des fleurs" afin de créer les conditions d'une certaine cordialité nécessaire à l'écoute réciproque. Si un tel sentiment est louable, il mène parfois à oublier de se regarder soi-même dans le miroir critique de toute confrontation authentique avec l'autre. On s'engage donc souvent dans le dialogue en essayant de regarder l'autre, en essayant de le comprendre -et même parfois de le flatter ou de lui plaire- alors, qu'en fait, il y a, à l'intérieur du dialogue, un besoin pressant d'une lecture critique de sa propre tradition qui est l'élément principal permettant de faire une place à l'autre. Il me semble difficile, voire impossible, si on ne crée pas cet espace à l'intérieur de soi -espace résultant d'une autocritique sincère- de faire une place légitime et respectueuse des traditions et des vérités de l'autre. Au niveau théologique, cette image nous renvoie à la conception kabbalistique du Tsimtsum, où Dieu s'impose à Lui-même une contraction et un retrait de Son propre Etre, afin de créer une place pour le monde et pour les hommes. L'existence de l'autre nécessite donc un retrait volontaire, dans lequel la réalité de notre prochain peut être garantie. Cette notion ne se limite pas à son aspect purement théologique, car il en va bien sûr de même dans le dialogue entre les religions. Comment faire une place à l'autre si nous ne créons pas cet espace en nous-mêmes capable d'accueillir la différence des convictions des autres religions ? C'est ainsi que le travail d'une approche autocritique de la religion m'a semblé s'imposer comme une nécessité préalable à tout dialogue véritable. En ce qui concerne l'événement ou plutôt le catalyseur de ce projet, je dois bien sûr mentionner une rencontre avec Soheib Bencheikh, il y a un an et demi à Séville, lors de la conférence "Imam et Rabbin pour la paix" [NB Ren' : la 1ère de ces conférences a eut lieu à Bruxelle en 2005]. Lors de la session pleinière, Soheib a fait une remarque virulente et profondément juste qui m'a interpellé, précisément sur la question de l'autocritique. Nous nous sommes retrouvés tous les deux à parler de ce besoin de poser un regard inquisiteur sur sa propre tradition afin de véritablement faire avancer les relations entre le judaïsme et l'islam de façon profonde...
[à suivre]
De l'autocritique au dialogue et à la concertation
Les réponses du rabbin David Meyer lors de la "table ronde" servant de conclusion à l'ouvrage
David, vous apparaissez comme l'auteur ou l'inventeur de cette expression "versets douloureux" et celui qui eut la première initiative de cette entreprise collective. Quelles circonstances, quels événements ou quelles expériences vous ont amené à ce projet ?
Ce qui m'a amené à ce projet, initialement, ce sont deux situations spécifiques ou, pour être plus précis, une réflexion de nature plutôt intellectuelle d'une part, et un événement plutôt ponctuel de l'autre. Tout d'abord, une réflexion de longue durée sur l'engagement dans le dialogue que j'ai eu depuis une quinzaine d'années en tant que rabbin. Ces expériences de dialogue interreligieux très concrètes m'ont confronté à un certain nombre de problèmes récurrents au coeur même de toute tentative de dialogue. Le problème le plus important qui m'est apparu a été de prendre conscience de ce que, trop souvent, les partenaires d'un tel dialogue "se jettent des fleurs" afin de créer les conditions d'une certaine cordialité nécessaire à l'écoute réciproque. Si un tel sentiment est louable, il mène parfois à oublier de se regarder soi-même dans le miroir critique de toute confrontation authentique avec l'autre. On s'engage donc souvent dans le dialogue en essayant de regarder l'autre, en essayant de le comprendre -et même parfois de le flatter ou de lui plaire- alors, qu'en fait, il y a, à l'intérieur du dialogue, un besoin pressant d'une lecture critique de sa propre tradition qui est l'élément principal permettant de faire une place à l'autre. Il me semble difficile, voire impossible, si on ne crée pas cet espace à l'intérieur de soi -espace résultant d'une autocritique sincère- de faire une place légitime et respectueuse des traditions et des vérités de l'autre. Au niveau théologique, cette image nous renvoie à la conception kabbalistique du Tsimtsum, où Dieu s'impose à Lui-même une contraction et un retrait de Son propre Etre, afin de créer une place pour le monde et pour les hommes. L'existence de l'autre nécessite donc un retrait volontaire, dans lequel la réalité de notre prochain peut être garantie. Cette notion ne se limite pas à son aspect purement théologique, car il en va bien sûr de même dans le dialogue entre les religions. Comment faire une place à l'autre si nous ne créons pas cet espace en nous-mêmes capable d'accueillir la différence des convictions des autres religions ? C'est ainsi que le travail d'une approche autocritique de la religion m'a semblé s'imposer comme une nécessité préalable à tout dialogue véritable. En ce qui concerne l'événement ou plutôt le catalyseur de ce projet, je dois bien sûr mentionner une rencontre avec Soheib Bencheikh, il y a un an et demi à Séville, lors de la conférence "Imam et Rabbin pour la paix" [NB Ren' : la 1ère de ces conférences a eut lieu à Bruxelle en 2005]. Lors de la session pleinière, Soheib a fait une remarque virulente et profondément juste qui m'a interpellé, précisément sur la question de l'autocritique. Nous nous sommes retrouvés tous les deux à parler de ce besoin de poser un regard inquisiteur sur sa propre tradition afin de véritablement faire avancer les relations entre le judaïsme et l'islam de façon profonde...
