E.poe

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Saraphoïde

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E.poe

Ecrit le 17 févr.05, 02:29

Message par Saraphoïde »

"C'était une jeune fille d'une très rare beauté, et qui n'était pas moins aimable que pleine de gaieté. Et maudite fut l'heure où elle vit, et aima, et épousa le peintre. Lui, passionné, studieux, austère, et ayant déjà trouvé une épouse dans son Art …………….. Ce fut une terrible chose pour cette dame que d'entendre le peintre parler du désir de peindre même sa jeune épouse. Mais elle était humble et obéissante, et elle s'assit avec douceur pendant de longues semaines dans la sombre et haute chambre de la tour, où la lumière filtrait sur la pâle toile seulement par le plafond. Mais lui, le peintre, mettait sa gloire dans son oeuvre, qui avançait d'heure en heure et de jour en jour. - Et c'était un homme passionné, et étrange, et pensif, qui se perdait en rêveries ; si bien qu'il ne voulait pas voir que la lumière qui tombait si lugubrement dans cette tour isolée desséchait la santé et les esprits de sa femme, qui languissait visiblement pour tout le monde, excepté pour lui. Cependant, elle souriait toujours, et toujours sans se plaindre, parce qu'elle voyait que le peintre (qui avait un grand renom) prenait un plaisir vif et brûlant dans sa tâche, et travaillait nuit et jour pour peindre celle qui l'aimait si fort, mais qui devenait de jour en jour plus languissante et plus faible. Et, en vérité, ceux qui contemplaient le portrait parlaient à voix basse de sa ressemblance, comme d'une puissante merveille et comme d'une preuve non moins grande de la puissance du peintre que de son profond amour pour celle qu'il peignait si miraculeusement bien. - Mais, à la longue, comme la besogne approchait de sa fin, personne ne fut plus admis dans la tour ; car le peintre était devenu fou par l'ardeur de son travail, et il détournait rarement ses yeux de la toile, même pour regarder la figure de sa femme. Et il ne voulait pas voir que les couleurs qu'il étalait sur la toile étaient tirées des joues de celle qui était assise près de lui. Et quand bien des semaines furent passées et qu'il ne restait plus que peu de chose à faire, rien qu'une touche sur la bouche et un glacis sur l'oeil, l'esprit de la dame palpita encore comme la flamme dans le bec d'une lampe. Et alors la touche fut donnée, et alors le glacis fut placé ; et pendant un moment le peintre se tint en extase devant le travail qu'il avait travaillé ; mais une minute après, comme il contemplait encore, il trembla et il devint très pâle, et il fut frappé d'effroi ; et criant d'une voix éclatante : " En vérité, c'est la Vie elle-même ! " - il se retourna brusquement pour regarder sa bien-aimée : - elle était morte ! "

Edgar Allan Poe "Le portrait ovale" ( traduction de Charles Baudelaire )


J'aimerai vous demander, à quoi vous fait penser ce texte ?

Saraphoïde

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Ecrit le 17 févr.05, 03:20

Message par Saraphoïde »

Avant, je vais déjà vous donner le mien.



J'ai connu il y a quelque tant une très belle fille, elle était pauvre et je lui ai donné un peu d'argent. J'étais alors assez ronchon, et je ne voulais que ce ce que je désirais, sans égard aux autres et à leurs difficultés.

Elle avait un gosse d'un an, elle m'a demandé de le garder, et j'étais là, face à ce gamin, je le faisais marcher. C'est idiot à dire, mais face à un gosse d'un an, on se sent désarmé. j'avais beau me croire intelligent, face à ce gosse, j'étais désemparé. Il avait le pouvoir de faire rire, il avait tous les pouvoirs.

Puis je suis rentrer chez moi, il y avait une bougie, je l'ai allumée. Le vacillement de la flamme me faisait penser à elle, c'était son sourire, son reflet, ses jolis yeux papillons et elle, me regardait. Je pensait alors, tout ce qui me tient ( car alors j'étais très seul ) n'est que ce reflet, ce geste et ce sourire. Ce n'est que la pupille d'une bougie aux couleurs du lendemain.

Le lendemain, j'ai allumé la bougie, je l'ai bien regardé, la flamme était terne, elle ne contenait rien. Plus de visage, plus de rêve, plus rien, adultère que j'étais. Je me suis alors dit, la vie est comme une bougie, elle se consume et un jour, elle arrive à la fin. Un coup de vent et elle vacille, un souffle, et elle s'éteint. Elle est fragile, on ne joue pas avec, elle brûle aussi.

Nova

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Re: E.poe

Ecrit le 17 mars05, 01:58

Message par Nova »

La première chose qui me vient à l'esprit en lisant ce texte est la simplicité de la vie. Le bonheur est souvent là, tout simple, à portée de main et nous compliquons sans cesse les choses en énumérant tout ce qui nous semble indispensable pour être heureux. Nous passons notre temps à peindre une vie idéale, à figer un bonheur rêvé mais pendant ce temps et sans nous en apercevoir, notre vie passe... et à côté de beaucoup de joies pourtant accessibles...

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