[à suivre]
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Ecrit le 03 nov.09, 00:45[Suite]
Il a déjà été question des "versets douloureux" qui renvoient à des textes fondateurs. On parle de plus en plus, jusque dans la presse et dans le grand public, de "religion du Livre", expression coranique, islamique, que chaque religion doit probablement préciser pour elle-même. L'opinion publique -ou tout simplement les croyants autres- peuvent avoir l'impression que ce sont des religions de savants (et parfois moins savants) capables de citer des textes et même de se battre à coups de textes. Comment mettre les choses -les textes- en perspective ? David, vous parlez par exemple de la Torah et de la Bible : est-ce la même chose ?
Il me semble, en effet, qu'une réflexion sur la nature du texte est une donnée qui s'impose pour le travail que nous avons mené dans ce livre. Je suis certain que nous avons tous cela présent à l'esprit. Les deux mots que vous mentionnez, la Torah et la Bible, renvoient déjà à deux niveaux de réflexions et d'autorités différentes par rapport au texte. Si l'on reste dans un cadre purement traditionnel, il y a une distinction radicale entre les textes de la Torah et ceux de la Bible. En effet, les textes de la Torah sont supposés être des textes qui émanent d'une "révélation directe". Par opposition, les textes bibliques sont supposés provenir d'une "inspiration" et non d'une "révélation". Entre révélation et inspiration il y a une nuance très importante, en particulier pour le travail que nous avons fait et que nous essayons de poursuivre. Cette nuance se situe au niveau de la prise de conscience de l'implication humaine dans le texte dit "sacré". C'est bien là que se trouve la différence de base entre le texte de la Torah et celui de la Bible. Les textes bibliques, à l'exception de la Torah, sont donc des textes profondément humains ! Quand nous nous penchons sur les versets douloureux de la Bible, les versets dangereux, des passages qui nous hérissent, des passages qui parlent par exemple de mépris, quand ils sont "bibliques" et non "toraïques", le lecteur averti sait que le texte qu'il affronte est le résultat d'un "travail" humain. Cela nous aide bien évidemment dans la façon de comprendre ce texte. Nous pouvons essayer de comprendre qui, quand et pourquoi le passage en question a été écrit. Nous pouvons faire face à la "douleur" de certains passages par une approche beaucoup plus contextuelle ou conjoncturelle, qui permet justement de contourner certaines difficultés. Par contre, lorsque je fais face à un texte de la Torah, la tâche est plus compliquée. Le texte est supposé être révélé, donc parfait, donc éternel. Lorsque des versets "toraïques" me hérissent par leur violence, ou par la haine que nous semblons comprendre à leur lecture, je suis obligé de choisir une autre approche critique. Je ne peux plus me contenter de dire : "Oui ce texte est violent et douloureux mais c'est un texte humain à replacer dans son époque" ! Il me faut donc d'autres outils d'interprétation pour ces versets-là. Ainsi, la première chose, c'est de ne pas considérer tous les textes comme étant au même niveau de "sainteté" (bien que je n'aime pas beaucoup ce terme que je trouve très trompeur et souvent dangereux en lui-même) et de reconnaître qu'il y a des gradations, et même une hiérarchie, dans la valeur des textes. Ce qui s'exprime dans cette hiérarchie, c'est une implication plus ou moins profonde de l'histoire et de la nature humaine dans le texte. Allons plus loin et parlons des textes talmudiques. Ces textes ne sont ni "révélés" ni "inspirés". Ils ne sont que le résultat des débats des sages de la communauté juive à une époque bien précise et dans un lieu spécifique. L'influence de l'humain et de l'histoire dans ces passages talmudiques est absolument centrale. C'est pourquoi j'ai essayé de diviser ces textes douloureux en trois sous-sections : les versets douloureux de la Torah, les versets douloureux de la Bible et, enfin, les versets douloureux du Talmud. Si nous ne sommes plus à même de faire cette distinction entre les différents du texte, c'est à ce moement-là que nous prenons le risque de sombrer dans une sorte de sacralisation du texte talmudique et même du texte biblique. Il s'agit là d'une situation "d'idolâtrie du texte" qui est extrêmement dangereuse. Il me semble donc que tout notre travail doit être un travail de "désacralisation" du texte, en préservant les différents niveaux hiérachiques des textes de la tradition juive.
[à suivre]
Il a déjà été question des "versets douloureux" qui renvoient à des textes fondateurs. On parle de plus en plus, jusque dans la presse et dans le grand public, de "religion du Livre", expression coranique, islamique, que chaque religion doit probablement préciser pour elle-même. L'opinion publique -ou tout simplement les croyants autres- peuvent avoir l'impression que ce sont des religions de savants (et parfois moins savants) capables de citer des textes et même de se battre à coups de textes. Comment mettre les choses -les textes- en perspective ? David, vous parlez par exemple de la Torah et de la Bible : est-ce la même chose ?
Il me semble, en effet, qu'une réflexion sur la nature du texte est une donnée qui s'impose pour le travail que nous avons mené dans ce livre. Je suis certain que nous avons tous cela présent à l'esprit. Les deux mots que vous mentionnez, la Torah et la Bible, renvoient déjà à deux niveaux de réflexions et d'autorités différentes par rapport au texte. Si l'on reste dans un cadre purement traditionnel, il y a une distinction radicale entre les textes de la Torah et ceux de la Bible. En effet, les textes de la Torah sont supposés être des textes qui émanent d'une "révélation directe". Par opposition, les textes bibliques sont supposés provenir d'une "inspiration" et non d'une "révélation". Entre révélation et inspiration il y a une nuance très importante, en particulier pour le travail que nous avons fait et que nous essayons de poursuivre. Cette nuance se situe au niveau de la prise de conscience de l'implication humaine dans le texte dit "sacré". C'est bien là que se trouve la différence de base entre le texte de la Torah et celui de la Bible. Les textes bibliques, à l'exception de la Torah, sont donc des textes profondément humains ! Quand nous nous penchons sur les versets douloureux de la Bible, les versets dangereux, des passages qui nous hérissent, des passages qui parlent par exemple de mépris, quand ils sont "bibliques" et non "toraïques", le lecteur averti sait que le texte qu'il affronte est le résultat d'un "travail" humain. Cela nous aide bien évidemment dans la façon de comprendre ce texte. Nous pouvons essayer de comprendre qui, quand et pourquoi le passage en question a été écrit. Nous pouvons faire face à la "douleur" de certains passages par une approche beaucoup plus contextuelle ou conjoncturelle, qui permet justement de contourner certaines difficultés. Par contre, lorsque je fais face à un texte de la Torah, la tâche est plus compliquée. Le texte est supposé être révélé, donc parfait, donc éternel. Lorsque des versets "toraïques" me hérissent par leur violence, ou par la haine que nous semblons comprendre à leur lecture, je suis obligé de choisir une autre approche critique. Je ne peux plus me contenter de dire : "Oui ce texte est violent et douloureux mais c'est un texte humain à replacer dans son époque" ! Il me faut donc d'autres outils d'interprétation pour ces versets-là. Ainsi, la première chose, c'est de ne pas considérer tous les textes comme étant au même niveau de "sainteté" (bien que je n'aime pas beaucoup ce terme que je trouve très trompeur et souvent dangereux en lui-même) et de reconnaître qu'il y a des gradations, et même une hiérarchie, dans la valeur des textes. Ce qui s'exprime dans cette hiérarchie, c'est une implication plus ou moins profonde de l'histoire et de la nature humaine dans le texte. Allons plus loin et parlons des textes talmudiques. Ces textes ne sont ni "révélés" ni "inspirés". Ils ne sont que le résultat des débats des sages de la communauté juive à une époque bien précise et dans un lieu spécifique. L'influence de l'humain et de l'histoire dans ces passages talmudiques est absolument centrale. C'est pourquoi j'ai essayé de diviser ces textes douloureux en trois sous-sections : les versets douloureux de la Torah, les versets douloureux de la Bible et, enfin, les versets douloureux du Talmud. Si nous ne sommes plus à même de faire cette distinction entre les différents du texte, c'est à ce moement-là que nous prenons le risque de sombrer dans une sorte de sacralisation du texte talmudique et même du texte biblique. Il s'agit là d'une situation "d'idolâtrie du texte" qui est extrêmement dangereuse. Il me semble donc que tout notre travail doit être un travail de "désacralisation" du texte, en préservant les différents niveaux hiérachiques des textes de la tradition juive.
[à suivre]
Ar c'hi bihan breizhad...
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
Mon regard de catholique sur l'islam : https://blogrenblog.wordpress.com/ (nouvelle adresse pour fuir la pub sur OB et EB)
Co-auteur du blog judéo-islamo-chrétien http://dialogueabraham.wordpress.com/
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